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20/09/2012 | FRANCE | N°11-20798

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 septembre 2012, 11-20798


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui était employé par la société Champeau Casanave en qualité d'électro-mécanicien, a été victime le 31 mars 2003, d'un accident du travail qui a été reconnu comme étant dû à la faute inexcusable de son employeur par arrêt définitif de la cour d'appel de Bourges du 2 mars 2007 ; qu'après le dépôt du rapport de l'expert commis pour l'examiner, M. X... a demandé à la juridiction de sécurité sociale de fixer le montant de l'indemnisation de ses

préjudices complémentaires et de lui allouer des indemnités au titre de la perte...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui était employé par la société Champeau Casanave en qualité d'électro-mécanicien, a été victime le 31 mars 2003, d'un accident du travail qui a été reconnu comme étant dû à la faute inexcusable de son employeur par arrêt définitif de la cour d'appel de Bourges du 2 mars 2007 ; qu'après le dépôt du rapport de l'expert commis pour l'examiner, M. X... a demandé à la juridiction de sécurité sociale de fixer le montant de l'indemnisation de ses préjudices complémentaires et de lui allouer des indemnités au titre de la perte de salaire subie pendant les périodes d'incapacité temporaire totale et d'incapacité permanente partielle ; que son épouse est intervenue volontairement à l'instance et a demandé à être indemnisée du préjudice moral qu'elle avait subi du fait de l'état de santé de son mari ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de M. et Mme X... :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les demandes formées par Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral, alors, selon le moyen :

1°/ que les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale sont compétentes pour connaître des actions en responsabilité fondées sur l'article 1382 du code civil lorsque ces actions constituent l'accessoire d'une demande principale qui relève du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en déclarant en l'espèce irrecevables les demandes de Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral causé par la faute inexcusable de l'employeur de son mari, quand celles-ci étaient formées accessoirement à la demande principale de M. X... qui sollicitait également la réparation de ses préjudices causés par la faute inexcusable de son employeur ayant conduit à son accident du travail, la cour d'appel a violé ce texte et l'article L. 142-1 du code de la sécurité sociale ;

2°/ qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, le conjoint de la victime survivante d'un accident du travail, qui n'a pas la qualité d'ayant droit au sens de l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale, peut obtenir l'indemnisation de son préjudice personnel selon les règles du droit commun ; que la cour d'appel ne pouvait déclarer en l'espèce irrecevables les demandes de Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral causé par la faute inexcusable de l'employeur de son mari, par des motifs inopérants tirés du décès de son mari et de l'incompétence des juridictions de sécurité sociale, quand la cour d'appel, qui était aussi la juridiction d'appel du droit commun, avait évoqué, en application de l'article 568 du code de procédure civile, l'indemnisation du préjudice personnel subi par Mme X... et était compétente pour statuer sur l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 562 et 568 du code de procédure civile, l'article L. 311-1 du code de l'organisation judiciaire, ensemble les articles 1382 du code civil et L. 451-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale que la juridiction de sécurité sociale, saisie de demandes en réparation des préjudices complémentaires à la suite de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, n'a pas le pouvoir d'accorder au conjoint de la victime qui a survécu à l'accident une indemnisation au titre du préjudice moral ;

Et attendu que ni le caractère accessoire de la demande de Mme X..., ni le fait que la cour d'appel ait évoqué le fond de l'affaire, n'étant de nature à étendre la compétence de la juridiction de sécurité sociale, la cour d'appel a décidé à bon droit que cette demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal et du pourvoi incident de la CPAM, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que pour allouer à M. X... une certaine somme au titre du préjudice résultant de la perte de possibilités de promotion professionnelle, l'arrêt relève qu'il a été dans l'impossibilité de reprendre le métier d'électromécanicien pour lequel il avait été formé après un début de carrière prometteur, qu'il a d'ailleurs été licencié et a été dans l'obligation de se reconvertir, qu'après avoir obtenu un diplôme d'électricien d'équipement, il a créé une entreprise artisanale depuis le 22 février 2011 ;

Qu'en statuant par de tels motifs, insuffisants à faire ressortir le caractère sérieux des chances de promotion professionnelle de la victime avant l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et, sur le second moyen du pourvoi principal et du pourvoi incident de la CPAM :

Vu les articles L. 433-1 et suivants, et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que si l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, dispose qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, c'est à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ;

Attendu que pour allouer à M. X... une indemnisation des pertes de salaire subies pendant la période d'incapacité, l'arrêt énonce qu'au titre de la réparation intégrale, la victime de l'accident du travail a droit à la différence entre les salaires qu'elle aurait perçus de son employeur et les indemnités journalières reçues en application des articles L. 433-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;

Qu'en statuant par de tels motifs, d'où il ressort que le préjudice était, fût-ce de manière incomplète, couvert par le livre précité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum la société Champeau et la société MAAF à payer à M. X... la somme de 20 625 euros à titre de perte de salaires pendant la période d'incapacité et a fixé à 56 000 euros le montant de l'indemnisation complémentaire en ce qu'elle comprend la somme de 25 000 euros au titre de la perte de possibilités de promotion professionnelle, l'arrêt rendu le 13 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés MAAF assurances et Champeau-Casanave, demanderesses au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR fixé l'indemnisation complémentaire de Monsieur Christophe X..., sur le fondement de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale, à la somme de 56.000 € et rappelé que cette indemnité sera versée directement à Monsieur Christophe X... par la Caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre qui en récupérera le montant auprès de la société CHAMPEAU-CASANAVE ;

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Christophe X... est dans l'impossibilité de reprendre le métier d'électromécanicien pour lequel il a été formé, après un début de carrière prometteur ; qu'il a d'ailleurs été licencié et a été dans l'obligation de se reconvertir ; que désormais la victime a obtenu un diplôme d'électricien d'équipement et a créé une entreprise artisanale depuis le 22 février 2011 ; qu'il en ressort un préjudice résultant de la perte des possibilités de promotion professionnelle dans son domaine de compétence initiale ; que cependant, Monsieur Christophe X... ne peut soutenir que ce préjudice est égal à la capitalisation de son salaire sous déduction de la rente accident du travail perçue, elle-même capitalisée ; qu'en effet, il résulte des articles L.434-1 et L.434-2 du Code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité et, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que de même, la perte ou la diminution de possibilité de promotion professionnelle ne peut être égale, comme le soutient subsidiairement la victime, à la différence entre le salaire qu'il aurait pu percevoir au sein de l'entreprise et le SMIC pendant la période d'activité restant à courir jusqu'à l'âge de la retraite ; qu'au vu des éléments versés aux débats, une somme de 25.000 € réparera justement ce préjudice » ;

1°/ ALORS, d'une part, QUE , le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle dont la victime peut demander réparation à l'employeur auteur d'une faute inexcusable à l'origine de l'accident est distinct du préjudice résultant du déclassement professionnel, déjà compensé par l'attribution d'une rente majorée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, indemnisant un déclassement professionnel déjà compensé par l'attribution d'une rente majorée, la Cour d'appel a violé l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ensemble le principe de la réparation intégrale ;

2°/ ALORS, d'autre part et en toutes hypothèses, QU E, les juges du fond doivent faire ressortir le caractère sérieux des chances de promotion professionnelle de la victime avant l'accident ; qu'en se bornant à affirmer que Monsieur Christophe X... est dans l'impossibilité de reprendre le métier d'électromécanicien pour lequel il a été formé, après un début de carrière prometteur, qu'il a d'ailleurs été licencié, qu'il a été dans l'obligation de se reconvertir et que désormais a obtenu un diplôme d'électricien d'équipement et a créé une entreprise artisanale depuis le 22 février 2011, sans faire ressortir le caractère sérieux de ses chances de promotion professionnelle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR condamné in solidum la société CHAMPEAU-CASANAVE et la société MAAF ASSURANCES à payer à Monsieur Christophe X... la somme de 20.625 € au titre de la perte de salaire pendant la période d'incapacité ;

AUX MOTIFS QUE « dans sa décision du 18 juin 2010, statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a décidé que les dispositions des articles L.451–1 et L.452-2 à L.452-5 du Code de la sécurité sociale étaient conformes à la constitution, sous réserve qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L.452-3 ne fassent obstacle à ce que la victime ou, en cas de décès, ses ayants droits, puissent demander, devant les juridictions de sécurité sociale, à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que par ailleurs, dans cette même décision, le Conseil constitutionnel a considéré qu'au regard des objectifs d'intérêt général qu'il énonce, le plafonnement de la rente allouée destinée à compenser la perte de salaire résultant de l'incapacité n'instituait pas une restriction disproportionnée aux droits des victimes d'accident du travail ; qu'il se déduit de cette décision du Conseil constitutionnel que devant les juridictions de sécurité sociale, la victime d'un accident du travail, pour lequel la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue, ou ses ayants droit en cas de décès, ont droit, d'abord, à l'indemnisation spécifique, pour partie plafonnée, prévue par le livre IV du Code de la sécurité sociale relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles et, ensuite, à la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; … ; que, comme indiqué cidessus, au titre du principe de la réparation intégrale, la victime a droit d'obtenir la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que néanmoins, en l'absence de textes légaux, les organismes sociaux n'ont pas à faire l'avance de ces différentes sommes ; que le Monsieur Christophe X... sollicite une indemnisation pour perte de salaires pendant sa période d'incapacité suite à l'accident du travail ; qu'au titre du principe de la réparation intégrale, la victime a en effet droit à la différence entre les salaires qu'elle aurait dû percevoir de son employeur et les indemnités journalières au titre des accidents du travail reçues conformément aux articles L.433-1 et suivants du Code de la sécurité sociale ; que cependant, la période d'incapacité de Monsieur Christophe X... s'est seulement poursuivie du 31 mars 2003 au 30 janvier 2009 ; qu'en conséquence, la SARL CHAMPEAU-CASANAVE et la SA MAAF ASSURANCES seront condamnées in solidum à payer à Monsieur Christophe X... la somme de 20.625 € au titre des pertes de salaires (3.666 € en 2004 ; 5.131 € en 2005 ; 4.162 € en 2006 ; 4.076 € en 2007 ; 3.182 € en 2008 ; 408 € en janvier 2009) » ;

ALORS QUE, dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, l e Conseil constitutionnel a jugé qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que cette réserve ne porte pas sur l'indemnisation forfaitaire de certains dommages couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale, et notamment sur celle de la perte de salaires pendant l'incapacité temporaire, indemnisée par le versement d'indemnités journalières calculées forfaitairement ; qu'en décidant cependant que Monsieur Christophe X... avait droit à une indemnisation pour perte de salaires pendant sa période d'incapacité, c'est-à-dire à la différence entre les salaires qu'il aurait dû percevoir de son employeur et les indemnités journalières reçues conformément aux articles L.433-1 et s. du Code de la sécurité sociale, la Cour d'appel, dès lors que la perte de salaire pendant la période d'incapacité est un dommage couvert par le livre IV du Code de la sécurité sociale, donnant lieu à une indemnisation forfaitaire, a violé l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale.

Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X..., demandeurs au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes formées par Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral ;

AUX MOTIFS QU' « aucune partie ne s'oppose à l'évocation par la cour de l'entier litige; qu'il est de bonne justice, conformément à l'article 568 du code de procédure civile, de statuer sur les points non jugés par le tribunal et de donner à l'affaire une solution définitive ; … que, malgré les sollicitations de la SARL Champeau- Casanave et de la SA MAAF assurances, la cour n'envisage pas de solliciter l'avis de la Cour de cassation sur le fondement des articles 1031-1 et suivants du code de procédure civile ; … que dans sa décision du 18 juin 2010, statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a décidé que les dispositions des articles L 451-1et L. 452- 2 à L 452-5 du code de la sécurité sociale étaient conformes à la constitution, sous réserve qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L. 452-3 ne fassent obstacle à ce que la victime ou, en cas de décès, ses ayants droits, puissent demander, devant les juridictions de sécurité sociale, à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ; que par ailleurs, dans cette même décision, le Conseil constitutionnel a considéré qu'au regard des objectifs d'intérêt général qu'il énonce, le plafonnement de la rente allouée destinée à compenser la perte de salaire résultant de l'incapacité n'instituait pas une restriction disproportionnée aux droits des victimes d'accident du travail ; … qu'il se déduit de cette décision du Conseil constitutionnel que devant les juridictions de sécurité sociale, la victime d'un accident du travail, pour lequel la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue, ou ses ayants droit en cas de décès, ont droit, d'abord, à l'indemnisation spécifique, pour partie plafonnée, prévue par le livre IV du code de la sécurité sociale relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles et, ensuite, à la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ; … qu'ainsi, si la victime d'un accident de travail n'est pas décédée, ses ayants droits au sens du code de la sécurité sociale sont irrecevables à solliciter une indemnisation devant les juridictions de sécurité sociale ; qu'en conséquence, les demandes de Mme Vanessa Y... épouse X... seront déclarées irrecevables » (arrêt, p. 6-7) ;

1./ ALORS, D'UNE PART, QUE les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale sont compétentes pour connaître des actions en responsabilité fondées sur l'article 1382 du Code civil lorsque ces actions constituent l'accessoire d'une demande principale qui relève du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en déclarant en l'espèce irrecevables les demandes de Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral causé par la faute inexcusable de l'employeur de son mari, quand celles-ci étaient formées accessoirement à la demande principale de M. X... qui sollicitait également la réparation de ses préjudices causés par la faute inexcusable de son employeur ayant conduit à son accident du travail, la Cour d'appel a violé ce texte et l'article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale ;

2./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en cas de faute inexcusable de l'employeur, le conjoint de la victime survivante d'un accident du travail, qui n'a pas la qualité d'ayant droit au sens de l'article L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, peut obtenir l'indemnisation de son préjudice personnel selon les règles de droit commun ; que la Cour d'appel ne pouvait déclarer en l'espèce irrecevables les demandes de Mme X... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral causé par la faute inexcusable de l'employeur de son mari, par des motifs inopérants tirés du décès de son mari et de l'incompétence des juridictions de la sécurité sociale, quand la Cour d'appel, qui était aussi la juridiction d'appel de droit commun, avait évoqué, en application de l'article 568 du Code de procédure civile, l'indemnisation du préjudice personnel subi par Mme X... et était compétente pour statuer sur l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 562 et 568 du Code de procédure civile, l'article L. 311-1 du Code de l'organisation judiciaire, ensemble les articles 1382 du Code civil et L. 451-1 du Code de la sécurité sociale ;

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre, demanderesse au pourvoi incident

PREMIER MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR accordé à Monsieur Christophe X..., sur le fondement de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale, à la somme de 56 000 euros et d'AVOIR dit que la CPAM de la Nièvre ferait l'avance de l'indemnisation complémentaire accordée à Monsieur X..., à charge pour la Caisse de récupérer cette somme auprès de l'employeur

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Christophe X... est dans l'impossibilité de reprendre le métier d'électromécanicien pour lequel il a été formé, après un début de carrière prometteur ; qu'il a d'ailleurs été licencié et a été dans l'obligation de se reconvertir ; que désormais la victime a obtenu un diplôme d'électricien d'équipement et a créé une entreprise artisanale depuis le 22 février 2011 ; qu'il en ressort un préjudice résultant de la perte des possibilités de promotion professionnelle dans son domaine de compétence initiale ; que cependant, Monsieur Christophe X... ne peut soutenir que ce préjudice est égal à la capitalisation de son salaire sous déduction de la rente accident du travail perçue, elle-même capitalisée ; qu'en effet, il résulte des articles L.434-1 et L.434-2 du Code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité et, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que de même, la perte ou la diminution de possibilité de promotion professionnelle ne peut être égale, comme le soutient subsidiairement la victime, à la différence entre le salaire qu'il aurait pu percevoir au sein de l'entreprise et le SMIC pendant la période d'activité restant à courir jusqu'à l'âge de la retraite ; qu'au vu des éléments versés aux débats, une somme de 25.000 € réparera justement ce préjudice » ;

1/ ALORS, d'une part, QUE , le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle dont la victime peut demander réparation à l'employeur auteur d'une faute inexcusable à l'origine de l'accident est distinct du préjudice résultant du déclassement professionnel, déjà compensé par l'attribution d'une rente majorée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, indemnisant un déclassement professionnel déjà compensé par l'attribution d'une rente majorée, la Cour d'appel a violé l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ensemble le principe de la réparation intégrale ;

2/ ALORS, d'autre part et en toutes hypothèses, QUE, les juges du fond doivent faire ressortir le caractère sérieux des chances de promotion professionnelle de la victime avant l'accident ; qu'en se bornant à affirmer que Monsieur Christophe X... est dans l'impossibilité de reprendre le métier d'électromécanicien pour lequel il a été formé, après un début de carrière prometteur, qu'il a d'ailleurs été licencié, qu'il a été dans l'obligation de se reconvertir et que désormais a obtenu un diplôme d'électricien d'équipement et a créé une entreprise artisanale depuis le 22 février 2011, sans faire ressortir le caractère sérieux de ses chances de promotion professionnelle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné in solidum la société CHAMPEAU-CASANAVE et la société MAAF ASSURANCES à payer à Monsieur Christophe X... la somme de 20.625 euros au titre de la perte de salaire pendant la période d'incapacité ;

AUX MOTIFS QUE « dans sa décision du 18 juin 2010, statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a décidé que lesdispositions des articles L.451–1 et L.452-2 à L.452-5 du Code de la sécurité sociale étaient conformes à la constitution, sous réserve qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L.452-3 ne fassent obstacle à ce que la victime ou, en cas de décès, ses ayants droits, puissent demander, devant les juridictions de sécurité sociale, à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que par ailleurs, dans cette même décision, le Conseil constitutionnel a considéré qu'au regard des objectifs d'intérêt général qu'il énonce, le plafonnement de la rente allouée destinée à compenser la perte de salaire résultant de l'incapacité n'instituait pas une restriction disproportionnée aux droits des victimes d'accident du travail ; qu'il se déduit de cette décision du Conseil constitutionnel que devant les juridictions de sécurité sociale, la victime d'un accident du travail, pour lequel la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue, ou ses ayants droit en cas de décès, ont droit, d'abord, à l'indemnisation spécifique, pour partie plafonnée, prévue par le livre IV du Code de la sécurité sociale relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles et, ensuite, à la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; … ; que, comme indiqué ci-dessus, au titre du principe de la réparation intégrale, la victime a droit d'obtenir la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que néanmoins, en l'absence de textes légaux, les organismes sociaux n'ont pas à faire l'avance de ces différentes sommes ; que le Monsieur Christophe X... sollicite une indemnisation pour perte de salaires pendant sa période d'incapacité suite à l'accident du travail ; qu'au titre du principe de la réparation intégrale, la victime a en effet droit à la différence entre les salaires qu'elle aurait dû percevoir de son employeur et les indemnités journalières au titre des accidents du travail reçues conformément aux articles L.433-1 et suivants du Code de la sécurité sociale ; que cependant, la période d'incapacité de Monsieur Christophe X... s'est seulement poursuivie du 31 mars 2003 au 30 janvier 2009 ; qu'en conséquence, la SARL CHAMPEAUCASANAVE et la SA MAAF ASSURANCES seront condamnées in solidum à payer à Monsieur Christophe X... la somme de 20.625 € au titre des pertes de salaires (3.666 € en 2004 ; 5.131 € en 2005 ; 4.162 € en 2006 ; 4.076 € en 2007 ; 3.182 € en 2008 ; 408 € en janvier 2009) » ;

ALORS QUE, dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, l e Conseil constitutionnel a jugé qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale ; que cette réserve ne porte pas sur l'indemnisation forfaitaire de certains dommages couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale, et notamment sur celle de la perte de salaires pendant l'incapacité temporaire, indemnisée par le versement d'indemnités journalières calculées forfaitairement ; qu'en décidant cependant que Monsieur Christophe X... avait droit à une indemnisation pour perte de salaires pendant sa période d'incapacité, c'est-à-dire à la différence entre les salaires qu'il aurait dû percevoir de son employeur et les indemnités journalières reçues conformément aux articles L.433-1 et s. du Code de la sécurité sociale, la Cour d'appel, dès lors que la perte de salaire pendant la période d'incapacité est un dommage couvert par le livre IV du Code de la sécurité sociale, donnant lieu à une indemnisation forfaitaire, a violé l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-20798
Date de la décision : 20/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 13 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 sep. 2012, pourvoi n°11-20798


Composition du Tribunal
Président : M. Héderer (conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20798
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