La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/03/2013 | FRANCE | N°11-27432

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mars 2013, 11-27432


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1134-5, L. 2141-5 et L. 2141-8 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la caisse primaire d'assurance maladie de la Moselle à compter du 17 février 1989, a exercé des fonctions syndicales à compter de 1971 ; que, s'estimant victime d'une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de repositionneme

nt au niveau hiérarchique revendiqué après avoir admis qu'il avait été vic...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1134-5, L. 2141-5 et L. 2141-8 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la caisse primaire d'assurance maladie de la Moselle à compter du 17 février 1989, a exercé des fonctions syndicales à compter de 1971 ; que, s'estimant victime d'une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de repositionnement au niveau hiérarchique revendiqué après avoir admis qu'il avait été victime d'une discrimination dans l'évolution de sa carrière en raison de ses activités syndicales, la cour d'appel retient que les démarches de validation des acquis effectuées par l'employeur n'ont pu aboutir en raison du manque de temps consacré par le salarié à l'acquisition des compétences requises et de son souhait de voir valider ses acquis en matière de droit social et de droit du travail aux lieu et place des objectifs fixés par l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu de sorte qu'il lui appartenait de rechercher à quelle classification serait parvenu le salarié s'il avait bénéficié d'un déroulement normal de carrière et d'ordonner le cas échéant, à titre de réparation, son repositionnement à cette classification, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande de repositionnement, l'arrêt rendu le 3 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Moselle aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Moselle et la condamne à payer à M. X... et à l'union locale CGT la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X... et l'union locale CGT
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de repositionnement au niveau IV indice 326, après avoir pourtant considéré qu'il avait été victime d'une discrimination dans l'évolution de sa carrière en raison de ses activités syndicales,
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'existence de la discrimination et ses conséquences ; Vu l'article L 2141-5 du code du travail, Vu le procès-verbal établi le 20 décembre 2006 par l'Inspecteur du Travail, Vu les observations du Défenseur des Droits ; C'est par des motifs pertinents, que la Cour adopte, que les premiers juges ont considéré que la discrimination invoquée par Gérard X... à raison de ses activités syndicales est réelle ; Cependant, les premiers juges ne pouvaient se substituer à l'employeur dans son pouvoir de direction, et allouer un rappel de salaire à Gérard X... ; Seuls peuvent être alloués des dommages-intérêts réparant le préjudice subi par Gérard X... du fait de la discrimination constatée, pour un montant total qui sera confirmé par la Cour, soit 37 915,34 € ; S'agissant de l'Union locale CGT, les premiers juges ont fait une juste appréciation de son préjudice et de sa réparation, à hauteur de 1 000 € ; S'agissant du repositionnement de Gérard X... au niveau IV coefficient 326, la CPAM établit, en produisant le courrier qu'elle a adressé à Gérard X... le 20 mars 1997, qu'elle a engagé un processus de validation en vue de l'obtention d'un degré dans le cadre du développement professionnel. Cependant, cette démarche n'a pu aboutir du fait que Gérard X... n'a pas consacré de temps à l'acquisition des compétences requises ; Cinq ans plus tard, soit au terme de la période fixée conventionnellement, la CPAM engage à nouveau le processus de validation des compétences, ainsi qu'il résulte de son courrier daté du 1er février 2002 ; Gérard X... répond à ce courrier en acceptant le principe de cette démarche de validation, mais pas les objectifs de développement professionnel. Gérard X... explique qu'il a en revanche acquis d'autres compétences en matière de droit social et de droit du travail ; Cette réponse met un terme à la démarche de validation des acquis ; La CPAM démontre qu'elle a effectué auprès de Gérard X... les mêmes démarches de validation des acquis qu'auprès des autres salariés, et que le non-aboutissement de ces démarches résulte uniquement du fait que Gérard X... n'a pas rempli les conditions objectives nécessaires à la validation ; Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé également en ce qu'il a débouté Gérard X... de sa demande en repositionnement au niveau IV coefficient 326.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Monsieur Gérard X... présente des tableaux comparatifs d'échantillons de salariés ayant la même ancienneté, ou, la même qualification, ou, le même emploi ; Attendu que la CPAM ne peut, prendre en compte les absences liées aux activités syndicales de Monsieur Gérard X..., pour arrêter ses décisions concernant la répartition du travail, l'avancement, la rémunération et l'évolution de carrière ; Attendu que Monsieur Gérard X... est permanent syndical ; Que seule cette justification est l'objet d'un traitement défavorable ; En conséquence, le Conseil constate que la CPAM, va à l'encontre de l'article L.2141-5 du Code du Travail, e a privé Monsieur Gérard X... de toute possibilité d'avancement ; Le Conseil dit que Monsieur Gérard X... a fait l'objet d'une discrimination indirecte dans son évolution de carrière en raison de son activité syndicale. Sur le repositionnement au Niveau IV, coefficient 326 avec astreinte ; Attendu que selon le protocole d'accord du 9 avril 1998 relatif aux garanties conventionnelles des personnels travaillant dans les ETS ; Que pour un changement de qualification, le personnel bénéficie des mesures de formation professionnelle, initiale ou de la formation complémentaire nécessaire à l'évolution de leur qualification ; Que les salariés sont reclassés autant que possible dans un emploi comportant un coefficient au moins égal à leur ancien coefficient ; Attendu que selon le protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois, pour tout changement de niveau de qualification et changement d'emploi sans changement de niveau de qualification, tout salarié peut poser sa candidature pour accéder à un emploi déclaré vacant et porté à la connaissance des personnels ; Que l'évolution dans l'échelle des niveaux de qualification est conditionnée par l'acquisition des compétences et connaissances requises, compte tenu du référentiel de l'emploi considéré et validées pour l'accès à un niveau supérieur ; Que tout salarié ayant cinq ans de présence peut demander à bénéficier d'un bilan professionnel interne, distinct du bilan de compétences prévu par la loi, lui permettant de mesurer et d'orienter ses capacités potentielles, pour acquérir, notamment par des actions de formation adaptées ou de l'expérience professionnelle validante, des connaissances supplémentaires pour remplir les conditions d'accès à un niveau supérieur de qualification ; Attendu que Monsieur Gérard X... ne s'est pas positionné au cours de sa carrière pour un changement éventuel d'emploi, une formation qualifiante ou un niveau supérieur ; Attendu que Monsieur Gérard X... n'a pas fait preuve de diligence au moment opportun ; En conséquence le Conseil dit qu'il n'y a pas lieu de repositionner Monsieur Gérard X... au Niveau IV, coefficient 326, sous astreinte ; Le Conseil ne fait pas droit à la demande de Monsieur Gérard X... ; Sur la demande de rappel salarial. Attendu que chaque niveau de qualification comporte deux coefficients, exprimés en points ; Que ces coefficients définissent la plage d'évolution salariale à l'intérieur de laquelle chaque salarié, dans le niveau de qualification qu'il occupe, a vocation à évoluer dans le respect des règles définies infra ; Que le coefficient minimum du niveau est dénommé coefficient de qualification ; Que la rémunération de base est égale au produit du coefficient de qualification par la valeur du point ; Attendu que Monsieur Gérard X... justifie sa demande à partir de tableaux comparatif de salariés ayant la même ancienneté, ou le même emploi, ou la même qualification ; Que la différence d'évolution de carrière est discontinue ; Que Monsieur Gérard X... a bénéficié à deux reprises de la garantie conventionnelle ; Qu'il y a lieu de comptabiliser le nombre de points selon la moyenne de l'écart entre l'évolution de l'ensemble des personnels présentés et l'évolution de monsieur Gérard X... ; Qu'il y a lieu d'arrêter cette évolution aux 60 ans de Monsieur Gérard X... ; Le Conseil fait droit à la demande de Monsieur Gérard X... sur le rappel salarial à hauteur de 2 277,80 points à la valeur du point de la dernière fiche de paie présentée soit 7,15018, soit la somme globale de 16 286,68 € net. Sur la demande de réparation du préjudice moral ; Attendu qu'un salarié victime de discrimination syndicale peut agir sur le fondement du principe général de non-discrimination mais également sur le fondement des dispositions spécifiques relatives à la discrimination syndicale prévoyant l'octroi de dommages-intérêts ; Attendu que la demande de dommagesintérêts fondée sur l'article L.2141-8 du code du travail n'a pas pour seul objet de réparer la perte de salaire résultant de la discrimination mais d'indemniser l'ensemble du préjudice subi par le salarié du fait de la discrimination ; Que cette demande n'est pas soumise à la prescription de l'article L.3245-1 du code du travail relatif à la prescription des salaires ; Attendu que selon l'article L.2141-8 : «Les dispositions des articles L. 2141-5 à L. 2141, sont d'ordre public. Toute mesure prise par l'employeur contrairement à ces dispositions est considérée comme abusive et donne lieu à dommage et intérêts » ; En conséquence, le Conseil fait droit à la demande de Monsieur Gérard X... de dommages et intérêts pour préjudice de retraite et préjudice moral pour la somme de 20 000,00€.
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en conséquence, le juge est tenu d'ordonner le reclassement du salarié au niveau qu'il aurait atteint s'il n'avait pas été victime de discrimination syndicale ; qu'en rejetant la demande de Monsieur X... de repositionnement au niveau IV indice 326 – qui était le coefficient moyen atteint lors de la rupture du contrat de travail par des salariés ayant la même ancienneté que lui et qui avaient été embauchés à un niveau comparable – alors qu'elle avait relevé que le salarié avait été victime d'une discrimination syndicale, qu'il n'avait pas vu sa carrière évoluer et que son avancement avait été délibérément négligé, ce dont il résultait qu'il était donc fondé à se voir reclasser dans le coefficient de rémunération qu'il aurait atteint en l'absence de discrimination, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L1132-1, L1134-1, L1134-5, L2141-5 et L2141-8 du code du travail,
ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE le fait qu'un salarié n'ait jamais bénéficié, depuis son engagement syndical, d'aucune formation professionnelle conséquente, au prétexte de son absence d'activité professionnelle dans l'établissement, ne constitue pas un élément objectif propre à justifier la discrimination dont il fait l'objet dans l'avancement de sa carrière ; que même l'éventuel refus, de la part du salarié, en raison de ses activités syndicales, de participer à une action de formation ne constitue un élément objectif propre à justifier la stagnation de son avancement ; qu'en affirmant que «l'employeur avait engagé un processus de validation en vue de l'obtention d'un degré dans le cadre du développement professionnel mais, cependant, cette démarche n'a pu aboutir du fait que Gérard X... n'a pas consacré de temps à l'acquisition des compétences requises », la cour d'appel a statué par un motif inopérant et elle n'a pas caractérisé l'élément objectif permettant à l'employeur de justifier la différence de traitement qu'avait subi Monsieur X... dans l'évolution de sa carrière, privant ainsi sa décision de base légale au regard de articles L1132-1, L1134-1, L1134-5, L2141-5 et L2141-8 du code du travail,
ALORS EN OUTRE QUE l'avancement du salarié ne peut être subordonnée à l'accomplissement préalable d'une formation qualifiante que s'il est démontré que cette formation est indispensable à l'évolution de sa carrière et à l'exécution des taches des poste auxquels le salarié aurait pu postuler ; qu'en se bornant à l'affirmation générale selon laquelle « l'employeur avait engagé un processus de validation en vue de l'obtention d'un degré dans le cadre du développement professionnel mais, cependant, cette démarche n'a pu aboutir du fait que Gérard X... n'a pas consacré de temps à l'acquisition des compétences requises », sans jamais constater que cette action de formation était indispensable à l'évolution de la carrière de Monsieur X... au sein de la CPAM, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles L1132-1, L1134-1, L1134-5, L2141-5 et L2141-8 du code du travail,
ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, après avoir constaté que le salarié avait répondu à son employeur qu'il acceptait le processus de validation des compétences, qu'il contestait les objectifs de développement professionnel proposés par celui-ci, mais qu'il sollicitait néanmoins la validation des compétences en matière de droit social et de droit du travail qu'il avait acquises par l'exercice de ses mandats, la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que « cette réponse met un terme à la démarche de validation des acquis », sans rechercher pour quelle raison l'employeur n'avait pas validé l'expérience acquise par le salarié en droit social ; qu'en refusant, en conséquence, le repositionnement du salarié au niveau IV indice 326, sans jamais caractériser d'élément objectif propre à justifier le retard dont Monsieur X... avait fait l'objet dans l'avancement de sa carrière et pour quelle raison l'employeur n'avait pas validé les compétences acquises en droit social par le salarié durant l'exercice de ses mandats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles L1132-1, L1134-1, L1134-5, L2141-5 et L2141-8 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-27432
Date de la décision : 20/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 03 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mar. 2013, pourvoi n°11-27432


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27432
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award