La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2014 | FRANCE | N°13-11459

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mai 2014, 13-11459


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 décembre 2012), que M. X..., engagé le 21 juillet 1997 par l'association tutélaire de l'Ariège, exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur, a été licencié pour faute grave par lettre du 13 avril 2010 ; que par jugement du 10 avril 2013, le tribunal de commerce de Foix a prononcé le redressement judiciaire de l'association tutélaire de l'Ariège, a désigné M. Y...comme administrateur judiciaire ; Attendu que l'employeur fait grief à

l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 décembre 2012), que M. X..., engagé le 21 juillet 1997 par l'association tutélaire de l'Ariège, exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur, a été licencié pour faute grave par lettre du 13 avril 2010 ; que par jugement du 10 avril 2013, le tribunal de commerce de Foix a prononcé le redressement judiciaire de l'association tutélaire de l'Ariège, a désigné M. Y...comme administrateur judiciaire ; Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de le condamner à payer au salarié diverses sommes, alors, selon le moyen : 1°/ que les juges du fond sont tenus, même dans le cadre des procédures orales, de respecter la contradiction, ce qui leur impose en particulier d'inviter préalablement les parties à s'expliquer sur les moyens qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, M. X...n'avait pas invoqué dans ses conclusions reprises oralement le moyen selon lequel le délai entre la connaissance des faits et le début de la procédure de licenciement n'aurait pas été suffisamment restreint au point de faire perdre à la faute son caractère de gravité ; qu'en soulevant ce moyen d'office, sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, la cour d'appel a violé l'article 16, alinéa 3, du code de procédure civile ; 2°/ que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé, pour considérer que le licenciement de M. X...était intervenu trop tardivement, que le président de l'association disposait depuis janvier 2010 des éléments d'information sur les relations difficiles entretenues entre M. X...et Mme Z...et sur les pressions de M. X...; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le relevait la lettre de licenciement, le dénigrement de Mme Z...et la pression de M. X...sur les salariés et sur Mme Z...ayant atteint un niveau confinant au harcèlement moral ne s'étaient pas aggravés en février et mars 2010, comme le démontraient les pétitions du personnel (qui se sont ultérieurement traduites en plainte pour harcèlement moral auprès du procureur de la République) aussi bien que le courriel de M. X...en date du 5 mars 2010, de sorte que le maintien de ce dernier dans l'entreprise était devenu totalement impossible même pendant la durée de son préavis à partir de cette période seulement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ; 3°/ que si la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et doit être sanctionnée dans un délai relativement restreint, ce délai s'apprécie en tenant compte des circonstances qui ont pu légitimement conduire l'employeur à reporter provisoirement le prononcé de la sanction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. X...avait recherché une solution de départ négocié à compter du 2 février 2010 et qu'elle avait été étudiée par le conseil d'administration de l'association avant que la procédure de licenciement ne soit engagée le 23 mars 2010 ; qu'en affirmant que le licenciement était intervenu trop tardivement dès lors que les faits étaient connus de l'association fin janvier 2010, sans prendre en considération le fait que cette négociation, qui devait être effectuée de bonne foi par l'exposante, qui n'est qu'une association, ait légitimement retardé la sanction jusqu'au moment où il est apparu qu'elle ne pourrait pas aboutir en considération tant des prétentions de M. X...que de l'accroissement considérable de la tension au sein de l'association, notamment du fait des pétitions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ;

4°/ que les juges du fond sont tenus, même dans le cadre des procédures orales de respecter la contradiction, ce qui leur impose d'inviter préalablement les parties à s'expliquer sur les moyens qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que le grief formulé par la lettre de licenciement concernant la gestion erronée des payes ne constituait qu'une insuffisance professionnelle et non une faute ; qu'en soulevant ainsi d'office ce moyen que M. X...n'invoquait pas dans ses conclusions reprises oralement à l'audience, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a derechef violé l'article 16, alinéa 3, du code de procédure civile ; 5°/ que l'insuffisance professionnelle justifie un licenciement pour faute grave lorsqu'elle résulte de la mauvaise volonté ou d'un comportement délibéré du salarié ; qu'en l'espèce, en considérant que le grief lié à la gestion erronée des payes des salariés ne constituait qu'une manifestation d'insuffisance professionnelle, sans rechercher ni si l'intention délibérée de M. X...n'était pas démontré par le fait qu'il se soit attribué des coefficients, des primes et des contingents d'heures supplémentaires injustifiés, ni même si ces faits ne constituaient pas une faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ; 6°/ en tout état de cause que les juges du fond doivent motiver leurs décisions en fait et droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que le comportement de M. X...lui avait causé un préjudice, notamment en ce qu'il s'était octroyé des primes et heures supplémentaires indues et un déroulement de carrière plus rapide que ne le prévoyait la convention collective ; qu'en rejetant cette demande sans s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la dégradation des relations entre le salarié et la chef de service ainsi que l'accroissement des pressions effectuées sur le personnel, qui étaient reprochées au salarié par l'employeur, étaient connues de celui-ci dès la fin du mois de janvier 2010 mais que la relation de travail s'était poursuivie pendant la négociation que les parties avaient entretenue durant plus d'un mois et demi sur les conditions d'une éventuelle rupture conventionnelle du contrat de travail, la cour d'appel, en retenant, sans méconnaître le principe de la contradiction, que le délai entre la connaissance des faits par l'employeur et l'engagement de la procédure de licenciement qui s'était ainsi écoulé permettait de considérer que les faits ne présentaient pas une gravité telle qu'ils empêchaient la poursuite du contrat de travail et ne constituaient donc pas une faute grave, n'a fait que tirer les conséquences légales de ses constatations souveraines ; Attendu, ensuite, qu'en retenant que le grief tenant à la gestion erronée des payes ne constituait qu'une insuffisance professionnelle et non une faute à défaut de preuve d'une mauvaise volonté délibérée du salarié, la cour d'appel, qui n'avait pas à s'expliquer sur des griefs qui n'étaient pas visés dans la lettre de licenciement, n'a fait que qualifier les faits qui étaient dans le débat et sur lesquels les parties s'étaient expliquées ;

Attendu, enfin, que sous le couvert d'un grief de défaut de réponse à conclusions, le moyen critique en sa sixième branche une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile ; D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa sixième branche, n'est pas fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; Condamne l'association tutélaire de l'Ariège et M. Y..., ès qualités aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mai deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour l'association tutélaire de l'Ariège et M. Y..., ès qualités. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné l'exposante à verser à Monsieur X...21. 703, 60 ¿ d'indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés y afférents, 2. 956, 72 ¿ au titre de rappel de salaire lié à la période de mise à pied conservatoire, 500 ¿ d'indemnité pour absence de mention du DIF dans la lettre de licenciement, 1. 500 ¿ d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, d'AVOIR, réformant le jugement, condamné l'association à verser à Monsieur X...43. 176, 77 ¿ d'indemnité conventionnelle de licenciement, 50. 000 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 500 ¿ en réparation du préjudice causé par la remise tardive des documents sociaux, 1. 500 ¿ en application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR rejeté la demande de l'association tendant à la condamnation de Monsieur X...à lui verser une indemnité de 60. 000 ¿ ; AUX MOTIFS QUE « la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que l'employeur sur qui pèse la charge de la preuve de cette faute doit donc engager une procédure de licenciement dans un délai restreint à partir du moment où il a connaissance des faits qui sont reprochés au salarié et qui doivent être visés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Attendu que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige précise trois griefs : 1/ La poursuite du dénigrement de la chef de service Marie-Thérèse Z...ainsi que la confirmation de votre agressivité ; 2/ Une gestion erronée de la paye du personnel et en particulier l'utilisation inadéquate des heures supplémentaires et complémentaires, révélée par la très récente analyse du Cabinet MAZARS nous faisant courir notamment le risque d'un redressement par l'URSSAF ; 3/ L'accentuation de la pression sur les salariés et sur Marie-Thérèse Z...en particulier en février et mars 2010 la limite du harcèlement moral. Attendu que selon l'association Tutélaire de l'Ariège, les premières critiques formées par Monsieur X...contre Mme Z...sont contenues dans un document intitule « recommandations/ direction » dans lequel il écrit à propos du service dont Mme Z...assume la responsabilité « parce que j'affirme que, par le jeu combine des rôles spécifiques, copinages et autre omerta régnantes, ce service est pourri, tire vers le bas par une minorité, comme je ne lai jamais vu par ailleurs, aussi pas question de faire le dos rond encore et encore. Pour moi cela serait fautif, tout simplement fautif » ; que le 1er décembre 2009, Mme Z...a répondu à ce document diffusé par courriel du 24 novembre 2009, en indiquant notamment « mon expérience professionnelle me permet de vous assurer que I'AT09 est très loin de cette réalité là. Je parlerai plutôt d'un service moderne, tiré vers le haut, service ayant su être réactif et s'adapter, service poursuivant sa réflexion face aux nouvelles exigences et je suis moi-même convaincue de la compétence et de la bonne volonté de chacun ». Attendu que le second incident relevé par l'employeur concerne la découverte d'un courriel échangé le 18 décembre entre deux salariées proches de Monsieur X...et dans lequel Mme A...écrit « Je viens d'avoir Magali au tel, crois moi il faut avoir une force de caractère énorme pour ne pas lui révéler les merdes de la nouvelle chef de service... parce que pour moi les erreurs qui ont pu lui être reprochées sont du pipi de chat côté de l'incompétence de qui on sait... » ; que Monsieur X..., informé du contenu de ce courriel, a reçu un message de Madame A...faisant part de ses regrets, acceptant de présenter des excuses à Mme Z...et précisant qu'elle n'avait aucune animosité personnelle l'égard de Mme Z...qui « est une personne agréable, sympathique, courtoise » ; que ce message de Mme A...a été transmis, le jour même sait le 18 décembre, par Monsieur X...au président de l'association. Attendu que dans une message adressé le 23 décembre 2009 Monsieur X..., le président de l'association fait part de sa perplexité « sur ce qui se passe à l'AT depuis Vendredi... et qui devait se passer depuis un bon moment » trouvant cela « désolant et malheureux » qu'il indique avoir proposé « la réunion du GRH pour clarifier les positions des uns et des autres et trouver une réponse globale à un mal être évident » ; que le 28 décembre 2009, Monsieur X...adresse un long courrier au président de l'association dans lequel il écrit notamment : « Hors la question concernant Mme A..., je prenais conscience que Mme Z...s'était surtout appliquée devant vous mettre en cause Mme B..., suspectée d'on ne sait quelle complicité mais de toutes façons outrepassant sa fonction, et moi-même aux déplorables méthodes envers les salariés..... Puis-je remercier Mme Z...? Un tel degré de déloyauté de la part d'une chef de service, collaboratrice essentielle et largement rétribuée pour cela, me libère. Les milles interrogations quant à cette personne, les inquiétudes montantes dont je vous ai entretenu maintes fois, s'ouvrent un autre éclairage ¿ ». Attendu que le 5 janvier 2010 Monsieur X...a adressé un courrier aux membre du groupe d'appui GRH dans lequel il écrit : « je pèse donc mes mots. Cela fait des années que ce service est otage de Mme C.... Il n'est pas question ici d'envisager ce que peuvent être ses compétences professionnelles ou son intérêt pour les personnes vulnérables, mais seulement d'exprimer qu'il est grand temps qu'elle mette fin à ce comportement délétère qui, littéralement, plombe l'AT09. Sans aborder cela, vous ne réglerez rien. » Attendu qu'il résulte du déroulement des faits que le président de l'association disposait depuis le début du mois de janvier 2010 de tous les éléments d'information sur les relations difficiles entretenues entre Monsieur X...et Mme Z...et sur les pressions que Monsieur X...exercerait contre les salariés et notamment contre Mme C...qui n'est toutefois pas nommément désignée dans la lettre de licenciement ; que les pétitions des salariés des 11 février et 5 mars 2010 ne contiennent aucune information justifiant une nouvelle appréciation des faits reprochés à Monsieur X.... Attendu encore que dans un courrier du 2 février 2010, Monsieur X...a écrit au président de l'association : « nous ne sommes plus dans la perspective de lettre de recadrage. La possibilité de licenciement a également été prononcée. Faites. Ou acceptez l'ouverture d'une procédure de rupture conventionnelle de mon contrat de travail » ; qu'une première rencontre s'est déroulée le 10 février 2010 sur les conditions d'une rupture conventionnelle à la suite de laquelle le conseil d'administration réuni le 26 février 2010 a fixé les conditions (indemnité de rupture d'environ 9. 300 ¿) ; qu'à la demande de Monsieur X..., une seconde rencontre s'est déroulée le 18 mars 2010, sans succès puisque la procédure de licenciement a été engagée le 23 mars 2010. Attendu que si l'échec des négociations portant sur une rupture conventionnelle n'interdit pas formellement à l'employeur d'engager une procédure de licenciement pour faute grave, cette négociation qui a duré plus d'un mois et demi permet de considérer que les griefs reprochés au salarié ne présentaient pas une gravité telle qu'ils empêchaient la poursuite du contrat de travail. Attendu que l'association produit un courriel du 5 mars 2010 dans lequel Monsieur X...écrit Mme B...: « Je sors du point compta avec F..., G..., E...et l'ineffable MTP. Maintenant ils parlent de l'avenir, j'ai donc quitté le bureau. MTP ne comprend rien, E...est obligé de la reprendre, mais elle, elle ne voit rien ¿, et elle reste là à parader ! Putain, j'ai des envies de cogner. Trop humiliant E...m'a cherché des poux... ». Mais attendu que les éléments du dossier ne permettent pas de savoir si le président de l'association a pris connaissance de ce courriel pendant les négociations sur la rupture conventionnelle et notamment avant ou après la seconde rencontre du 18 mars 2010 que ce message révèle une grande tension nerveuse et une forte colère de Monsieur X...dont « l'envie de cogner » ne vise personne en particulier ; que le fait d'indiquer que Mme E...« ne comprend rien » et « reste là à parader » ne constitue pas dans le contexte de ce message, adressé uniquement à Mme B..., une faute justifiant un licenciement » ; 1°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus, même dans le cadre des procédures orales, de respecter la contradiction, ce qui leur impose en particulier d'inviter préalablement les parties à s'expliquer sur les moyens qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, Monsieur X...n'avait pas invoqué dans ses conclusions reprises oralement le moyen selon lequel le délai entre la connaissance des faits et le début de la procédure de licenciement n'aurait pas été suffisamment restreint au point de faire perdre à la faute son caractère de gravité ; qu'en soulevant ce moyen d'office, sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, la cour d'appel a violé l'article 16, al. 3, du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé, pour considérer que le licenciement de Monsieur X...était intervenu trop tardivement, que le président de l'association disposait depuis janvier 2010 des éléments d'information sur les relations difficiles entretenues entre Monsieur X...et Madame Z...et sur les pressions de Monsieur X...; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le relevait la lettre de licenciement, le dénigrement de Madame Z...et la pression de Monsieur X...sur les salariés et sur Madame Z...ayant atteint un niveau confinant au harcèlement moral ne s'étaient pas aggravés en février et mars 2010, comme le démontraient les pétitions du personnel (qui se sont ultérieurement traduites en plainte pour harcèlement moral auprès du Procureur de la République) aussi bien que le courriel de Monsieur X...en date du 5 mars 2010, de sorte que le maintien de ce dernier dans l'entreprise était devenu totalement impossible même pendant la durée de son préavis à partir de cette période seulement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du Code du travail ; 3°) ALORS QUE, si la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et doit être sanctionnée dans un délai relativement restreint, ce délai s'apprécie en tenant compte des circonstances qui ont pu légitimement conduire l'employeur à reporter provisoirement le prononcé de la sanction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Monsieur X...avait recherché une solution de départ négocié à compter du 2 février 2010 et qu'elle avait été étudiée par le conseil d'administration de l'association avant que la procédure de licenciement ne soit engagée le 23 mars 2010 ; qu'en affirmant que le licenciement était intervenu trop tardivement dès lors que les faits étaient connus de l'association fin janvier 2010, sans prendre en considération le fait que cette négociation, qui devait être effectuée de bonne foi par l'exposante, qui n'est qu'une association, ait légitimement retardé la sanction jusqu'au moment où il est apparu qu'elle ne pourrait pas aboutir en considération tant des prétentions de Monsieur X...que de l'accroissement considérable de la tension au sein de l'association, notamment du fait des pétitions, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du Code du travail ; ET AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement vise encore « une gestion erronée de la paye du personnel et en particulier l'utilisation inadéquate des heures supplémentaires et complémentaires, révélée par la très récente analyse du Cabinet MAZARS nous faisant courir notamment le risque d'un redressement par l'URSSAF ». Mais attendu qu'à défaut pour l'association de démontrer une intention délibérée de Monsieur X...de se conformer aux instructions données, ce grief, s'il est établi, ne peut constituer qu'une insuffisance professionnelle insusceptible de justifier une mesure de licenciement disciplinaire. Attendu que les faits reprochés à Monsieur X...ne constituent pas une faute grave justifiant son licenciement ; qu'ils ne peuvent pas non plus être invoqués pour justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse dès lors que selon article 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées en date du 15 mars 1966 : « sauf en cas de faute grave il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins 2 des sanctions citées ci-dessus, prises dans le cadre de la procédure légale ». Attendu que le licenciement de Monsieur X...est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse » ; 4°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus, même dans le cadre des procédures orales de respecter la contradiction, ce qui leur impose d'inviter préalablement les parties à s'expliquer sur les moyens qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que le grief formulé par la lettre de licenciement concernant la gestion erronée des payes ne constituait qu'une insuffisance professionnelle et non une faute ; qu'en soulevant ainsi d'office ce moyen que Monsieur X...n'invoquait pas dans ses conclusions reprises oralement à l'audience, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a derechef violé l'article 16, al. 3., du Code de procédure civile ; 5°) ALORS QUE l'insuffisance professionnelle justifie un licenciement pour faute grave lorsqu'elle résulte de la mauvaise volonté ou d'un comportement délibéré du salarié ; qu'en l'espèce, en considérant que le grief lié à la gestion erronée des payes des salariés ne constituait qu'une manifestation d'insuffisance professionnelle, sans rechercher ni si l'intention délibérée de Monsieur X...n'était pas démontré par le fait qu'il se soit attribué des coefficients, des primes et des contingents d'heures supplémentaires injustifiés, ni même si ces faits ne constituaient pas une faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du Code du travail ; 6°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE les juges du fond doivent motiver leurs décisions en fait et droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que le comportement de Monsieur X...lui avait causé un préjudice, notamment en ce qu'il s'était octroyé des primes et heures supplémentaires indues et un déroulement de carrière plus rapide que ne le prévoyait la convention collective ; qu'en rejetant cette demande sans s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-11459
Date de la décision : 21/05/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 06 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mai. 2014, pourvoi n°13-11459


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.11459
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award