LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1231-1 et L. 1237-2 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire que la rupture du contrat de travail du salarié résultait de sa démission non équivoque, l'arrêt retient qu'il s'évince des écritures et des pièces produites aux débats que le salarié invoque implicitement des agissements à caractère dolosif de la part de son employeur qui l'aurait trompé en lui demandant de signer la lettre du 5 septembre 2005 ; que la charge de la preuve d'un vice de consentement incombe à celui qui s'en prévaut ; que le salarié ne rapporte pas cette preuve ; que la lettre litigieuse était intervenue alors que le salarié avait entamé des démarches auprès de la CRAM pour se voir allouer une pension au titre de l'inaptitude, que le salarié n'a contesté la lettre de démission que plus de deux ans et sept mois après l'avoir signée ; que dans ces conditions la lettre du 5 septembre 2005 constitue une lettre de démission ;
Qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants relatifs à l'absence de démonstration par le salarié de l'existence d'un dol, alors qu'elle avait relevé que le salarié ne savait ni lire ni écrire, que la lettre litigieuse n'évoquait qu'une cessation d'activité et que le salarié avait signé cette lettre, rédigée par un tiers, aux seules fins de bénéficier du régime de retraite pour inaptitude, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Stavemac aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Stavemac à payer à la SCP Masse-Dessen et Thouvenin la somme de 2 500 euros, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... résultait de sa démission non équivoque, et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes tendant à voir la Société SAVELAC condamnée à lui verser des indemnités de préavis et les congés payés afférents, indemnité de licenciement, dommages et intérêts pour licenciement non causé et préjudice moral et remise des documents sociaux conformes
AUX MOTIFS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. La preuve de cette volonté peut être rapportée par tous moyens ; il est seulement produit aux débats, plus particulièrement par M. X..., les pièces suivantes : un récépissé du dépôt d'une demande d'avantage personnel par le salarié en date du Ier juillet 2005, délivré par la CRAM du sud-est et portant la mention manuscrite " inaptitude 1. 8 2005 " ; une lettre en date du 18 août 2005 aux termes de laquelle rappelant à M. X... qu'il a formulée une demande de pension personnelle au titre de l'inaptitude, qu'après examen, il a été reconnu inapte au travail, au sens de l'article L. 351-7 du code de la sécurité sociale, la CRAM lui demande de lui " retourner l'attestation de cessation d'activité, ci-jointe, dûment complétée par l'employeur " pour permet de procéder à la mise en paiement de sa retraite ; la lettre du 5 septembre 2005 énoncée dans l'exposé des faits ; un courrier daté du 8 octobre 2005 de la CRAM notifiant à M. X... l'attribution d'une retraite personnelle au titre de l'inaptitude au travail à compter du 1er octobre 2005 ; il s'évince des écritures de M. X... et des pièces ainsi produites aux débats que celui-ci invoque implicitement des agissements à caractère dolosif de la part de son employeur qui l'aurait trompé en lui demandant de signer la lettre du 5 septembre 2005, rédigée à la demande de cet employeur par un autre salarié et présentée comme une formalité nécessaire à la constitution de son dossier de départ en retraite afin d'anticiper son départ en le " maquillant " en démission. D'évidence, la charge de la preuve de tout vice de contentement incombe à celui qui s'en prévaut, en l'espèce M. X..., tandis que le dol ne se présume pas et doit être prouvé, en application des dispositions de l'article 1116 du code civil. Force est de constater qu'en dehors de procéder par simple allégation, voire supposition, M. X... dont il n'est pas contesté qu'il ne saurait ni lire ni écrire le français mais qui ne conteste aucunement avoir signé de sa propre main la lettre du 5 septembre 2005 rédigée par un tiers, ne démontre pas avoir été victime d'une quelconque contrainte, encore moins d'un quelconque dol de la part du gérant de la société Stavemac, ne justifiant pas plus-ni ne tentant d'ailleurs de le faire-de l'identité du salarié auquel, selon ses affirmations, l'employeur aurait fait appel pour rédiger la lettre litigieuse au pied de laquelle il a apposé sa signature. De même, M. X... ne fournit aucune explication sur les suites données à la demande de la CRAM de lui retourner une attestation d'activité dûment complétée par l'employeur, ni sur les circonstances de lieu dans lesquelles il a été amené à signer la lettre du 5 septembre 2005. En dehors des documents succincts versés aux débats relatifs à son inaptitude au travail au sens de l'article L. 351-7 du code de sécurité sociale, il n'est pas plus fourni d'explication ou de justificatif quant à son inaptitude à reprendre son emploi dans les conditions de l'article L. 1226-2 du code du travail, ne contestant pas l'affirmation de l'employeur selon laquelle il ne s'est plus présenté à son poste à compter du 1er août 2005. Enfin, il n'est pas sans intérêt de relever que la lettre du 5 septembre 2005 par laquelle M. X... exprimait son souhait d'arrêter toute activité salariale " pour raison de santé ", est intervenue dans un contexte précis, à savoir qu'au cours des mois de juillet et août 2005, il avait été déclaré par la sécurité sociale inapte au travail, avait entamé toutes démarches auprès de la CRAM pour se voir allouer une pension personnelle au titre de cette inaptitude, en vue notamment de bénéficier d'un départ en retraite au 1er octobre 2005. Il est tout aussi symptomatique de relever que M. X... n'a contesté pour la première fois sa lettre de démission du 5 septembre 2005 que par la saisine du conseil de prud'hommes, suivant requête du 29 avril 2008, soit passé un délai de plus de deux ans et sept mois ; tenant ces éléments et circonstances ainsi que l'absence de preuve incombant au salarié d'un quelconque dol imputable à l'employeur, 1 illettré du 5 septembre 2005 constitue une démission claire et non équivoque de la part de M. X..., contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges dont la décision sera dans ces conditions infirmée en toutes ses dispositions. M. X... sera en conséquence débouté de l'intégralité de ses prétentions tandis que la demande de rectification d'une erreur matérielle affectant le jugement déféré est devenue sans objet.
ALORS QUE la démission doit résulter d'une volonté claire et précise du salarié de mettre fin au contrat de travail ; que la Cour d'appel qui a constaté que Monsieur X... ne savait ni lire ni écrire, en sorte que la lettre n'était pas de sa main, qu'elle avait été signée dans un contexte précis à savoir qu'il avait été déclaré inapte au travail et avait entamé des démarches en vue de bénéficier d'une pension d'inaptitude et d'un départ en retraite le 1er octobre, ce dont il résultait que la volonté de démissionner était équivoque, la Cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient au regard des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1231-2 du code du travail.