LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 12 mars 2012), que M. X... a été engagé le 1er mars 2005 par l'association L'Escale en qualité d'agent de médiation en insertion locative ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des heures supplémentaires, alors, selon le moyen :
1°/ que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; que pour débouter M. X... de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu qu'il ne fournissait pas d'éléments suffisamment précis rendant vraisemblable l'accomplissement de plus de 125 heures de travail supplémentaire ; qu'en se déterminant ainsi, quand le salarié produisait un compte rendu de ses activités, ainsi qu'un tableau récapitulatif, mentionnant, pour chaque jour de la période litigieuse, les heures et minutes de travail effectuées, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°/ qu'en matière prud'homale la preuve est libre ; qu'en subordonnant la validité des éléments de preuve du salarié au contreseing de l'employeur, pour dire que la demande de rappel d'heures supplémentaires n'était pas suffisamment étayée, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail, ensemble le principe de liberté de la preuve ;
3°/ que constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire de travail ; qu'en relevant que le compte rendu d'activité du salarié faisait « aussi apparaître des journées de travail d'une durée inférieure à l'horaire normal », la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 3121-20 et L. 3121-22 du code du travail ;
4°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'en énonçant que le budget de l'association L'Escale ne prévoyait pas de « poste heures supplémentaires », que les éventuelles heures supplémentaires étaient récupérées et que le président et la directrice de l'association attestaient que l'accomplissement d'heures supplémentaires était exceptionnel, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
5°/ que le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur équivalent est subordonné à la conclusion d'une convention collective de branche professionnelle ou d'entreprise ; qu'en se bornant à retenir que les éventuelles heures supplémentaires faisaient l'objet de récupération, sans rechercher si le remplacement par un repos compensateur équivalent de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires était prévu par un accord collectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-24 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;
6°/ que le remplacement du paiement des heures supplémentaires et des majorations par un repos compensateur équivalent ne peut être instauré, en l'absence d'accord collectif, que dans les entreprises non assujetties à l'obligation visée par l'article L. 2242-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ; qu'en retenant le principe de la récupération des heures supplémentaires, sans constater que l'association L'Escale était une entreprise non assujettie à l'obligation visée par l'article précité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-24 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;
Mais attendu que la cour d'appel, examinant, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, les éléments de preuve produits par chacune des parties, a estimé que la réalité des heures supplémentaires dont le salarié réclamait le paiement n'était pas établie ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses troisième à sixième branches en ce qu'il vise des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que le second moyen, qui invoque la cassation par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen, est sans portée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la SCP Tiffreau-Corlay-Marlange la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur Guy X... de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le contrat de travail de monsieur Guy X... prévoyait une durée hebdomadaire de travail de 35 heures, sur 5 jours, soit 7 heures par jour de 9 h à 12 h et de 13 h à 17 h et aussi « un compte rendu hebdomadaire des activités réalisées par lui sur une fiche récapitulative pour l'évaluation du projet » ; qu'il résulte des pièces du dossier que monsieur Guy X... inscrivait les tâches qu'il effectuait sur un cahier (et non sur une fiche) ; que, selon lui, ces relevés démontreraient la réalité des 125 heures et 29 minutes d'heures supplémentaires dont son employeur est redevable et ce, pour 5 mois et demi seulement, soit l'équivalent de plus d'une heure et quart par jour ; que l'association l'Escale conteste fermement ce point, rappelant la finalité de la fiche récapitulative et produisant des feuilles d'heures supplémentaires visées et validées par son président ; que si l'existence du cahier ayant trait à l'activité de monsieur Guy X... et aux éventuels dépassements d'horaires n'est pas contestée, son examen montre qu'il n'a jamais fait l'objet d'un contreseing systématique de l'employeur et fait aussi apparaître des journées de travail d'une durée inférieure à l'horaire normal ; que, de plus, l'association l'Escale, association fonctionnant exclusivement avec des subventions publiques et qui doit se conformer au budget qui lui est alloué, lequel ne prévoit pas de poste « heures supplémentaires », indique que les éventuelles heures supplémentaires font l'objet de récupération et en justifie par les attestations de quatre de ses salariés ; qu'enfin, rien ne démontre que les heures supplémentaires, qui plus est dans de telles proportions, relèveraient d'une pratique courante au sein de cette structure, son président et sa directrice attestant qu'elles sont, au contraire, exceptionnelles ; que dans ces conditions, monsieur Guy X... ne fournissant pas d'éléments suffisamment précis rendant vraisemblable l'accomplissement de plus de 125 heures de travail supplémentaire effectivement réalisées et l'association l'Escale fournissant au contraire ses propres analyses et éléments s'y opposant, c'est à juste raison, et sans qu'il y ait lieu de recourir à une mesure d'instruction, que le conseil a débouté le salarié de ce chef de demande ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE monsieur Guy X... embauché à compter du 1er mars 2005 en qualité d'agent de médiation en insertion locative par l'association l'Escale dont la mission est de procurer des logements autonomes à des personnes isolées ou des familles défavorisées en vue de leur réinsertion, a travaillé jusqu'au 16 septembre 2005, puis a été placé en arrêt maladie et licencié le 20 février 2007 ; que monsieur Guy X... soutient avoir réalisé des heures supplémentaires entre le 1er mars et le 16 septembre 2005 et produit, à cet effet, un cahier tenu par lui-même qui en établirait le nombre ; que si l'association l'Escale reconnaît l'existence de ce cahier qui, à l'examen, laisse apparaître qu'il était tenu également par d'autres salariés -écritures différentes-, elle soutient qu'il servait à évaluer l'activité des salariés sur l'année, l'ensemble des salariés ayant attesté que les heures supplémentaires éventuellement effectuées ne faisaient l'objet d'aucun paiement, qu'elles étaient récupérées et étaient en faible nombre, aucun bulletin de salaire ne faisant état d'heures supplémentaires ; qu'à la lecture du cahier tenu par monsieur Guy X..., il apparaît que plusieurs journées de travail se trouvent en dessous de sept heures de travail ; que ce document n'a pas valeur de preuve puisque tenu par le salarié lui-même sans visa de l'employeur ; que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même ; qu'ainsi il y a lieu de débouter monsieur Guy X... de cette demande ;
1°) ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; que pour débouter monsieur Guy X... de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu qu'il ne fournissait pas d'éléments suffisamment précis rendant vraisemblable l'accomplissement de plus de cent vingt cinq heures de travail supplémentaire ; qu'en se déterminant ainsi, quand le salarié produisait un compte rendu de ses activités, ainsi qu'un tableau récapitulatif, mentionnant, pour chaque jour de la période litigieuse, les heures et minutes de travail effectuées, la cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du code du travail ;
2°) ALORS QU'en matière prud'homale la preuve est libre ; qu'en subordonnant la validité des éléments de preuve du salarié au contreseing de l'employeur, pour dire que la demande de rappel d'heures supplémentaires n'était pas suffisamment étayée, la cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du code du travail, ensemble le principe de liberté de la preuve ;
3°) ALORS QUE constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire de travail ; qu'en relevant que le compte rendu d'activité du salarié faisait « aussi apparaître des journées de travail d'une durée inférieure à l'horaire normal », la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L.3121-20 et L3121-22 du code du travail ;
4°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'en énonçant que le budget de l'association l'Escale ne prévoyait pas de « poste heures supplémentaires », que les éventuelles heures supplémentaires étaient récupérées et que le président et la directrice de l'association attestaient que l'accomplissement d'heures supplémentaires était exceptionnel, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants, et a violé l'article L.3171-4 du code du travail ;
5°) ALORS QUE le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur équivalent est subordonné à la conclusion d'une convention collective de branche professionnelle ou d'entreprise ; qu'en se bornant à retenir que les éventuelles heures supplémentaires faisaient l'objet de récupération, sans rechercher si le remplacement par un repos compensateur équivalent de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires était prévu par un accord collectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3121-24 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;
6°) ET ALORS, subsidiairement, QUE le remplacement du paiement des heures supplémentaires et des majorations par un repos compensateur équivalent ne peut être instauré, en l'absence d'accord collectif, que dans les entreprises non assujetties à l'obligation visée par l'article L.2242-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ; qu'en retenant le principe de la récupération des heures supplémentaires, sans constater que l'association l'Escale était une entreprise non assujettie à l'obligation visée par l'article précité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3121-24 du code du travail dans sa rédaction alors applicable.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur Guy X... de sa demande d'indemnisation au titre du travail dissimulé ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE si l'organisation administrative mise en place par l'association l'Escale peut apparaître comme manquant d'un suivi structuré, il n' en découle pas pour autant qu'elle aurait une intention malveillante ou qu'elle serait de mauvaise foi ; que la preuve des heures supplémentaires n'étant pas rapportée, la demande d'indemnité forfaitaire présentée par monsieur Guy X... est sans objet et ne sera pas plus avant examinée ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE ni la mauvaise foi ni l'intention frauduleuse de l'association l'Escale d'échapper au paiement d'heures supplémentaires ne sont démontrées ; qu'il n'y a donc pas lieu de condamner l'association au paiement de dommages et intérêts représentant six mois de salaire pour travail dissimulé ;
ALORS QUE la cassation qui interviendra du chef du premier moyen relatif aux heures supplémentaires entraînera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile la cassation sur le second moyen relatif au travail dissimulé.