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20/03/2013 | FRANCE | N°11-26444

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mars 2013, 11-26444


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1351 du code civil et 36 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a travaillé sur l'exploitation agricole appartenant à M. Y... du 1er septembre 1997 au 31 mars 2000 ; que par jugement du 31 janvier 2003, la juridiction prud'homale a ordonné sous astreinte provisoire à l'employeur de lui délivrer les bulletins de salaire ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de liquidation d'astreinte et de remise d

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Attendu que pour dire n'y avoi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1351 du code civil et 36 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a travaillé sur l'exploitation agricole appartenant à M. Y... du 1er septembre 1997 au 31 mars 2000 ; que par jugement du 31 janvier 2003, la juridiction prud'homale a ordonné sous astreinte provisoire à l'employeur de lui délivrer les bulletins de salaire ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de liquidation d'astreinte et de remise de bulletins de salaire manquants ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à liquidation de l'astreinte et débouter la salariée, l'arrêt, après avoir énoncé qu'il incombe à celle-ci d'apporter la preuve de ses affirmations selon lesquelles l'employeur n'aurait pas satisfait à ses obligations sous astreinte, relève que le conseil de prud'hommes n'a pas condamné l'employeur à communiquer la totalité des bulletins de salaire pour la période d'avril 1997 à mars 2000 mais seulement ceux qui seraient manquants, sans pour autant en dresser la liste exhaustive ce qui laisse à la salariée la latitude de déterminer le périmètre de l'exécution de la décision du conseil de prud'hommes alors que c'est au juge qu'il appartient de définir la charge précise des obligations qu'il impose à telle ou telle partie, et retient que la preuve n'est pas rapportée de la non-exécution intégrale par l'employeur de ses obligations en constatant que la salariée avait mis plus de quatre ans avant d'envoyer des réclamations qui toutes, en ce qu'elles exigeaient la remise de tous les bulletins de salaires, étaient manifestement au moins partiellement mal fondées, vidant ainsi de toute substance la preuve qu'elle pouvait par là prétendre rapporter de l'inexécution par l'employeur de ses obligations ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui incombait, au besoin en procédant à l'interprétation de la décision assortie d'astreinte, de déterminer quels étaient les bulletins de salaires que devait remettre l'employeur et de dire si celui-ci démontrait avoir rempli son obligation, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et le condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à liquidation de l'astreinte provisoire et d'AVOIR débouté Madame X... de sa demande de communication de pièces et dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte définitive ;
AUX MOTIFS QU'il incombe à Mme X... qui estime que M. Y... n'aurait pas satisfait à ses obligations sous astreinte dont elle sollicite, à ce titre, la liquidation d'apporter la preuve de ses affirmations ; il ressort du jugement du conseil de prud'hommes de la Roche sur Yon en date du 31 janvier 2003 que Mme X... épouse Y..., dans une instance l'opposant à son conjoint, poursuivait notamment qu'il lui soit fourni « les salaires, certificat de travail et document ASSEDIC, sous astreinte » ; Dans ses motifs, « sur la non production des pièces », cette juridiction a dit que « (...) M. Y... sera condamné (...) à fournir Mme Y... les bulletins de salaire manquants pour la période d'avril 1997 à mars 2000 » ; le dispositif de son jugement, confirme à ce titre : « ordonne à M. Y... Jean H. de délivrer les bulletins de salaire, le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC avant le 7 mars 2003 ; passé ce délai, une astreinte de 30 € par jour de retard commencera à courir, le conseil de prud'hommes se réservant la possibilité de liquider ladite astreinte » ; il découle de ce qui précède qu'au-delà d'une demande indéterminée, sur ce point, présentée par Mme X..., le conseil de prud'hommes n'a pas condamné M. Y... à lui communiquer la totalité des bulletins de salaire pour la période d'avril 1997 à mars 2000 mais seulement ceux qui seraient manquants, sans pour autant en dresser la liste exhaustive ce qui laisse à Mme X... la latitude de déterminer le périmètre de l'exécution de la décision du conseil de prud'hommes par M. Y... alors que c'est au juge qu'il appartient de définir, à l'issue de débats contradictoires, la charge précise des obligations qu'il impose à telle ou telle partie ; pour le surplus, M. Y... déclare avoir satisfait à ses obligations compte tenu de l'imprécision de la décision précitée et avoir fait parvenir à Mme Y..., par courrier du 7 mars 2003, l'ensemble des bulletins de salaire couvrant la période litigieuse ; Mme X... conteste cette affirmation et observe que par négligence ou malveillance M. Y... n'aurait communiqué, par le courrier précité, qu'une partie seulement des bulletins de salaire dont la communication avait été mise à sa charge et met en avant les rappels qu'elle a envoyés à son ex-mari par lettres recommandées des 21 juin 2007, 29 août 2008 et 6 avril 2009 ; Curieusement, Mme X... a mis plus de quatre ans avant de manifester son insatisfaction alors qu'elle se plaint elle-même du conflit qui oppose les parties et retarde ainsi la liquidation de leur régime matrimonial ; il convient encore de constater que ces rappels, tous postérieurs à la date du 7 mars 2003, font litière du courrier du 7 mars 2003 en réclamant à M. Y... l'intégralité des bulletins de salaire pour la période d'avril 1997 à mars 2000, ce qui semble davantage correspondre à la volonté d'entretenir un conflit que de chercher à le résoudre pacifiquement, ce qui aurait été le cas si Mme X... avait pris le soin de ne réclamer que les bulletins de salaire qui lui paraissaient manquer, alors que ces trois réclamations apparaissent manifestement, au moins partiellement, mal fondées au vu des propres déclarations de Mme X..., ce qui vide de toute leur substance la preuve qu'elle pouvait par-là prétendre rapporter de l'inexécution par M. Y... de ses obligations ; En conséquence et la décision du premier juge sera infirmée sur ce point, Mme X... se verra déboutée de ses prétentions, la cour considérant que la preuve n'est pas rapportée de la non-exécution intégrale par M. Y... de ses obligations, et il n'y aura pas lieu à liquidation d'astreinte ; il convient également de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a assorti d'une astreinte définitive de 60 € par jour de retard à compter du 20 janvier 2010 jusqu'au 20 juillet 2010 l'obligation faite à M. Y... de remettre à Mme X... la totalité des originaux des bulletins de salaire du 1er mars au 31 mars 1998 ainsi que du 1e avril 1999 au 31 mars 2000 ;
1) ALORS QUE, lorsqu'une astreinte assortit une décision de condamnation à une obligation de faire, il incombe au débiteur condamné de rapporter la preuve de l'exécution conforme, dans le délai imparti, de cette obligation ; qu'en retenant qu'il incombait à Mme X... qui estime que M. Y... n'aurait pas satisfait à ses obligations sous astreinte dont elle sollicite, à ce titre, la liquidation d'apporter la preuve de ses affirmations, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
2) ALORS QUE, en toute hypothèse, le juge saisi d'une demande tendant à la liquidation de l'astreinte doit vérifier si l'obligation qui en était assortie a été ou non exécutée ; qu'en se bornant, pour rejeter cette demande de liquidation, à relever que le jugement du 31 janvier 2003 n'avait pas condamné l'employeur à lui communiquer la totalité des bulletins de salaire pour la période d'avril 1997 à mars 2000 mais seulement ceux qui seraient manquants et que Monsieur Y... déclarait avoir satisfait à ses obligations, compte tenu de l'imprécision de la décision précitée, en faisant parvenir à la salariée, par courrier du 7 mars 2003, les bulletins de salaire en cause, sans répondre aux conclusions par lesquelles la salariée a fait valoir que, par l'envoi du 7 mars 2003, Monsieur Y... n'avait pas exécuté l'obligation mise à sa charge en ne communiquant par ce courrier que des photocopies des bulletins de salaire du 1e mars au 31 décembre 1998, dont elle avait réclamé en vain les originaux (concl. p. 7), la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE, le juge ne peut dénaturer le sens clair et précis des écrits versés aux débats pour prouver l'inexécution de l'obligation ; qu'en retenant que, par les rappels envoyés par lettres recommandées des 21 juin 2007, 29 août 2008 et 6 avril 2009, la salarié aurait demandé la communication de l'intégralité des bulletins de salaire pour la période d'avril 1997 à mars 2000 sans tenir compte du courrier du 7 mars 2003 par lequel Monsieur Y... lui avait adressé une partie des pièces et en considérant, par voie de conséquence, que ces trois réclamations apparaissaient manifestement, au moins partiellement, mal fondées et n'étaient pas de nature à prouver l'inexécution par Monsieur Y... de ses obligations cependant qu'une simple lecture des lettres de rappel en cause permet de constater que Madame X... n'y réclamait que les bulletins qui manquaient dans le courrier du 7 mars 2003- auquel elle faisait expressément référence-, ce dont il résultait que la salarié apportait ainsi la preuve de l'inexécution partielle de son obligation par l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des courriers des 21 juin 2007, 29 août 2008 et 6 avril 2009 et a violé l'article 1134 du code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26444
Date de la décision : 20/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 13 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mar. 2013, pourvoi n°11-26444


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.26444
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