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11/06/2014 | FRANCE | N°12-26521

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juin 2014, 12-26521


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 3 juillet 2012), que par arrêté du 15 juin 2009, le maire d'Epagny (Haute-Savoie) a autorisé l'« ouverture exceptionnelle » le 28 juin 2009 des commerces de la commune « à l'exception des commerces visés par les arrêtés préfectoraux n° 5/1976 du 7 juillet 1976 et n° 697/2000 du 6 mars 2000, faisant obligation de fermeture des établissements de vente de meuble, de literie, d'articles d'ameublement, de matériels de radio-télévision, électro

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 3 juillet 2012), que par arrêté du 15 juin 2009, le maire d'Epagny (Haute-Savoie) a autorisé l'« ouverture exceptionnelle » le 28 juin 2009 des commerces de la commune « à l'exception des commerces visés par les arrêtés préfectoraux n° 5/1976 du 7 juillet 1976 et n° 697/2000 du 6 mars 2000, faisant obligation de fermeture des établissements de vente de meuble, de literie, d'articles d'ameublement, de matériels de radio-télévision, électroménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie » ; que la Fédération des groupements de commerçants de la Haute-Savoie et la Chambre syndicale de négoce de l'ameublement et l'équipement de la maison de Haute-Savoie ont fait citer la société Auchan France devant le tribunal de commerce d'Annecy aux fins de voir juger que cette société avait violé la prohibition d'ouverture dominicale prévue par les arrêtés préfectoraux du 7 juillet 1976 et du 6 mars 2000 et que cette ouverture illicite leur avait causé un préjudice direct et certain ;
Attendu que la société Auchan France fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la Fédération des groupements de commerçants de la Haute-Savoie et la Chambre syndicale de négoce de l'ameublement et l'équipement de la maison de Haute-Savoie, une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen : 1°/ que les arrêtés préfectoraux ordonnant la fermeture au public pendant la durée du repos hebdomadaire d'un établissement d'une profession déterminée, lorsqu'ils ne visent que des commerces spécialisés, ne s'appliquent pas aux magasins à commerces multiples tels que les grandes surfaces, qui sont classés dans une catégorie professionnelle autre que les magasins spécialisés ; qu'en l'espèce, l'arrêté préfectoral n° 5-76 du 7 juillet 1976 qui interdit dans le département de la Haute-Savoie l'ouverture le dimanche « des établissements de commerce de détail où sont en vente des matériels de radio-télévision, électroménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie en ce qui concerne notamment les produits d'entretien, peinture et papiers peints » ne vise que des commerces de détail spécialisés dans la commercialisation desdits articles ; qu'en jugeant au contraire que cet arrêté ne se référait pas à une catégorie professionnelle de sorte qu'il serait applicable à la société Auchan, laquelle indiquait sans être contestée être un magasin à commerces multiples, la cour d'appel a violé par fausse interprétation de l'arrêté préfectoral n° 5-76 du 7 juillet 1976 , ensemble l'article L. 221-17 du code du travail devenu l'article L. 3132-29 ;2°/ que les jugements doivent être motivés ; que dans ses conclusions d'appel, la société Auchan faisait valoir que les arrêtés préfectoraux de fermeture d'établissement le dimanche ne lui étaient plus applicables puisqu'elle bénéficiait de la dérogation permanente de droit au repos dominical prévue par l'article L. 3132-13 du code du travail, lequel autorise les établissements ayant pour activité principale la vente au détail de denrées alimentaires à donner le repos hebdomadaire le dimanche à partir de 13 heures ; qu'en jugeant applicable à la société Auchan l'arrêté préfectoral du 7 juillet 1976 interdisant l'ouverture le dimanche de certains établissements sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;3°/ que si le principe de la séparation des pouvoirs des autorités administratives et judiciaires interdit au juge civil de se prononcer sur la légalité d'un acte administratif, il lui appartient, lorsqu'il est saisi d'une contestation sur la légalité d'un tel acte, de se prononcer sur le caractère sérieux de cette contestation et, dans l'affirmative, de renvoyer au juge administratif l'appréciation de la légalité dudit acte ; que dans ses conclusions d'appel, la société Auchan faisait valoir que le syndicat professionnel propre aux commerces multiples, catégorie à laquelle elle appartenait, n'avait pas été consulté préalablement à l'accord sur lequel était fondé l'arrêté préfectoral du 7 juillet 1976 de sorte qu'elle contestait la légalité de cet arrêté préfectoral ; qu'en ne se prononçant pas sur le caractère sérieux de cette contestation et en jugeant cet arrêté préfectoral applicable à la société Auchan, la cour d'appel a violé l'article L. 3132-29 du code du travail, les articles 4 et 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Mais attendu, d'abord, qu'exercent la même profession au sens de l'article L. 3132-29 du code du travail les établissements dans lesquels s'effectue à titre principal ou accessoire, l'activité visée par l'arrêté préfectoral ;
Attendu, ensuite, que la circonstance que l'arrêté préfectoral ordonnant la fermeture au public pendant toute la durée du repos hebdomadaire des établissements d'une profession déterminée, a été pris sans l'accord d'un syndicat ou d'une organisation d'employeurs de cette profession n'est pas, par elle-même, de nature à établir que les organisations qui ont manifesté leur accord n'auraient pas exprimé la volonté de la majorité indiscutable des établissements concernés ;
Et attendu que la cour d'appel, qui n'était tenue de répondre ni aux conclusions inopérantes visées par la troisième branche du moyen ni au moyen tiré de la dérogation au repos dominical prévue par l'article L. 3132-13 du code du travail, lequel était sans influence sur la solution du litige, a exactement retenu que l'arrêté préfectoral du 7 juillet 1976 qui vise tous les établissements vendant au détail des matériels de radio-télévision, électroménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie en ce qui concerne notamment les produits d'entretien, peinture et papiers peints, sans limiter son champ d'application aux seuls établissements pratiquant cette activité à titre principal, était opposable à la société Auchan laquelle commercialise dans son magasin de Haute-Savoie, les différents produits énumérés par cet arrêté ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Auchan France aux dépens ;Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Auchan France à payer à la Fédération des groupements de commerçants de la Haute-Savoie la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Auchan France
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société AUCHAN à payer à la Fédération des Groupements de Commerçants de la Haute-Savoie et la Chambre Syndicale de Négoce de l'Ameublement et de l'équipement de la Maison de Haute Savoie la somme unique de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts, outre celle de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile AUX MOTIFS QUE par arrêté du 15 juin 2009, le maire d'Epagny a autorisé l' « ouverture exceptionnelle » des commerces de la commune le dimanche 28 juin 2009 « à l'exception des commerces visés par les arrêtés préfectoraux n°5/1976 du 7 juillet 1976 etn°697/2000 du 6 mars 2000, faisant obligation de fermeture des établissements de vente de meubles et de literie, d'articles d'ameublement, de matériel de radiotélévision, électroménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie » ; que la SA Auchan France a ouvert son magasin de grande surface de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire d'Epagny ce dimanche 28 juin 2009, et en particulier ses rayons ameublement et autres visés par les arrêtés susdits et que la Fédération des groupements de commerçants de la Haute Savoie et la Chambre syndicale de négoce et de l'ameublement et de l'équipement de la maison de Haute Savoie reprochent à la société Auchan l'illégalité de cette ouverture ; que le tribunal de grande instance d'Annecy, statuant comme Tribunal de commerce, les a déboutées et les a condamnées à payer chacune à la société Auchan 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et qu'elles en ont interjeté appel par déclaration du 9 mai 2011 ; que, soutenant que la société Auchan s'est rendue coupable de concurrence déloyale, que rien dans les arrêtés ne précise qu'ils ne s'adressent qu'aux magasins spécialisés, que l'arrêté de 1976 parle des « établissements de détail où sont mis en vente des matériels de radiotélévision, électroménager », qu'un arrêté préfectoral de fermeture dominicale s'applique aux établissements à commerces multiples dès lors qu'il est pris en termes généraux et que son activité rejoint celle visée par l'arrêté ; qu'Auchan a réalisé un chiffre d'affaires de 26.197 euros ce jour-là, premier dimanche des soldes d'été, sur les rayons litigieux, qu'elle a causé un préjudice directe aux commerçants exerçant à proximité et exerçant exclusivement les commerces concernés, la Fédération des groupements de commerçants de la Haute Savoie et la Chambre syndicale de négoce de l'ameublement et de l'équipement de la maison de Haute Savoie demandent de réformer le jugement, de condamner la société Auchan à payer à chacune 50.000 euros de dommages-intérêts et 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa demande reconventionnelle ; que, alléguant que l'arrêté du 6 mars 2000 ne vise pas son activité mais précise qu'il concerne les commerces de détail du numéro 52.4 H du code NAF, qu'elle est un commerce de gros à prédominance alimentaire ; que c'est la vente de matériels à titre principal qui est visée ; que les magasins à commerces multiples relèvent d'une catégorie professionnelle particulière ; qu'elle n'entre pas dans le champ de l'article 3132-29 du code du travail, fondement des arrêtés préfectoraux ; qu'il appartient aux appelantes de démontrer que les textes visés lui seraient opposables ; qu'elle bénéficie de la dérogation permanente de droit de l'article L. 3132-13 du code du travail ; que les établissements de commerce de détail d'ameublement bénéficient depuis la loi du 3 août 2008 de la dérogation au repos hebdomadaire ; que les appelantes ne justifient d'aucun préjudice et ne démontrent pas qu'en cas de fermeture ses clients auraient acheté les mêmes produits dans d'autres commerces, la SA Auchan conclut à la confirmation du jugement, à l'inopposabilité des arrêtés préfectoraux des 7 juillet 1976 et 6 mars 2000, à la condamnation des appelantes à lui payer l'euro symbolique à titre de dommages et intérêts ainsi que 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; que l'arrêté municipal litigieux définit les établissements interdits d'ouverture en ce premier dimanche de soldes 2009 par référence à ceux visés par les deux arrêtés préfectoraux qu'il cite ; que l'arrêté préfectoral du 6 mars 2000 introduit une obligation de fermeture dominicale s'imposant aux « établissements de commerce de détail repris sous le n°52.4 du code NAF où sont mis en vente des meubles neufs et des articles neufs d'ameublement et de literie » ; qu'il ne s'impose donc qu'aux établissements relevant dudit code NAF, soit le commerce de détail de meubles et que, effectivement, la seule référence à ce texte n'interdisait pas l'ouverture au public contesté ; que toutefois, l'arrêté du 7 juillet 1976 interdit dans le département de la Haute Savoie l'ouverture le dimanche des « établissements de commerce de détail où sont mis en vente des matériels de radio-télévision, électro-ménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie en ce qui concerne notamment les produits d'entretien, peinture et papiers peints » ; que ledit arrêté préfectoral ne se réfère pas à une catégorie professionnelle précise mais au commerce d'une série de produits ; que la société Auchan ne conteste pas avoir ouvert ce dimanche 28 juin 2009 un établissement de commerce, faisant du commerce de détail et mettant en vente des matériels de radio-télévision, etc, tels que définis par le texte sus cité ; que dès lors l'arrêté municipal lui était bien applicable, et ne l'autorisait pas à ouvrir les rayons concernés ; que le préjudice des appelants n'est pas lié au chiffre d'affaires réalisé par la société Auchan grâce à l'infraction visée, voire seulement à son bénéfice, mais constitue un préjudice moral occasionné par l'atteinte aux intérêts que leurs membres défendent en s'associant ; que ce préjudice est estimé à 15.000 euros.1° - ALORS QUE les arrêtés préfectoraux ordonnant la fermeture au public pendant la durée du repos hebdomadaire d'un établissement d'une profession déterminée, lorsqu'ils ne visent que des commerces spécialisés, ne s'appliquent pas aux magasins à commerces multiples tels que les grandes surfaces, qui sont classés dans une catégorie professionnelle autre que les magasins spécialisés ; qu'en l'espèce, l'arrêté préfectoral n°5-76 du 7 juillet 1976 qui interdit dans le département de la Haute Savoie l'ouverture le dimanche « des établissements de commerce de détail où sont en vente des matériels de radio-télévision, électro-ménager, quincaillerie, bricolage, équipement de la maison, des articles de droguerie en ce qui concerne notamment les produits d'entretien, peinture et papiers peints » ne vise que des commerces de détail spécialisés dans la commercialisation desdits articles ; qu'en jugeant au contraire que cet arrêté ne se référait pas à une catégorie professionnelle de sorte qu'il serait applicable à la société AUCHAN, laquelle indiquait sans être contestée être un magasin à commerces multiples, la Cour d'appel a violé par fausse interprétation de l'arrêté préfectoral n°5-76 du 7 juillet 1976 , ensemble l'article L. 221-17 du Code du travail devenu l'article L. 3132-29.
2° - ALORS QUE les jugements doivent être motivés ; que dans ses conclusions d'appel, la société AUCHAN faisait valoir que les arrêtés préfectoraux de fermeture d'établissement le dimanche ne lui étaient plus applicables puisqu'elle bénéficiait de la dérogation permanente de droit au repos dominical prévue par l'article L 3132-13 du Code du travail, lequel autorise les établissements ayant pour activité principale la vente au détail de denrées alimentaires à donner le repos hebdomadaire le dimanche à partir de 13 heures (cf. conclusions d'appel, p. 13 à 16) ; qu'en jugeant applicable à la société AUCHAN l'arrêté préfectoral du 7 juillet 1976 interdisant l'ouverture le dimanche de certains établissements sans répondre à ce moyen pertinent, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile. 3° - ALORS en tout état de cause QUE si le principe de la séparation des pouvoirs des autorités administratives et judiciaires interdit au juge civil de se prononcer sur la légalité d'un acte administratif, il lui appartient, lorsqu'il est saisi d'une contestation sur la légalité d'un tel acte, de se prononcer sur le caractère sérieux de cette contestation et, dans l'affirmative, de renvoyer au juge administratif l'appréciation de la légalité dudit acte ; que dans ses conclusions d'appel, la société AUCHAN faisait valoir que le syndicat professionnel propre au commerces multiples, catégorie à laquelle elle appartenait, n'avait pas été consulté préalablement à l'accord sur lequel était fondé l'arrêté préfectoral du 7 juillet 1976 (cf. ses conclusions d'appel, p. 9) de sorte qu'elle contestait la légalité de cet arrêté préfectoral ; qu'en ne se prononçant pas sur le caractère sérieux de cette contestation et en jugeant cet arrêté préfectoral applicable à la société AUCHAN, la Cour d'appel a violé l'article L. 3132-29 du Code du travail, les articles 4 et 12 du Code de procédure civile, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-26521
Date de la décision : 11/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 03 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2014, pourvoi n°12-26521


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.26521
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