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12/02/2014 | FRANCE | N°11-21546

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 février 2014, 11-21546


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315, alinéa 2 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé pour la période du 29 octobre 2007 au 31 mai 2009 en qualité de technicien de maintenance informatique par la société Télécoms entreprises, par contrat de travail à durée déterminée de professionnalisation, une formation de technicien supérieur de support informatique devant être dispensée auprès du Centre AFTEC-Formation ; que le salarié a rompu le contrat par courrier du 3

juillet 2008 en raison du non-respect par l'employeur de ses obligations d'emp...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315, alinéa 2 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé pour la période du 29 octobre 2007 au 31 mai 2009 en qualité de technicien de maintenance informatique par la société Télécoms entreprises, par contrat de travail à durée déterminée de professionnalisation, une formation de technicien supérieur de support informatique devant être dispensée auprès du Centre AFTEC-Formation ; que le salarié a rompu le contrat par courrier du 3 juillet 2008 en raison du non-respect par l'employeur de ses obligations d'employeur et de formateur et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la rupture du contrat de professionnalisation à durée déterminée l'arrêt retient que si le salarié produit son dossier de formation comportant notamment le référentiel des compétences à acquérir, il n'est pas démontré que la société qui, quant à elle, verse les plannings jour par jour, de la formation de ce dernier, n'a pas rempli ses obligations de formation, et ce d'autant qu'à la date du 3 juillet 2008, l'intéressé n'était en formation que depuis 8 mois sur les 20 mois prévus jusqu'au 31 mai 2009, que le salarié, dont les seules affirmations ne sauraient être probantes, ne fournit aucune pièce justifiant de ses dires selon lesquels il était employé à des tâches étrangères à sa formation, ne bénéficiait pas d'un maître de stage et était " exploité " par la société qui l'aurait " embauché " pour avoir à son service un opérateur en téléphonie à bon compte lui permettant de bénéficier de subventions intéressantes pour sa trésorerie et aurait ainsi détourné la lettre et l'esprit du contrat de professionnalisation ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve de l'exécution de l'obligation de formation qui pèse sur l'employeur, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne la société Télécoms entreprises aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. X....
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a refusé de considérer que le contrat avait été rompu par le fait d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et rejeté les demandes d'indemnités formées par M. X... ;
AUX MOTIFS QU'« il est constant que le contrat liant Freddy X... et la société Telecoms Entreprises est un contrat à durée déterminée comme indiqué précisément sur ledit contrat précité et signé le 22 octobre 2007 ; qu'en vertu de J'article L 1243-1 du code du travail, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure ; que l'article L 1243-2 du même code prévoit une dérogation aux dispositions de l'article L 1243-1 en disposant que le contrat à durée déterminée peut être rompu avant l'échéance du terme à l'initiative du salarié lorsque celui-ci justifie de la conclusion d'un contrat à durée indéterminée Attendu qu'en l'espèce, Freddy X... a, selon les termes du courrier précité adressé le 3 juillet 2008 à son employeur, " pris acte de la rupture de son contrat de travail du fait du non respect (par la société Telecoms Entreprises) de ses obligations d'employeur et de formateur ", en formulant divers griefs ; que lorsqu'un salarié rompt le contrat de travail à durée déterminée et qu'il invoque des manquements de l'employeur, il incombe au juge de vérifier si les faits invoqués sont ou non constitutifs d'une faute grave, laquelle se définit comme celle qui rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'en l'espèce, Freddy X... qui prétend démontrer que son employeur a commis une faute grave, indique qu'il s'est à plusieurs reprises plaint auprès du dirigeant de la société de ce qu'il ne recevait aucune formation en lien avec la maintenance informatique ; que cependant, il ne justifie pas de ce qu'il a effectivement interpellé la société Telecoms Entreprises à plusieurs reprises et qu'il se borne à cet égard à produire le courrier qu'il a adressé le 9 juin 2008, soit plus de sept mois après le début de son contrat de travail, à Monsieur Y..., gérant de la société, par lequel il allègue que les attentes du contrat ne sont pas remplies et que le travail demandé par l'entreprise ne correspond pas à sa future qualification professionnelle, courrier dont il a adressé la copie à l'Inspecteur du travail ; que ce courrier émanant de l'intéressé, ne saurait en lui-même constituer la preuve d'une faute grave de l'employeur ; que ne permettent pas davantage de caractériser une faute grave de l'employeur les courriers adressés le 19 juin 2008 par le contrôleur du travail, d'une part à la société Telecoms Entreprises et, d'autre part, à Freddy X... à la suite du courrier de ce dernier ; qu'en effet, le contrôleur, qui s'est rendu dans l'entreprise le 12 juin 2008, se borne à informer Freddy X... de ce qu'il a adressé à son employeur un courrier lui rappelant ses obligations contractuelles de formation au titre de l'article L 6325-3 du code du travail, tandis qu'il s'adresse à Monsieur Y... dans les termes suivants " il semble que la tâche confiée actuellement à Monsieur X... (employé en contrat de professionnalisation depuis octobre 2007) qui consiste notamment à répondre aux appels téléphoniques de clients pour régler les soucis qu'ils rencontrent avec leurs installations téléphoniques ou aux souhaits de modifier celles-ci ne sont pas en mesure de permettre à l'intéressé d'exploiter et d'approfondir de manière significative les connaissances théoriques qui lui sont dispensées par l'AFTEC dans le cadre de sa formation de " technicien de support en Informatique " " et qu'il demande à l'employeur de " veiller à un plus strict respect de ses engagements de formation en vertu des dispositions de l'article L 6325-3 du code du travail " ; que ce dernier courrier dont les termes comportent, au demeurant, certaines restrictions (" il semble ", " tâche confiée actuellement ", " de manière significative "), ne saurait permettre de caractériser une faute grave de la société au sens de l'article L 1243-1 du code du travail, et ce, d'autant que le contrôleur du travail n'a pas établi de procès-verbal ou engagé de procédure contre la société ; que, contrairement à ce que soutient Freddy X..., le courrier que lui a adressé Monsieur Y... le 30 juin 2008 pour faire suite à son courrier du 9 juin 2008 et à l'entretien consécutif du 12 juin 2008 avec le contrôleur du travail ne saurait constituer une reconnaissance par l'employeur du non respect de ses obligations constitutif d'une faute grave ; qu'en effet, aux termes de ce courrier, Monsieur Y... rappelle avoir proposé " en toute bonne foi " ce contrat en alternance après avoir exposé à l'AFTEC le contenu de ce qu'il pouvait apporter à Freddy X... en terme de formation dans le cadre de son cursus scolaire et fait " aujourd'hui " le constat de l'inadéquation entre les moyens et les objectifs attendus ; que, dans ce courrier, Monsieur Y... évoque même une solution consistant à mettre Freddy X... en rapport avec un autre chef d'entreprise et que la société Telecoms Entreprises justifie avoir effectivement contacté le gérant d'une entreprise susceptible d'embaucher le cas échéant l'intéressé ; que si Freddy X... produit son dossier de formation comportant notamment le référentiel des compétences à acquérir, il n'est pas démontré que la société Telecoms Entreprises qui, quant à elle, verse les plannings jour par jour de la formation de ce dernier, n'a pas rempli ses obligations de formation et ce, d'autant qu'à la date du 3 juillet 2008, l'intéressé n'était en formation que depuis 8 mois sur les 20 mois prévus jusqu'au 31 mai 2009 ; que Freddy X..., dont les seules affirmations ne sauraient être probantes, ne fournit aucune pièce justifiant de ses dires selon lesquels il était employé à des tâches étrangères à sa formation, ne bénéficiait pas d'un maître de stage et était " exploité " par la société Telecoms Entreprises qui l'aurait " embauché pour avoir à son service un opérateur en téléphonie à bon compte lui permettant de bénéficier de subventions intéressantes pour sa trésorerie " et aurait ainsi détourné la lettre et l'esprit du contrat de professionnalisation ; que la cour relève à cet égard que Freddy X... ne produit aucun pièce émanant en particulier du centre de formation AFTEC avec lequel il était en contact étroit puisqu'il y suivait ses cours, qui était, dès lors nécessairement informé de sa situation et qui aurait pu être en mesure, le cas échéant, de corroborer ses dires ; qu'en définitive, il ressort de ce qui vient d'être exposé que Freddy X..., à qui en incombe en l'espèce la charge, ne démontre pas que son employeur a commis une faute grave au sens de l'article L 1243-1 du code du travail ; qu'il a ainsi rompu son contrat de travail de manière anticipée en méconnaissance des dispositions de cet article, étant relevé qu'il ne justifie pas, ni n'allègue même, se trouver dans la situation prévue à l'article L 1243-2 du code du travail ; que, dès lors, le jugement entrepris doit être infirmé et que Freddy X... qui n'était pas fondé, en l'espèce à rompre son contrat de travail, doit être débouté de sa demande d'indemnisation » (arrêt, p. 3-4) ;
ALORS QUE, premièrement, chaque fois que l'employeur, indépendamment des obligations découlant du contrat de travail souscrit l'obligation de dispenser une formation au salarié, il lui incombe d'établir qu'il a satisfait à cette obligation et dans quelles conditions ; qu'en décidant le contraire, pour faire peser la charge de la preuve sur le salarié, les juges du fond ont violé les règles de la charge de la preuve, ensemble l'article 1315 du code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, s'il incombe au salarié alléguant une faute grave à l'encontre de l'employeur d'établir cette faute grave, c'est sur la base des éléments établis par l'employeur, s'agissant de la formation qu'il a dispensée ; que pour avoir statué comme ils l'ont fait, les juges du fond ont à tout le moins violé les articles 1243-1 et L. 6325-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-21546
Date de la décision : 12/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 12 novembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 fév. 2014, pourvoi n°11-21546


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.21546
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