LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 mai 2011), que, le 2 mai 2003, Berthe X..., alors âgée de 80 ans, a, d'une part, conclu avec l'association Aide à domicile en milieu rural de Concarneau (l'association) un contrat de mandat aux termes duquel, en sa qualité de particulier employeur, elle déléguait à cette association l'établissement pour son compte des obligations et tâches administratives liées à l'emploi d'une ou plusieurs aides à domicile (bulletins de paie, démarches administratives, bordereaux trimestriels...), l'association s'engageant également à conseiller Berthe X... dans le déroulement des formalités relatives à l'exonération des charges sociales patronales et le recrutement de l'aide à domicile, d'autre part, conclu un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel avec Mme F... épouse Y..., engagée en qualité d'employée de maison pour assurer auprès d'elle, de jour et de nuit, les fonctions de garde en présence responsable et les astreintes de nuit ; qu'ayant démissionné le 31 août 2004, Mme Y... a saisi la juridiction prud'homale le 1er avril 2008 d'une demande de rappel de salaire dirigée à titre principal contre l'association, à titre subsidiaire contre les héritiers de Berthe X..., décédée en novembre 2004 ;
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de la condamner en qualité d'employeur à payer à Mme Y... une somme à titre de rappel de salaire, alors, selon le moyen :
1°/ que selon l'article L. 7232-6 du code du travail L. 129-1 ancien dans sa rédaction applicable à l'espèce, les associations dont les activités concernent exclusivement les services rendus aux personnes physiques à leur domicile doivent être agréées par l'État lorsqu'elles poursuivent au moins l'un des deux objets suivants : 1/ le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs, ainsi que, pour le compte de ces dernières, l'accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de ces travailleurs ; 2/ l'embauche de travailleurs pour les mettre, à titre onéreux, à la disposition de personnes physiques ; qu'il en résulte que, dans le cas visé au 1/ de ce texte, les personnes physiques étant les employeurs des travailleurs, l'association remplit le rôle d'un simple mandataire chargé d'accomplir les formalités administratives et d'assurer les déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi ; que la cour d'appel s'est bornée à constater que l'association ADMR procédait au nom de Mme X... à différentes formalités administratives, comptables et réglementaires et que la salariée était également employée, simultanément, par plusieurs autres mandants de l'association ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les éléments qu'elle retenait ne permettaient pas de conclure que l'association avait dépassé, en ce qui concerne l'aide à domicile de Mme X..., son rôle de mandataire et s'était comportée comme employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2°/ qu'il était constant aux débats que les horaires de travail de Mme Y... auprès de Mme X... étaient expressément stipulés au contrat de travail en date du 2 mai 2003 puis à l'avenant en date du 1er juillet 2003, tous deux conclus entre la salariée et la personne aidée, de telle sorte que ces horaires étaient fixes et qu'ils n'étaient pas déterminés, en cours d'exécution du contrat, par l'association ADMR ; qu'en se bornant à relever, pour dire que l'association était le véritable employeur, que ces horaires étaient fixés de façon à permettre à la salariée d'occuper plusieurs emplois en parallèle auprès de différents mandants de l'association, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ne permettant pas de caractériser un dépassement, par l'association, de son rôle de mandataire, violant ainsi de plus fort l'article L. 7232-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que Mme Y... travaillait selon les horaires et les lieux indiqués par l'association à laquelle elle devait rendre compte de son activité en remplissant et en communiquant des fiches de présence, que l'association contrôlait et comptabilisait sa présence et lui imposait des instructions et des ordres, que la structure mise en place correspondait à un service organisé au sein duquel les conditions de travail étaient déterminées unilatéralement par l'association, la cour d'appel a pu en déduire qu'il existait entre celle-ci et Mme Y... un lien de subordination caractérisant un contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association ADMR de Concarneau aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de l'association ADMR de Concarneau et celle des consorts X..., condamne l'association ADMR de Concarneau à payer à la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour l'association ADMR de Concarneau
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'ADMR avait la qualité d'employeur de Madame Y... et de l'AVOIR, en conséquence, condamnée à lui payer la somme de 6. 486, 80 € à titre de rappel de salaire, outre les frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« il résulte des éléments produits aux débats : que le contrat de travail et le contrat de mandant ont été établis le même jour par l'ADMR et signés non pas par Madame X... mais par son mari ; que l'avenant au contrat de travail en date du 1er juillet 2003 a également été établi par l'ADMR sur un document à entête de cette association, que Madame Y... était également amenée à intervenir chez d'autres personnes et que certains contrats conclus dans les mêmes conditions que celui régularisé avec Madame X... ne comportait que le cachet de l'ADMR sans même la signature de la personne dénommée « employeur » ; que l'ADMR procédait à l'établissement des bulletins de salaires mais ne s'est pas préoccupée de la qualification prévue dans le contrat de travail, qualification qu'à l'évidence Madame X..., compte tenu de son âge et de son état de santé n'avait pu fixer elle-même ; qu'elle réglait directement le salaire de Madame Y... après avoir prélevé, 15 jours avant, la somme correspondant à la facturation qu'elle effectuait à l'égard de Madame X... ; que selon l'attestation d'une ancienne collègue de Madame Y..., l'ADMR fixait les horaires de travail ; que Madame Y... était tenue de remettre des fiches de présence à la fin de chaque mois à l'ADMR qui contrôlait ainsi son activité et que ces fiches mentionnaient le nom de la salariée et celui de « la personne aidée » (et non de « l'employeur ») ainsi que la signature de cette dernière ; que l'organisation de l'activité et des plannings était effectuée par l'ADMR de façon à permettre à la salariée d'occuper plusieurs emplois en parallèle ; que sur une fiche à entête de l'ADMR concernant les congés, il est expressément rappelé que la salariée ne peut prendre ses congés sans accord et qu'elle devra préciser à sa remplaçante les horaires à effectuer et le travail à accomplir ce qui constitue des instructions et des consignes très précises ; qu'il s'ensuit que Madame Y... travaillait selon les horaires et les lieux indiqués par l'Association à qui elle devait rendre compte de son activité en remplissant et en communiquant des fiches de présence, que L'ADMR contrôlait et comptabilisait sa présence et lui imposait des instructions et des ordres. Que la structure mise en place correspondait à un service organisé au sein duquel les conditions de travail étaient déterminées unilatéralement par l'ADMR et qu'il existait entre la salariée et cette association un lien de subordination tel que le véritable employeur de Madame Y... était l'ADMR. Que quelles que soient les fonctions réellement exercées par Madame Y... auprès de Madame X... et la dépendance de cette dernière, le contrat de travail mentionne expressément que la salariée était embauchée en qualité d'employée de maison au niveau IV de la convention collective du particulier-employeur. Qu'en l'absence de tout avenant et de tout accord de la part de la salariée, celle-ci était en droit de percevoir le minimum conventionnel correspondant à cette classification. Que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont allouée à Madame Y... le rappel de salaire sollicité sur cette base. Que l'équité commande d'accorder à la salariée une indemnité supplémentaire de 1. 200 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « l'ADMR conteste avoir la qualité d'employeur de Madame Marguerite Y... ; qu'elle se prévaut d'une part, du contrat de travail formalisé par acte sous seing privé du 2 mai 2003 entre la demanderesse et Madame Berthe X... et, d'autre part, du contrat de mandat souscrit par Madame Berthe X... ; qu'elle ajoute que l'orientation, par le Conseil Général, de Madame Berthe X... vers un service mandataire davantage que vers un service prestataire d'aide à domicile, supposait nécessairement qu'elle avait capacité à souscrire un contrat de travail avec Madame Marguerite Y... ; que Madame Berthe X... a exercé ses prérogatives d'employeur en recrutant la salariée, en signant ses fiches de présence, la déclaration d'employeur pour les emplois familiaux, le bulletin d'adhésion à l'IRCEM, une autorisation de prélèvement par l'ADMR du montant des salaires ; que seule Madame Berthe X... était en mesure de surveiller, à son domicile, l'activité de la salariée ; que le rôle de l'ADMR se limitait à l'organisation des plannings ; que toutefois, une vue plus générale des relations entretenues par Madame Marguerite Y... avec l'ADMR laisse apparaître que la salariée était employée chez plusieurs mandants de l'ADMR, à savoir, notamment, Madame Z..., Madame A..., Madame B..., Monsieur C..., Monsieur D... ; que les horaires fixés aux contrats de travail rédigés par l'ADMR étaient tels qu'ils permettaient l'emploi en parallèle de Madame Marguerite Y... chez ces différents mandants ; que L'ADMR déterminait, sans se tenir aux contrats de travail désignés entre ses mandants et la salariée, le montant des rémunérations ; qu'ainsi alors que le niveau de qualification visé au contrat de travail signé par Madame Marguerite Y... et Madame Berthe X... le 2 mai 2003 était de IV, la rémunération arrêtée par l'ADMR était celle d'une employée de maison de niveau inférieur ; qu'à deux reprises, les 25 juillet et 24 octobre 2003, L'ADMR s'est substituée aux mandants pour conclure directement des contrats de travail avec Madame Marguerite Y... ; qu'elle a complété et fait signer le 13 mai 2004 à Madame Marguerite Y... un contrat de travail pour le compte de Madame A... sans veiller à recueillir la signature de cette dernière ; qu'il ressort de ces constatations que, d'une part, la structure mise en place correspondait à un service organisé au sein duquel les conditions de travail étaient déterminées unilatéralement par l'association et que, d'autre part, l'ADMR a excédé les termes des mandats qui lui étaient confiés ; que Madame Marguerite Y... était subordonnée à l'ADMR, de sorte que cette association était son véritable employeur ; vu les articles 1134 du Code Civil et 6-2 de la convention collective des salariés du particulier employeur ; que la qualification visée au contrat de travail de Madame Marguerite Y... est celle d'employée de maison de niveau IV ; que la rémunération conventionnelle d'un tel emploi ne peut être inférieure à 8 fois le salaire horaire pour 12 heures de présence de nuit ; que nonobstant la nature du travail effectivement réalisé par Madame Marguerite Y... au domicile de Madame Berthe X..., le niveau de son emploi, déterminant le montant de sa rémunération, ne pouvait être modifié unilatéralement par son employeur ; que partant, il doit être fait droit à la demande de rappel de salaire exposée par Madame Marguerite Y... » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE selon l'article L. 7232-6 du Code du travail L. 129-1 ancien dans sa rédaction applicable à l'espèce, les associations dont les activités concernent exclusivement les services rendus aux personnes physiques à leur domicile doivent être agréées par l'État lorsqu'elles poursuivent au moins l'un des deux objets suivants : 1/ le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs, ainsi que, pour le compte de ces dernières, l'accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de ces travailleurs ; 2/ l'embauche de travailleurs pour les mettre, à titre onéreux, à la disposition de personnes physiques ; qu'il en résulte que, dans le cas visé au 1/ de ce texte, les personnes physiques étant les employeurs des travailleurs, l'association remplit le rôle d'un simple mandataire chargé d'accomplir les formalités administratives et d'assurer les déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi ; que la cour d'appel s'est bornée à constater que l'association ADMR procédait au nom de Madame X... à différentes formalités administratives, comptables et réglementaires et que la salariée était également employée, simultanément, par plusieurs autres mandants de l'association ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les éléments qu'elle retenait ne permettaient pas de conclure que l'association avait dépassé, en ce qui concerne l'aide à domicile de Madame X..., son rôle de mandataire et s'était comportée comme employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il était constant aux débats que les horaires de travail de Madame Y... auprès de Madame X... étaient expressément stipulés au contrat de travail en date du 2 mai 2003 puis à l'avenant en date du 1er juillet 2003, tous deux conclus entre la salariée et la personne aidée, de telle sorte que ces horaires étaient fixes et qu'ils n'étaient pas déterminés, en cours d'exécution du contrat, par l'association ADMR ; qu'en se bornant à relever, pour dire que l'association était le véritable employeur, que ces horaires étaient fixés de façon à permettre à la salariée d'occuper plusieurs emplois en parallèle auprès de différents mandants de l'association, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ne permettant pas de caractériser un dépassement, par l'association, de son rôle de mandataire, violant ainsi de plus fort l'article L. 7232-6 du Code du travail.