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15/01/2014 | FRANCE | N°12-23575

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-23575


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 août 2001 par la société Le Fournil biterrois en qualité de chauffeur livreur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des heures de nuit ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3121-1 du code du travail ;
Attendu que constitue un travail effectif au sens de ce texte le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doi

t se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 août 2001 par la société Le Fournil biterrois en qualité de chauffeur livreur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des heures de nuit ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3121-1 du code du travail ;
Attendu que constitue un travail effectif au sens de ce texte le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;
Attendu que pour décider que le temps passé par le salarié dans le camion équipé d'une couchette entre deux livraisons n'était pas du temps de travail effectif, l'arrêt, après avoir relevé qu'il résultait des attestations produites que les frais d'hôtel des chauffeurs n'étaient remboursés que lors d'un déplacement sans un des camions équipés de couchette, et que, pour ses déplacements à Bordeaux, le salarié devait dormir dans le véhicule qui lui était affecté et surveiller le frigo, retient que ces attestations ne permettent pas de caractériser que le temps passé par l'intéressé dans la couchette de son camion correspond à du temps pendant lequel il ne pouvait vaquer à ses occupations personnelles et devait rester à la disposition de l'employeur et se conformer à ses directives ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié devait surveiller son véhicule, de sorte qu'il ne disposait, pendant ce temps, d'aucune liberté pour vaquer à des occupations personnelles et restait à la disposition permanente de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que pour limiter à une certaine somme le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des heures de nuit, l'arrêt retient que le salarié ne produit pas d'éléments de nature à étayer sa demande lorsqu'il verse aux débats un décompte précisant jour par jour du 8 juillet 2002 au 29 décembre 2008 le nombre d'heures de travail sans préciser les horaires de début et de fin, et, pour les heures de nuit, un décompte indiquant mois par mois de novembre 2002 à décembre 2008 le nombre d'heures qu'il aurait ainsi réalisées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait produit un décompte des heures qu'il prétendait avoir réalisées auquel l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande en requalification du temps de couchette en temps de travail effectif et limite à certaines sommes le rappel de salaire dû au titre des heures supplémentaires, des heures de nuit et des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 6 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Le Fournil biterrois aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Le Fournil biterrois à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté un salarié de sa demande tendant à l'intégration dans le temps de travail effectif du temps de couchette et de sa demande de rappel de salaire consécutive.
AUX MOTIFS QUE Monsieur François X... demande que soit décompté comme temps de travail effectif le temps passé dans le camion équipé de la couchette entre deux livraisons dans la mesure où il ne pouvait vaquer à ses occupations personnelles ; que les photographies de camion et les attestations de M. Y... (pièces n° 16 et 44) selon laquelle les frais d'hôtel des chauffeurs n'étaient remboursés que "lors d'un déplacement sans un des camions équipés de couchette" et que "pour ses déplacement à Bordeaux il dort dans le véhicule qui lui est affecté et surveille le frigo" ne permettent nullement de caractériser que le temps passé par M. François X... dans la couchette de son camion correspond à du temps pendant lequel il ne pouvait vaquer à ses occupations personnelles et devait rester à la disposition de l'employeur et se conformer à ses directives ; que M. François X... se prévalant d'ailleurs d'une jurisprudence où ordre avait été donné en ce sens au camionneur, ordre inexistant en l'espèce ; que dès lors cette demande présentée par M. François X... doit être rejetée.
ALORS QUE la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, peu important que son camion soit équipé d'une couchette, Monsieur François X... était tenu de surveiller son véhicule ; qu'en affirmant que ce temps ne constituait pas un temps de travail effectif, la Cour d'appel a violé l'article L.3121-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 9.794,53 euros et 979,45 euros les sommes dues au salarié au titre des heures supplémentaires et congés payés y afférents et à 54,23 euros et 5,42 euros les sommes dues au salarié au titre des heures de nuit et congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QU'il résulte de l'article L 3171 -4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires réalisés par le salarié au regard notamment des dispositions des articles D. 3171-2 et D. 3171-8 dudit Code ; qu'à titre liminaire il convient de rappeler que l'horaire de travail de M. François X... ne se limite pas aux seuls temps de conduite, réalité d'ailleurs reconnue par l'employeur lors de la réunion des délégués du personnel de septembre 2007 (cf pièce n° 21), en parfaite cohérence avec le fait que le contrat de travail précise que les fonctions principales sont celles de chauffeur livreur mais qu'elles pourront s'étendre à toutes manutentions nécessaires dans l'entreprise et que le salarié sera polyvalent, notamment en poste de manutention ; que d'autre part M. François X... qui dispose d'éléments de preuve journaliers constitués des disques de ses tournées et des feuilles de tournée émargées par son responsable et après avoir bénéficié d'une mesure de réouverture des débats pour préciser ses réclamations, verse aux débats un décompte précisant jour par jour du 8 juillet 2002 au 29 décembre 2008 le nombre d'heures de travail (sans préciser les horaires de début et de fin) et un décompte en euros des heures supplémentaires hebdomadaire qui seraient dues pour la même période, décompte portant mention de 3 5 heures payés par semaine sur la base de l'affirmation contenue en page 8/19 de ses conclusions selon laquelle " tous les bulletins de paie du concluant, sans exception, font état de 151.67 heures par mois et en face de la case heures supplémentaires, il est systématiquement noté 0 le simple examen des bulletins de paie fait apparaître qu'en août 2005 M. François X... est payé pour 165,67 heures, 197,67 heures en juillet 2005, 235,67 en octobre 2002, 283,67 heures en octobre 2003 158,67 heures en mars 2005,197,67 heures en juillet 2005,165,67 heures en août 2005, 153,17 en décembre 2005 ; que de tous ces éléments il résulte que M. François X... n'étaye pas sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre utilement sur sa demande chiffrée ; que pour autant dans la mesure où ce dernier reconnaît devoir : - pour l'année 2002,127,5 heures à 125% pour les 8 premières heures, soit 1.139,53 ¿, 115,4 heures à 150%, soit 1.237,66 ¿, 145,89 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50% pour les heures à compter de la 41ème, soit 521,55 €, 449,66 € d'heures supplémentaires au-delà du contingent conventionnel, - pour l'année 2003,33,58 heures à 125% pour les 8 premières heures, soit 313, 88 €, 19,83 heures à 150%, soit 222,19 €, 83,88 euros pour 22,46 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50%, - pour l'année 2004, 79,62 heures à 125% pour les 8 premières heures, soit 771,63 €, 6,78 heures à 150%, soit 77,69 €, 49,76 € pour 12,97 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50%, - pour l'année 2005 114,21 heures à 125% pour les 8 premières heures, soit 1.145,47 €, 26,44 heures à 150%, soit 318,47 € et 188,82 6 pour 47,03 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50%, - pour l'année 2006 131,59 heures à 25% pour les 8 premières heures, soit 1.348,28 €, 6,89 heures à 50%, soit 85,35 €, 85.56 € pour 20,76 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50%, - pour l'année 2007 136,73 heures à 125% pour les 8 premières heures, soit 1.428,80 €,14,14 heures à 150% soit 178,36 € et 137,44 € pour 32,77 heures ouvrant droit au repos compensateur à 50%, - pour l'année 2008 1 heure à 25% pour les 8 premières heures, soit 10,55 €, il reste du à M. François X... une somme globale de 9.794,53 euros, outre 979,45 euros de congés payés afférents.
ET AUX MOTIFS QU'il résulte de l'article L.3171-4 du Code du travail, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires réalisés par le salarié au regard notamment des dispositions des articles D. 3171-2 et D. 3171-8 dudit Code ; que d'autre part M. François X... qui dispose d'éléments de preuve journaliers constitués des disques de ses tournées et des feuilles de tournée émargées par son responsable et après avoir bénéficié d'une mesure de réouverture des débats pour préciser ses réclamations, verse aux débats un décompte; (pièce n° 50) indiquant mois par mois de novembre 2002 à décembre 2008 le nombre d'heures de nuit qu'il aurait réalisées ; que ce faisant Monsieur François X... n'étaye pas sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés permettant à l'employeur de répondre utilement ; que pourtant, dans la mesure où ce dernier reconnait devoir pour l'année 2002, 54,23 euros pour 30,34 heures, il convient de faire droit à cette demande à hauteur de cette dernière somme, outre 5,42 euros de congés payés afférents.
ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en retenant que le salarié n'étayait pas sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour limiter le montant du rappel de salaire du au salarié au titre des heures supplémentaires au seul montant que l'employeur reconnaissait devoir, après avoir pourtant constaté que le salarié produisait un décompte journalier récapitulatif des heures supplémentaires et des sommes dues à ce titre pour l'ensemble de la période concernée, ce qui étayait amplement sa demande, la Cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-23575
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 06 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2014, pourvoi n°12-23575


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.23575
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