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30/04/2014 | FRANCE | N°13-13506

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 avril 2014, 13-13506


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 9 janvier 2013), que Mme X... a été engagée à compter du 3 mars 2008 par la société Seca Robert Paul (la société) en qualité de vendeuse moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 000 euros complétée par une prime de quota mensuelle fondée sur les résultats, le contrat de travail stipulant qu'une prime de 2 000 euros brute annuelle serait également versée en décembre 2008, au prorata de la présence de la salariée dans l'entreprise ; que le 15 mai 2010, l'intÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 9 janvier 2013), que Mme X... a été engagée à compter du 3 mars 2008 par la société Seca Robert Paul (la société) en qualité de vendeuse moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 000 euros complétée par une prime de quota mensuelle fondée sur les résultats, le contrat de travail stipulant qu'une prime de 2 000 euros brute annuelle serait également versée en décembre 2008, au prorata de la présence de la salariée dans l'entreprise ; que le 15 mai 2010, l'intéressée a été victime d'un accident du travail à la suite duquel elle a été placée en arrêt jusqu'au 16 juin 2010, puis sans discontinuité à partir du 8 janvier 2011 ; que reprochant à la société son refus de lui rembourser ses lunettes brisées lors de son accident et réclamant le versement de la prime annuelle à compter de 2010, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt de le déclarer tenu de verser chaque année à la salariée une prime de 2 000 euros et de le condamner à lui payer cette somme au titre des années 2010, 2011 et 2012, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges ne peuvent dénaturer les clauses claires et précises des écrits ; qu'en l'espèce, le contrat de travail du 3 mars 2008 de Mme X... mentionnait qu'elle percevrait un salaire mensuel brut, une prime de quota mensuel et que « une prime de 2 000 euros brute annuelle vous sera également versée en décembre 2008, au prorata de votre présence dans l'entreprise » ; que cette disposition claire et précise ne prévoyait le versement de cette prime de 2 000 euros qu'au titre de la seule année 2008 et au prorata de la présence de la salariée dans l'entreprise ; qu'en jugeant cette clause ambiguë et en l'interprétant comme prévoyant le versement d'une prime de 2 000 euros chaque année, prorata temporis pour l'année 2008, la cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges ne peuvent dénaturer les clauses claires et précises des écrits ; qu'en l'espèce, le contrat de travail du 3 mars 2008 de Mme X... prévoyait que la prime annuelle litigieuse serait versée « au prorata de votre présence dans l'entreprise » ; qu'il en résultait que cette prime devait être réduite ou supprimée en cas d'absence dans l'entreprise de la salariée ; qu'en jugeant que ce contrat ne prévoyait pas que cette prime serait réduite ou supprimée en cas d'absence pour maladie ou accident du travail de la salariée, la cour d'appel a dénaturé la clause claire et précise de ce contrat de travail en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que procédant à l'interprétation nécessaire de la clause prévoyant le versement d'une prime de 2 000 euros dont les termes étaient ambigus, la cour d'appel n'a pu la dénaturer ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser une somme à titre de dommages-intérêts pour retard dans le remboursement des lunettes, alors, selon le moyen, que les jugements doivent être motivés ; que dans ses conclusions d'appel, la société Seca Robert Paul faisait valoir et offrait de prouver que Mme X... avait attendu le 14 octobre 2010 pour solliciter le remboursement de ses lunettes brisées lors de son accident du travail survenu le 15 mai 2010, qu'elle-même avait immédiatement communiqué son dossier à sa compagnie d'assurance puis avait transmis à sa salariée, par lettre du 10 décembre 2010, une quittance d'indemnité provenant de sa compagnie d'assurance à lui retourner complétée, quittance que Mme X... n'avait jamais renvoyée ; qu'elle ajoutait qu'après avoir été assignée le 2 février 2011 en paiement du coût de ces lunettes, elle avait spontanément accepté de régler cette somme dès l'audience de conciliation du 2 mars 2011 et s'était exécutée dès le lendemain ; qu'en reprochant à faute à la société Seca Robert Paul d'avoir « attendu 10 mois après l'accident » pour rembourser ces frais, et en indemnisant ce retard de 10 mois pris par l'employeur, sans répondre au moyen pris de ce que la salariée avait elle-même tardé à solliciter le remboursement de ses lunettes puis s'était abstenue de remplir les documents nécessaires à ce remboursement, la cour d'appel a privé sa décision de motif ;
Mais attendu que sous le couvert de grief non fondé de défaut de motivation, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par les juges du fond qui ont estimé que la salariée avait subi un préjudice résultant du retard mis par l'employeur à l'indemniser du bris de ses lunettes dont ils ont apprécié l'étendue ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Seca Robert Paul aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Seca Robert Paul et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Seca Robert Paul
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la société SECA ROBERT PAUL était tenue de verser chaque année à Mme X... une prime de 2. 000 euros et de l'AVOIR condamnée à lui verser les sommes de 2. 000 euros à titre de rappel de prime pour l'année 2010, de 2. 000 euros à titre de rappel de prime pour l'année 2011 et de 2. 000 euros à titre de rappel de prime pour l'année 2012, d'AVOIR dit qu'en cas de départ de la salariée, la prime serait versée au prorata temporis de sa présence dans les effectifs de l'entreprise et d'AVOIR condamné la société SECA ROBERT PAUL à verser à Mme X... la somme de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE II) sur la prime ; que le contrat de travail contenait les dispositions suivantes : " en rémunération de vos services, vous percevrez un salaire mensuel brut fixe de 2. 000 ¿ pour un horaire hebdomadaire de 35 heures, auquel viendra s'ajouter une prime de quota mensuel brut relative au volume de marge brute de vos ventes de.. (suit une énumération des primes de quota comprises entre 50 ¿ et 300 ¿) Le versement de cette prime de quota mensuel vous sera garanti avec un minimum de 200 ¿ jusqu'au 31 août 2008. Une prime de 2. 000 ¿ brute annuelle vous sera également versée en décembre 2008, au prorata de votre présence dans l'entreprise " ; que les parties sont en désaccord sur le sens de cette dernière clause, la salariée soutenant qu'elle lui attribue une prime de 2. 000 ¿ chaque année alors que l'employeur considère qu'elle ne prévoit le versement que d'une prime de 2. 000 ¿ en 2008, au prorata du temps de présence de la salariée dans l'entreprise ; qu'il convient d'emblée de rejeter l'argument de la société SECA ROBERT PAUL selon lequel le terme " annuelle " a été ajouté pour préciser qu'il s'agit d'une prime pour toute l'année par opposition à la prime de quota mensuel ; qu'en effet, une prime " annuelle " est en principe une prime versée chaque année et le simple fait qu'elle soit mentionnée en l'espèce après des dispositions prévoyant un quota mensuel ne permet pas d'exclure un tel sens ; que la clause litigieuse est néanmoins ambiguë puisque, après avoir fait état d'une prime annuelle, elle parait limiter son versement à l'année 2008, prorata temporis ; que l'interprétation nécessaire de cette clause conduit la Cour à rechercher quelle a été la commune intention des parties ; qu'Armelle X... explique qu'elle a démissionné de ses fonctions chez son précédent employeur, après une ancienneté de 23 ans, pour entrer au service de la société SECA ROBERT PAUL qui l'avait démarchée et qu'il avait été convenu qu'elle percevrait une rémunération supérieure à celle dont elle bénéficiait antérieurement ; que la société SECA ROBERT PAUL ne conteste pas ce contexte mais prétend que la rémunération supérieure était assurée par le versement du fixe et du quota mensuel et que la prime de 2. 000 ¿ avait pour seul objet de récompenser la salariée de l'investissement réalisé pour se familiariser aux méthodes de vente de l'entreprise : qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'Armelle X... percevait chez son précédent employeur un salaire mensuel moyen de 2. l 00 ¿ sur 13 mois, soit une moyenne de 2. 275 ¿ par mois ; que la rémunération prévue par la société SECA ROBERT PAUL, constituée par un fixe de 2. 000 ¿ et une prime de quota, est inférieure, sauf dans 1'hypothèse où la salariée réalise le maximum de ventes prévu lui donnant droit à une prime de 300 ¿ ; qu'ainsi, globalement et compte tenu du versement aléatoire de la prime de quota, le salaire fixe et les commissions prévus ne garantissent pas le versement d'une rémunération supérieure à celle perçue auparavant, ce qui milite dans le sens de la thèse de la salariée ; qu'il convient d'observer en second lieu que cette prime de 2. 000 ¿ correspond très précisément à un treizième mois, qui était perçu par Armelle X... chez son précédent employeur ; que le caractère permanent de la prime est par ailleurs conforté par le fait que la société SECA ROBERT PAUL a versé à Armelle X... en 2009 une prime du même montant que celui prévu en 2008, cette similitude rendant difficilement crédible son affirmation selon laquelle il s'agissait alors d'une gratification exceptionnelle ; qu'Armelle X... produit enfin aux débats une attestation d'un ancien salarié de la société SECA ROBERT PAUL, Michel B..., qui relate ainsi les négociations entre la société SECA ROBERT PAUL et Armelle X... : " j'étais à l'époque le directeur commercial de cette société... J'étais en outre chargé du recrutement et j'ai notamment procédé aux entretiens d'embauche de Mme X... en 2008. Je confirme par la présente qu'il avait été décidé, en accord avec M. F..., Président de la SECA et en présence de M Jean Paul C..., chef d'agence d'Amiens, de verser une prime annuelle de 2. 000 ¿ à Mme X..., la première devant lui être versée en décembre 2008 prorata temporis à son entrée dans l'agence, et ce chaque année, afin de pallier à la différence de salaire par rapport à son emploi précédent dans le groupe BROSSETTE.. " ; que cette attestation est certes contredite par le témoignage de M. C... mais les éléments précités conduisent la Cour à la faire prévaloir sur ce témoignage ; qu'il ressort en conséquence de ce qui précède que la commune intention des parties a été de prévoir le versement d'une prime de 2. 000 ¿ chaque année, prorata temporis pour l'année 2008 ; que le contrat de travail ne prévoyant pas que la prime sera réduite ou supprimée en cas d'absence pour maladie ou accident de travail de la salariée, cette prime est due dans son intégralité pour les années 2011 et 2012, nonobstant les arrêts de travail subis par Armelle X... à la suite de son accident du travail du 15 mai 2010 ; qu'en cas de départ de la salariée, cette prime sera versée prorata temporis de sa présence dans les effectifs de l'entreprise ; que l'équité commande d'allouer à Armelle X... une somme de 1. 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
1°- ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les clauses claires et précises des écrits ; qu'en l'espèce, le contrat de travail du 3 mars 2008 de Madame X... mentionnait qu'elle percevrait un salaire mensuel brut, une prime de quota mensuel et que « une prime de 2. 000 euros brute annuelle vous sera également versée en décembre 2008, au prorata de votre présence dans l'entreprise » ; que cette disposition claire et précise ne prévoyait le versement de cette prime de 2. 000 euros qu'au titre de la seule année 2008 et au prorata de la présence de la salariée dans l'entreprise ; qu'en jugeant cette clause ambiguë et en l'interprétant comme prévoyant le versement d'une prime de 2. 000 euros chaque année, prorata temporis pour l'année 2008, la Cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise en violation de l'article 1134 du Code civil.
2°- ALORS subsidiairement QUE les juges ne peuvent dénaturer les clauses claires et précises des écrits ; qu'en l'espèce, le contrat de travail du 3 mars 2008 de Madame X... prévoyait que la prime annuelle litigieuse serait versée « au prorata de votre présence dans l'entreprise » ; qu'il en résultait que cette prime devait être réduite ou supprimée en cas d'absence dans l'entreprise de la salariée ; qu'en jugeant que ce contrat ne prévoyait pas que cette prime serait réduite ou supprimée en cas d'absence pour maladie ou accident du travail de la salariée, la Cour d'appel a dénaturé la clause claire et précise de ce contrat de travail en violation de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du Conseil des prud'hommes d'Amiens du 23 janvier 2012 ayant condamné la société SECA ROBERT PAUL à payer à Madame X... la somme de 220 euros à titre de dommages-intérêts pour retard dans le remboursement des frais de lunettes.
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le remboursement des frais de lunettes ; qu'il est constant qu'Armelle X... a eu ses lunettes brisées lors de l'accident de travail dont elle a été victime et que la société SECA ROBERT PAUL a attendu le 3 mars 2011, soit 10 mois après l'accident, pour l'indemniser des frais de remplacement ; que le conseil de prud'hommes a justement réparé le préjudice occasionné par ce retard par une somme de 220 ¿.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Sur le remboursement du bris de lunettes : que Mademoiselle Armelle X... sollicite du Conseil le remboursement de bris de lunettes suite à un accident du travail survenu le 15 mai 2010, d'un montant de 220 euros ; que le 03 mars 2011, la S. A. S. SECA ROBERT PAUL a remis un chèque de 220, 00 euros, soit un an après l'accident du travail ; que la S. A. S. SECA ROBERT PAUL a donc tardé à rembourser les frais que Mademoiselle Armelle X... a dû exposer pour le remplacement de ses lunettes ; que de ce fait, Mademoiselle Armelle X... a subi un préjudice qu'il convient de réparer ; qu'en conséquence, le Conseil condamnera la S. A. S SECA ROBERT PAUL à régler à Mademoiselle Armelle X... la somme de 220 à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement du remboursement du bris de lunettes.
1°- ALORS QUE les jugements doivent être motivés ; que dans ses conclusions d'appel, la société SECA ROBERT PAUL faisait valoir et offrait de prouver que Madame X... avait attendu le 14 octobre 2010 pour solliciter le remboursement de ses lunettes brisées lors de son accident du travail survenu le 15 mai 2010, qu'elle-même avait immédiatement communiqué son dossier à sa compagnie d'assurance puis avait transmis à sa salariée, par lettre du 10 décembre 2010, une quittance d'indemnité provenant de sa compagnie d'assurance à lui retourner complétée, quittance que Madame X... n'avait jamais renvoyée ; qu'elle ajoutait qu'après avoir été assignée le 2 février 2011 en paiement du coût de ces lunettes, elle avait spontanément accepté de régler cette somme dès l'audience de conciliation du 2 mars 2011 et s'était exécutée dès le lendemain (cf. ses conclusions d'appel, p. 4, § 3 à 7 et p. 5) ; qu'en reprochant à faute à la société SECA ROBERT PAUL d'avoir « attendu 10 mois après l'accident » pour rembourser ces frais, et en indemnisant ce retard de 10 mois pris par l'employeur, sans répondre au moyen pris de ce que la salariée avait elle-même tardé à solliciter le remboursement de ses lunettes puis s'était abstenue de remplir les documents nécessaires à ce remboursement, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-13506
Date de la décision : 30/04/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 09 janvier 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 avr. 2014, pourvoi n°13-13506


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.13506
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