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26/09/2012 | FRANCE | N°11-17134

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 11-17134


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieur

es ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Z...-A..., a été engagée par la société Ambulances Oullinoises (la société) en qualité d'employée service administratif le 11 septembre 2000 ; que le 12 juillet 2007, elle a sollicité le paiement d'heures supplémentaires ; qu'elle a démissionné par lettre du 20 juillet 2007, puis est revenue sur cette démission le 25 juillet ; que l'employeur a, le 26 juillet, accusé réception de la démission et fixé les dates d'exécution du préavis ; que le 7 août 2007, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail ; que la société a été mise en liquidation judiciaire le 25 juin 2011, M. Y...étant désigné comme liquidateur judiciaire ;

Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre de la rupture, l'arrêt retient que la lettre de démission ne contenait l'énoncé d'aucun motif, qu'elle était intervenue entre sa demande écrite de paiement d'heures supplémentaires du 12 juillet 2007, qui n'avait pas été précédée de réclamations orales, et l'entretien prévu le 7 août 2007 au cours duquel l'employeur se réservait d'examiner cette réclamation, qu'elle a démissionné sans attendre l'entretien que l'employeur lui avait proposé et au cours duquel sa réclamation devait être examinée, qu'elle ne pouvait présumer le 20 juillet 2007 la décision de la société, que la précipitation de la salariée ne s'explique que par sa décision de s'engager sans délai dans les liens d'un nouveau contrat de travail, que la créance de rappel de salaire alléguée n'est pas la cause de sa démission, qui est claire et non équivoque ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la salariée avait sollicité le paiement d'heures supplémentaires quelques jours avant sa démission et rétracté celle-ci cinq jours plus tard, ce dont il résultait l'existence de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission la rendant équivoque, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de se prononcer sur les griefs invoqués par la salariée à l'appui de sa prise d'acte, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la démission de Mme Z...-A... était claire et non équivoque et l'a déboutée de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 28 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y..., ès qualités, à payer à Mme Z...-A... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme Z...-A....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la démission de Madame Z...
A... était claire et non équivoque et de l'avoir, en conséquence, déboutée de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; qu'elle entraîne la rupture immédiate de ce contrat et ne peut être rétractée sans l'accord de l'employeur ; qu'en l'espèce, la société Ambulances Oullinoises n'a pas accepté que la salariée revienne sur sa démission du 20 juillet 2007 ; que la prise d'acte postérieure de la rupture du contrat de travail est donc sans effet ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, la lettre de démission de Mme Z...
A... ne contient l'énoncé d'aucun motif ; qu'elle est intervenue entre sa demande écrite de paiement d'heures supplémentaires du 12 juillet 2007, dont rien ne permet de considérer qu'elle avait été précédée de réclamations orales et l'entretien prévu le 7 août 2007 ; que l'employeur se réservait d'examiner la réclamation salariale dont il avait été saisi, à l'issue des congés payés de Mme Z...
A... ; que celle-ci a démissionné sans attendre l'entretien que la société Ambulances Oullinoises lui avait proposé et au cours duquel sa réclamation devait être examinée ; qu'elle ne pouvait présumer le 20 juillet 2007 la décision de la société Ambulances Oullinoises ; que la précipitation de la salariée ne s'explique que par sa décision de s'engager sans délai dans les liens d'un nouveau contrat de travail avec un office notarial ; que ce nouveau lien contractuel a mis obstacle à l'exécution du préavis d'un mois sollicitée par la société Ambulances Oullinoises ; que dans ce contexte, la créance de rappel de salaire alléguée par Mme Z...
A... n'est pas la cause de sa démission, qui est claire et non équivoque ;

ALORS, D'UNE PART, QU'une démission ne peut résulter que d'une manifestation non équivoque de volonté de la part du salarié ; que la démission donnée par un salarié qui justifie qu'un différend antérieur ou contemporain de celle-ci l'avait opposé à son employeur et qui a contesté les conditions de la rupture du contrat de travail dans un très bref délai après celle-ci, est nécessairement équivoque ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la salariée avait demandé, avant sa démission, le paiement de ses heures supplémentaires, demande que la Cour d'appel a jugé fondée et dont l'employeur lui a contesté le droit jusqu'à l'arrêt d'appel ; qu'en outre, la Cour d'appel a relevé que 4 jours après sa démission, la salariée s'était rétractée en expliquant que celle-ci était due au contentieux relatif au paiement des heures supplémentaires ; qu'en décidant néanmoins que la démission était claire et non équivoque, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART QUE le défaut de paiement des heures supplémentaires constitue de la part de l'employeur un manquement à ses obligations de nature à lui imputer la responsabilité de la rupture, de sorte que la salariée ne pouvait pas avoir donné de consentement clair et non équivoque à sa démission ; qu'en décidant au contraire que le défaut de règlement des heures supplémentaires sur plusieurs années que la salariée invoquait légitimement, ne constituait pas une cause de rupture dès lors que la salariée n'aurait formulé qu'une réclamation écrite et aurait fait preuve de précipitation ayant trouvé un autre travail, la Cour d'appel a statué par motifs inopérants et violé les dispositions des articles 1134 du Code civil et les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 et suivants du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17134
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 28 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°11-17134


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17134
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