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17/09/2014 | FRANCE | N°13-16172

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 septembre 2014, 13-16172


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de directeur département essais par la société ETS devenue ETSM, dont il était administrateur et actionnaire ; que le 12 juin 2006, les actionnaires de la société ETSM et de la société Drecq Daniel technologies (D2T), ont signé un protocole de cession d'actions à effet du 30 juin 2006, date à laquelle le conseil d'administration a pris acte de la démission de M. X... de son poste d'administrateur ; qu'il a été nommé directeur général d

élégué, pour une durée d'un an, son mandat se cumulant avec son contrat de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de directeur département essais par la société ETS devenue ETSM, dont il était administrateur et actionnaire ; que le 12 juin 2006, les actionnaires de la société ETSM et de la société Drecq Daniel technologies (D2T), ont signé un protocole de cession d'actions à effet du 30 juin 2006, date à laquelle le conseil d'administration a pris acte de la démission de M. X... de son poste d'administrateur ; qu'il a été nommé directeur général délégué, pour une durée d'un an, son mandat se cumulant avec son contrat de travail, puis, le 5 septembre 2007, directeur du marketing stratégique ; qu'il a été licencié pour faute grave le 9 juillet 2008 ; que le salarié étant bénéficiaire d'une indemnité contractuelle de deux années en cas de rupture du contrat à l'initiative de l'employeur, sauf en cas de faute lourde, en sus des indemnités légales et conventionnelles, la société D2T a saisi la juridiction prud'homale pour solliciter l'annulation de cette clause et le salarié a alors contesté le bien fondé de la rupture ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 225-42 du code de commerce ;
Attendu que pour condamner la société à payer au salarié une somme à titre d'indemnité contractuelle de licenciement, la cour d'appel retient que les chiffres de la société pour l'année 2011 traduisent une amélioration significative de la situation, qu'il ne peut être considéré dans ces conditions que le versement d'une somme de 317 326 euros à titre d'indemnité contractuelle revêtirait pour la société des conséquences suffisamment dommageables pour entraîner la nullité de l'avenant et que ce caractère dommageable doit aussi prendre en compte l'action du salarié au sein de la société ETSM dans laquelle il s'est investi de manière durable, importante et efficace pendant sept ans ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs partiellement inopérants, et sans rechercher si l'engagement pris au nom de la société entraînait pour celle-ci des conséquences dommageables à la date à laquelle elle statuait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société à payer au salarié une somme à titre d'indemnité contractuelle de licenciement, l'arrêt rendu le 26 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Drecq Daniel technologies D2T.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. Jean-Jacques X... est dénué de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'avoir condamné la société D2T à payer à M. X... les sommes de 39. 666 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 3. 966 euros au titre des congés payés y afférents, compte tenu non de la moyenne des douze mois de salaire, mais de la prise en compte, au prorata, de la prime de vacances Syntec, de 47. 378 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 180. 000 euros au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement, de 132. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 500 euros au titre du préjudice lié au retard relatif à l'attestation ASSEDIC, de 2. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel, ainsi qu'aux dépens ;
Aux motifs qu'il appartient à l'employeur qui invoque la faute grave, laquelle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, d'en rapporter la preuve ; que le premier des griefs formulés dans la lettre de licenciement concerne l'exercice désinvolte des missions qui avaient été confiées à M. Jean-Jacques X..., à savoir le marketing stratégique, le management stratégique, le développement à l'international et la représentation de la société ; que s'agissant du marketing stratégique, il est certain que les études réalisées dans ce cadre n'ont pas répondu aux attentes de l'employeur qui l'a fait savoir à M. Jean-Jacques X... en un temps suffisant pour permettre redresser la situation (mel du 1er avril 2008) ; que s'agissant de la mission de management stratégique, l'employeur qui allègue une absence totale de réalisations, se trouve confronté à la preuve d'un fait négatif, mais aurait pu prouver avoir fait les observations ou remontrances qu'aurait impliquées une réelle carence, ce qu'il ne fait pas. S'agissant du développement à l'international, l'employeur prouve avoir fait des rappels pour la finalisation d'un projet d'installation en Inde, mais M. Jean-Jacques X... produit de son côté des documents attestant, d'une part, d'un réel travail, fut ce dans des délais plus longs que prévu et avec une faible valeur ajoutée (attestation G...), d'autre part, de ce que certaines informations utiles ne lui étaient pas communiquées (mel du 24 octobre 2007) ; que la mission devait porter aussi sur la Chine, la Russie, le Brésil, la Corée et la Roumanie, mais aucun rappel ou observation ne lui a été fait à ce titre, étant précisé que lui même n'allègue pas avoir réalisé quelque étude que ce soit sur ce sujet ; que s'agissant de la mission de représentation de la société D2T, l'employeur, qui reconnaît que M. Jean-Jacques X... y a consacré du temps, ne prouve pas qu'il s'y serait consacré, comme il le soutient, d'abord pour le compte d'autres entités que D2T. Au contraire, des attestations produites par M. Jean-Jacques X... établissent qu'il a oeuvré pour le compte de cette société, y compris en Inde (M. Y...) ; qu'enfin, s'agissant de l'absence d'implication au sein de l'équipe de direction, les éléments produits par la société ne la prouvent pas, les absences à certaines réunions de conseil de direction devant être mises en relation avec les autres contraintes de M. Jean-Jacques X... ; qu'au surplus, M. De Z..., ancien commercial et responsable de l'établissement de Rouen, atteste non seulement de l'implication de M. Jean-Jacques X..., laquelle est au demeurant corroborée par de nombreux mels produits à cette fin, mais aussi du fait que ce dernier a été écarté d'un séminaire avec les responsables de filiales étrangères qui avait été organisé à son insu ; que s'il résulte de ce qui précède que M. Jean-Jacques X... a pu manifester des carences dans certaines des missions qui lui avaient été confiées, il n'en demeure pas moins que l'employeur ne prouve pas que ces manquements revêtaient un caractère fautif, notamment en raison d'une mauvaise volonté délibérée (Cass. Soc. 17 nov. 2011, n° 1010267 ; 16 février 2012, n° 1018162) ; que ces faits, qui auraient pu être éventuellement analysés sous l'angle d'une insuffisance professionnelle, ne sauraient d'aucune façon justifier un licenciement que l'employeur a entendu placer de lui même sur le terrain disciplinaire ; que le deuxième grief consiste dans la déstabilisation du personnel des établissements de Rouen ; que la lettre de licenciement fait état, d'une part, de déclarations précises imputées à M. Jean-Jacques X... de nature à inquiéter les équipes et à les démotiver, d'autre part, d'une consigne tendant à faire vider les caisses d'outil et à détourner le matériel de l'entreprise, avant l'inventaire prévu aux fins d'attribution d'une prime d'outillage ; que contrairement à ce qu'a indiqué le conseil de prud'hommes, ces faits sont formellement contestés ; que les faits relatifs à l'outillage ne sont prouvés par aucune pièce, M. Jean-Jacques X... ayant produit quant à lui des éléments en sens contraire (attestations de MM. A..., M... et B...) ; que pour prouver les faits relatifs à la déstabilisation du personnel, l'employeur verse aux débats deux attestations ; que la première est celle de Mme C... qui fait état de réunions tenues par M. Jean-Jacques X... avec le personnel pour l'inciter soit à ne plus travailler afin que D2T se désengage de la société ETS, soit à racheter un site pour fonder une nouvelle société concurrente de D2T ; que Mme C... mentionne elle même dans l'attestation qu'elle a été l'assistante de M. Jean-Jacques X... jusqu'en juillet 2007, mais, contrairement à ce que soutient M. Jean-Jacques X..., on ne peut en déduire qu'elle n'aurait plus été en contact avec lui après ; qu'elle précise en effet rapporter des faits postérieurs à son intégration dans le « service ressources humaines » mis en place juste après la fusion et le fait qu'elle n'ait plus été alors l'assistante de direction ne faisait pas obstacle à ce qu'elle assiste, en une autre qualité, à des réunions tenues par M. Jean-Jacques X... ; que la seconde attestation émane de M. Jean-Jacques X... qui fait état de ce que M. Jean-Jacques X... « témoignait aux équipes de Rouen (...) de son mécontentement quant au nouveau fonctionnement de la société et contribuait à rendre difficile les missions de management des responsables de centre » ; que ces attestations sont trop imprécises pour considérer que le grief est prouvé, alors qu'elles ne rapportent pas les propos que l'employeur a expressément cité entre guillemets dans la lettre de licenciement comme exemple de déstabilisation du personnel ; qu'au surplus, M. Jean-Jacques X... produit les attestations de M. A..., ingénieur, qui attribue la déstabilisation à la responsable des ressources humaines auprès de laquelle travaillait désormais Mme C... et qui conteste point par point l'attestation de cette dernière. M. B..., mécanicien, et M. D..., assistant ingénieur, M. M... attestent dans le même sens, ainsi que M. E... qui, ayant exercé des fonctions de représentant du personnel, a précisé que M. Jean-Jacques X... n'avait jamais dénigré D2T ; qu'enfin, l'employeur produit deux autres documents intitulés « quelle image avez vous d'ETSm ? » dont la provenance est inconnue et dont la Cour, en l'absence de toute explication des parties sur ce point, ne peut tirer aucun enseignement utile ; que le grief sera considéré comme insuffisamment prouvé ; que par le troisième grief, il est reproché à M. Jean-Jacques X... d'avoir dénigré la société auprès des clients et partenaires, en particulier, d'une part, en fournissant à un interlocuteur de l'UTAC une fausse information selon laquelle l'entreprise ne serait pas retenue pour un partenariat sur le projet PSA, d'autre part, en tenant des propos qui ont ému deux clients au congrès de la société des ingénieurs de l'automobile (SIA) de Rouen ; que ce dernier fait n'est pas attesté de manière suffisamment précise par la seule attestation produite par la société D2T ; que le premier fait est en revanche attesté par M. F..., responsable d'une business unit au sein de D2T, et un mel du directeur général de l'UTAC, M. Jean-Jacques X..., relatant ces propos. Toutefois, il résulte de ce mel du 10 décembre 2007 que M. Jean-Jacques X... a informé à cette date la direction de D2T de ces faits qu'il signalait avoir été commis le 16 novembre précédent ; que leur commission comme leur connaissance par l'employeur étant antérieures de plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement, ils sont prescrits ; qu'aucun autre fait de dénigrement n'est prouvé par l'employeur ; qu'il résulte de tout ce qui précède que le licenciement de M. Jean-Jacques X... doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé en ce sens ; que par voie de conséquence, la société D2T sera condamnée à verser à M. Jean-Jacques X... les sommes de : 39. 666 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 3. 966 euros au titre des congés payés y afférents, compte tenu non de la moyenne des douze mois de salaire, mais de la prise en compte, au prorata, de la prime de vacances syntec, 47. 378 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 132. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, compte tenu en particulier des circonstances de la rupture, de l'ancienneté du salarié (10 ans et 9 mois), de sa rémunération et de l'évolution de sa situation postérieurement au licenciement, notamment en l'absence d'emploi durable et au regard de la spécificité de ses fonctions et de ses compétences, étant précisé que la clause de non concurrence dont il demande la prise en compte pour apprécier son préjudice n'est pas une clause du contrat de travail, mais du contrat de cession des parts qu'il détenait dans la société ETSM et qu'il l'a acceptée en tant qu'actionnaire, non en tant que salarié, 500 euros au titre du retard dans l'attestation ASSEDIC, dès lors que si M. Jean-Jacques X... aurait pu se présenter plus tôt, sans cette attestation, à l'ANPE, il n'en demeure pas moins que le retard apporté par l'employeur à la remise de cette attestation a concouru au dommage qui l'a privé d'un demi-mois d'indemnisation ;
Alors, de première part, que le refus du salarié de prendre en considération les directives de l'employeur pour remédier à une insuffisance de résultats constitue une faute grave ; que la Cour d'appel, après avoir dûment constaté qu'il est certain que les études réalisées dans ce cadre n'ont pas répondu aux attentes de l'employeur qui l'a fait savoir à M. Jean-Jacques X... en un temps suffisant pour lui permettre de redresser la situation, ne pouvait considérer que la faute grave du salarié n'était pas caractérisée sans méconnaître la portée légale de ses propres constatations au regard des articles L. 1232-1 et L. 1234-1 du Code du travail ;
Alors, de deuxième part, qu'en jugeant que la société D2T ne faisait pas la preuve du fait négatif de l'absence totale de réalisation de la mission de management stratégique dévolue à M. Jean-Jacques sans examiner, au moins sommairement, l'offre de preuve de l'employeur qui s'en rapportait aux pièces visées par le salarié dans son dossier de procédure et placées sous les cotes 55A à 55C, la Cour d'appel a méconnu les exigences de motivation qui s'évincent de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors de troisième part, que la Cour d'appel ne pouvait estimer tout d'abord que, s'agissant du développement à l'international, M. Jean-Jacques avait fourni un « réel travail » et considérer ensuite, s'agissant de cette même mission que le travail de M. Jean-Jacques X... présentait « une faible valeur ajoutée » sans se contredire et méconnaître les exigences de motivation qui s'évincent de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, de quatrième part, qu'après avoir constaté que M. Jean-Jacques X... n'avait réalisé aucune diligence dans le cadre de sa mission de développement à l'international pour « la Chine, la Russie, le Brésil, la Corée et la Roumanie », la Cour d'appel ne pouvait écarter l'existence d'une faute grave en considérant qu'« aucun rappel ou observation ne lui a été fait à ce titre », sans se prononcer par un motif inopérant et priver sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1234-1 du Code du travail ;
Alors, de cinquième part, qu'en considérant que M. Jean-Jacques X... s'était consacré à la représentation de la société D2T sans rechercher, comme elle y était dûment invitée, s'il versait aux débats des documents émanant des partenaires institutionnels, des représentants du monde industriel, tel que Renault, PSA, John Deere, Valeo, Reckers (partenaire D2T pour le marché indien), la Cour d'appel a privé derechef sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1234-1 du Code du travail ;
Alors, de sixième part, qu'en considérant que M. Jean-Jacques X... n'avait pu se consacrer pleinement aux réunions de l'équipe dirigeante de la société D2T en raison de contraintes professionnelles et d'autres implications, sans en préciser au moins sommairement la teneur, la Cour d'appel s'est prononcée par des motifs dépourvus de considérations concrètes ne permettant pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle et a ainsi méconnu les exigences de motivation qui s'évincent de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, de septième part, qu'en déniant toute valeur probante aux attestations, particulièrement circonstanciées, de Mme C... et de M. I... qui rapportaient les manoeuvres de M. Jean-Jacques X... pour dénigrer la société D2T auprès de ses partenaires en relevant que le contenu de ces attestations ne recoupait pas exactement le contenu de la lettre de licenciement du 9 juillet 2008, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1234-1 du Code du travail ;
Alors, de huitième part, et enfin, qu'en considérant que l'attestation de M. J..., rapportant que deux clients de la société D2T lui avaient rapporté les actes de dénigrement de M. Jean-Jacques X..., n'était pas assez précise, sans indiquer, au moins sommairement, les points sur lesquels portaient ces imprécisions, la Cour d'appel a méconnu l'article 455 du Code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société D2T à payer à M. X... la somme de 180. 000 euros au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement et de 2. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel, ainsi qu'aux dépens ;
Aux motifs que l'indemnité contractuelle de licenciement dont se prévaut M. Jean-Jacques X... trouve son fondement dans une convention dont il n'est pas contesté qu'il s'agit d'une convention soumise aux prescriptions des articles L. 225-38 et suivants du code de commerce ; qu'aux termes de l'article L. 225-40, alinéa 4 de ce code, « l'intéressé ne peut pas prendre part au vote et ses actions ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité » ; qu'en l'espèce, c'est lors d'une séance du conseil d'administration du 7 septembre 2004 qu'a été conféré au président de la société E. le pouvoir de conclure un avenant au contrat de travail de M. Jean-Jacques X... prévoyant qu'en cas de rupture du contrat de travail imputable à l'employeur, le versement d'une indemnité contractuelle de deux ans de rémunération en brut s'ajouterait aux indemnités de toute nature dues en vertu de la loi et de la convention collective, et ce quelle que soit la cause de la rupture du contrat de travail par l'employeur, sauf en cas de faute lourde ; que M. Jean-Jacques X... soutient, en premier lieu, que cette décision a été régulièrement prise ; que le procès verbal de cette séance mentionne que les trois seuls membres composant le conseil d'administration, dont M. Jean-Jacques X..., étaient présents et que, s'agissant du quorum, plus de la moitié des membres du conseil assistant à la réunion, celui ci pouvait valablement délibérer sur l'ordre du jour, exclusivement consacré à l'autorisation donnée au président de conclure l'avenant dont le contenu est précisé ; que ce procès verbal indique encore que « cette décision est prise par le conseil en application des dispositions de l'article 225-38 du code de commerce », lesquelles se bornent à définir la convention réglementée et à poser le principe de l'autorisation préalable du conseil d'administration ; qu'il n'y est ni fait référence aux prescriptions précitées de l'article L. 225-40, ni indiqué que M. Jean-Jacques X... n'a pas pris part au vote ; qu'enfin, il est signé par le président et les deux autres administrateurs, et donc par M. Jean-Jacques X..., alors qu'il suffisait, pour répondre aux exigences de l'article R 225-23 du code de commerce, qu'il fut signé d'un seul administrateur en sus du président ; qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que M. Jean-Jacques X... a participé à la prise de cette décision, quand bien même il suffisait que deux administrateurs soient présents pour que le quorum soit constitué ; que certes, les deux autres administrateurs, MM. K... et L..., ont attesté, en décembre 2009 et juin 2010, dans les formes prescrites par les articles 202 et suivants du code de procédure civile, que M. Jean-Jacques X... n'avait pas pris part au vote, ni même, selon M. L..., à la discussion ; que toutefois, ces attestations, établies plus de cinq après les faits, par deux personnes qui ont encore, avec M. Jean-Jacques X..., des intérêts communs, au demeurant non dissimulés, dans diverses sociétés, ne sauraient prévaloir sur les déductions tirées des mentions mêmes du document objectif que constitue le procès verbal rédigé dans le temps de la prise de décision et en dehors de tout litige ; que la nullité de la délibération est donc encourue ; que quoiqu'il en soit de la possibilité d'une régularisation par l'assemblée générale sur rapport spécial du commissaire aux comptes, dont le principe même est contesté par M. Jean-Jacques X..., il est constant qu'en tout état de cause, une telle régularisation n'a pas eu lieu ; que les dispositions de l'article L. 225-42 du code de commerce aux termes desquelles « la nullité peut être couverte par un vote de l'assemblée générale intervenant sur rapport spécial des commissaires aux comptes exposant les circonstances en raison desquelles la procédure d'autorisation n'a pas été suivie » ne s'appliquent donc pas ; que M. Jean-Jacques X... se prévaut, en deuxième lieu, de la prescription de l'action en nullité, en se fondant sur le deuxième alinéa de l'article L. 225-42 du code de commerce, aux termes duquel « l'action en nullité des conventions visées à l'article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d'administration se prescrit par trois ans, à compter de la date de la convention. Toutefois, si la convention a été dissimulée, le point de départ du délai de la prescription est reporté au jour où elle a été révélée » ; qu'il fait valoir que, la convention ayant été conclue le 1er octobre 2004, la société devait agir au plus tard le1er octobre 2007, alors qu'elle n'a saisi le conseil de prud'hommes que le 15 septembre 2008 ; que si la convention a été dissimulée, le point de départ du délai de la prescription est reporté au jour où elle a été révélée ; que s'il y a eu volonté de dissimulation, la révélation de la convention s'apprécie à l'égard de la personne qui exerce l'action (Cass. Com. 8 février 2011, Bull. IV n° 69) ; qu'en l'espèce, et dès lors que la participation de M. Jean-Jacques X... à l'autorisation donnée par le conseil d'administration rend cette décision irrégulière et équivaut à une absence d'autorisation, l'absence d'information tant des commissaires aux comptes de la société ETSM que de l'assemblée générale traduisent une volonté de dissimulation de la convention ; que c'est donc à l'égard de la société D2T, qui exerce l'action, que doit s'apprécier la révélation ; qu'or, contrairement à ce que soutient M. Jean-Jacques X..., la société D2T ne peut être réputée avoir eu connaissance de l'avenant depuis le 1er octobre 2004, à raison de ce que la cession d'actions assurerait la continuité de la personnalité morale entre les sociétés ETSM et D2T ; qu'en effet, si la cession d'actions ne remet pas en cause le principe de la survie de la personnalité morale de la société ETSM. et par conséquent la pérennité des contrats qu'elle a conclus, y compris l'avenant litigieux, il n'en demeure pas moins que la société D2T constitue une personne morale distincte de la société ETSM et elle ne saurait être considérée comme ayant eu connaissance de l'avenant litigieux à la date à laquelle la société E. serait elle même censée en avoir eu connaissance, soit, selon M. Jean-Jacques X..., le 1er octobre 2004 ; qu'au contraire, il résulte du protocole de cession des actions de la société ETSM en date du 12 juin 2006 que la société D2T, cessionnaire, reconnaît avoir eu accès à l'ensemble des documents juridiques, sociaux, fiscaux, administratifs, commerciaux et avoir pu en vérifier la teneur dans la limite qu'elle a seule décidé de la revue réalisée ; que la société D2T ne conteste pas qu'a figuré parmi ces documents l'avenant litigieux au contrat de travail ; que c'est donc à la date du 12 juin 2006 que doit être fixé le point de départ du délai de prescription, de telle sorte que la saisine du conseil de prud'hommes par la société 2DT aux fins d'annulation de la convention par lettre du 12 septembre 2008 reçue le 15 septembre est intervenue avant l'expiration du délai de prescription ; que pour que la convention soit annulée, encore faut il qu'elle ait des conséquences dommageables pour la société, étant précisé que c'est au moment où il est statué sur la demande d'annulation qu'il convient d'apprécier si la convention a eu de telles conséquences (Cass. soc. 1er oct. 1996, n° 9416315) ; qu'à cet égard, et en premier lieu, il est constant que la garantie du passif, mise en avant par M. Jean-Jacques X... pour contester le caractère dommageable de la convention, expirait au 31 décembre 2008, de telle sorte que, ne pouvant plus avoir aucun effet au moment où la Cour statue, elle ne peut être prise en considération au titre d'une éventuelle atténuation de la portée des engagements financiers de la société ; qu'en second lieu, la société prouve que les résultats des exercices depuis 2008 aboutissent à des pertes cumulées d'un montant approchant les 4, 4 millions d'euros et qu'elle a du engager depuis 2010 diverses actions destinées à redresser la situation (licenciement de dix salariés pour motif économique ; chômage partiel), dans un contexte défavorable pour la filière automobile, au moins en France ; que si, comme le souligne M. Jean-Jacques X..., l'Institut français du pétrole (IFP) est actionnaire à 100 % de D2T et lui assure un important concours financier, il n'en demeure pas moins que c'est au regard de la situation de D2T, seule débitrice de l'indemnité contractuelle, que la Cour doit apprécier la portée de l'avenant litigieux ; qu'or, les chiffres pour l'année 2011, qui font état d'un chiffre d'affaires de 40, 9 millions d'euros et d'un résultat d'exploitation de 1, 9 millions d'euros traduisent une amélioration significative de la situation de la société D2T ; que dans ces conditions, il ne peut être considéré que le versement d'une somme de 317. 326 € à titre d'indemnité contractuelle revêtirait pour la société des conséquences suffisamment dommageables pour entraîner la nullité de l'avenant ; que ce caractère dommageable est d'autant moins caractérisé que, contrairement à ce que soutient la société D2T, l'appréciation de la contrepartie apportée par le salarié, également déterminante du caractère dommageable ou non, ne saurait être limitée à l'action de M. Jean-Jacques X... au sein de la société D2T, mais doit prendre aussi en compte son action au sein d'ETSM, dans laquelle il s'est investi d'une manière durable (7 ans à la date de l'avenant), importante et efficace mise en évidence notamment par les différentes attestations qu'il produit à cette fin ; que les conditions cumulatives nécessaires pour l'annulation de la convention réglementée litigieuse ne sont donc pas toutes réunies et la Cour ne peut faire droit à la demande de la société sur ce point ; que toutefois, l'indemnité contractuellement prévue à la charge de l'employeur, qui met fin au contrat de travail, constituant la réparation forfaitaire d'un préjudice résultant de la cessation de l'exécution du contrat, peut être modérée ou augmentée (Cass. Soc. 24 mars 2010, n° 0841948) en application de l'article 1152 du code civil, selon qu'elle est excessive ou dérisoire ; qu'en l'espèce, l'avenant prévoit le versement forfaitaire de deux ans de salaire sans lien avec l'ancienneté du salarié et y compris en cas de faute grave ; qu'au vu de l'ensemble des éléments produits par les deux parties, de l'ancienneté du salarié et de son implication dans la société E. dont les parts ont été cédées à la société D2T, mais aussi de ce qui a été précédemment indiqué tant sur la clause de non concurrence invoquée par le salarié pour s'opposer à la réduction de l'indemnité contractuelle que sur certaines limites de son travail au sein de D2T, il y a lieu de réduire à la somme de 180. 000 euros le montant de l'indemnité contractuelle ; qu'enfin, dès lors que l'avenant au contrat de travail prévoyait expressément : « l'employeur versera au salarié une indemnité contractuelle qui s'ajoutera aux indemnités de toutes natures dues en vertu de la loi et de la convention collective », l'indemnité contractuelle est due à M. Jean-Jacques X... en sus de l'indemnité conventionnelle (Cass. Soc. 6 juin 2007, n° 0543054) ;
Alors, de première part, que sans préjudice de la responsabilité de l'intéressé, les conventions visées à l'article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d'administration peuvent être annulées si elles ont eu des conséquences dommageables pour la société ; qu'en refusant d'annuler l'avenant litigieux en considérant que le versement d'une somme de 317. 326 € à titre d'indemnité contractuelle n'aurait pas revêtu pour la société D2T de conséquences « suffisamment » dommageables, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 225-42 du Code de commerce ;

Alors, de deuxième part, subsidiairement que sans préjudice de la responsabilité de l'intéressé, les conventions visées à l'article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d'administration peuvent être annulées si elles ont eu des conséquences dommageables pour la société ; qu'en considérant que la société D2T n'aurait subi aucune conséquence dommageable en raison du versement d'une somme de 317. 326 euros à titre d'indemnité contractuelle en prenant en compte les données comptables et financières de l'année 2011 et sans examiner la situation financière de la société D2T au titre de l'exercice 2012, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 225-42 du Code de commerce ;
Alors, de troisième part, que sans préjudice de la responsabilité de l'intéressé, les conventions visées à l'article L. 225-38 et conclues sans autorisation préalable du conseil d'administration peuvent être annulées si elles ont eu des conséquences dommageables pour la société ; qu'en considérant que la société D2T n'aurait subi aucune conséquence dommageable en raison du versement d'une somme de 317. 326 euros à titre d'indemnité contractuelle en relevant que cette indemnité contractuelle aurait constitué la contrepartie de l'action de M. Jean-Jacques X... au service de la société ETSM et de la société D2T en dépit de ce que cette indemnité ne constituait que la contrepartie pour M. Jean-Jacques X... de la rupture de son contrat de travail et du manquement de l'employeur à une obligation d'assurer la stabilité de l'emploi du salarié, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant au regard de l'article L. 225-42 du Code de commerce ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-16172
Date de la décision : 17/09/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 26 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 sep. 2014, pourvoi n°13-16172


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16172
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