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31/10/2012 | FRANCE | N°11-20529

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 octobre 2012, 11-20529


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X..., ès qualités de mandataire judiciaire de la société Eliot Press de ce qu'il reprend l'instance ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 mai 2011), que M. Y... a été engagé le 2 janvier 2004 en qualité de "rédacteur polyvalent" par la société Eliot Press, pour un emploi déclaré à temps partiel de 84,5 heures par mois ; qu'à la suite de son licenciement pour faute grave, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment

en requalification de son contrat de travail en contrat à plein temps et en pai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X..., ès qualités de mandataire judiciaire de la société Eliot Press de ce qu'il reprend l'instance ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 mai 2011), que M. Y... a été engagé le 2 janvier 2004 en qualité de "rédacteur polyvalent" par la société Eliot Press, pour un emploi déclaré à temps partiel de 84,5 heures par mois ; qu'à la suite de son licenciement pour faute grave, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment en requalification de son contrat de travail en contrat à plein temps et en paiement de diverses sommes ; que M. X... désigné en qualité de mandataire judiciaire de la société à la suite de son placement sous sauvegarde de justice le 14 novembre 2011, est intervenu à l'instance ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir les demandes du salarié, alors, selon le moyen :
1°/ que même en l'absence de contrat de travail écrit mentionnant la durée de travail et de sa répartition, un employeur peut rapporter la preuve que la relation de travail était à temps partiel en établissant, d'une part, la durée exacte du travail convenue, et, d'autre part, que le salarié n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que le salarié travaillait pour « un "mi-temps" mentionné dans les documents de travail susvisés », c'est-à-dire le « planning horaire général de temps de travail affiché dans l'entreprise », l'employeur soulignant que le temps de travail de M. Y... était resté fixe tel que mentionné sur ses fiches de paie ; que l'employeur faisait par ailleurs valoir qu'il n'était pas tenu de se tenir à sa disposition permanente du fait de son rythme de travail puisqu'il était gérant d'une société JLS ayant une activité de conseil en informatique et avait notamment, parallèlement à son activité salariée, réalisé pour divers clients de nombreux sites internet, dont il assurait en outre l'administration ; que pour l'établir l'employeur versait aux débats divers éléments de preuve ; qu'en retenant que la relation de travail aurait été à temps plein sans s'expliquer sur le fait que M. Y... avait d'autres activités professionnelles, ce dont il pouvait résulter qu'il connaissait à l'avance ses rythmes de travail et n'était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de la société Eliot Press, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3123-14 du code du travail ;
2°/ que les juges du fond doivent répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur se prévalait de l'aveu par le salarié que la relation de travail était à mi-temps en se fondant, d'une part, sur un courrier électronique du salarié daté du décembre 2003 indiquant lui-même qu'il convenait de « déclarer un temps partiel » et du compte-rendu de l'entretien préalable établi par le conseiller du salarié indiquant que « M. Y..., non cadre, est en charge des matériels informatiques de la société à mi-temps » ; qu'en omettant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent examiner les éléments de preuve versés aux débats ; qu'en jugeant, en l'espèce, que le salarié était employé à temps plein sans examiner son courrier électronique du 30 décembre 2003 dont il résultait que le salarié avait lui-même sollicité une embauche à mi-temps, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ subsidiairement, qu'en accordant au salarié un rappel de salaire sur la base de 39 heures de travail par semaine quand la cour d'appel avait retenu que le salarié devait être rémunéré pour un temps plein soit une durée de 35 heures par semaine conformément à la loi et à l'horaire de travail applicable dans l'entreprise, la cour d'appel a violé L. 3121-10 du code du travail ;
Mais attendu que l'absence d'écrit mentionnant la durée hebdomadaire, ou le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, fait présumer que l'emploi est à temps complet, et que l'employeur qui conteste cette présomption peut rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
Et attendu qu'après avoir constaté qu'aucun contrat écrit n'avait été établi, et apprécié souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'avait pas à s'expliquer sur les pièces qu'elle écartait, ni à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a retenu que le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prévoir ses rythmes de travail ;
D'où il suit que le moyen, nouveau et irrecevable, comme étant mélangé de fait et de droit, en sa quatrième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eliot Press et M. X..., ès qualités de mandataire judiciaire de la société Eliot Press, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Eliot Press et M. X..., ès qualités de mandataire judiciaire de la société Eliot Press, à payer la somme de 2 500 euros à M. Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Eliot press et M. X..., ès qualités
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à temps plein et d'AVOIR en conséquence condamné la société ELIOT PRESS à payer à M. Y... les sommes de 39.785,46 euros pour rappel de salaire 2004, 40.109.94 euros pour rappel de salaire 2005, 30.886.00 euros pour rappel de salaire de janvier à octobre 2006, 3.439.86 euros pour solde de 13ème mois 2006, outre une somme par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'« en application de l'article L.3123-14 du Code du travail, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue, et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet ; il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; en l'espèce, il n'existe aucun contrat de travail écrit ; l'employeur ne peut se prévaloir d'aucune mention contractuelle respectant le texte ci-dessus retranscrit ; il ne suffit pas de se référer à un planning horaire général de temps de travail affiché dans l'entreprise, dès lors qu'aucune contractualisation de ce planning, en l'absence de toute preuve de son acceptation par le salarié concerné, n'a été convenue entre les seules parties concernées par le litige ; aucun accord sur la durée hebdomadaire de la prestation ne peut être opposé au salarié, peu important les témoignages produits par l'intimée, largement contestés par l'appelant, relatifs à une présence dans l'entreprise autorisée pour effectuer d'autres tâches que celles objet de l'emploi ; ces témoignages ne font d'ailleurs aucune allusion à une durée de temps de travail exclusivement consacrée à l'emploi ; il n'existe en tout état de cause aucune stipulation quelconque sur la répartition de la durée du travail prétendument à temps partiel, ni aucune indication sur un éventuel délai de prévenance relatif aux jours de travail souhaités par l'employeur, alors que ne sont pas contestées par lui notamment des heures de présence en nombre important un samedi et un dimanche en juillet 2006 ; M. Y... s'est manifestement trouvé en état d'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler ; il s'est tenu constamment à disposition, sa présence chaque jour, non contestée non plus par la société ELIOT PRESS et au contraire mise en avant, le confirmant en tant que de besoins, ainsi que la rémunération des heures supplémentaires précitées ; il s'ensuit que la demande en paiement de sommes calculées par reconstitution du salaire pour un travail accompli à temps complet sur la base de celui d'un "mi-temps" mentionné dans les documents de travail susvisés, soit par doublement, doit être accueillie; le jugement qui a rejeté cette demande doit être infirmé ; les montants sollicités ne sont pas plus contestés en tant que tels par la société ELIOT PRESS ; les rappels de salaire en tout cas jusqu'à la notification de la mise à pied conservatoire dans le cadre du licenciement pour faute grave sont par elle dus ; il y a lieu de la condamner au paiement des sommes de : 39.785,46 euros pour rappel de salaire 2004, 40.109.94 euros pour rappel de salaire 2005, 30.886.00 euros pour rappel de salaire de janvier à octobre 2006, 3.439.86 euros pour solde de 13ème mois 2006, dû quelle que soit la cause du licenciement et d'ailleurs acquitté partiellement ; s'agissant en revanche de la réclamation d'un rappel pour indemnité de congés payés "au 20 novembre 2006", bien que non critiquée spécifiquement par la société ELIOT PRESS, la cour relève que la somme de 4.333,36 euros prétendument due à ce titre a bien été versée en à la rupture des relations contractuelles; le bulletin de salaire au 20 novembre 2006 mentionne expressément le décompte des jours de congés payés dus et la somme correspondante pour le montant ci-avant ; la demande ne saurait donc être accueillie » ;
1) ALORS QUE même en l'absence de contrat de travail écrit mentionnant la durée de travail et de sa répartition, un employeur peut rapporter la preuve que la relation de travail était à temps partiel en établissant, d'une part, la durée exacte du travail convenue, et, d'autre part, que le salarié n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, la Cour d'Appel a elle-même constaté que le salarié travaillait pour « un "mi-temps" mentionné dans les documents de travail susvisés », c'est-à-dire le « planning horaire général de temps de travail affiché dans l'entreprise », l'employeur soulignant que le temps de travail de M. Y... était resté fixe tel que mentionné sur ses fiches de paie ; que l'employeur faisait par ailleurs valoir qu'il n'était pas tenu de se tenir à sa disposition permanente du fait de son rythme de travail puisqu'il était gérant d'une société JLS ayant une activité de conseil en informatique et avait notamment, parallèlement à son activité salariée, réalisé pour divers clients de nombreux sites internet, dont il assurait en outre l'administration ; que pour l'établir l'employeur versait aux débats divers éléments de preuve ; qu'en retenant que la relation de travail aurait été à temps plein sans s'expliquer sur le fait que M. Y... avait d'autres activités professionnelles, ce dont il pouvait résulter qu'il connaissait à l'avance ses rythmes de travail et n'était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de la société ELIOT PRESS, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3123-14 du Code du travail ;
2) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur se prévalait de l'aveu par le salarié que la relation de travail était à mi-temps en se fondant, d'une part, sur un courrier électronique du salarié daté du décembre 2003 indiquant lui-même qu'il convenait de « déclarer un temps partiel » et du compte-rendu de l'entretien préalable établi par le conseiller du salarié indiquant que « M. Y..., non cadre, est en charge des matériels informatiques de la société à mi-temps » ; qu'en omettant de répondre à ces conclusions, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3) ALORS en outre QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent examiner les éléments de preuve versés aux débats ; qu'en jugeant en l'espèce que le salarié était employé à temps plein sans examiner son courrier électronique du 30 décembre 2003 dont il résultait que le salarié avait lui-même sollicité une embauche à mi-temps, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS subsidiairement QU'en accordant au salarié un rappel de salaire sur la base de 39 heures de travail par semaine quand la Cour d'Appel avait retenu que le salarié devait être rémunéré pour un temps plein soit une durée de 35 heures par semaine conformément à la loi et à l'horaire de travail applicable dans l'entreprise, la Cour d'Appel a violé L.3121-10 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-20529
Date de la décision : 31/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 03 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 oct. 2012, pourvoi n°11-20529


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20529
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