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05/11/2014 | FRANCE | N°13-19607

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 novembre 2014, 13-19607


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 16 avril 2013) que M. X... a été engagé en qualité d'ouvrier agricole, sur la base d'un contrat à durée déterminée signé le 1er octobre 2007 pour les travaux saisonniers d'automne 2007 par la société Bruno Y... qui a utilisé le titre emploi simplifié agricole ; que la relation de travail s'est poursuivie jusqu'au mois de mai 2008 ; que le 1er février 2009, un contrat à durée indéterminée a été signé entre les parties ; que le 1er septembre 2010, le salarié a

pris acte de la rupture du contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 16 avril 2013) que M. X... a été engagé en qualité d'ouvrier agricole, sur la base d'un contrat à durée déterminée signé le 1er octobre 2007 pour les travaux saisonniers d'automne 2007 par la société Bruno Y... qui a utilisé le titre emploi simplifié agricole ; que la relation de travail s'est poursuivie jusqu'au mois de mai 2008 ; que le 1er février 2009, un contrat à durée indéterminée a été signé entre les parties ; que le 1er septembre 2010, le salarié a pris acte de la rupture du contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de le condamner au paiement d'une indemnité de requalification alors, selon le moyen :
1°/ que le contrat de travail à durée déterminée, conclu pour un emploi saisonnier, peut ne pas comporter de terme précis ; qu'il est alors conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; qu'en requalifiant en contrat à durée indéterminée le contrat de travail saisonnier du 1er octobre 2007, motif pris que conclu pour « l'automne 2007 », il s'était poursuivi jusqu'en mai 2008, cependant que la référence dans le contrat à « l'automne 2007 » constituait la durée minimale du contrat dont le terme, non fixé avec précision lors de sa conclusion, correspondait à la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu, ce dont il résultait que la circonstance que le salarié avait travaillé jusqu'en mai 2008 était inopérante pour justifier la requalification du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1245-1 et L. 1242-7 du code du travail ;
2°/ et en tout état de cause, que lorsque le contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée du seul fait de la poursuite de la relation contractuelle de travail après l'échéance de son terme, le salarié ne peut prétendre à une indemnité de requalification, hors les cas où sa demande en requalification s'appuie sur une irrégularité du contrat à durée déterminée initial ou de ceux qui lui ont fait suite ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le contrat conclu pour « l'automne 2007 » s'était poursuivi au-delà de l'automne 2007 et avait pris fin en mai 2008, ce dont il résultait que M. X... n'était pas fondé à demander une indemnité de requalification, a violé l'article L. 1245-2 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que l'exécution du contrat à durée déterminée conclu pour la saison « automne 2007 » s'était poursuivie jusqu'à fin mai 2008, soit au delà de la réalisation de son objectif ;
Attendu, ensuite, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure que l'employeur ait soutenu que le salarié ne pouvait prétendre au versement de l' indemnité de requalification du seul fait de la poursuite de la relation contractuelle après l'échéance de son terme ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable comme nouveau mélangé de droit et de fait en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'heures supplémentaires et de décider qu'il s'était rendu coupable de travail dissimulé alors, selon le moyen :
1°/ que méconnaît les termes du litige le juge qui énonce qu'un plaideur ne conteste pas un point ou qu'il ne dénie pas un fait alors que son système de défense comportait une contestation sur ce point ; qu'en ayant énoncé que le décompte du salarié n'était pas contesté par l'employeur et qu'il ne produisait aucun élément sur ses horaires, cependant que celui-ci contestait ce décompte au moyen d'attestations mentionnées dans ses conclusions et précisant que « Les horaires étaient réguliers et le sont toujours 8 heures, 12 heures, 13 heures 30, 18 heures, nous avons toujours 1heure 1/2 à 2 heures pour le déjeuner. Nous quittions le chantier ensemble et reprenions ensemble, les horaires étaient les mêmes pour tous les salariés » (p. 6), la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ et en tout état de cause, qu'en n'ayant pas analysé l'attestation de Mme Z... du 16 juin 2011 précisant que « j'ai effectivement travaillé avec M. X... Edmond et M. A... Cédric, ils ne se sont jamais plaints des conditions de travail ni de l'attitude de M et M. Y.... Nous n'avons jamais travaillé le dimanche, parfois le samedi en période de plantations ou de castration, ces jours là étaient récupérés les jours de la semaine suivante. Les horaires étaient réguliers et le sont toujours 8 heures, 12 heures, 13 heures 30, 18 heures, nous avons toujours 1 heure 1/2 à 2 heures pour le déjeuner. Nous quittions le chantier ensemble et reprenions ensemble, les horaires étaient les mêmes pour tous les salariés¿ mes bulletins de paie ont toujours pris en compte la totalité des heures effectuées dans le mois sans complément d'horaires dissimulés » et l'attestation comparable de Mme B..., indiquant quels étaient les horaires des salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ et en tout état de cause que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut limiter les droits d'une partie au motif que des pièces ne figurent pas à son dossier, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de pièces figurant sur le bordereau de pièces communiquées et dont la communication n'a pas été contestée ; que la cour d'appel a énoncé que la société Bruno Y... « ne produit aucune pièce relative à l'horaire effectué » ; qu'à supposer que les attestations produites par la société Bruno Y... et notamment celle de Mme Z... n'aient pas figuré au dossier, la cour d'appel, qui n'a pas invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des attestations figurant sur le bordereau des pièces communiquées par la société, dont la communication n'a pas été contestée par M. X... et même reconnue par celui-ci, a en tout état de cause violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le salarié étayait sa demande par la production d'un récapitulatif des horaires effectués jour par jour d'octobre 2007 à mai 2008, et de janvier 2009 à août 2010, d'un cahier manuscrit mis à la disposition des salariés par l'employeur faisant apparaître les horaires réalisés par chacun d'entre eux, et de décomptes hebdomadaires précis, sans que l'employeur verse de pièce relative à l'horaire effectué par l'intéressé, la cour d'appel a, sans méconnaître les termes du litige ni le principe de la contradiction, fait ressortir l'existence d'heures supplémentaires dont elle a souverainement évalué l'importance et fixé en conséquence les créances salariales s'y rapportant ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bruno Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 1 500 euros à M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Bruno Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir requalifié le contrat du 1er octobre 2007 en contrat à durée indéterminée et condamné l'Earl Bruno Y... au paiement d'une indemnité de requalification de 1 365,03 € ;
Aux motifs que le contrat prévoit qu'il est conclu pour « l'automne 2007 » ; que ce contrat s'est poursuivi au-delà de l'automne 2007 et a pris fin en mai 2008 ; que le contrat s'étant poursuivi au-delà de la saison 2007, il convenait de le requalifier en contrat à durée indéterminée en application de l'article L. 1245-1 du code du travail ; que M. X... était fondé à demander l'indemnité de requalification prévue par l'article L. 1245-2 du code du travail ;
Alors 1°) que le contrat de travail à durée déterminée, conclu pour un emploi saisonnier, peut ne pas comporter de terme précis ; qu'il est alors conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; qu'en requalifiant en contrat à durée indéterminée le contrat de travail saisonnier du 1er octobre 2007, motif pris que conclu pour « l'automne 2007 », il s'était poursuivi jusqu'en mai 2008, cependant que la référence dans le contrat à « l'automne 2007 » constituait la durée minimale du contrat dont le terme, non fixé avec précision lors de sa conclusion, correspondait à la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu, ce dont il résultait que la circonstance que le salarié avait travaillé jusqu'en mai 2008 était inopérante pour justifier la requalification du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1245-1 et L. 1242-7 du code du travail ;
Alors 2°) et en tout état de cause, que lorsque le contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée du seul fait de la poursuite de la relation contractuelle de travail après l'échéance de son terme, le salarié ne peut prétendre à une indemnité de requalification, hors les cas où sa demande en requalification s'appuie sur une irrégularité du contrat à durée déterminée initial ou de ceux qui lui ont fait suite ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le contrat conclu pour « l'automne 2007 » s'était poursuivi au-delà de l'automne 2007 et avait pris fin en mai 2008, ce dont il résultait que M. X... n'était pas fondé à demander une indemnité de requalification, a violé l'article L. 1245-2 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'Earl Bruno Y... à payer à M. X... la somme de 5 176,49 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 3 794,17 € à titre de rappel de congés payés, et d'avoir, par voie de conséquence, décidé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que l'Earl Bruno Y... s'était rendue coupable de travail dissimulé ;
Aux motifs que M. X... produit un récapitulatif des horaires de travail effectués, jour par jour, d'octobre 2007 à mai 2008, de janvier 2009 à août 2010, un cahier manuscrit mis à disposition par l'employeur faisant apparaître les horaires réalisés de chacun des salariés de l'entreprise, et enfin un décompte par semaine du nombre d'heures réalisées en répartissant ces heures selon le taux de majoration, le taux horaire afférent et faisant apparaître le différentiel entre le salaire versé (incluant certaines heures supplémentaires) et le salaire réellement dû ; qu'il résulte de décompte, non contesté par l'employeur, qui ne produit aucune pièce relative à l'horaire effectué, que l'Earl Bruno Y... reste devoir à M. X... la somme de 7 762,80 € à titre de rappel de salaires, outre 3 794,17 € à titre de rappel de congés payés ; que M. X... précise avoir perçu 2 012,12 € représentant partie des heures supplémentaires dues ;
Alors 1°) que méconnaît les termes du litige le juge qui énonce qu'un plaideur ne conteste pas un point ou qu'il ne dénie pas un fait alors que son système de défense comportait une contestation sur ce point ; qu'en ayant énoncé que le décompte du salarié n'était pas contesté par l'employeur et qu'il ne produisait aucun élément sur ses horaires, cependant que celui-ci contestait ce décompte au moyen d'attestations mentionnées dans ses conclusions et précisant que « Les horaires étaient réguliers et le sont toujours 8H 12H 13h30 18H, nous avons toujours 1h1/2 à 2H pour le déjeuner. Nous quittions le chantier ensemble et reprenions ensemble, les horaires étaient les mêmes pour tous les salariés » (p. 6), la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;
Alors 2°) et en tout état de cause, qu'en n'ayant pas analysé l'attestation de Mme Z... du 16 juin 2011 précisant que « j'ai effectivement travaillé avec M. X... Edmond et M A... Cédric, ils ne se sont jamais plaints des conditions de travail ni de l'attitude de M et Mr Y.... Nous n'avons jamais travaillé le dimanche, parfois le samedi en période de plantations ou de castration, ces jours là étaient récupérés les jours de la semaine suivante. Les horaires étaient réguliers et le sont toujours 8H 12H 13h30 18H, nous avons toujours 1h1/2 à 2H pour le déjeuner. Nous quittions le chantier ensemble et reprenions ensemble, les horaires étaient les mêmes pour tous les salariés¿mes bulletins de paie ont toujours pris en compte la totalité des heures effectuées dans le mois sans complément d'horaires dissimulés » et l'attestation comparable de Mme B..., indiquant quels étaient les horaires des salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors 3°) et en tout état de cause que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut limiter les droits d'une partie au motif que des pièces ne figurent pas à son dossier, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de pièces figurant sur le bordereau de pièces communiquées et dont la communication n'a pas été contestée ; que la cour d'appel a énoncé que l'Earl Bruno Y... « ne produit aucune pièce relative à l'horaire effectué » ; qu'à supposer que les attestations produites par l'Earl Bruno Y... et notamment celle de Mme Z... n'aient pas figuré au dossier, la cour d'appel, qui n'a pas invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des attestations figurant sur le bordereau des pièces communiquées par la société, dont la communication n'a pas été contestée par M. X... et même reconnue par celui-ci (conclusions d'appel p. 16), a en tout état de cause violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-19607
Date de la décision : 05/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 16 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 nov. 2014, pourvoi n°13-19607


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19607
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