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15/01/2014 | FRANCE | N°12-26650

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-26650


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été embauché par la société Rieffel bâtiment en qualité de grutier, par contrat à durée indéterminée en date du 20 mai 1999 ; qu'il a été victime d'un accident de trajet en se rendant sur un chantier le 22 avril 2008 et a subi un arrêt de travail jusqu'au 2 mars 2009, à l'issue duquel le médecin du travail l'a déclaré apte au poste de grutier exclusivement et inapte au poste de coffreur brancheur ; que, par ordonnance de référé du 19 octobre 2009, le c

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été embauché par la société Rieffel bâtiment en qualité de grutier, par contrat à durée indéterminée en date du 20 mai 1999 ; qu'il a été victime d'un accident de trajet en se rendant sur un chantier le 22 avril 2008 et a subi un arrêt de travail jusqu'au 2 mars 2009, à l'issue duquel le médecin du travail l'a déclaré apte au poste de grutier exclusivement et inapte au poste de coffreur brancheur ; que, par ordonnance de référé du 19 octobre 2009, le conseil de prud'hommes a ordonné la réintégration du salarié à son poste de travail en qualité de grutier et ce, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard ; que, par lettre du 24 décembre 2009, l'employeur lui a notifié son licenciement pour motif économique ; que, par arrêt du 31 mars 2011, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, saisie de l'appel de l'ordonnance du 19 octobre 2009, a, constatant le licenciement intervenu, dit n'y avoir lieu à référé ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 2411-1 16° , L. 2411-3 et L. 2411-18 du code du travail ;
Attendu que, pour dire le licenciement nul en l'absence d'autorisation administrative de licenciement, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que M. X... avait la qualité de conseiller du salarié lorsque la procédure de licenciement pour motif économique a été engagée et notamment au jour de l' entretien préalable qui s'est tenu le 27 novembre 2009 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 2411-1 16° du code du travail et les articles L. 2411-3 et L. 2411-18 du même code doivent être interprétés en ce sens que le salarié protégé n'est pas en droit de se prévaloir de la protection résultant d'un mandat extérieur à l'entreprise lorsqu'il est établi qu'il n'en a pas informé son employeur au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, et qu'il résultait de ses constatations que le salarié n'avait jamais informé son employeur de son statut de conseiller du salarié qu'il n'avait invoqué qu'en cause d'appel par conclusions du 15 novembre 2011, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour liquider l'astreinte prononcée par l'ordonnance de référé du conseil de prud'hommes du 19 octobre 2009, l'arrêt retient que, en l'absence de toute cause étrangère expliquant l'inexécution de l'obligation de réintégration du salarié, la cour liquide l'astreinte définitive pour la période du 6 novembre 2009, date du délai passé de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance de référé, au 16 février 2010, date effective de la rupture du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel du 31 mars 2011, statuant sur appel de l'ordonnance de référé du 19 octobre 2009, avait dit n'y avoir lieu à référé, ce dont il résultait que le prononcé de l'astreinte avait été anéanti, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a annulé le jugement déféré du 17 novembre 2010 rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre, l'arrêt rendu le 29 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour la société Rieffel bâtiment
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR, annulant le jugement entrepris et statuant à nouveau, constaté la nullité du licenciement notifié à Jacky X... par la SARL Rieffel Bâtiment, et condamné la SARL Rieffel Bâtiment à payer à Jacky X... les sommes de 32 091,51 euros à titre de violation du statut protecteur et de 25 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la somme de 10 300,00 euros à titre de liquidation d'astreinte,
AUX MOTIFS QUE De par l'effet dévolutif de l'appel, la cour, nonobstant l'annulation du jugement entrepris, est saisie de l'ensemble des prétentions des parties. Il n'est pas contesté par l'appelante que Jacky X... avait la qualité de conseiller du salarié lorsque la procédure de licenciement pour motif économique a été engagée et notamment au jour de l'entretien préalable, qui s'est tenu le 27 novembre 2009. Par conséquent, son licenciement était soumis à la procédure d'autorisation administrative applicable aux salariés protégés dont fait partie le conseiller du salarié et ne pouvait intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail, et ce, même en cas de motif économique invoqué par l'employeur. La procédure spéciale de licenciement dont bénéficient les salariés protégés est d'ordre public absolu et le licenciement notifié en violation du statut protecteur est nul de plein droit. En l'espèce, la SARL Rieffel Bâtiment n'allègue pas avoir demandé, ni encore moins obtenu, l'autorisation de l'inspecteur du travail de licencier Jacky X... et dès lors, sans qu'il soit besoin de rechercher si l'employeur a ou non respecté son obligation de reclassement puis de vérifier la réalité du motif économique invoqué, la cour, constate la nullité du licenciement de Jacky X..., notifié par courrier daté du 14 décembre 2009 et prenant effet au 16 février 2010, du fait de la violation de son statut protecteur attaché à la qualité de conseiller du salarié dont il bénéficiait depuis le 1° juillet 2008. En conséquence, l'intimé, qui ne sollicite pas sa réintégration, a droit à une indemnisation pour violation de son statut protecteur qui se cumule avec la réparation du préjudice résultant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L'indemnité pour violation du statut protecteur attaché au conseiller du salarié doit être égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu'à la fin de la période triennale de révision de la liste en cours au jour de son éviction ou pendant une durée qui ne peut être inférieure à la période de 12 mois prévue à l'article L 2411-3 du code du travail. Le licenciement a été effectif à l'issue du préavis dont Jacky X... a été dispensé et qui lui a été payé, soit jusqu'au 16 février 2010. L'intimé avait été nommé conseiller du salarié jusqu'au 30 juin 2011 et son dernier salaire brut s'élevait à 1 944,94 euros. La cour fixe donc à la somme de 1 944,94 € x 16,5 mois = 32 091,51 € l'indemnité pour violation du statut protecteur. Jacky X... peut également prétendre à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite de son licenciement au moins égale à six mois de salaire. Au vu de son ancienneté et des pièces du dossier, la cour évalue à la somme de 25 000,00 € l'indemnité allouée en réparation de ce préjudice. Aux termes de l'article 1315 du code civil, il appartient au débiteur condamné sous astreinte, à une obligation de faire, de rapporter la preuve de l'exécution conforme dans le délai imparti. Et l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que « le montant de l'astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. » L'appelante ne conteste pas ne pas avoir réintégré Jacky X... à son poste de travail en qualité de grutier ordonné en référé par le conseil de prud'hommes de Saint Pierre le 19 octobre 2009, et ce sous astreinte de 100,00 € par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision. Elle n'apporte aucune justification au non-respect de cette décision de justice et n'allègue aucune difficulté particulière qui l'aurait empêchée de l'exécuter. Au contraire, d'une part cette demande de réintégration est devenue sans objet du fait du licenciement, ainsi que l'a constatée la cour d'appel dans son arrêt du 31 mars 2011, qui a observé tout d'abord que les premiers juges avaient exactement estimé qu'il fallait faire droit à cette demande de réintégration, d'autre part, ce licenciement est nul du fait de la violation par le débiteur du statut protecteur du salarié. Ainsi, en l'absence de toute cause étrangère, expliquant l'inexécution de l'obligation de réintégration de Jacky X..., la cour liquide l'astreinte définitive pour la période du 6 novembre 2009, date du délai passé de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance de référé (21 octobre 2009), au 16 février 2010, date effective de la rupture du contrat de travail, à la somme de 100 € x 103 jours = 10 300 € (arrêt p 6,7) ;
1°) ALORS QUE le salarié est tenu à une obligation de loyauté à l'égard de son employeur, que les fonctions de conseiller du salarié s'exerçant à l'extérieur de l'entreprise, M. Jacky X..., lequel au surplus se trouvait en arrêt de travail prolongé, avait l'obligation d'aviser son employeur de sa désignation à de telles fonctions intervenue par arrêté préfectoral du 18 juin 2008 à compter du 1° juillet 2008, qu'en faisant grief à l'employeur de ne pas alléguer d'avoir demandé, ni encore moins obtenu l'autorisation de l'inspecteur du travail pour prononcer la nullité du licenciement de M. X..., sans rechercher si M. Jacky X... rapportait la preuve qu'il avait informé l'employeur de sa désignation aux fonctions de conseiller du salarié au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, l'arrêt attaqué a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2411-21, L 2411-1 16° , et L 1232-14 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil,
2°) ALORS QUE il était acquis aux débats que M. Jacky X..., en raison de son accident de trajet du 22 avril 2008, à la suite duquel la caisse de sécurité sociale lui avait reconnu une incapacité permanente de 15%, n'a pas été convoqué à la visite de reprise de la médecine du travail avant le 2 mars 2009, que la suspension prolongée du contrat de travail de M. X... en raison de son état de santé faisant donc obstacle à ce qu'il soit désigné en qualité de conseiller du salarié par l'arrêté préfectoral du 18 juin 2008, que cet arrêt de travail prolongé faisait également obstacle à l'exercice de son mandat de conseiller du salarié, qu'en s'abstenant de rechercher si M. Jacky X... avait informé la DDTE (DIECCTE) de la suspension prolongée de son contrat de travail en raison de l'accident dont il avait été victime, pour opposer à l'employeur la qualité de salarié protégé de M. Jacky X... issue de l'arrêté préfectoral du 18 juin 2008 et invalider en conséquence le licenciement prononcé pour cause économique le 14 décembre 2009, l'arrêt attaqué a violé les articles L 2411-21, L 2411-1 16° , et L 1232-14 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est encore fait grief à la décision attaquée d'AVOIR, annulant le jugement entrepris et statuant à nouveau, condamné la SARL Rieffel Bâtiment à payer à Jacky X... la somme de 10 300,00 euros à titre de liquidation d'astreinte,
AUX MOTIFS QUE Aux termes de l'article 1315 du code civil, il appartient au débiteur condamné sous astreinte, à une obligation de faire, de rapporter la preuve de l'exécution conforme dans le délai imparti. Et l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que « le montant de l'astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. » L'appelante ne conteste pas ne pas avoir réintégré Jacky X... à son poste de travail en qualité de grutier ordonné en référé par le conseil de prud'hommes de Saint Pierre le 19 octobre 2009, et ce sous astreinte de 100,00 € par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision. Elle n'apporte aucune justification au non-respect de cette décision de justice et n'allègue aucune difficulté particulière qui l'aurait empêchée de l'exécuter. Au contraire, d'une part cette demande de réintégration est devenue sans objet du fait du licenciement, ainsi que l'a constaté la cour d'appel dans son arrêt du 31 mars 2011, qui a observé tout d'abord que les premiers juges avaient exactement estimé qu'il fallait faire droit à cette demande de réintégration, d'autre part, ce licenciement est nul du fait de la violation par le débiteur du statut protecteur du salarié. Ainsi, en l'absence de toute cause étrangère, expliquant l'inexécution de l'obligation de réintégration de Jacky X..., la cour liquide l'astreinte définitive pour la période du 6 novembre 2009, date du délai passé de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance de référé (21 octobre 2009), au 16 février 2010, date effective de la rupture du contrat de travail, à la somme de 100 € x 103 jours= 10 300 €.
ALORS 1°) QUE l'astreinte même définitive est liquidée par le juge de l'exécution sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir, que l'arrêt attaqué qui n'était saisi que de la contestation du licenciement économique de M. X... n'était pas compétent pour liquider à la demande de M. X... l'astreinte ordonnée en référé pour garantir sa réintégration et devait soulever d'office son incompétence, qu'en estimant qu'il lui appartient dans le cadre de l'actuelle procédure de contestation du licenciement économique de statuer sur cette créance litigieuse de liquidation d'astreinte, l'arrêt attaqué a violé l'article 35 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991.
ALORS 2°) QUE l'astreinte est une mesure accessoire à la condamnation qu'elle assortit, qu'en cas d'annulation de la décision sur le fondement de laquelle l'astreinte avait été prononcée, cette annulation entraîne de plein droit l'anéantissement de l'astreinte, que l'ordonnance de référé du 19 octobre 2009, qui avait ordonné la réintégration du salarié sous astreinte, ayant été réformée par arrêt du 31 mars 2011 qui a dit n'y avoir lieu à référé, l'arrêt attaqué qui a condamné la société Rieffel Bâtiment à payer à M. X... la somme de 10 300 euros au titre de la liquidation de l'astreinte décidée par l'ordonnance de référé du 19 octobre 2009 réformée par arrêt du 31 mars 2011, a violé l'article 33 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-26650
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 29 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2014, pourvoi n°12-26650


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lesourd, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.26650
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