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10/10/2012 | FRANCE | N°11-17898

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 octobre 2012, 11-17898


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 28 septembre 2010), que M. X... a été engagé le 1er décembre 1998 par la société Optique de Bourbon en qualité d'opticien ; qu'ayant refusé la proposition de modification de ses fonctions d'opticien itinérant au profit d'un poste sédentaire avec modification de sa rémunération et suppression de son véhicule de fonction, il a été licencié pour motif économique, le 3 mars 2008 ;
Attendu que le salarié fait grief à l

'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans ca...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 28 septembre 2010), que M. X... a été engagé le 1er décembre 1998 par la société Optique de Bourbon en qualité d'opticien ; qu'ayant refusé la proposition de modification de ses fonctions d'opticien itinérant au profit d'un poste sédentaire avec modification de sa rémunération et suppression de son véhicule de fonction, il a été licencié pour motif économique, le 3 mars 2008 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur ; que la lettre de licenciement invoque une restructuration de l'entreprise rendue nécessaire par des difficultés économiques et une nouvelle législation sur l'optique ; qu'en se bornant à relever, tout en constatant que la nouvelle législation était sans impact sur le poste occupé par le salarié, que les difficultés économiques étaient établies et justifiaient à elles seules le licenciement, sans caractériser en quoi ces difficultés économiques justifiaient la modification du contrat de travail proposée par l'employeur et refusée par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 233-3 du code du travail ;
2°/ que l'employeur doit exécuter sérieusement et loyalement son obligation de reclassement, et le salarié peut prétendre dans ce cadre à tous les postes que sa compétence ou son expérience professionnelle lui permet d'occuper ; que le salarié faisait valoir que l'employeur lui avait refusé un poste vacant de directeur de magasin susceptible de correspondre à sa compétence et à son expérience ; qu'en considérant que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, sans rechercher si le refus de l'employeur de confier ce poste au salarié qu'il envisageait de licencier était motivé par des raisons objectives, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant le caractère sérieux du motif économique de licenciement invoqué, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, a estimé, par motifs propres et adoptés, que les difficultés économiques dont l'employeur faisait état justifiaient la suppression de l'emploi d'opticien itinérant occupé par le salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991 rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes tendant à ce qu'il soit dit et jugé que son licenciement ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse, et à la condamnation de la société Optique du Bourdon à lui verser des dommages-intérêts subséquents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les difficultés économique, qui sont à apprécier à la date de la notification du licenciement soit en mars 2008, sont avérées et donc réelles et sérieuses à la lecture des bilans de l'exercice 06-/2006-06/2007, marqués par une perte de près de 23K euros (après 127K euros de bénéfice lors de l'exercice précédent) puis de l'exercice suivant 06/2007-06/2008 révélant une perte de l'ordre de 165K euros ; la réduction de l'excédent brut d'exploitation (perte de près de 25K euros en 2007/2008 comparé à l'excédent de 60K euros à l'exercice N-1) de même que la faiblesse du résultat d'exploitation repris dans la lettre de licenciement vont dans le même sens ; la circonstance au demeurant fortement contestée par la société que, selon le salarié, ces résultats ne seraient que la conséquence d'une politique de gros investissements (création de magasin, transfert du siège et embauches) opérée entre 2005 et 2007 est sans effet sur le constat fait par les experts comptables pointant en septembre 2008 une insuffisance de rentabilité de l'entreprise de nature à causer rapidement un état de cessation des paiements ; l'employeur, qui réfute la création d'un siège, d'un atelier et de deux points de vente limite l'embauche à des contrats de professionnalisation outre une simple embauche ; l'appréciation d'ordre général donnée par le salarié à ce secteur d'activité qu'il considère en pleine croissance, y compris chez les concurrents, ne résiste pas à l'analyse comptable des bilans précités qui dans un contexte de durcissement de la concurrence révèlent une persistance des difficultés économiques confirmées par l'augmentation de l'endettement permanent de l'entreprise (920K euros en 2007, 898K euros en 2006 et 701K euros en 2005) et un nouveau résultat déficitaire de près de 25K euros en 2007/2008 ; dans ce contexte, qui exclut que le licenciement dont s'agit aurait eu pour but de réaliser des économies voire des bénéfices, cette mesure repose sur une cause réelle et sérieuse, peu important les fruits apportés depuis par l'effort de restructuration ; il n'est pas nécessaire d'examiner le second motif du licenciement lié à l'impact d'une nouvelle législation contraignant l'employeur à disposer d'un opticien diplômé, et invoqué curieusement par l'entreprise à l'occasion de la suppression d'un de ces postes d'opticien dont le caractère itinérant est sans effet direct à cet égard ; le licenciement étant justifié par des difficultés économiques à l'origine de la réorganisation ou restructuration de l'entreprise, l'absence de référence à la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise est indifférente ; aucune nullité du licenciement n'est encourue pour ce licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ; la décision déférée est donc confirmée et l'appelant est débouté de ces demandes contraires, y compris celles visant à la réparation d'un préjudice distinct et à la communication des éléments comptables des exercices 2008 et 2009 et du livre du personnel alors qu'il est attesté par l'expert-comptable que l'effectif moyen de l'entreprise a baissé depuis l'année 2007 jusqu'en 2009 inclus ; Sur l'obligation de reclassement : ; l'obligation de reclassement étant un élément constitutif de la cause économique de licenciement, et alors que la proposition de modification du contrat de travail ne constitue pas un reclassement, il convient de rechercher si entre le moment où il a été informé du refus de l'appelant d'accepter la modification de son contrat de travail, soit après le 21/01/08 jusqu'à la notification du licenciement de l'intéressé intervenue le 03/03/08, l'employeur a vainement tenté son reclassement au sein de l'entreprise ; le salarié verse aux débats à l'appui de l'allégation, selon laquelle l'employeur fait partie d'un groupe, un communiqué de réunion du 26/11/03 faisant état de la reprise, au lieu et place de la société Optika, par la société Optinvest de la société Optique de Bourbon ; cependant, cette prise de contrôle par une SAS "composée de 4 personnes" qui devient actionnaire majoritaire de la SA Otique de Bourbon ne démontre pas que l'employeur appartient à un groupe au sein duquel les salariés peuvent être permutés ; par pli précité du 21/12/07, l'employeur a envisagé au profit de Eric X... une possibilité de reclassement dans un autre établissement que celui de Saint-Benoît en cas de refus de changement d e son contrat de travail ; si le salarié a pu se porter candidat avec d'autres à un autre poste de directeur à Saint Pierre cette faculté, cette opportunité certes positive pour l'intéressé, ne vaut pas offre de reclassement laquelle exclut une sélection préalable ; en revanche, l'employeur justifie par l'envoi de télécopies à des partenaires actionnaires présents notamment en France métropolitaine (G. Scherz et A. Deleflie), à un membre du Groupe Luz, à des concurrents du département (Optic 2000, Atol et Chevillard) avoir recherché des possibilités de reclassement dans le secteur concerné et dans des secteurs voisins tant en interne qu'en externe ; à cela s'ajoute la proposition faite pour un emploi d'opticien responsable à compter 01/04/08 à Sainte-Clotilde (B.2.1. au coefficient 220) ; l'appelant demande vainement le registre du personnel alors qu'il est versé aux débats une attestation digne de foi émanant de l'expert comptable certifiant une baisse régulière de l'effectif moyen au sein de l'entreprise qui suffît à établir qu'aucune embauche nouvelle n'a pu avoir lieu depuis l'année 2007, puisque l'entreprise comprenait 88 salariés en 2007, 83 salariés en 2008 et 80 salariés en 2009 ; dans ce contexte, il ne peut être soutenu que l'employeur aurait pu augmenter ses effectifs au cours de la période de mise en oeuvre de la procédure de licenciement ; l'employeur a donc satisfait sérieusement et loyalement à son obligation de reclassement exigée par l'article L. 1233-4 du Code du travail relativement à des emplois relevant de la catégorie de celui qu'il occupait jusqu'alors ou d'un emploi équivalent où à défaut un emploi de catégorie inférieure, ce qui n'oblige pas l'employeur à proposer un emploi de catégorie supérieure (poste de cadre) ; l'appréciation du caractère réel et sérieux du licenciement dont s'agit n'est donc pas affectée par l'accomplissement de cette obligation patronale ; il est observé à cet égard que suite à son souhait exprimé en fin juillet 2008 de bénéficier de la priorité de réembauchage, le salarié a été vainement destinataire d'une offre d'emploi portant sur un responsable technique de magasin (Opticien au coefficient 240 catégorie Cadre) » (arrêt attaqué, p. 6 à 8) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'en l'espèce, le licenciement de Monsieur X... Eric a été notifié le 28 février 2008 en lettre recommandée avec accusé réception pour motif économique : - des difficultés économiques réelles, grave et persistantes ; - une nouvelle législation tirée du code de la santé publique obligeant le défendeur d'employer des opticiens "diplômés", laissant au défendeur aucune autre alternative que de supprimer le poste de travail d'opticien itinérant ; qu'une convention de reclassement personnalisé a été proposée au demandeur ; qu'il bénéficiait d'une priorité de réembauchage, à condition qu'il fasse valoir cette priorité dans les était imparti ; que toutes les solutions de reclassement proposées par l'employeur et entrant dans le cadre des dispositions légales ont été refusées ; que toutes les difficultés économiques ont été confirmées par le rapport de l'expert comptable ; qu'en conséquence, le licenciement pour motif économique est fondé ; que le demandeur réclame la somme de 182 750,00 € au titre d'indemnité pour licenciement abusif ; qu'en l'espèce, le demandeur soutient que sa demande est fondée car son licenciement a été notifié pour économique et non sur le refus de la proposition de modification de son contrat de travail ; que le défendeur a usé de toutes les solutions de reclassement possibles et refusées par le demandeur ; par ailleurs, le Conseil dit que le licenciement pour motif économique est justifié ; en conséquence, le Conseil déboute Monsieur X... Eric de sa demande d'indemnité pour licenciement abusif » (jugement entrepris, p.5) ;
1) ALORS QU'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur ; que la lettre de licenciement invoque une restructuration de l'entreprise rendue nécessaire par des difficultés économiques et une nouvelle législation sur l'optique ; qu'en se bornant à relever, tout en constatant que la nouvelle législation était sans impact sur le poste occupé par le salarié, que les difficultés économiques étaient établies et justifiaient à elles seules le licenciement, sans caractériser en quoi ces difficultés économiques justifiaient la modification du contrat de travail proposée par l'employeur et refusée par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L 1233-3 du code du travail ;
2) ALORS QUE l'employeur doit exécuter sérieusement et loyalement son obligation de reclassement, et le salarié peut prétendre dans ce cadre à tous les postes que sa compétence ou son expérience professionnelle lui permet d'occuper ; que le salarié faisait valoir que l'employeur lui avait refusé un poste vacant de directeur de magasin susceptible de correspondre à sa compétence et à son expérience ; qu'en considérant que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, sans rechercher si le refus de l'employeur de confier ce poste au salarié qu'il envisageait de licencier était motivé par des raisons objectives, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17898
Date de la décision : 10/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 28 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 oct. 2012, pourvoi n°11-17898


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17898
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