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20/02/2013 | FRANCE | N°11-26040

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-26040


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2011), que M. X..., engagé par la Société française de transports Gondrand frères à compter du 29 septembre 1986, en qualité de manutentionnaire spécialisé, a été promu sous-chef de quai le 1er avril 1990 et chef de quai le 31 janvier 2005 ; qu'après avoir saisi la juridiction prud'homale le 21 avril 2008 d'une demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, il a pris acte de la rupture de son c

ontrat de travail le 31 août 2008, invoquant le non-paiement des heure...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2011), que M. X..., engagé par la Société française de transports Gondrand frères à compter du 29 septembre 1986, en qualité de manutentionnaire spécialisé, a été promu sous-chef de quai le 1er avril 1990 et chef de quai le 31 janvier 2005 ; qu'après avoir saisi la juridiction prud'homale le 21 avril 2008 d'une demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 31 août 2008, invoquant le non-paiement des heures supplémentaires, un travail dissimulé et un harcèlement moral ;
Sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n' y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
Sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de réformer le jugement en ce qu'il avait dit que le contrat de travail se trouvait rompu aux torts de l'employeur à la date du 21 avril 2008 et de rejeter sa demande tendant à ce que la prise d'acte de rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que les juges du fond doivent examiner, même sommairement, tous les documents versés aux débats ; qu'en affirmant que le harcèlement moral allégué par M. X... n'était pas établi, sans examiner, notamment, l'attestation de M. Y... établissant que M. Z..., directeur de la succursale, s'était adressé au salarié de façon « agressive » et « vexante », « en criant » et de façon « irrespectueuse et blessante », l'attestation du docteur A..., médecin du travail ayant constaté l'état de « détresse psychologique » de M. X..., les dossiers médicaux du docteur B... ayant diagnostiqué une « dépression réactionnelle » et du docteur C... ayant fait mention d'un « stress sur le travail », toutes ces pièces ayant pourtant été régulièrement versées aux débats, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 1353 du code civil ;
Mais attendu que sous le couvert d'une violation des articles 455 du code de procédure civile et 1353 du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation des éléments de fait et de preuve par les juges du fond qui ont estimé que ceux-ci ne laissaient pas présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille treize.

MOYENS ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir réformé le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 27 octobre 2009 en ce qu'il avait dit que le contrat de travail se trouvait rompu aux torts de l'employeur à la date du 21 avril 2008 et d'avoir rejeté la demande de M. X... tendant à ce que la prise d'acte de rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE sur le grief de non-paiement d'heures supplémentaires effectuées certains samedis matin, M. X... critique les modalités de paiement des heures supplémentaires effectuées certains samedis matin ; qu'il reconnaît avoir été rémunéré sous la forme de remboursement de frais (indemnités kilométriques) des heures ainsi accomplies ; que la société Gondrand verse aux débats la justification des notes de frais visées par le salarié entre janvier 2006 et avril 2007 pour une somme totale nette de 1.776,78 € ; qu'un chèque était adressé chaque mois, durant la période litigieuse, à M. X..., rémunérant, d'une manière dont la société Gondrand admet aujourd'hui qu'elle n'était « pas appropriée », les heures supplémentaires accomplies par ses salariés volontaires ; que M. X... n'a remis en cause la modalité de paiement de ces heures supplémentaires que le 15 février 2008 par l'intermédiaire de son conseil ; qu'il ne visait alors que les heures accomplies en 2006, soit dix-sept samedis travaillés de 8 heures à 12 heures ; que la société Gondrand a tout aussitôt régularisé la situation en en informant expressément l'avocat de son salarié dès le 28 février 2008 et en faisant figurer, sur le bulletin de paie du mois de février 2008, soixante-huit heures supplémentaires (soit dix-sept samedis x 4 heures) majorées au taux de 25 %, soit une somme globale brute de 1.369,62 €, déduction faite des remboursements de frais qui avaient été versés à M. X... en 2006, soit 1.480,26 € net ; que M. X... n'a formé aucune objection à réception de son bulletin de paie de février 2008 ; que ce n'est que le 21 avril 2008, au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, qu'il a réclamé une somme de 2.815,60 € à titre d'heures supplémentaires, omettant de décompter les indemnités kilométriques qu'il reconnaît avoir perçues – fût-ce indûment – à ce titre, tout autant que la somme réclamée par l'intermédiaire de son avocat qui lui avait été diligemment réglée ; que la société Gondrand a opéré le calcul des sommes dues pour la totalité des trente-cinq samedis travaillés et rémunérés selon des modalités illégales à raison de quatre heures par samedi, soit 140 heures supplémentaires qui devaient donner lieu : - pour l'année 2006, au paiement d'une somme totale de 2.497,05 €, soit trente et un samedis x 4 heures x 16,11 € (taux horaire) x 1,25 (majoration) = 2.497,05 € ; - pour l'année 2007, au paiement d'une somme totale de 325,60 €, soit quatre samedis x 4 heures x 16,11 € (taux horaire) x 1,25 (majoration) = 325,60 €, soit un total de 2.822,65 € brut, représentant 2.206,46 € net, en tenant compte d'un taux de cotisations sociales de 21,83 % ; qu'après déduction de la somme nette de 1.776,78 € payée sous forme d'indemnités de déplacement, il reste dû à M. X... 429,68 € net, outre les congés payés sur l'ensemble des heures supplémentaires, soit une somme brute de 282,26 € ; que la somme modique ainsi due à M. X... du fait de sa demande de régularisation du paiement d'heures supplémentaires selon les modalités légales ne peut justifier la prise d'acte de la rupture par le salarié de son contrat de travail, alors que le temps de travail accompli par M. X... avait été intégralement rémunéré des heures effectuées au moment de leur accomplissement, que la régularisation était intervenue à première demande du salarié, et en considération du fait que le dernier samedi travaillé et rémunéré sur des bases non conformes aux dispositions légales était le samedi 28 avril 2007, de sorte que le manquement allégué – entre temps régularisé – se trouvait antérieur de plus d'une année à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de seize mois à la prise d'acte de la rupture ; que le manquement de l'employeur n'était dès lors pas de nature à faire obstacle à la poursuite du contrat de travail au demeurant suspendu par les arrêts de travail successifs transmis par M. X... à la société Gondrand ;
ET AUX MOTIFS QUE, sur le grief de harcèlement moral, pour faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, au visa des articles L.1152 et L.1154-1 du code du travail, M. X... allègue l'existence de remarques irrespectueuses et vexatoires de la part du directeur de la succursale ; que la société Gondrand conteste légitimement la crédibilité et la sincérité des attestations produites par le salarié en faisant notamment valoir que M. E... a quitté la société en août 2006, soit près de deux ans avant la saisine de la juridiction prud'homale par M. X..., que Mme F... a été en congé sabbatique du 27 août 2006 au 31 juillet 2007, de sorte qu'elle a été absente sur quasiment toute la période dénoncée par le salarié en faveur duquel elle atteste, avant d'être licenciée pour une faute grave non contestée le 6 mai 2008 et que Mme G... affirme, en sa qualité de cliente de la société Gondrand lorsqu'elle travaillait pour la société Aia Production, avoir été témoin de l'agressivité du supérieur hiérarchique de M. X... vis-à-vis de ce dernier le 17 décembre 2007, alors pourtant que les clients de la société ne sont jamais présents sur les quais au moment du chargement ou du déchargement de leurs produits et qu'il résulte du planning des interventions qu'aucune opération n'a été effectuée pour la société Aia Production le 17 décembre 2007 ; qu'en dépit de leur multiplicité, les attestations rédigées par MM. H... et I... – dont l'employeur souligne que, rédigées sur une courte période, elles aient été communiquées en fonction des nécessités procédurales, les privant ainsi de crédit –, sont trop lacunaires et imprécises pour confirmer la réalité des faits allégués par le salarié ; qu'elles ne relatent au surplus aucun fait précis ni même daté, à l'exception d'un événement qui serait survenu le 14 décembre 2007 ; que le directeur de la succursale serait alors « venu interpeller Mr X... en criant parce qu'il était assis sur une chaise dans le bureau du quai. Il a mis en doute devant tout le monde la façon de travailler de Monsieur X... dont la fonction lui impose selon Mr Z..., de se trouver là où il y a du travail. Il lui a alors ordonné d'aller aider au déchargement d'un camion grec situé sur le quai export » ; qu'un tel fait ne pouvait constituer un « harcèlement moral », à défaut de la répétition qui caractérise le harcèlement, et alors qu'il n'avait pu porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, ni altérer sa santé, ni davantage compromettre son avenir professionnel ; que la société Gondrand a versé aux débats les comptes-rendus des réunions du comité d'établissement et les procèsverbaux des réunions du CHSCT dont était membre M. X... ; qu'il apparaît qu'il n'a jamais évoqué dans ce contexte protégé les faits dont il se dit victime, alors que, selon la thèse qu'il développe et les attestations qu'il produit, les faits critiquables auraient eu lieu au su et au vu de tous ; que le médecin du travail, toujours présent à ces réunions, n'a pas davantage évoqué la situation de M. X..., qui invoque aujourd'hui la position de ce médecin, au prix de citations tronquées ; que l'employeur souligne en effet que, le 9 mai 2007, le médecin du travail a noté, non pas « traitement tranquillisant (1/2 Temesta) problèmes au travail», mais : « Tout petit traitement tranquillisant », avant de déclarer M. X... « apte sans aucune réserve » à son travail et sans jamais lui prescrire le moindre arrêt de travail ; que l'omission par le salarié de la mention « aux dires du salarié » pour rendre compte dans ses écritures de la visite médicale du 10 janvier 2008 : « Problèmes de travail + ambiance particulièrement délétère, problèmes très variés, grosse pression aux dires du salarié avec les mêmes doléances que la fois précédente » conduit encore à exclure toute réelle incidence sur l'altération de sa santé des faits invoqués postérieurement à l'avertissement reçu et alors qu'il se trouvait en arrêt maladie ; qu'au terme de l'examen de chacun des griefs invoqués par M. X..., il apparaît que l'attitude prétendument fautive de l'employeur n'est pas établie ; que dans ces conditions, la rupture du contrat opérée par la lettre du 31 août 2008 ne peut s'analyser que comme une démission ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les énonciations claires et précises d'un document régulièrement versé aux débats ; qu'en affirmant « qu'en faisant figurer sur, le bulletin de paie du mois de février 2008, 68 heures supplémentaires » (arrêt attaqué, p. 6 § 6), l'employeur avait ainsi régularisé la situation de M. X... avant la saisine par celui-ci, le 21 avril 2008, du conseil de prud'hommes, de sorte que la rupture du contrat de travail ne pouvait être imputée à la société Gondrand, cependant que le bulletin de salaire du mois de février 2008 ne porte aucune mention d'une telle régularisation, qui a été en réalité effectuée le 30 avril 2008, sur le bulletin de salaire du mois d'avril 2008, soit après la saisine par le salarié du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a dénaturé les mentions portées sur le bulletin de salaire du mois de février 2008, violant ainsi l'article 1134 du code civil et méconnaissant le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges du fond doivent examiner, même sommairement, tous les documents versés aux débats ; qu'en affirmant que le harcèlement moral allégué par M. X... n'était pas établi, sans examiner, notamment, l'attestation de M. Y... établissant que M. Z..., directeur de la succursale, s'était adressé au salarié de façon « agressive » et « vexante », « en criant » et de façon « irrespectueuse et blessante », l'attestation du docteur A..., médecin du travail ayant constaté l'état de « détresse psychologique » de M. X..., les dossiers médicaux du docteur B... ayant diagnostiqué une « dépression réactionnelle » et du docteur C... ayant fait mention d'un « stress sur le travail », toutes ces pièces ayant pourtant été régulièrement versées aux débats, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 1353 du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société française de transport Gondrand frères,
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, après avoir condamné la société française de Transports Gondrand Frères à payer à M. X... les sommes de 429,68 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 282,26 € au titre des congés payés sur les heures supplémentaires de l'AVOIR condamnée à lui payer 16.506,94 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE le fait que la société Gondrand ait réglé les salaires dus sous la forme dont elle soutient qu'elle avait convenue entre les parties, mais qui ne correspondait pas aux exigences légales, ne suffit pas à exclure l'application des articles L. 8221-5 2° et L. 8223-1 du code du travail, dès lors que les heures supplémentaires effectuées n'ont pas été mentionnées sur les bulletins de paie de salaires correspondant, la rémunération étant intervenue sous forme d'indemnités kilométriques ; que l'employeur a intentionnellement dissimulé une partie du travail du salarié ;
ET AUX MOTIFS QUE la somme modique due à M. X... du fait de sa demande de régularisation du paiement d'heures supplémentaires selon les modalités légales, ne peut justifier la prise d'acte par le salarié de son contrat de travail, alors que le temps de travail accompli avait été intégralement rémunéré des heures effectuées au moment de leur accomplissement, que la régularisation était intervenue à première demande du salarié (arrêt p. 7) ;
ALORS QUE le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, pour retenir que la prise d'acte du salarié devait produire les effets d'une démission, que seule une somme modique était due au salarié du fait de sa demande de régularisation du paiement d'heures supplémentaires selon les modalités légales, tandis que le temps de travail accompli avait été intégralement rémunéré des heures effectuées au moment de leur accomplissement, et que la régularisation était intervenue à première demande du salarié (arrêt p. 7) ; qu'en condamnant cependant l'employeur au titre du travail dissimulé, sans rechercher si ces circonstances n'excluaient pas nécessairement l'intention de l'employeur de dissimuler le travail de son salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26040
Date de la décision : 20/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 fév. 2013, pourvoi n°11-26040


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.26040
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