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09/10/2013 | FRANCE | N°12-18829

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 octobre 2013, 12-18829


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 5 mars 2012), que M. X..., engagé par le Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, aux droits duquel est venu le Crédit industriel et commercial Est, a occupé à compter du 1er juillet 1992 les fonctions de directeur de succursale de proximité de Thionville ; qu'il a été nommé à compter du 7 avril 2005 responsable de l'unité risques régionale ; qu'il a occupé à compter du 1er février 2006 les fonctions d'adjoint au directeur régional de Moselle ; que le salarié a

saisi, le 14 juin 2006, la juridiction prud'homale en résiliation judicia...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 5 mars 2012), que M. X..., engagé par le Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, aux droits duquel est venu le Crédit industriel et commercial Est, a occupé à compter du 1er juillet 1992 les fonctions de directeur de succursale de proximité de Thionville ; qu'il a été nommé à compter du 7 avril 2005 responsable de l'unité risques régionale ; qu'il a occupé à compter du 1er février 2006 les fonctions d'adjoint au directeur régional de Moselle ; que le salarié a saisi, le 14 juin 2006, la juridiction prud'homale en résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'il a informé le 30 novembre 2006 son employeur de sa volonté de faire valoir ses droits à la retraite à effet au 1er février 2007, cette décision s'accompagnant d'une demande de liquidation de sa pension de vieillesse ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de paiement d'indemnités ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir les demandes du salarié, alors, selon le moyen :
1°/ que l'immutabilité du litige est totale en ce qui concerne le fondement de la demande ; qu'en l'espèce, le salarié n'avait pas demandé à ce que la rupture soit qualifiée de prise d'acte, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais avait simplement demandé aux juges de requalifier la rupture en licenciement ; qu'en retenant dès lors l'existence d'une prise d'acte qui n'était pas invoquée par le salarié, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ que le salarié ne peut tout à la fois invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa demande de liquidation de ses droits à la retraite et demander que cet acte soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait dans ses conclusions que « le consentement de M. X... a été vicié et l'a conduit à partir prématurément de l'entreprise » ; que cette invocation d'un vice du consentement interdisait au juge d'analyser la demande de liquidation des droits à la retraite comme une prise d'acte, de sorte qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail, ensemble les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°/ que la demande de liquidation de ses droits à la retraite d'un salarié s'oppose à une demande postérieure visant à faire produire à la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, il est constant que, par courrier du 30 novembre 2006, le salarié a sollicité un départ anticipé à la retraite, avec liquidation de sa pension de vieillesse, retraite qu'il a effectivement prise le 1er février 2007 ; qu'en jugeant pourtant, en se fondant sur le prétendu caractère équivoque de la volonté de départ à la retraite du salarié, que ce courrier devait être analysé en une prise d'acte pouvant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail ;
4°/ que le changement de lieu de travail ne suffit pas à caractériser une modification du contrat de travail ; qu'en se fondant, pour conclure à l'existence d'une modification du contrat de travail du salarié à l'occasion de sa nomination au poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » le 7 avril 2005, sur le fait que son lieu de travail soit passé de Metz à Thionville (en fait de Thionville à Metz), sans caractériser que cela aurait entraîné un changement de secteur géographique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ que la circonstance que la tâche nouvellement confiée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement ne caractérise pas une modification du contrat de travail du salarié tant qu'elle correspond à sa qualification ; qu'en se fondant, pour conclure à l'existence d'une modification du contrat de travail du salarié à l'occasion de sa nomination au poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » le 7 avril 2005, sur le fait que le salarié ait changé de fonctions, qu'il ait eu moins de subordonnés avec en contrepartie une faible augmentation de sa délégation de crédits, et que des responsabilités supplémentaires lui aient été confiées dès le 1er octobre 2005, sans caractériser que les nouvelles fonctions de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » confiées au salarié ne correspondaient pas à sa qualification, ni qu'il aurait été rétrogradé dans l'organigramme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
6°/ que le juge ne peut pas méconnaître l'objet du litige ; qu'en l'espèce, le salarié admettait lui-même, dans ses conclusions, que sa nomination au poste d'« adjoint au directeur régional » était une réponse à sa demande de retrouver son métier d'origine en prise directe avec la responsabilité d'agence, et donc de quitter son poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » ; qu'en jugeant que cette nomination constituait une nouvelle modification qui se serait opérée sans l'accord exprès du salarié, au cours de laquelle il aurait perdu une grande partie de ses attributions antérieures, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
7°/ que la circonstance que la tâche nouvellement confiée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement ne caractérise pas une modification du contrat de travail du salarié tant qu'elle correspond à sa qualification ; qu'en l'espèce, pour juger que l'employeur aurait modifié le contrat de travail du salarié en le nommant « adjoint au directeur régional », la cour d'appel s'est contentée de relever que le salarié n'exerçait plus ses fonctions antérieures depuis le 9 janvier 2006, qu'il n'exerçait des responsabilités que sur onze points de vente, alors que l'autre adjoint en avait trente-trois sous sa responsabilité, et que dans d'autres directions régionales il n'existait qu'un seul adjoint au directeur lequel supervise au minimum seize points de vente, éléments objectifs qui caractériseraient le manque de consistance du poste confié au salarié ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, dès lors qu'aucune discrimination n'était invoquée, sans caractériser que les nouvelles tâches confiées au salarié, différentes de celles effectuées antérieurement, ne correspondaient pas à sa qualification et constituaient une rétrogradation ou un déclassement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le salarié ayant invoqué dans ses écritures les manquements de l'employeur à ses obligations, la cour d'appel n'a pas modifié les termes du litige en se fondant sur une prise d'acte ;
Attendu, ensuite, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que l'employeur ait invoqué l'impossibilité pour le salarié d'invoquer à la fois un vice du consentement et une prise d'acte ; que le moyen, en sa deuxième branche, est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Attendu, enfin, que le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu'à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d'un départ volontaire à la retraite ;
Et attendu qu'ayant constaté que l'employeur avait réduit les responsabilités hiérarchiques du salarié et supprimé ses fonctions commerciales, la cour d'appel a pu en déduire que le contrat de travail avait été modifié ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le rejet du premier moyen rend le second moyen sans objet ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une indemnité de préavis correspondant à trois mois de salaire, alors, selon le moyen, que l'indemnité compensatrice de préavis n'est due qu'en cas d'inexécution par le salarié de son préavis ; qu'en l'espèce, il était constant qu'après sa demande de liquidation de ses droits à la retraite du 30 novembre 2006 requalifiée en prise d'acte, le salarié avait effectué son préavis jusqu'au 1er février 2007 ; qu'en allouant pourtant au salarié une indemnité de préavis égale aux trois mois prévus par la convention collective, sans en retrancher la durée pendant laquelle le salarié avait travaillé et avait été rémunéré entre le 30 novembre 2006 et le 1er février 2007, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-5 du code du travail ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que l'employeur avait invoqué une exécution partielle du préavis ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Crédit industriel et commercial Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Crédit industriel et commercial Est et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Crédit industriel et commercial Est
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que le départ à la retraite de Monsieur X... s'analysait en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR, en conséquence, condamné le CIC EST à payer à Monsieur X... les sommes de 17.954,61 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1.795,46 € au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents au préavis, 97.656,90 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 35.909,22 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR ordonné au CIC EST de rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié du jour du licenciement au jour du jugement, dans la limite de trois mois d'indemnité et d'AVOIR condamné le CIC EST à payer à Monsieur X... la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE si, lorsque au moment où le juge statue sur une action du salarié tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, le contrat de travail a pris fin par la mise ou le départ à la retraite du salarié, sa demande de résiliation devient sans objet, force est de constater en l'espèce que dans le dernier état de ses prétentions formulées devant le conseil de prud'hommes, Jean-Marie X... ne sollicitait plus le prononcé de la résiliation judiciaire mais la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il ne demande pas davantage une telle résiliation à hauteur de Cour ; que dès lors, la règle susvisée invoquée par le CIC Est est inopérante ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient le CIC Est, le fait que le salarié ait demandé à partir en retraite en sollicitant la liquidation de ses droits à pension ne lui interdit pas de remettre en cause sa volonté de mettre fin au contrat de travail en raison de manquements imputables à son employeur ; et que s'il apparaît que le salarié n'a pas exprimé une volonté claire et non équivoque de partir en retraite, sa demande de départ à la retraite s'analyse en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dans l'hypothèse où les griefs invoqués par le salarié sont justifiés ; qu'en l'espèce, la lettre par laquelle Jean-Marie X... a informé le CIAL de sa décision de faire valoir ses droits à la retraite est libellée comme suit : « En 2004, je suis devenu directeur du réseau grand public, mes fonctions restaient identiques à celles de directeur de succursale de proximité que j'occupais antérieurement. Cependant suite à la restructuration en 2005 de la société, un nouveau poste m'a été confié constituant une modification de mes attributions antérieures celui de responsable de l'unité de risques régional, qui a évolué vers le poste d'adjoint au Directeur régional. Ce dernier poste aurait du être adapté pour se conformer à l'avis du médecin de travail du 9 janvier 2006 qui prévoyait des aménagements concernant le travail sur écran et les déplacements professionnels. Or cette modification qui m'a été imposée, a transformé non seulement ma situation professionnelle, et m'a également obligé à effectuer de longs et fréquents déplacements qui ont entraîné de graves conséquences sur mon état de santé. Ces circonstances actuelles me contraignent donc à vous présenter aujourd'hui ma demande de départ à la retraite anticipée » ; qu'en l'état de telles énonciations, il est manifeste que la volonté de partir à la retraite de Jean-Marie X... était équivoque de sorte que son départ à la retraite s'analyse en une prise d'acte de la rupture ; que d'après les pièces versées aux débats, les fonctions de directeur de la succursale de proximité de Thionville exercées par Jean-Marie X... jusqu'au début du mois d'avril 2005 consistaient à superviser, coordonner, animer et développer un groupe d'agences sur le marché des particuliers et des professionnels, ce qui impliquait des responsabilités hiérarchiques à l'égard de tous les collaborateurs rattachés à la succursale et, en premier lieu, à l'égard des directeurs d'agence et un rôle de management d'équipes, de développement commercial, de gestion des engagements de la succursale ainsi que d'organisation de cette structure ; qu'il est constant que sa nomination en qualité de responsable de l'unité risques régionale de Moselle à effet du 7 avril 2005 s'est réalisée sans accord exprès de sa part ; que selon sa lettre de nomination à ce poste, celle-ci s'est accompagnée d'une augmentation de sa rémunération fixe annuelle de 3.500 euros et de la garantie d'une rémunération variable pour 2006 égale à la moyenne des sommes perçues au titre des exercices de 2002 à 2004 ; qu'au demeurant, Jean-Marie X... ne se plaint pas d'un changement de sa rémunération ; mais que l'augmentation de la rémunération globale de l'intéressé qui est mise en avant par le CIC Est n'exclut pas une modification éventuelle du contrat de travail ; qu'or, il est acquis aux débats que cette nomination a occasionné pour Jean-Marie X... un changement de lieu de travail, passé de Metz à Thionville ; qu'il apparaît en outre que cette nomination a impliqué un changement important des tâches à accomplir avec un positionnement fonctionnel complètement différent ; qu'en effet, d'après la fiche du poste concerné, celui-ci, s'exerçant en direction régionale, consiste à assurer la responsabilité hiérarchique du pôle risques de la région constitué des assistants crédit avec un pouvoir de décision quant aux engagements relevant de sa délégation et un rôle d'assistance et de suivi de la gestion des risques de la direction régionale ; que Jean-Marie X... est ainsi passé de l'exploitation, où la gestion des engagements ne représentait qu'une petite partie de ses attributions, à la « famille risques et engagements » telle que mentionnée sur la fiche de poste en perdant par là-même toutes fonctions commerciales et quasiment toutes relations avec la clientèle ; qu'enfin, il n'est pas contestable que les responsabilités hiérarchiques de Jean-Marie X... ont ce faisant été singulièrement réduites puisqu'elles s'exerçaient auparavant sur l'ensemble des collaborateurs de sa succursale, en ce compris les directeurs d'agence, alors que désormais, elles ne portaient plus que sur les assistants crédit du pôle risques du département ; et qu'il n'apparaît pas que cette perte de responsabilités ait été compensée par une compétence nettement accrue en termes de délégations de crédit dans la mesure où en sa qualité de directeur de la succursale de proximité de Thionville, il bénéficiait, aux termes d'une note du 4 juillet 2001, d'une délégation atteignant un plafond de 4.000.000 francs, soit environ 609.000 euros, et où sa délégation de crédits portait sur une somme maximale de euros au titre de son nouveau poste ; qu'ainsi, ce changement d'affectation a constitué pour Jean-Marie X... un changement important sur le plan fonctionnel et s'est accompagné d'un changement de lieu de travail ainsi que d'une diminution importante de ses responsabilités hiérarchiques sans réel accroissement de sa délégation de crédits ; que qui plus est, il ressort d'un mail du 31 août 2005 d'Alain Y... faisant état des modifications au sein de la direction régionale validées par la direction générale et d'un compte rendu de la réunion du 8 septembre 2005 du comité d'établissement Moselle CIAL qu'à compter du 1er octobre 2005, Jean-Marie X... a été chargé, tout en restant responsable de l'unité risques régionale de Moselle, des fonctions d'adjoint au directeur régional en ayant sous sa responsabilité les agences de Moselle Est ainsi que de Faulquemont et Morhange ; que ce faisant, il a acquis une responsabilité hiérarchique sur certains services de la direction régionale, au delà de la seule unité régionale risques, ainsi que sur certains points de vente ; qu'or, ainsi que le fait valoir Jean-Marie X..., cette adjonction de fonctions réalisée quelques mois après sa prise de son nouveau poste de responsable de l'unité risques régionale témoigne de l'étroitesse des attributions liées à celui-ci ; qu'en considération de ces éléments, il apparaît que l'affectation au mois d'avril 2005 de Jean-Marie X... sur le poste de responsable de l'unité risques régionale constituait une modification de son contrat de travail qui nécessitait son accord exprès, étant observé que la circonstance que l'intéressé ait effectivement exercé ces fonctions ne saurait justifier de son accord et que Jean-Marie X... prouve avoir sollicité un rendez vous auprès du directeur des ressources humaines dès le 18 mai 2005, ce qui corrobore l'existence de difficultés ressenties par lui quant à ce poste ; qu'au demeurant, le CIC Est indique lui-même que c'est à la suite du souhait de Jean-Marie X... de ne pas se cantonner à la responsabilité des engagements que des fonctions d'adjoint au directeur régional lui ont été confiées ; que l'employeur confirme donc lui-même l'insatisfaction éprouvée par son salarié au regard de sa nouvelle affectation ; qu'il ressort cependant de la lecture de courriels datant d'octobre 2007 de Jean-Marie X... et de Jean Z..., directeur des crédits selon l'appelant, qu'à la suite de l'adjonction des fonctions d'adjoint au directeur régional, le premier s'est rapidement plaint de ne voir aucun changement dans les circuits de décisions ainsi que dans l'organigramme et que le cumul des fonctions de responsable des engagements et d'adjoint au directeur régional est par ailleurs apparu aux yeux du second difficilement conciliable sur le plan déontologique s'agissant des délégations de crédit, qu'or, la direction régionale ne justifre pas avoir apporté la moindre réponse sur ces points hormis avoir confirmé, le 9 janvier 2006, la nomination de Jean-Marie X... en qualité d'adjoint au directeur régional mais sans le maintenir dans son poste de responsable de l'unité risques régionale ; qu'ainsi, après avoir affecté Jean-Marie X... sur deux postes différents en même temps que celui-ci a eu les plus grandes difficultés à exercer en raison de circonstances indépendantes de sa volonté, le CIAL a retiré à son salarié ses fonctions et sa qualité de responsable de l'unité risques régionale ; que ce faisant, Jean-Marie X... a perdu une grande partie de ses attributions ainsi que de ses responsabilités par rapport à celles dont il était titulaire depuis le 1er octobre 2005 ; qu'il est en outre établi qu'en sa qualité d'adjoint au directeur régional, Jean-Marie X... exerçait des responsabilités sur 11 points de vente alors que l'autre adjoint en avait sous sa responsabilité 33 et que dans d'autres directions régionales y compris plus importantes, il n'existe qu'un seul adjoint au directeur, lequel supervise au minimum 16 points de vente ; que le manque de consistance du poste d'adjoint au directeur qui lui a été en dernier lieu seul confié est donc confirmé par des éléments objectifs ; qu'il apparaît dès lors que la nomination de Jean-Marie X... aux seules fonctions d'adjoint au directeur régional constituait une nouvelle modification de son contrat de travail qui s'est opérée sans son accord exprès et à laquelle il s'est clairement opposé comme en témoigne la lettre adressée le 17 février 2006 par son conseil dans laquelle il était demandé au CIAL de lui faire retrouver sans délai la situation professionnelle qui était la sienne avant les changements opérés, cette lettre étant restée sans effet ; que le CIAL a donc imposé cette modification à son salarié en dépit de son désaccord alors que quelques mois plus tôt, il avait déjà opéré une première modification de son contrat de travail sans avoir eu son accord, ce qui constitue de la part de l'employeur un manquement grave à ses obligations ; qu'en conséquence, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Jean-Marie X... produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement qui l'a débouté de sa demande de requalification étant infirmé ; sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse, que Jean-Marie X... sollicite le paiement des indemnités de rupture ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'en réparation de son préjudice moral ; que le CIC Est s'oppose à ces prétentions au motif que la liquidation de sa retraite par le salarié interdirait la requalification du départ à la retraite et en arguant de l'absence de préjudice subi par l'appelant, dont il souligne qu'il bénéficie tant sa retraite que des revenus tirés de son activité de conseil créée à la suite de son départ de la banque ; que la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Jean-Marie X... est fondé à réclamer l'indemnité compensatrice du préavis de 3 mois auquel, en sa qualité de cadre, il avait droit en application de la convention collective nationale de la banque ; que le CIC Est ne contestant pas les montants sollicités, il sera alloué à l'intéressé la somme de 17.954,61 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 1.795,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents ; qu'en application de l'article 26 de la convention collective nationale de la banque et compte tenu de son ancienneté, Jean-Marie X... peut prétendre à une indemnité plafonnée à 24 X (13/14,5) d'une mensualité, soit 128.777,88 euros sur la base d'un salaire mensuel de 5.984,87 euros ; qu'ainsi que l'appelant l'indique lui-même, il convient de déduire de l'indemnité de licenciement la somme qu'il a perçue à titre d'indemnité de départ en retraite d'un montant de 31.120,98 euros ; que dès lors, il y a lieu de condamner le CIC Est à payer à Jean-Marie X... la somme de 97.656,90 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; que le jugement qui a débouté le salarié de ses demandes portant sur les indemnités de rupture doit en conséquence être infirmé ; que conformément à l'article L.122-14-4 alinéa premier du code du travail, recodifié à l'article L.1235-3, il est en droit d'obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant au moins égal aux salaires des six derniers mois, soit la somme de 35.909,22 euros au paiement de laquelle le CIC Est doit donc être condamné, le jugement étant également infirmé de ce chef ; qu'en application du même article, recodifié à l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner au CIC Est de rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de trois mois d'indemnités,
1- ALORS QUE l'immutabilité du litige est totale en ce qui concerne le fondement de la demande ; qu'en l'espèce, le salarié n'avait pas demandé à ce que la rupture soit qualifiée de prise d'acte, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais avait simplement demandé aux juges de requalifier la rupture en licenciement ; qu'en retenant dès lors l'existence d'une prise d'acte qui n'était pas invoquée par le salarié, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
2- ALORS QUE le salarié ne peut tout à la fois invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa demande de liquidation de ses droits à la retraite et demander que cet acte soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait dans ses conclusions (p.10 §4) que « le consentement de Monsieur X... a été vicié et l'a conduit à partir prématurément de l'entreprise » ; que cette invocation d'un vice du consentement interdisait au juge d'analyser la demande de liquidation des droits à la retraite comme une prise d'acte, de sorte qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L.1231-1 du Code du travail, ensemble les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
3- ALORS QUE la demande de liquidation de ses droits à la retraite d'un salarié s'oppose à une demande postérieure visant à faire produire à la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, il est constant que, par courrier du 30 novembre 2006, le salarié a sollicité un départ anticipé à la retraite, avec liquidation de sa pension de vieillesse, retraite qu'il a effectivement prise le 1er février 2007 ; qu'en jugeant pourtant, en se fondant sur le prétendu caractère équivoque de la volonté de départ à la retraite du salarié, que ce courrier devait être analysé en une prise d'acte pouvant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a violé l'article L.1231-1 du Code du travail.
4- ALORS, en tout état de cause, QUE le changement de lieu de travail ne suffit pas à caractériser une modification du contrat de travail ; qu'en se fondant, pour conclure à l'existence d'une modification du contrat de travail du salarié à l'occasion de sa nomination au poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » le 7 avril 2005, sur le fait que son lieu de travail soit passé de METZ à THIONVILLE (en fait de THIONVILLE à METZ), sans caractériser que cela aurait entraîné un changement de secteur géographique, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L.1221-1 du Code du travail.
5- ALORS QUE la circonstance que la tâche nouvellement confiée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement ne caractérise pas une modification du contrat de travail du salarié tant qu'elle correspond à sa qualification ; qu'en se fondant, pour conclure à l'existence d'une modification du contrat de travail du salarié à l'occasion de sa nomination au poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » le 7 avril 2005, sur le fait que le salarié ait changé de fonctions, qu'il ait eu moins de subordonnés avec en contrepartie une faible augmentation de sa délégation de crédits, et que des responsabilités supplémentaires lui aient été confiées dès le 1er octobre 2005, sans caractériser que les nouvelles fonctions de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » confiées au salarié ne correspondaient pas à sa qualification, ni qu'il aurait été rétrogradé dans l'organigramme, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L.1221-1 du Code du travail.
6- ALORS QUE le juge ne peut pas méconnaître l'objet du litige ; qu'en l'espèce, le salarié admettait lui-même, dans ses conclusions, que sa nomination au poste d'« adjoint au directeur régional » était une réponse à sa demande de retrouver son métier d'origine en prise directe avec la responsabilité d'agence, et donc de quitter son poste de « responsable de l'unité risques régionale de Moselle » ; qu'en jugeant que cette nomination constituait une nouvelle modification qui se serait opérée sans l'accord exprès du salarié, au cours de laquelle il aurait perdu une grande partie de ses attributions antérieures, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
7- ALORS QUE la circonstance que la tâche nouvellement confiée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement ne caractérise pas une modification du contrat de travail du salarié tant qu'elle correspond à sa qualification ; qu'en l'espèce, pour juger que l'employeur aurait modifié le contrat de travail du salarié en le nommant « adjoint au directeur régional », la Cour d'appel s'est contentée de relever que le salarié n'exerçait plus ses fonctions antérieures depuis le 9 janvier 2006, qu'il n'exerçait des responsabilités que sur 11 points de vente, alors que l'autre adjoint en avait 33 sous sa responsabilité, et que dans d'autres directions régionales il n'existait qu'un seul adjoint au directeur lequel supervise au minimum 16 points de vente, éléments objectifs qui caractériseraient le manque de consistance du poste confié au salarié ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, dès lors qu'aucune discrimination n'était invoquée, sans caractériser que les nouvelles tâches confiées au salarié, différentes de celles effectuées antérieurement, ne correspondaient pas à sa qualification et constituaient une rétrogradation ou un déclassement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L.1221-1 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné le CIC EST à payer à Monsieur X... les sommes de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et de 750 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS PROPRES QUE le salarié peut réclamer des dommages et intérêts en sus s'il justifie d'un préjudice distinct de celui du licenciement proprement dit ainsi que d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant la rupture ; qu'en l'espèce, il résulte d'un certificat médical de son médecin traitant et d'attestations de ses proches que Jean-Marie X... a souffert d'une dépression à la suite de sa mutation à Metz en avril 2005, laquelle s'est aggravée à partir du début de l'année 2006, de sorte qu'il prouve avoir subi un préjudice moral en raison des modifications de son contrat de travail qui lui ont été imposées par son employeur ; que ce comportement fautif de l'employeur a donc fait naître au détriment de Jean-Marie X... un préjudice distinct de celui résultant de la rupture qui sera justement réparé par la somme de 10.000 ¿ à titre de dommages et intérêts, le jugement étant confirmé de ce chef,
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en modifiant les affectations et conditions d'exécution du contrat de travail de Monsieur Jean-Marie X... (et ce nonobstant le fait qu'il pouvait s'agir de promotion) de manière unilatérale et sans s'inquiéter : de son positionnement hiérarchique réel, de la réelle teneur de ses nouvelles attributions et de sa compétence technique à les assumer, des dysfonctionnements dans les circuits de décisions (en particulier au niveau délégation) et de communication (pièces 27 A et B), le CIAL a failli à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail de Monsieur Jean-Marie X...,
ALORS QUE les juges du fond n'ont alloué une indemnisation complémentaire au salarié qu'en raison de la prétendue faute de l'employeur ayant consisté à modifier le contrat de travail du salarié ; que par conséquent, la cassation à intervenir sur le fondement des quatre dernières branches du premier moyen, qui contestent l'existence d'une modification du contrat de travail du salarié, entraînera la cassation du chef de dispositif attaqué par le présent moyen, par application de l'article 624 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné le CIC EST à payer à Monsieur X... les sommes de 17.954,61 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 1.795,46 € au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents au préavis,
AUX MOTIFS QUE la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Jean-Marie X... est fondé à réclamer l'indemnité compensatrice du préavis de 3 mois auquel, en sa qualité de cadre, il avait droit en application de la convention collective nationale de la banque ; que le CIC Est ne contestant pas les montants sollicités, il sera alloué à l'intéressé la somme de 17.954,61 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 1.795,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents,
ALORS QUE l'indemnité compensatrice de préavis n'est due qu'en cas d'inexécution par le salarié de son préavis ; qu'en l'espèce, il était constant qu' après sa demande de liquidation de ses droits à la retraite du 30 novembre 2006 requalifiée en prise d'acte, le salarié avait effectué son préavis jusqu'au 1er février 2007 ; qu'en allouant pourtant au salarié une indemnité de préavis égale aux trois mois prévus par la convention collective, sans en retrancher la durée pendant laquelle le salarié avait travaillé et avait été rémunéré entre le 30 novembre 2006 et le 1er février 2007, la Cour d'appel a violé l'article L.1234-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-18829
Date de la décision : 09/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 05 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 oct. 2013, pourvoi n°12-18829


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.18829
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