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24/10/2012 | FRANCE | N°11-30387

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 octobre 2012, 11-30387


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 avril 2011) que M. Eric X... a été engagé, le 1er août 1996, en qualité de mécanicien, par son frère M. Pascal X... qui exploite un garage ; que, par lettre recommandée du 7 mars 2007, M. Eric X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes, d'une part, à caractère indemnitaire au titre de la rupture de son contrat de travail, et, d'autre part, en paiement d'heures supplémentaires et d'une indemnité

pour travail dissimulé ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 avril 2011) que M. Eric X... a été engagé, le 1er août 1996, en qualité de mécanicien, par son frère M. Pascal X... qui exploite un garage ; que, par lettre recommandée du 7 mars 2007, M. Eric X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes, d'une part, à caractère indemnitaire au titre de la rupture de son contrat de travail, et, d'autre part, en paiement d'heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. Pascal X... fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à M. Eric X... diverses sommes à titre d'heures supplémentaires et de congés payés correspondants, d'indemnité pour travail dissimulé, d'indemnité pour rupture abusive, d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés correspondants et d'indemnité conventionnelle de licenciement alors, selon le moyen :
1°/ que le paiement d'heures supplémentaires n'est dû que si l'employeur en a demandé ou au moins toléré la réalisation ; qu'en ne montrant pas en quoi M. Pascal X... avait agi de la sorte, quand il contestait avoir jamais autorisé les prétendues heures supplémentaires dont le paiement était réclamé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-11 du code du Travail ;
2°/ que les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile ; qu'en se bornant à relever un moyenne mensuelle, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-10, L. 3121-20 et L. 3121-22 du code du travail ;
3°/ que les juges du fond doivent fixer le quantum des heures supplémentaires dont ils énoncent l'existence ; qu'en se bornant à fixer une moyenne mensuelle approximative, sans déterminer le nombre total d'heures supplémentaires accomplies par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
4°/ que la condamnation de l'employeur pour travail dissimulé implique qu'il soit établi qu'il a intentionnellement omis de mentionner certaines heures de travail sur le bulletin de paie ; qu'en se bornant à relever que M. Pascal X... connaissait les horaires de son salarié, sans constater qu'il avait de façon intentionnelle mentionné un nombre d'heures travaillées inexact sur les bulletins de paie, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-3 du code du travail ;
5°/ qu'en cas de prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail il appartient au juge de caractériser la faute de l'employeur et d'apprécier son degré de gravité comme justifiant la prise d'acte ; qu'en ayant alors uniquement relevé que M. Eric X... « embauché en qualité de mécanicien, avait en outre la charge de l'accueil des clients et assurait seul la formation des apprentis » pour justifier la prise d'acte de celui-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
6°/ subsidiairement, que l'indemnité pour travail dissimulé ne peut pas se cumuler avec une indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en condamnant M. Pascal X... à payer à la fois ces deux indemnités, la cour d'appel a violé l'article L. 8223-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a relevé que les heures litigieuses étaient rendues nécessaires par les tâches d'accueil et de formation d'apprentis ajoutées à ses fonctions contractuelles de mécanicien par l'employeur et que celui-ci ne pouvait ignorer les horaires pratiqués par le salarié ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel en retenant que le salarié effectuait 20 heures supplémentaires par mois et moins de huit heures par semaine a fait ressortir le nombre d'heures supplémentaires accomplies chaque semaine par le salarié ;
Attendu, en outre, qu'ayant rappelé que pour que soit caractérisé le travail dissimulé le salarié doit apporter la preuve de l'intention de l'employeur de se soustraire aux dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail, la cour d'appel, qui a constaté que le salarié accomplissait depuis plusieurs années un temps de travail supérieur à la durée légale de travail et que l'employeur ne l'ignorait pas, a caractérisé une telle intention de l'employeur ;
Attendu, enfin, qu'ayant constaté qu'il était établi que l'employeur n'avait pas respecté ses obligations en omettant de rémunérer les heures supplémentaires du salarié, la cour d'appel a estimé que ce manquement était de nature à justifier la prise d'acte de la rupture par le salarié aux torts de l'employeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Pascal X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer 2 500 euros à M. Eric X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour M. Pascal X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable l'appel formé par Monsieur Eric X... ;
AUX MOTIFS QUE la lettre d'appel comporte les mentions prescrites par l'article R. 1461-1 du Code du Travail ainsi qu'à l'article 58 du Code de Procédure Civile en ce qu'il est indiqué sur quelles dispositions du jugement porte l'appel ainsi que le nom du représentant de l'appelant, à savoir son avocat ;
ALORS QUE la lettre par laquelle il est fait appel d'un jugement prud'homal doit comporter à peine de nullité les indications imposées par l'article 58 du Code de Procédure Civile, c'est-à-dire pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur et les nom, prénom et domicile du défendeur ; que la lettre d'appel ne comporte aucune indication sur l'intimé et est muette sur la nationalité et la profession de l'appelant ; qu'en l'estimant conforme à l'article 58 précité, la Cour d'Appel l'a dénaturée, en violation de l'article 4 du Code de Procédure Civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Pascal X... à verser à Monsieur Eric X... diverses sommes à titre d'heures supplémentaires et de congés payés correspondants, d'indemnité pour travail dissimulé, d'indemnité pour rupture abusive, d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés correspondants et d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE résulte de l'article L. 3171-4 nouveau du code du travail, s'agissant des modalités tic la preuve des heures supplémentaires, que le salarié doit fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, qu'en conséquence le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié, qu'il doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ; il est produit par le salarié plusieurs témoignages exposant qu'il effectuait dans l'atelier outre les tâches de mécanicien, l'accueil des clients, la formation des apprentis, qu'il pouvait être présent le soir après 19 heures et le matin avant 8 heures 30 ; l'employeur ne produit aucun élément sur les heures effectuées, se limitant à indiquer l'horaire de travail et l'absence d'instructions de sa part pour effectuer des heures supplémentaires ; les attestations produites par Monsieur Pascal X... ne contredisent pas celles de son frère quant à ses horaires de travail mais insistent sur le mauvais accueil faits aux témoins, clients du garage ; il n'est pas établi que Monsieur Eric X... aurait pris des congés en avril 2006 ; par contre il en a pris en mai qui ont été décomptés de son bulletin de salaire, ce qui n'exclut pas des heures supplémentaires ; il est manifeste qu'il a effectué des heures supplémentaires durant toute son activité, sans toutefois que soit apportée jour par jour la preuve des dépassements qu'il retient dans ses tableaux et sachant que, s'agissant d'une entreprise familiale, une certaine souplesse des horaires, alléguée par Monsieur Pascal X..., n'est pas contestée ; en application de la convention collective des Services à l'automobile, la majoration pour heures supplémentaires est de 25 % pour les 8 premières heures et 50 % au delà ; il apparaît que Monsieur Eric X... a effectué environ 20 heures supplémentaires par mois, soit, en tout état de cause, moins de 8 par semaine ; si des majorations variables pour heures supplémentaires au taux de 10 % apparaissent sur certains bulletins de salaire, sans que le nombre total d'heures ne dépasse l'horaire contractuel de 169 heures, l'employeur n'apporte aucune explication sur leur mode de calcul ; en tenant compte de l'augmentation des salaires au cours des 5 années non prescrites, le total des heures supplémentaires sera évalué à la somme de 10 000 €, augmentée des congés payés afférents, soit 1000 € ; le seuil de déclenchement du repos compensateurs de 220 heures par an n'est ainsi pas atteint et que Monsieur Eric X... ne peut prétendre à l'indemnisation du préjudice résultant de la privation du dit repos ; pour que soit caractérisée la réalisation d'un travail dissimulé, le salarié doit apporter la preuve de l'intention de l'employeur de se soustraire aux dispositions rappelées à l'article L. 8221-5 du code du travail ; Monsieur Pascal X... ne pouvait ignorer les horaires pratiqués par son salarié ; la pratique d'un travail dissimulé est caractérisée ; en application des dispositions de l'article L. 8223 du code du travail, l'employeur sera condamné à payer à Monsieur Eric X... la somme de 9048 € ; il a été démontré ci-dessus que l'employeur n'a pas respecté ses obligations en omettant de rémunérer les heures supplémentaires de Monsieur Eric X... ; il est par ailleurs établi par les attestations produites, y compris par celles de l'employeur émanait de clients faisant état de l'accueil désagréable que leur réservait Monsieur Eric X..., que celui-ci, embauché en qualité de mécanicien avait en outre la charge de l'accueil des clients et assumait seul la formation des apprentis ; il en résulte que la prise d'acte de rupture effectuée par Monsieur Eric X... a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit à indemnités ; la cour, au regard de la taille de l'entreprise, de la durée de l'emploi du salarié et du préjudice qui en est résulté pour lui, est en mesure de fixer à la somme de 7 000 € l'indemnité qui lui est due pour rupture abusive ; les sommes réclamées pour l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité conventionnelle de licenciement ne sont pas critiquées en leurs montants ; il sera fait droit aux demandes ; il y a lieu d'ordonner la remise des bulletins de salaire rectifiés, de l'attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes à la présente décision ;
1°) – ALORS, D'UNE PART, QUE le paiement d'heures supplémentaires n'est dû que si l'employeur en a demandé ou au moins toléré la réalisation ; qu'en ne montrant pas en quoi Monsieur Pascal X... avait agi de la sorte, quand il contestait avoir jamais autorisé les prétendues heures supplémentaires dont le paiement était réclamé, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-11 du Code du Travail ;
2°) – ALORS, D'AUTRE PART, QUE les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile ; qu'en se bornant à relever un moyenne mensuelle, la Cour d'Appel a violé les articles L. 3121-10, L. 3121-20 et L. 3121-22 du Code du Travail ;
3°) – ALORS, EN OUTRE, QUE les juges du fond doivent fixer le quantum des heures supplémentaires dont ils énoncent l'existence ; qu'en se bornant à fixer une moyenne mensuelle approximative, sans déterminer le nombre total d'heures supplémentaires accomplies par le salarié, la Cour d'Appel a violé l'article L. 3171-4 du Code du Travail ;
4°) – ALORS QUE PAR AILLEURS la condamnation de l'employeur pour travail dissimulé implique qu'il soit établi qu'il a intentionnellement omis de mentionner certaines heures de travail sur le bulletin de paie ; qu'en se bornant à relever que Monsieur Pascal X... connaissait les horaires de son salarié, sans constater qu'il avait de façon intentionnelle mentionné un nombre d'heures travaillées inexact sur les bulletins de paie, la Cour d'Appel a violé l'article L. 8221-3 du Code du Travail ;
5°) – ALORS, DE MEME, QU'en cas de prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail il appartient au juge de caractériser la faute de l'employeur et d'apprécier son degré de gravité comme justifiant la prise d'acte ; qu'en ayant alors uniquement relevé que Monsieur Eric X... «embauché en qualité de mécanicien, avait en outre la charge de l'accueil des clients et assurait seul la formation des apprentis » pour justifier la prise d'acte de celui-ci, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;
6°) – ALORS ENFIN, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'indemnité pour travail dissimulé ne peut pas se cumuler avec une indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en condamnant Monsieur Pascal X... à payer à la fois ces deux indemnités, la Cour d'Appel a violé l'article L. 8223-1 du Code du Travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-30387
Date de la décision : 24/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 05 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 oct. 2012, pourvoi n°11-30387


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.30387
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