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09/10/2013 | FRANCE | N°12-21807

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 octobre 2013, 12-21807


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 2 février 2010 par la société Impérial palace en qualité de responsable du développement marketing casino ; que le salarié a été intégré dans les plannings des membres du comité de direction, son employeur lui imposant des tâches d'encadrement des activités de la salle de jeux soit le matin, soit en journée, soit la nuit ; qu'e

stimant que l'employeur avait unilatéralement modifié son contrat de travail, le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 2 février 2010 par la société Impérial palace en qualité de responsable du développement marketing casino ; que le salarié a été intégré dans les plannings des membres du comité de direction, son employeur lui imposant des tâches d'encadrement des activités de la salle de jeux soit le matin, soit en journée, soit la nuit ; qu'estimant que l'employeur avait unilatéralement modifié son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la résiliation de son contrat de travail ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que le contrat de travail du salarié stipule qu'il exercerait des fonctions de membre du comité de direction ; que des horaires de nuit sont inhérents à cet emploi ; que l'article 35.3 de la convention collective nationale des casinos du 29 mars 2002 prévoit que le travail de nuit constitue un mode habituel de travail compte tenu de la spécificité de l'activité des entreprises de la branche ; que le salarié n'établit pas que l'employeur aurait manqué à ses obligations contractuelles ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit constitue, nonobstant toute clause contractuelle ou conventionnelle contraire, une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Impérial palace aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Impérial palace à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... Belkacem de sa demande de résolution judiciaire de son contrat de travail aux torts de la SA Impérial Palace ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE par application de l'article 1184 du code civil, le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail si son employeur ne satisfait pas à ses engagements contractuels ; que les manquements invoqués par le salarié doivent présenter un caractère de gravité suffisant ; que Belkacem X... affirme que la résolution judiciaire du contrat est justifiée compte tenu de la modification unilatérale de ses fonctions par son employeur qui, à compter de juin 2010, l'a affecté à une fonction d'encadrement des jeux de nuit qui n'était pas prévue à son contrat de travail, la fonction de MCD n'étant pas un emploi de la convention collective des casinos mais d'une obligation créée par la réglementation qui exige que dans les salles de jeux, des MCD puissent remplacer le directeur ; que le contrat de travail de Belkacem X... versé aux débats prévoit notamment en son article 1er intitulé « Engagement et fonctions » : « monsieur X... est engagé en qualité de responsable du développement marketing casino, sous réserve du résultat de la visite médicale d'embauche. Il bénéficie d'un statut cadre prenant effet au premier jour de travail. Dès l'obtention de l'agrément et l'autorisation des renseignements généraux, Belkacem X... sera nommé membre du comité de direction, responsable du développement marketing casino » ; qu'ainsi, le contrat de travail prévoit expressément que Belkacem X... est embauché avec la double qualité de responsable marketing et de MCD, dès qu'il aura obtenu l'agrément nécessaire ; que l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos précise notamment, en son article 14, que le directeur et les membres du comité de direction ont seuls qualité pour s'occuper de l'exploitation des jeux et pour donner des ordres au personnel des salles de jeux, et, en ses articles 72 à 75, le rôle des MCD en ce qui concerne la comptabilité des produits des jeux ; que l'emploi de MCD est prévu par la convention collective des casinos, qu'il constitue un emploi classé cadre, niveau V, MCD débutants et qui gèrent un effectif inférieur ou égal à 10, niveau VI, MCD confirmés ; que la grille des rémunérations prévue par l'annexe 1 de la convention collective prévoit également les indices et minima mensuels applicables aux emplois de MCD débutants et confirmés ; que la convention collective des casinos prévoit par ailleurs, en son article 35.3, que compte tenu de la spécificité de l'activité des entreprises de la branche, le travail de nuit constitue un mode habituel de travail ; qu'ainsi, contrairement aux dires de Belkacem X..., la fonction de MCD ne correspond pas à une simple qualification mais bien à un emploi ; que compte tenu de la spécificité de l'activité des casinos, prévue expressément par la convention collective, il ne pouvait ignorer que l'exercice de sa fonction de MCD s'exercerait habituellement la nuit, ce d'autant plus qu'il avait, alors qu'il était encore employé dans un établissement de jeux à Annemasse, suivi une formation à la fonction de « membre du comité de direction » ; qu'à compter de l'obtention de son agrément, le 17 juin 2010, Belkacem X... a donc été régulièrement intégré dans le planning des MCD, travaillant dans les salles de jeux soit le matin, soit en journée, soit la nuit ; que ses plannings de présence en salle laissent apparaître qu'il a néanmoins des plages de travail en journée sans activité jeux aux fins d'assurer ses fonctions marketing ; que Belkacem X... affirme par ailleurs que son employeur n'a jamais mis à sa disposition les moyens matériels lui permettant de réaliser son activité marketing ; que cependant, il convient de souligner qu'il n'a jamais fait part d'une telle difficulté pendant l'exécution de son contrat de travail jusqu'à son arrêt maladie en juillet 2010, qu'il ne verse d'ailleurs aucune pièce au soutien de son affirmation ; que l'employeur soutient quant à lui que le salarié disposait des mêmes moyens matériels avant et après l'obtention de l'agrément ; qu'il verse aux débats des photos du bureau des MCD dont Belkacem X... disposait pendant son temps de travail, où divers moyens sont mis à la disposition du salarié y travaillant en journée - bureau, ordinateurs, téléphone, imprimante, casiers ; qu'il convient, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, de dire que Belkacem X... n'établit pas la preuve de manquements graves de l'employeur à son égard ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE monsieur X..., à son arrivée dans sa nouvelle entreprise, exerce donc son seul poste de responsable de développement marketing casino ; que du fait de cette fonction, il n'est pas amené à faire des horaires de nuit réguliers ; qu'à l'obtention de son agrément, il est alors demandé à monsieur X... d'être présent en salle de jeux « machines à sous », comme le spécifie la fonction de membre de comité de direction (MCD) ; que de par cette fonction, il doit donc faire des horaires de nuit ; que monsieur X... fait valoir la dénaturation de son contrat de travail du fait de travailler la nuit ; que selon lui, ces horaires n'ont pas de raison d'être du fait qu'il soit responsable marketing ; que de même, ils sont incompatibles avec sa vie de famille ; que pour ces raisons, il a saisi le Conseil de prud'hommes et demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'une résiliation judiciaire ne peut être prononcée qu'en cas de manquement grave de l'employeur ; que vu le contrat à durée indéterminée, dûment signé et paraphé par les parties, qui prévoit expressément : « monsieur X... est engagé en qualité de responsable du développement marketing casino sous réserve du résultat de la visite médicale d'embauche. Il bénéficie d'un statut cadre, prenant effet au premier jour de travail. Dès l'obtention de l'agrément et l'autorisation des renseignements généraux, monsieur X... sera nommé membre du comité de direction, responsable du développement marketing casino. Monsieur X... s'engage à accepter les modifications de ses attributions qui pourraient intervenir pour un meilleur fonctionnement dans l'établissement. Ainsi, monsieur X... s'engage à assurer toutes les tâches qui lui seront demandées, entrant dans son champ de compétences, en fonction des nécessités des services » ; que vu la pièce n° 6 (défendeur) « membre du comité de direction des jeux », descriptif de poste : monsieur X..., titulaire de la carte d'agrément ministériel, avait une parfaite connaissance des responsabilités afférentes à ce poste ; que vu la pièce n° 8 du demandeur, du jeudi 10 juin 2010, paragraph e II 3) : « Objectif annuel : 50 % - 50 % sur les deux fonctions », pièce qui mentionne expressément une répartition équilibrée sur les deux fonctions prévues au contrat de travail ; que dès lors, monsieur X... ne peut se targuer de ne pas avoir eu connaissance de ses fonctions et de leur répartition ; qu'aucun élément du demandeur ne démontre des manquements graves de l'employeur ;
1) ALORS QUE le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit constitue, nonobstant toute clause contractuelle ou conventionnelle, une modification du contrat de travail qui doit être expressément acceptée par le salarié, et qu'une telle modification unilatérale du contrat de travail imposée par l'employeur est d'une gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat de travail à ses torts ; qu'après avoir constaté que monsieur X... avait été amené, à partir du 17 juin 2010, à travailler de nuit, d'où il résultait que son contrat de travail avait été modifié, la cour d'appel, qui s'est abstenue de rechercher si le salarié avait expressément consenti à cette modification, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
2) ALORS QUE le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit constitue, nonobstant toute clause contractuelle ou conventionnelle, une modification du contrat de travail qui doit être expressément acceptée par le salarié, et qu'une telle modification unilatérale du contrat de travail imposée par l'employeur est d'une gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat de travail à ses torts ; qu'en considérant que le passage d'un horaire de jour à un horaire partiellement de nuit était licite aux motifs inopérants, que le contrat de travail de monsieur X... prévoyait qu'il s'engageait à accepter les modifications de ses attributions qui pourraient intervenir pour un meilleur fonctionnement de l'établissement, que la convention collective des casinos stipulait que le travail de nuit constituait un mode habituel de travail et que monsieur X... avait suivi une formation de membre du comité de direction, de sorte qu'il ne pouvait ignorer que cette fonction s'exerçait habituellement la nuit, la cour d'appel a, derechef, privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
3) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'il incombe aux juges du fond de vérifier si le changement d'horaire porte une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ; qu'en se bornant à considérer que monsieur X... avait régulièrement travaillé de nuit, sans rechercher si, comme le soutenait le salarié, ce changement d'horaire avait porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie personnelle et familiale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1121-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
4) ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, monsieur X... soutenait qu'il avait subi des agissements constitutifs d'un harcèlement moral, tenant notamment au fait que monsieur Y..., son supérieur hiérarchique, lui avait ordonné à plusieurs reprises de ranger le bureau d'un collègue ; qu'il faisait également valoir qu'il avait été placé en arrêt de travail pour « surmenage ¿ stress ¿ harcèlement », que ces troubles étaient pris en charge au titre d'un accident professionnel et que l'inaptitude constatée par le médecin du travail avait pour origine le harcèlement ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5) ET ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, monsieur X... faisait également valoir que son employeur refusait de rémunérer l'ensemble des heures de travail, dans la mesure où il ne comptabilisait pas les journées de moins de sept heures de travail dans les 218 jours de travail annuel fixés par sa convention de forfait ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes, la cour d'appel a, derechef, violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-21807
Date de la décision : 09/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 03 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 oct. 2013, pourvoi n°12-21807


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.21807
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