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27/02/2013 | FRANCE | N°12-19596

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 27 février 2013, 12-19596


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 4 juillet 1990, la société Paloma, devenue la société Natixis Lease, a fait inscrire une hypothèque provisoire sur divers lots de copropriété appartenant à M. X... ; que celui-ci a vendu ces lots aux époux Y..., par acte authentique reçu le 13 juillet 1990 par M. Z..., notaire associé de la SCP B...- C...- Z...- D..., aux droits de laquelle vient la SCP E...- F...- G...- H...- I... ; que reprochant au notaire de s'être dessaisi des fonds entre les mains du ven

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 4 juillet 1990, la société Paloma, devenue la société Natixis Lease, a fait inscrire une hypothèque provisoire sur divers lots de copropriété appartenant à M. X... ; que celui-ci a vendu ces lots aux époux Y..., par acte authentique reçu le 13 juillet 1990 par M. Z..., notaire associé de la SCP B...- C...- Z...- D..., aux droits de laquelle vient la SCP E...- F...- G...- H...- I... ; que reprochant au notaire de s'être dessaisi des fonds entre les mains du vendeur sans s'assurer de la situation hypothécaire de l'immeuble, les époux Y... et la société Natixis Lease l'ont assigné en responsabilité ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la société Natixis Lease, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'action engagée par la société Natixis Lease, comme prescrite, l'arrêt énonce que cette dernière ne pouvait ignorer, lors de l'inscription de son hypothèque définitive le 10 août 1992, que le bien n'était plus la propriété de son débiteur ; que cette date marque donc le point de départ du délai de prescription de dix ans prévu à l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;
Qu'en statuant ainsi, par un moyen relevé d'office, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi provoqué de M. Z... et de la SCP E...- F...- G...- H...- I..., pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que l'arrêt, après avoir relevé que M. Z... avait commis une faute en omettant de lever un état hypothécaire du bien vendu et condamné ce dernier à indemniser les époux Y... à hauteur d'une somme de 50 000 euros, retient que le notaire ne saurait échapper à sa responsabilité en invoquant le fait que l'inscription d'hypothèque provisoire est antérieure de quelques jours à la vente du 13 juillet 1990, alors qu'il ne produit aucun état hypothécaire mentionnant l'absence d'une telle inscription d'hypothèque ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, compte tenu de la date de la vente, la délivrance d'un état hypothécaire aurait pu matériellement révéler l'existence de l'inscription d'hypothèque litigieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal et du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 février 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Natixis Lease
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action de la société Natixis Lease à l'encontre de François Z... et de la SCP E...- F...- G...-H...- I... ;
Aux motifs que « il résulte des dispositions de l'article 2270-1 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en application de la loi du 17 juin 2008, non applicable à la présente espèce, que les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; la société Natixis Lease, en ce qui la concerne, n'a pu avoir connaissance de la vente consentie par son débiteur André Roland X... aux époux Y... le jour même de celle-ci. En revanche, elle ne saurait soutenir qu'elle n'en a eu connaissance qu'en 2005 lorsqu'elle a interrogé son avocat sur ce point, alors qu'elle-même soutient et justifie avoir procédé, suite à l'obtention de son titre résultant d'un arrêt de la Cour d'appel de Saint-Denis du 24 juillet 1992 confirmant un jugement du Tribunal mixte de commerce, à l'inscription de son hypothèque définitive le 10 août 1992. Elle n'a donc pu ignorer au moment de cette inscription que le bien grevé n'était plus la propriété de son débiteur. Sa demande formalisée par des écritures déposées le 14 avril 2008 dans le cadre de la procédure de première instance suite à son appel en intervention forcée par François Z... et la SCP E...- F...- G...-H...- I..., plus de dix ans après avoir eu connaissance du fait dommageable, est donc prescrite. La décision sera donc infirmée en ce qu'elle a déclaré l'action de la société Natexis Lease, devenue Natixis lease recevable et a condamné François Z... et la SCP E...- F...- G...-H...- I... in solidum à lui verser la somme de 93. 683, 73 euros à titre de dommages et intérêts et de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile » ;
Alors, d'une part, que tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction, le juge ne peut fonder sa décision sur un moyen relevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à s'expliquer sur celui-ci ; que dès lors, en relevant d'office, pour déclarer prescrite l'action en responsabilité civile extra-contractuelle exercée par la société Natixis Lease à l'encontre de Maître Z... et de la SCP de notaires, qu'ayant procédé à l'inscription de son hypothèque définitive le 10 août 1992, la société Natixis Lease ne pouvait ignorer, à compter de cette date, que le bien grevé n'était plus la propriété de son débiteur, et que la date de cette inscription constituait dès lors le point de départ du délai de prescription, sans avoir mis la société Natixis Lease en mesure d'en débattre contradictoirement, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Alors, d'autre part, qu'en se déterminant pas les mêmes motifs, là où il ne résultait ni des conclusions de la SCP de notaires et de Maître Z..., ni des motifs du jugement entrepris, que le délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par la société Natixis ait pu commencer à courir le 10 août 1992, avec l'inscription de son hypothèque définitive, la Cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige en y introduisant un moyen de fait que les parties n'avaient pas invoqué, a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors, en outre, que la prescription d'une action en responsabilité civile extra-contractuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en affirmant que la société Natixis Lease, qui n'avait « pu avoir connaissance de la vente consentie par son débiteur André Roland X... aux époux Y... le jour même de celle-ci », n'avait, en revanche, « en procédant à l'inscription de son hypothèque définitive le 10 août 1992, … pu ignorer, au moment de cette inscription, que le bien grevé n'était plus la propriété de son débiteur », sans établir en quoi, précisément, le simple fait de procéder à cette inscription définitive appelée à rétroagir au 4 juillet 1990, date de l'inscription provisoire, aurait pu permettre à la société Natixis Lease d'être informée de la vente du bien grevé survenue, entre temps, le 13 juillet 1990, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à son arrêt au regard de l'article 2270-1 ancien du Code civil, applicable en la cause ;
Alors, enfin, que la prescription d'une action en responsabilité civile extra-contractuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en fixant au 10 août 1992 le point de départ du délai de prescription applicable à l'action exercée par la société Natixis Lease, sans rechercher si, à cette date, la société Natixis Lease se trouvait déjà dans l'impossibilité de recouvrer sa créance à l'encontre de son débiteur, Monsieur X..., la Cour d'appel a une seconde fois privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2270-1 ancien du Code civil.
Moyen produit, au pourvoi provoqué, par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société E...- F...- G...- H...- I... et M. Z...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que Monsieur François Z... avait commis une faute engageant sa responsabilité à l'égard des époux Y..., dit que cette faute avait directement causé un préjudice à Monsieur et Madame Y... et condamné la SCP E...
G...
H...
I... in solidum avec Monsieur François Z... à verser aux époux Y... la somme de 50. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE le notaire en sa qualité d'officier ministériel est tenu, en vertu de la loi à une obligation d'authentification des actes de son ministère et de garantir ainsi l'efficacité des actes dont il a le monopole. En cas de la violation d'une telle obligation il engage sa responsabilité délictuelle si la faute ainsi commise a été source de préjudice. En l'espèce l'acte de vente ne mentionne pas l'existence de l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire au profit de la SA SALOMA. Il n'est pas douteux que Maître François Z... avant de dresser l'acte de vente se devait de requérir l'état hypothécaire et ensuite de ne pas se dessaisir du reliquat du prix après désintéressement du créancier du premier rang avant d'avoir publié son titre. Il ne peut soutenir que l'inscription de l'hypothèque judiciaire provisoire datée du 4 juillet 1990, soit de quelques jours avant la vente du 13 juillet 1990, ne pouvait être connue de lui, alors qu'il ne produit pas l'état hypothécaire qu'il a requis et qui n'aurait pas mentionné cette inscription. Cette faute a entraîné pour les époux Y... un préjudice certain et actuel puisque la SOCIETE NATIXIS LEASE, selon l'état hypothécaire bénéficie de son inscription jusqu'au 21 juin 2012 date à laquelle celle-ci pourra être renouvelée et qu'en leur qualité de propriétaires du bien hypothéqué ils demeurent ainsi obligés, en application des dispositions des articles 2293 et 2461 du Code civil, au remboursement de la créance de cette dernière ou à délaisser l'immeuble hypothéqué. Ce droit de suite est de nature à faire perdre à l'immeuble une part importante de sa valeur et rendre difficilement disponible le bien hypothéqué. Le préjudice des époux Y... peut donc justement être évalué à la somme de 50 000 euros qu'ils réclament. La demande relative au remboursement du montant du coût de la radiation n'est ni actuelle ni justifiée en son montant. La décision sera confirmée en ce qu'elle a débouté les époux Y... de cette demande. La décision sera donc confirmée en ce qu'elle a retenu la responsabilité du notaire à l'égard des époux Y... sauf à fixer le montant de leur préjudice à la somme de 50 000 euros. Ainsi François Z... et la SCP E...
F...
G...
H...
I... seront condamnés in solidum à verser à André Y... et Joëlle A..., épouse Y..., la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
1°) ALORS QUE la responsabilité du notaire suppose établie l'existence d'un lien de causalité entre la faute reprochée à l'officier ministériel et le préjudice allégué ; qu'en affirmant que le notaire avait engagé sa responsabilité et devait répondre à des conséquences de l'inscription prise le 4 juillet 1990 sur le bien vendu le 13 juillet de la même année, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, compte tenu de la date de l'inscription litigieuse, aucun état hypothécaire susceptible d'être obtenu avant la vente n'aurait révélé son existence, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
2°) ALORS QU'il appartient au demandeur à l'action en responsabilité de rapporter la preuve du lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice invoqué ; qu'en relevant, pour retenir la responsabilité du notaire et dire qu'il devait répondre de l'inscription pris le 4 juillet 1990, qu'il ne produisait pas l'état hypothécaire qu'il avait requis et qui n'aurait pas mentionné cette inscription, quand il appartenait au demandeur à l'action d'établir que le notaire aurait pu être en possession, à la date de la vente du 13 juillet 1990, d'un état faisant apparaître l'inscription prise le 4 juillet de la même année, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;
3°) ALORS QU'aucun texte n'impose à un notaire de conserver le prix de vente d'un bien jusqu'à la délivrance d'un état des inscriptions sur publication ; qu'en affirmant néanmoins que Monsieur Z... avait commis une faute en se libérant des fonds provenant de la vente du bien appartenant à Monsieur X... après avoir réglé la BFC OI, unique créancier inscrit, sans s'assurer de l'absence d'inscription au profit de la société NATIXIS LEASE au jour de la publication de l'acte de vente aux motifs que ce n'est qu'après la délivrance d'un état des inscriptions sur publication que le prix de vente peut être délivré sans risque, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-19596
Date de la décision : 27/02/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 17 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 27 fév. 2013, pourvoi n°12-19596


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19596
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