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29/01/2014 | FRANCE | N°12-23597

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 janvier 2014, 12-23597


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 6 juin 2012), rendu en dernier ressort, que M. X... a été engagé en qualité d'agent de service par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier « Le grand Pavois » ; que son contrat a été transféré le 14 juillet 2006 à la société Utile et Agréable qui avait repris le marché de nettoyage de cet ensemble immobilier ; que ce marché a été attribué à la société Kilavtou à compter du 16 mai 201

1 ; que n'ayant pas été repris par cette société et n'étant plus rémunéré depuis l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 6 juin 2012), rendu en dernier ressort, que M. X... a été engagé en qualité d'agent de service par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier « Le grand Pavois » ; que son contrat a été transféré le 14 juillet 2006 à la société Utile et Agréable qui avait repris le marché de nettoyage de cet ensemble immobilier ; que ce marché a été attribué à la société Kilavtou à compter du 16 mai 2011 ; que n'ayant pas été repris par cette société et n'étant plus rémunéré depuis le 16 mai 2011 par l'entreprise sortante, le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 6 juillet 2011, pour obtenir le paiement d'un rappel de salaire ;
Attendu que la société Kilavtou fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de sommes à titre de rappel de salaire, alors, selon le moyen :
1°/ que place l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché et justifie par conséquent son refus de reprendre les salariés qui y travaillaient, l'entreprise sortante qui, malgré les demandes répétées de l'entreprise entrante, ne lui fait parvenir que postérieurement au début du chantier, la liste définitive des salariés transmissibles, sans y joindre ni les contrats de travail des salariés ni les autorisations de travail concernant les salariés étrangers, tous éléments indispensables pour pouvoir vérifier les conditions d'un éventuel transfert du contrat de travail et par suite opérer effectivement une reprise du contrat ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a constaté que la société Utile et Agréable n'avait pas respecté les obligations prévues par la convention collective des entreprises de propreté concernant la reprise du chantier « Le Grand Pavois » en ne transmettant pas à la société Kilavtou les documents sociaux concernant les salariés du chantier dans les délais requis ; que la société Kilavtou rappelait à cet égard que, s'agissant du chantier dont elle était chargée à partir du 16 mai 2011, elle avait, dès le 25 février, demandé à la société Utile et Agréable de lui faire parvenir sous huit jours, la liste du personnel transférable, les contrats de travail, les six derniers bulletins de paie, la dernière fiche d'aptitude médicale, mais que l'entreprise sortante avait attendu le 13 mai 2011 pour envoyer les bulletins de paie à l'exclusion des fiches d'aptitudes et contrats de travail des salariés concernés, et que la société Kilavtou n'avait reçu que le 17 mai une liste définitive de cinq salariés, ne comportant au demeurant toujours ni contrats de travail ni autorisations de travail des salariés de nationalité étrangère ; qu'en condamnant cependant la société Kilavtou pour avoir prétendument usé d'un « moyen illicite » en ne reprenant pas les cinq salariés, au motif que les salariés de l'entreprise sortante connaissaient le responsable de la société Kilavtou qui les avait contactés pour discuter de la reprise du chantier, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, impropres à faire ressortir la possibilité qu'aurait eue la société Kilavtou de reprendre les cinq salariés concernés avant le début du chantier, dans les conditions prévues par les dispositions légales et conventionnelles applicables ; qu'elle a, partant, privé sa décision de base légale au regard de la convention collective des entreprises de propreté, de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire dans le secteur de la propreté et de l'article 1er de l'avenant n° 1 à l'accord du 29 mars 1990 ;
2°/ que la société Kilavtou soutenait de manière circonstanciée devant le conseil de prud'hommes que la carence manifeste de l'entreprise sortante, ne lui ayant jamais fourni les documents nécessaires à la reprise des salariés avant le début du chantier, l'avait contrainte à engager du personnel pour pouvoir exécuter ce chantier, sans pouvoir d'ailleurs dans un premier temps recruter le nombre suffisant de salariés ; qu'elle soulignait que c'était dans cette circonstance que, lorsque deux salariés précédemment employés par la société Utile et Agréable s'étaient par la suite présentés en cours de chantier, elle les avait engagés pour compléter son équipe ; qu'en condamnant cependant la société Kilavtou au titre d'un « moyen illicite », pour n'avoir pas repris tous les salariés de l'entreprise sortante, au motif inopérant qu'elle en avait embauché deux, sans caractériser en quoi cela démontrait que la société Kilavtou, malgré les manquements patents de l'entreprise sortante, aurait été en mesure de reprendre tous ses salariés dans les conditions légales et conventionnelles avant le début de chantier, et sans donc avoir à procéder par ailleurs à des embauches, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la convention collective des entreprises de propreté, de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire dans le secteur de la propreté et de l'article 1er de l'avenant n° 1 à l'accord du 29 mars 1990 ;
Mais attendu qu'un manquement de l'entreprise sortante à son obligation de communiquer à l'entreprise entrante les documents prévus par l'accord ne peut empêcher un changement d'employeur qu'à la condition qu'il mette l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché ; qu'il appartient dans ce cas au juge d'apprécier si l'éventuelle insuffisance des éléments fournis rendait impossible la reprise effective du marché ;
Et attendu que le conseil de prud'hommes qui a constaté que le salarié connaissait le responsable de la société entrante qui avait pris préalablement contact avec l'intéressé afin de discuter des conditions de reprise du chantier, a fait ressortir que cette société ne s'était pas trouvée dans l'impossibilité d'en organiser la reprise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Kilavtou aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Kilavtou
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la Sarl Kilavtou à payer à M. X... les sommes de 2.172,05 € à titre de rappel de salaires et 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et à lui remettre les bulletins de paie conformes à la décision ;
AUX MOTIFS QUE la société Utile et Agréable n'a pas respecté l'ensemble des obligations telles que prévues par la convention collective des entreprises de propreté concernant la reprise du chantier « Le Grand Pavois » en ne transmettant pas à la Sarl Kilavtou les documents des salariés du chantier dans les temps voulus ; que toutefois, les manquements de la société utile et Agréable ne peuvent justifier le refus de la Sarl Kilavtou de reprendre l'ensemble des salariés du chantier que s'ils la mettent dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché ; qu'il appartient au juge d'apprécier dans quelle mesure les conséquences des retards de transmission des documents ont empêché la reprise effective du marché par la Sarl Kilavtou ; qu'il ressort des débats et de l'expression des salariés à la barre, lesquels n'ont aucun intérêt que ce soit une société plus qu'une autre qui reprenne leur contrat de travail, qu'ils connaissent le responsable de la Sarl Kilavtou lequel avait préalablement pris contact avec eux afin de discuter des conditions de la reprise du chantier ; que contre toute attente, la société entrante a par la suite, sur ce chantier, procédé à l'embauche de deux des cinq salariés avec reprise de l'ancienneté initiale ; qu'en procédant ainsi, elle s'est cru autorisée à reprendre partiellement le contrat en maintenant deux salariés et en excluant trois autres ; que ce moyen est illicite ; qu'il y a donc lieu de condamner la Sarl Kilavtou à verser l'ensemble des salaires de M. X... pour un montant de 2.172,05 ¿ et de délivrer les bulletins de paie correspondant ;
1) ALORS QUE place l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché et justifie par conséquent son refus de reprendre les salariés qui y travaillaient, l'entreprise sortante qui, malgré les demandes répétées de l'entreprise entrante, ne lui fait parvenir que postérieurement au début du chantier, la liste définitive des salariés transmissibles, sans y joindre ni les contrats de travail des salariés ni les autorisations de travail concernant les salariés étrangers, tous éléments indispensables pour pouvoir vérifier les conditions d'un éventuel transfert du contrat de travail et par suite opérer effectivement une reprise du contrat ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a constaté que la société Utile et Agréable n'avait pas respecté les obligations prévues par la convention collective des entreprises de propreté concernant la reprise du chantier « Le Grand Pavois » en ne transmettant pas à la Sarl Kilavtou les documents sociaux concernant les salariés du chantier dans les délais requis ; que la société Kilavtou rappelait à cet égard que, s'agissant du chantier dont elle était chargée à partir du 16 mai 2011, elle avait, dès le 25 février, demandé à la société Utile et Agréable de lui faire parvenir sous huit jours, la liste du personnel transférable, les contrats de travail, les six derniers bulletins de paie, la dernière fiche d'aptitude médicale, mais que l'entreprise sortante avait attendu le 13 mai 2011 pour envoyer les bulletins de paie à l'exclusion des fiches d'aptitudes et contrats de travail des salariés concernés, et que la société Kilavtou n'avait reçu que le 17 mai une liste définitive de 5 salariés, ne comportant au demeurant toujours ni contrats de travail ni autorisations de travail des salariés de nationalité étrangère ; qu'en condamnant cependant la société Kilavtou pour avoir prétendument usé d'un « moyen illicite » en ne reprenant pas les cinq salariés, au motif que les salariés de l'entreprise sortante connaissaient le responsable de la Sarl Kilavtou qui les avait contactés pour discuter de la reprise du chantier, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, impropres à faire ressortir la possibilité qu'aurait eue la société Kilavtou de reprendre les 5 salariés concernés avant le début du chantier, dans les conditions prévues par les dispositions légales et conventionnelles applicables ; qu'elle a, partant, privé sa décision de base légale au regard de la Convention collective des entreprises de propreté, de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire dans le secteur de la propreté et de l'article 1er de l'avenant n° 1 à l'accord du 29 mars 1990 ;
2°) ALORS QUE la société Kilavtou soutenait de manière circonstanciée devant le conseil de prud'hommes que la carence manifeste de l'entreprise sortante, ne lui ayant jamais fourni les documents nécessaires à la reprise des salariés avant le début du chantier, l'avait contrainte à engager du personnel pour pouvoir exécuter ce chantier, sans pouvoir d'ailleurs dans un premier temps recruter le nombre suffisant de salariés ; qu'elle soulignait que c'était dans cette circonstance que, lorsque deux salariés précédemment employés par la société Utile et Agréable s'étaient par la suite présentés en cours de chantier, elle les avait engagés pour compléter son équipe ; qu'en condamnant cependant la société Kilavtou au titre d'un « moyen illicite », pour n'avoir pas repris tous les salariés de l'entreprise sortante, au motif inopérant qu'elle en avait embauché deux, sans caractériser en quoi cela démontrait que la société Kilavtou, malgré les manquements patents de l'entreprise sortante, aurait été en mesure de reprendre tous ses salariés dans les conditions légales et conventionnelles avant le début de chantier, et sans donc avoir à procéder par ailleurs à des embauches, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la Convention collective des entreprises de propreté, de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire dans le secteur de la propreté et de l'article 1er de l'avenant n° 1 à l'accord du 29 mars 1990.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-23597
Date de la décision : 29/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 06 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jan. 2014, pourvoi n°12-23597


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.23597
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