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12/12/2012 | FRANCE | N°11-24562

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 décembre 2012, 11-24562


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué que le groupement d'intérêt économique Harmonie soins et services (GIE), exploite un pôle hospitalier qui comprend notamment la clinique Jules Verne à Nantes et la polyclinique de l'Océan à Saint-Nazaire ; que ces établissements sont issus du rapprochement et de la fusion de cliniques mutualistes dont le personnel était soumis à la convention collective des é

tablissements privés d'hospitalisation de soins, de cure et de garde à but ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué que le groupement d'intérêt économique Harmonie soins et services (GIE), exploite un pôle hospitalier qui comprend notamment la clinique Jules Verne à Nantes et la polyclinique de l'Océan à Saint-Nazaire ; que ces établissements sont issus du rapprochement et de la fusion de cliniques mutualistes dont le personnel était soumis à la convention collective des établissements privés d'hospitalisation de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 (FEHAP) et de cliniques privées à caractère commercial soumises à la convention collective de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 (dite convention collective unifiée CCU) ; que dans le cadre de cette fusion, le GIE a mis en oeuvre un processus d'harmonisation des statuts collectifs au profit de la convention collective FEHAP laquelle s'est appliquée à l'ensemble des salariés du GIE à compter du 1er janvier 2005 en maintenant au profit des facturières de la clinique de l'Océan la classification de "technicien administratif" dont elles bénéficiaient avant la fusion ; que Mme X... et douze autres salariées occupant des emplois de facturières au sein de la clinique Jules Verne classées à compter du 1er janvier 2005 au coefficient 349 de la convention FEHAP, correspondant au métier d'"employé administratif" ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir leur classification au coefficient 392 correspondant aux fonctions de "technicien administratif" et paiement d'un rappel de salaires, en application du principe d'égalité de traitement, en faisant valoir qu'elles devaient bénéficier du même classement conventionnel que les facturières de la clinique de l'Océan à Saint-Nazaire ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que les facturières de la clinique Jules Verne effectuent le même travail que celles du pôle hospitalier mutualiste de Saint-Nazaire pour un coefficient et un salaire moindre ; qu'il appartient, dès lors à l'employeur, d'établir que cette différence de traitement repose sur des raisons objectives et pertinentes ; que le GIE expose que les facturières du pôle hospitalier mutualiste de Saint-Nazaire bénéficiaient, sous l'empire de la convention collective unifiée, de la qualification de technicien, de sorte qu'au moment du transfert de leurs contrats de travail, il était nécessaire, pour préserver cet avantage acquis, de leur attribuer le coefficient 392 de la convention collective FEHAP ; que ce moyen ne saurait prospérer ; que l'intégration des cliniques relevant du secteur de l'hospitalier privé à but lucratif dans un pôle hospitalier mutualiste mettait en cause dans ces cliniques, du fait de la fusion intervenue au 1er janvier 2005, l'application de la convention collective unifiée, de sorte qu'en application de l'article L. 132-8, alinéa 7, devenu L. 2261-14 du code du travail, une nouvelle négociation devait s'engager au sein du GIE, à la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables ; que le GIE n'a entrepris aucune négociation après cette mise en cause de la convention collective unifiée alors que les négociations entreprises avant le transfert des contrats de travail n'avaient pas donné lieu à la conclusion d'un accord collectif ce qui ne pouvait lui permettre de se soustraire à cette procédure après la fusion ; que le GIE n'ayant pas mis à profit le délai dont il disposait après la mise en cause résultant de la fusion pour mener des négociations visant à l'adaptation des dispositions de la convention collective unifiée à celles de la convention collective FEHAP, il ne peut soutenir qu'il était nécessaire d'attribuer aux facturières de Saint-Nazaire le coefficient 392, celui-ci ne pouvant s'analyser en un avantage individuel acquis qu'en l'absence de conclusion d'un accord d'adaptation à l'issue du délai institué par les dispositions de l'article L. 132-8, alinéa 3, devenu L. 1226-10 (sic) du code du travail ; qu'ainsi la différence de traitement observée procède non pas de la nécessité de préserver un avantage acquis mais de la décision unilatérale de l'employeur d'accorder un coefficient supérieur aux facturières de Saint-Nazaire, étant observé que le mouvement social auquel il était confronté, dont il n'est d'ailleurs pas démontré qu'il était d'une ampleur plus importante qu'à Nantes, ne saurait justifier cette décision ; que l'historique des établissements concernés ne peut donc constituer une justification objective et pertinente de cette différence de traitement ;
Attendu cependant que l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu'ils tiennent d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il ressortait de ces constatations que l'attribution du coefficient 392 aux facturières de la polyclinique de Saint-Nazaire résultait de l'obligation pour le nouvel employeur de maintenir le surclassement conventionnel qui leur avait été consenti par leur ancien employeur, la cour d'appel a violé le principe et l'article susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juillet 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute les salariées de leur demande ;
Condamne les salariées aux dépens de cassation et à ceux afférents aux instances suivies devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour le groupement d'intérêt économique Harmonie soins et services
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que devait être reconnu aux salariées le coefficient 392 de la convention collective nationale du 31 octobre 1951 applicable à compter du 1er janvier 2005 pour l'ensemble des salariées, à l'exception de Madame X... qui ne pouvait y prétendre qu'à compter du 1er avril 2006, que les salariées étaient fondées à obtenir des rappels de salaires sur ce fondement et d'avoir renvoyé les parties à leurs calculs s'agissant du montant desdits rappels ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté que les facturières de la clinique Jules Verne effectuent le même travail que les facturières du pôle hospitalier mutualiste de Saint-Nazaire pour un coefficient et un salaire moindres ; qu'il appartient dès lors à l'employeur d'établir que cette différence de traitement repose sur des raisons objectives et pertinentes ; que contrairement à ce que soutient Harmonie Soins et Services-GIE, l'appartenance à des établissements distincts n'est pas, en tant que telle, de nature à justifier une différence de traitement entre salariés d'une même entreprise ; qu'il incombe à l'employeur d'établir que ce traitement différencié se justifie au regard de la situation particulière du personnel qui en fait l'objet ; que le GIE fait valoir que les établissements de Nantes et de Saint-Nazaire présentent des différences quant à la teneur de leurs activités et de leur organisation ; que force est toutefois de constater qu'il n'apporte aucune précision sur les différences dont il se prévaut et surtout n'expose nullement l'incidence de ces différences sur la situation des salariées concernés, de sorte que celles-ci ne sauraient justifier l'atteinte à l'égalité de traitement sui lui est reprochée ; que le GIE expose ensuite que les facturières du pôle hospitalier mutualiste de Saint-Nazaire bénéficiaient, sous l'empire de la convention collective unifiée, de la qualification de technicien, de sorte qu'au moment du transfert de leurs contrats de travail, il était nécessaire, pour préserver cet avantage acquis, de leur attribuer le coefficient 392 de la convention collective FEHAP, d'autant qu'il était confronté à un mouvement social au sein de cet établissement ; que ce moyen ne saurait prospérer ; que l'intégration des cliniques relevant du secteur de l'hospitalier privé à but lucratif dans un pôle hospitalier mutualiste mettait en cause dans ces cliniques, du fait de la fusion intervenue au 1er janvier 2005, l'application de la convention collective unifiée, de sorte qu'en application de l'article L. 132-8, alinéa 7, devenu L. 2261-14 du code du travail, une nouvelle négociation devait s'engager au sein du GIE, à la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables ; que le GIE n'a entrepris aucune négociation après cette mise en cause de la convention collective unifiée alors que les négociations entreprises avant le transfert des contrats de travail n'avaient pas donné lieu à la conclusion d'un accord collectif ce qui ne pouvait lui permettre de se soustraire à cette procédure après la fusion ; que le GIE n'ayant pas mis à profit le délai dont il disposait après la mise en cause résultant de la fusion pour mener des négociations visant à l'adaptation des dispositions de la convention collective unifiée à celles de la convention collective FEHAP, il ne peut soutenir qu'il était nécessaire d'attribuer aux facturières de Saint-Nazaire le coefficient 392, celui-ci ne pouvant s'analyser en un avantage individuel acquis qu'en l'absence de conclusion d'un accord d'adaptation à l'issue du délai institué par les dispositions de l'article L. 132-8, alinéa 3, devenu L. 1226-10 (sic) du code du travail ; qu'ainsi la différence de traitement observée procède non pas de la nécessité de préserver un avantage acquis mais de la décision unilatérale de l'employeur d'accorder un coefficient supérieur aux facturières de Saint-Nazaire, étant observé que le mouvement social auquel il était confronté, dont il n'est d'ailleurs pas démontré qu'il était d'une ampleur plus importante qu'à Nantes, ne saurait justifier cette décision ; que l'historique des établissements concernés ne peut donc constituer une justification objective et pertinente de cette différence de traitement (…) ;
ALORS QUE le maintien d'un avantage acquis en cas de mise en cause d'une convention ou d'un accord collectif ne méconnaît pas le principe « à travail égal, salaire égal » ; que la cour d'appel, pour juger qu'il existait une différence de traitement non justifiée entre les salariées des deux établissements, a retenu que l'attribution de la qualification de technicien et donc du coefficient 392 aux facturières de Saint-Nazaire n'aurait pu s'analyser en un avantage individuel acquis qu'en l'absence d'un accord d'adaptation, lorsqu'il résultait pourtant de ses constatations qu'un tel accord n'avait pas été conclu ; qu'elle a par là violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l'article L. 2261-14 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-24562
Date de la décision : 12/12/2012
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 08 juillet 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 déc. 2012, pourvoi n°11-24562


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.24562
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