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10/07/2013 | FRANCE | N°12-19227;12-19228;12-19229;12-19230;12-19231;12-19232;12-19233;12-19234;12-19235;12-19236;12-19237;12-19238

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2013, 12-19227 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 12-19.227, Y 12-19.228, Z 12-19.229, A 12-19.230, B 12-19.231, C 12-19.232, D 12-19.233, E 12-19.234, F 12-19.235, H 12-19.236, G 12-19.237, J 12-19.238 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que le 5 juin 2008 la société Maison Jean-Baptiste Béjot a acquis les parts sociales de la société Moillard-Grivot, puis pris en location gérance son fonds de commerce ; que les contrats de travail des salariés ont été repris par la société Maison Jean-Baptiste Béjot, qui

a mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant le licencieme...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 12-19.227, Y 12-19.228, Z 12-19.229, A 12-19.230, B 12-19.231, C 12-19.232, D 12-19.233, E 12-19.234, F 12-19.235, H 12-19.236, G 12-19.237, J 12-19.238 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que le 5 juin 2008 la société Maison Jean-Baptiste Béjot a acquis les parts sociales de la société Moillard-Grivot, puis pris en location gérance son fonds de commerce ; que les contrats de travail des salariés ont été repris par la société Maison Jean-Baptiste Béjot, qui a mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant le licenciement de vingt-deux salariés ; que Mme Y... et onze autres salariés ont demandé à la juridiction prud'homale le prononcé de la nullité de leur licenciement pour motif économique notifié le 23 octobre 2008 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société en remboursement par les salariés de la majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement allouée au titre du plan de sauvegarde de l'emploi, les arrêts retiennent que l'action contentieuse des salariés ne remet en cause leur candidature au départ volontaire ni directement ni indirectement, que s'il est vrai que l'annulation du plan de sauvegarde de l'emploi a pour effet de priver de base contractuelle la majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement allouée à ces candidats, il n'en reste pas moins que l'indemnisation due à ces derniers à raison de la nullité de leur licenciement inclut nécessairement le montant de cette majoration et que faire droit à la demande reconventionnelle de l'employeur reviendrait à priver injustement les salariés concernés d'une partie de la réparation à laquelle ils peuvent prétendre ;
Attendu, cependant, que le plan de sauvegarde de l'emploi qui ne répond pas aux exigences des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du code du travail est nul ; qu'il s'ensuit que les sommes perçues par les salariés en vertu du plan de sauvegarde de l'emploi n'ont plus de fondement juridique ; que la nullité du plan oblige les salariés à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan, lesquelles viennent en déduction de la créance à titrede dommages-intérêts qui leur est allouée ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans déduire, comme il le lui était demandé, de la créance allouée aux salariés à titre de dommages-intérêts les sommes qu'ils avaient perçues en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi, alors qu'elle avait décidé que la procédure de licenciement collectif pour motif économique était nulle à raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont rejeté la demande de l'employeur en remboursement de la majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement, les arrêts rendus le 15 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne les salariés aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits aux pourvois par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Maison Jean-Baptiste Béjot.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché aux arrêts attaqués d'avoir jugé nuls les licenciements en raison de la nullité du plan de sauvegarde de l'emploi ;
AUX MOTIFS QU'il doit être rappelé que le plan de sauvegarde de l'emploi qui ne répond pas aux exigences légales est nul ; qu'intitulé « mesures destinées à permettre le reclassement des salariés », le chapitre 3 du plan de sauvegarde de l'emploi en cause comprend les sept paragraphes suivants : convention de reclassement personnalisé, création d'une antenne emploi avec cellule de reclassement, formations à la reconversion par mise en oeuvre du droit individuel à la formation, aides à la création d'entreprise, aides à la mobilité géographique, majoration de l'indemnité de licenciement, appel et incitation au volontariat ; que le dit plan ne comprend strictement aucune action en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou sur des emplois de catégorie inférieure, ni aucune mesure de réduction ou d'aménagement du temps de travail ni de réduction du volume des heures supplémentaires ; que le plan en cause ne contient, de surcroît aucune précision concernant les possibilités de reclassement qui pouvaient exister au sein du ou des autres sites de la SA Maison Jean-Baptiste Béjot, laquelle employait au moins 82 salariés à la fin de l'année 2008 ; qu'aucun élément de preuve n'est d'ailleurs produit relativement aux entreprises du groupe que constitue ou dont dépend l'appelante ; pas plus n'est-il établi que les possibilités de reclassement interne aient été épuisées avant l'élaboration du plan ; que l'appelant ne démontre pas que la réduction du temps de travail n'ait pas été envisageable, le seul fait que l'entreprise ne rencontre pas de difficultés économiques étant insuffisante à exclure pareille mesure ; que la modernisation de l'outil de production projetée pour satisfaire aux normes qualitatives rendait, certes, vraisemblable la suppression d'un certain nombre de postes ; que la probabilité de ces suppressions n'est toutefois pas de nature à justifier l'absence de toute action de formation dans le cadre des mesures de reclassement interne ; qu'il doit être constaté en définitive que le plan de sauvegarde de l'emploi élaboré par la SA Maison Jean-Baptiste Béjot ne comprend aucune mesure destinée à éviter les licenciements ou à en réduire le nombre ; que ce plan ne répond pas aux exigences légales ; qu'il est atteint de nullité ; que la nullité du plan de sauvegarde des emplois entraîne celle de la procédure de licenciement ;
1) ALORS QUE dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement prévu à l'article L1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté aux représentants du personnel qui doivent être réunis, informés et consultés ; que la validité du plan de sauvegarde est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe ; qu'en jugeant que le plan ne répondait pas aux exigences légales nonobstant l'accord donné à l'unanimité par le comité d'entreprise et l'absence d'objection ou de constat de carence de l'administration, au motif qu'aucune précision n'avait été fournie concernant les possibilités de reclassement qui pouvaient exister au sein du ou des autres sites de la SA Maison Jean-Baptiste Béjot, sans analyser les éléments de preuve fournis par l'employeur et notamment le plan de formation des années 2003 à 2008 ainsi que le registre des entrées et sorties du personnel d'où il pouvait résulter qu'aucune formation adéquate et aucun emploi disponible ne permettait d'envisager des actions de reclassement interne, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant sa décision de base légale au regard des articles L1233-61 et L 1235-10 du code du travail ;
2) ALORS QU'en se bornant à affirmer que l'appelante ne démontrait pas que la réduction du temps de travail n'était pas envisageable, « le seul fait que l'entreprise ne rencontre pas de difficultés économiques étant insuffisant à exclure pareille mesure », sans rechercher si, comme l'affirmait l'employeur, une réduction du temps de travail n'était pas rendue impossible en raison des contraintes particulières liées à l'application des normes IFS BRC qui supposent la présentation d'un plan de continuité de l'entreprise et à la spécificité des postes de travail sur lesquels une seule personne peut être affectée, ayant la maîtrise complète de son outil de travail, sans aucune polyvalence envisageable entre les salariés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1233-61, L 1233-62 et L 1235-10 du code du travail ;
3) ALORS QUE les salariés n'invoquaient aucune appartenance de leur employeur à un groupe quelconque ; qu'en relevant néanmoins qu'aucun élément de preuve n'était produit relativement aux entreprises du groupe que constitue ou dont dépend l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 4, 6 et 7 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est encore reproché aux arrêts attaqués d'avoir condamné la société Maison Jean-Baptiste Béjot au versement de dommages et intérêts au titre des licenciements irréguliers, outre des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, et d'avoir débouté la SA Maison Jean-Baptiste Béjot de sa demande reconventionnelle de remboursement de la majoration des indemnités conventionnelles de licenciements ;
AUX MOTIFS QUE la cour possède des éléments d'information suffisants, tirés de l'ancienneté des salariés au sein de l'entreprise, du montant du salaire qui était le leur, de leur situation actuelle mais aussi du montant des indemnités perçues au moment de la rupture, pour considérer que les premiers juges les ont exactement indemnisés du préjudice causé par la perte injustifiée de leurs emplois (¿) ; que l'action contentieuse des salariés ne remet en cause leur candidature au départ volontaire ni directement ni indirectement ; que s'il est vrai que l'annulation du plan de sauvegarde de l'emploi a pour effet de priver de base contractuelle la majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement allouée à ces candidats, il n'en reste pas moins que l'indemnisation due à ces derniers à raison de la nullité de leurs licenciements inclut nécessairement le montant de cette majoration ; que faire droit à la demande reconventionnelle de l'employeur reviendrait à priver injustement les salariés concernés d'une partie de la réparation à laquelle ils peuvent prétendre ; que dès lors les premiers juges doivent être approuvés d'avoir débouté la SA Maison Jean-Baptiste Béjot de sa réclamation de ce chef ;
ALORS QUE l'annulation du plan de sauvegarde des emplois oblige les salariés à restituer les sommes perçues sur son fondement, lesquelles doivent venir, par compensation, en déduction de leurs créances indemnitaires ; qu'en déboutant l'employeur de sa demande de restitution et en jugeant que l'indemnisation due aux salariés à raison de la nullité de leurs licenciements devait nécessairement inclure le montant de la majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par le plan annulé au profit des salariés volontaires au départ, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de l'annulation qu'elle a prononcé du plan de sauvegarde des emplois et a violé l'article 1234 du code civil ainsi que les articles L 1235-10 et L 1235-11 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-19227;12-19228;12-19229;12-19230;12-19231;12-19232;12-19233;12-19234;12-19235;12-19236;12-19237;12-19238
Date de la décision : 10/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 15 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2013, pourvoi n°12-19227;12-19228;12-19229;12-19230;12-19231;12-19232;12-19233;12-19234;12-19235;12-19236;12-19237;12-19238


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19227
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