LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er avril 2003 par la société Auto bilan Bessac en qualité d'hôtesse d'accueil ; que son contrat de travail mentionnait qu'elle était rattachée au centre de contrôle de Toulouse où se situait le lieu principal de son activité et qu'elle pourrait être amenée exceptionnellement à effectuer des remplacements dans d'autres centres ; que le 7 février 2007, l'employeur lui a proposé la signature d'un avenant prévoyant qu'elle pourrait être amenée à effectuer des remplacements dans le centre de Leguevin ; qu'ayant refusé de signer cet avenant, Mme X... a été licenciée le 13 mars 2007 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande, l'arrêt retient que son affectation dans le centre de Leguevin constituait un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, de sorte que le refus de la salariée d'y travailler sans contrepartie financière ou matérielle était fautif ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'employeur avait lui-même proposé à la salariée la signature d'un avenant à son contrat de travail pour l'affecter de manière habituelle au centre de Leguevin, ce dont il résultait que l'employeur reconnaissait qu'il procédait ainsi à une modification du contrat que la salariée était en droit de refuser, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1134 du code civil ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et déboute la salariée de sa demande de dommages-intérêts à ce titre, l'arrêt rendu le 8 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne la société Auto bilan Bessac aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Auto bilan Bessac à payer à la SCP Delaporte, Briard et Trichet la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Mlle X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et d'avoir débouté en conséquence l'intéressée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que « la clause du contrat de travail qui définit le lieu de travail principal de Mme X... et énumère limitativement les lieux, parmi lesquels ne figure pas Leguevin, où elle peut être amenée à être affectée, exceptionnellement et temporairement, ne constitue pas une clause de mobilité ; que la société Auto Bilan Bessac a imposé à partir du 7 février à Mme X... de travailler sur le site de Leguevin, malgré son refus de signer l'avenant au contrat, et sans lui attribuer une compensation financière ou mettre un véhicule à sa disposition pour se rendre sur ce lieu de travail ; qu'il s'agissait d'une affectation, sinon permanente, en tous cas habituelle et sans terme déterminé, donc définitive ; que le centre de contrôle de la société Auto bilan Bessac de Leguevin se trouve à 20 km de celui où travaillait Mme X... dans la ville de Toulouse, dans une commune faisant partie de l'agglomération toulousaine, dans le même département, à distance moindre de ce centre que certaines des villes visées dans le contrat de travail comme lieu éventuel de travail (Castres, Albi, Castelnaudary, Gaillac et Lavaur), toutes situées dans un autre département que la Haute-Garonne ; que par ailleurs, la salariée est domiciliée à Fonbeauzard, autre commune de la banlieue de Toulouse, située, selon les données du site Mappy, à 5,3 km du centre toulousain de la société Auto Bilan Bessac et à 24 km de celui de Leguevin, l'augmentation du temps et du coût d'un trajet en voiture, sans encombrement, étant respectivement de 20 minutes et d'environ un euro ; que de l'ensemble de ces éléments, il se déduit que le centre de Leguevin était situé dans le même secteur géographique que celui de Toulouse où Mme X... était habituellement occupée jusqu'au 7 février 2007, de sorte que son affectation dans cet établissement n'entraînait pas modification de son lieu de travail et constituait un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en conséquence, le refus de la salariée de travailler dans le centre de Leguevin, sans une contrepartie financière ou matérielle, est fautif et justifie son licenciement ; que … la salariée sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions relatives au licenciement » (arrêt attaqué, pages 3 et 4) ;
Alors, d'une part, qu'en proposant au salarié la signature d'un avenant à son contrat de travail, l'employeur reconnaît nécessairement que l'aménagement suggéré constitue non un simple changement des conditions de travail, mais une modification de ce contrat supposant l'accord de l'intéressé ; que pour dire que le licenciement de Mlle X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que son affectation dans le centre de Léguevin constituait un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, de sorte que le refus de la salariée d'y travailler sans contrepartie financière ou matérielle était fautif ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que l'employeur avait lui-même proposé à la salariée la signature d'un avenant à son contrat de travail pour l'affecter de manière habituelle au centre de Léguevin, ce dont il résultait que l'employeur reconnaissait qu'il procédait ainsi à une modification du contrat que la salariée était en droit de refuser, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, d'autre part et subsidiairement, que Mlle X... faisait valoir que pour déterminer, de manière objective, si la proposition de l'employeur constitue un changement de secteur géographique nécessitant l'accord du salarié, il y avait lieu de prendre en considération la desserte par les transports en commun de chacun des deux sites entre lesquels le transfert du lieu de travail était envisagé ; que Mlle X... soulignait à ce titre, d'une part, qu'aucun train n'arrivait directement à Léguevin et, d'autre part, qu'en empruntant successivement le bus et le métro, le site de Léguevin était situé à plus d'une heure du site de Toulouse, où elle était initialement affectée, et à plus d'une heure vingt de son domicile (concl., p. 9 à 11) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de nature à établir que l'aménagement suggéré par l'employeur constituait non un simple changement des conditions de travail mais bien une modification du contrat supposant l'accord de la salariée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.