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20/11/2013 | FRANCE | N°12-25958

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2013, 12-25958


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 juillet 2012) que M. X... a été engagé le 1er juillet 2002, en qualité de consultant par la société Consulting, devenue Vision IT group qui exerce une activité de conseil en technologie de l'information auprès des banques et des compagnies d'assurance ; que, le 25 juin 2009, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que, le 3 septembre 2010, il a pris acte de la rupture de co

ntrat de travail aux torts de l'employeur, reprochant à celui-ci de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 juillet 2012) que M. X... a été engagé le 1er juillet 2002, en qualité de consultant par la société Consulting, devenue Vision IT group qui exerce une activité de conseil en technologie de l'information auprès des banques et des compagnies d'assurance ; que, le 25 juin 2009, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que, le 3 septembre 2010, il a pris acte de la rupture de contrat de travail aux torts de l'employeur, reprochant à celui-ci de l'avoir évincé de son poste de directeur aux offres et services ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que cette prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'allouer au salarié diverses indemnités, alors, selon le moyen :
1°/ que seul, un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles peut justifier la prise d'acte de la rupture par le salarié ; que le pouvoir de direction et de l'employeur lui permet en principe de modifier les affectations des salariés en fonction de l'intérêt de l'entreprise ; que seul, un abus de ce pouvoir peut justifier la rupture ; que dès lors, la cour d'appel, qui avait constaté que la nomination de M. X... au poste de directeur des offres de service n'avait encore fait l'objet d'aucun avenant au moment où l'employeur y avait renoncé, n'a pas caractérisé l'abus de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que de même, le fait d'avoir affecté, au mois de mars 2010, M. X... à un projet autre que celui qu'il pilotait depuis deux ans, relevait du pouvoir de direction de l'employeur ; que la cour d'appel n'ayant pas caractérisé l'abus de ce pouvoir, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ qu'en tout état de cause, l'employeur faisait valoir que l'affectation de M. X... à un autre projet que celui piloté pour la société EDF avait été rendu nécessaire par les exigences de cette société en matière de référencement ; que la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer les écritures d'appel, énoncer que l'employeur n'avait fourni aucune explication sur ce point ; qu'elle a ainsi violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé, hors toute dénaturation, que le salarié avait été nommé en qualité de directeur aux offres et services avant que ces fonctions ne lui soient ensuite retirées sans justification et qu'il avait par ailleurs été remplacé, sans explication, dans la responsabilité d'un projet qu'il dirigeait depuis plus de deux ans, la cour d'appel a pu décider que ces manquements de l'employeur étaient d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte de la rupture par le salarié aux torts de l'employeur ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Vision IT group aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Vision IT group
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la prise d'acte de la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la société exposante à payer à M. X... diverses sommes ;
AUX MOTIFS QUE lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et qu'ultérieurement, il prend acte de la rupture de son contrat, l'action en résiliation devient sans objet et le juge doit fonder sa décision sur les manquements de l'employeur invoqués par le salarié tant à l'appui de la demande de résiliation devenue sans objet, qu'à l'appui de la prise d'acte ; QU'en l'espèce, les manquements dénoncés par M. X... dans le cadre de la saisine du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 25 juin 2009 et de sa prise d'acte de rupture du contrat par lettre du 3 septembre 2010, s'articulent autour de 2 séries de motifs concernant d'une part son éviction du poste de directeur aux offres et services en mai 2009 et d'autre part son retrait en juin 2010 du projet EDF qu'il pilotait depuis mars 2008 ; QUE s'agissant de l'éviction du poste de directeur aux offres et services, la société Vision it group soutient que M. X... n'avait pas été nommé à ce poste mais qu'il avait seulement été pressenti à un poste qui en définitive n'a pas été crée ; QUE les pièces versées aux débats montrent au contraire que la constitution de la nouvelle équipe de direction a été annoncée par le directeur général de la société dès le mois d'octobre 2008 ; QU'il convient en effet de relever que si aucun avenant au contrat de travail n'avait été formalisé par la société, en revanche le courriel en date du 7 octobre 2009 de M. Eric Y... Directeur Général, annonce personnellement la nomination de M. X... à ce poste spécifique, invitant les destinataires du courriel à la présentation de " ses futures responsabilités à l'heure du thé ", ce qui donne à cette nomination une publicité effective ; QU'en outre, la présentation publique de l'organigramme de la nouvelle direction dans laquelle M. X... figurait comme directeur des offres et services, constitue un élément supplémentaire d'effectivité de sa nomination ; QUE si la société fait valoir qu'il s'agissait d'un simple projet, aucune mention ne figure à ce titre dans le document présenté en interne, et l'organigramme diffusé en juin 2009 constitue le même document que celui présenté en octobre 2008, seul le nom de M. X... ayant disparu, tout en maintenant le poste opérationnel, alors que les autres 3 directeurs restaient identifiés sur les postes de DRH, directeur commercial, le DAF ; QUE la fabrication de cartes de visite faisant figurer M. X... en qualité de directeur des offres et services, constitue également un élément de preuve supplémentaire de l'effectivité de la nomination ; QUE la société soutient encore que la nouvelle direction n'est devenue opérationnelle qu'en mai 2009, alors qu'il apparaît au contraire qu'entre octobre 2008 et mai 2009, les directeurs se réunissaient régulièrement au sein de comités de direction pout préparer la mise en oeuvre des orientations et des documents de travail devant être utilisés dans le cadre de ces orientations ; QUE cette participation confirme ainsi l'occupation du poste par M. X... ; QUE le conseil de prud'hommes a déduit de tous ces éléments un manque de tact et de déontologie de l'employeur justifiant une indemnité au seul titre du préjudice moral, alors que la société qui a décidé brutalement et unilatéralement de retirer M. X... de l'organigramme en mai 2009, sans invoquer aucune faute à l'encontre de celui-ci, a manqué à ses obligations contractuelles dans l'exécution du contrat de travail ; QUE les pièces produites révèlent que M. Eric Y... a été remplacé par Philippe Z... à compter du 1er janvier 2009 au poste de directeur général, ce changement étant susceptible de constituer l'une des causes dans la décision de retirer à M. X... le poste qui lui avait été confié, cette décision ne lui étant pas opposable, en raison des motifs précédemment exposés ;
QUE par ailleurs, il convient de constater qu'à la suite de la saisine du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 25 juin 2009 par M. X... de l'action en résiliation de son contrat, celui-ci est devenu destinataire dans le courant du deuxième semestre 2009 de courriels émanant du directeur général et des autres directeurs, qualifiés de mails de clarification alors qu'il s'agissait de véritables rappels à l'ordre révélant une suspicion des membres de la direction à l'égard de M. X... ; QUE le 19 mai 2010, celui-ci a finalement été remplacé par M. Frank A..., sur le projet EDF qu'il pilotait depuis mars 2008, sans aucune explication, la société se bornant à indiquer dans le cadre de l'instance qu'il lui a été confié d'autres projets importants, cet argument ne lui étant pas opposable pour lui retirer la responsabilité du projet qu'il dirigeait depuis plus de 2 ans ;
QU'au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparait que les manquements invoqués par M. X... dans le cadre de la saisine du conseil de prud'hommes et de sa prise d'acte de rupture du 3 septembre 2010, étaient réels ; QUE par suite, il convient de faire droit à ses demandes, la prise d'acte de la rupture devant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle el sérieuse.
1- ALORS QUE seul, un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles peut justifier la prise d'acte de la rupture par le salarié ; que le pouvoir de direction et de l'employeur lui permet en principe de modifier les affectations des salariés en fonction de l'intérêt de l'entreprise ; que seul, un abus de ce pouvoir peut justifier la rupture ; que dès lors, la cour d'appel, qui avait constaté que la nomination de M. X... au poste de directeur des offres de service n'avait encore fait l'objet d'aucun avenant au moment où l'employeur y avait renoncé, n'a pas caractérisé l'abus de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2- ALORS QUE de même, le fait d'avoir affecté, au mois de mars 2010, M. X... à un projet autre que celui qu'il pilotait depuis deux ans, relevait du pouvoir de direction de l'employeur ; que la cour d'appel n'ayant pas caractérisé l'abus de ce pouvoir, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3- ET ALORS QU'en tout état de cause, l'employeur faisait valoir que l'affectation de M. X... à un autre projet que celui piloté pour la société EDF avait été rendu nécessaire par les exigences de cette société en matière de référencement ; que la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer les écritures d'appel, énoncer que l'employeur n'avait fourni aucune explication sur ce point ; qu'elle a ainsi violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-25958
Date de la décision : 20/11/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2013, pourvoi n°12-25958


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.25958
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