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19/09/2012 | FRANCE | N°11-10812

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 septembre 2012, 11-10812


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 31 mai 2010) que Mme X... a été engagée en qualité d'agent de comptoir le 1er décembre 1985 par la société Voyages Eurafrique; qu'elle a été promue chef de comptoir en 2000; qu'ayant donné sa démission par lettre du 25 janvier 2006, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à faire juger que cette démission avait été donnée sous contrainte et que la clause de non-concurrence à laquelle elle s'était soumise dans sa lettre de démission Ã

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Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 31 mai 2010) que Mme X... a été engagée en qualité d'agent de comptoir le 1er décembre 1985 par la société Voyages Eurafrique; qu'elle a été promue chef de comptoir en 2000; qu'ayant donné sa démission par lettre du 25 janvier 2006, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à faire juger que cette démission avait été donnée sous contrainte et que la clause de non-concurrence à laquelle elle s'était soumise dans sa lettre de démission était nulle ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que la rupture de son contrat de travail résultait d'une démission non équivoque alors, selon le moyen :
1°/ ALORS QUE la démission doit, au moment où elle est donnée, résulter d'une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté qu'à la suite de son entretien du 24 janvier 2006 devant le directeur général de l'agence et au cours duquel elle avait reconnu avoir détourné à son profit, depuis six mois, des espèces pour un montant de 74.625, 76 euros et s'être engagée à rembourser cette somme, Mlle X... avait, dès le lendemain, soit le 25 janvier 2006, remis à son employeur une première lettre de démission, aussitôt corrigée par une seconde avec l'ajout de sa renonciation au délai légal de préavis et souligné que le directeur de l'agence Voyages Eurafrique avait dès le 26 janvier 2006 déposé une plainte pénale contre la salariée pour détournements de fonds, a néanmoins, pour dire claire et non équivoque la démission de Mlle X..., affirmé qu'il ne ressortait d'aucun élément de la cause que cette dernière avait été contrainte, à la suite de la convocation de son employeur, de rédiger lesdites lettres de démission, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que les circonstances dans lesquelles la salariée avait, dès le lendemain de l'aveu de faits pénalement punissables et pour lesquels l'employeur avait aussitôt déposé plainte, présenté sa démission avec renonciation au délai légal de préavis, excluaient une volonté claire et non équivoque de démissionner, et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;
2°/ ALORS QU'en retenant, pour dire claire et non équivoque la démission donnée par la salariée le 25 janvier 2006, soit le lendemain de l'aveu de faits pénalement punissables, qu'il ne ressortait d'aucun élément de la cause que l'employeur se soit engagé à ne pas déposer une plainte pénale en l'échange de la démission de la salariée, tout en constatant que dès le lendemain de la démission de Mlle X..., le 26 janvier 2006, la société Voyages Eurafrique avait déposé une plainte pour "détournements de fonds" contre cette dernière qui, en charge des caisses quotidiennes et des versements d'espèces auprès de la banque, avait reconnu le 24 janvier 2006 avoir détourné à son profit, depuis six mois, des espèces en annulant la saisie d'espèces sur des factures clients, ce qui, compte tenu de la gravité des faits reprochés à la salariée, était de nature à justifier la mise en oeuvre par l'employeur d'une procédure de licenciement à son encontre et, donc, à exclure la manifestation par la salariée d'une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;
3°/ ALORS QU'en affirmant encore, pour dire que c'était vainement que la salariée prétendait que l'employeur lui avait imposé, lors de sa démission, une clause de non-concurrence, que cet engagement était unilatéral, tout en ayant constaté que Mlle X... avait donné sa démission après avoir avoué des faits légalement punissables et pour lesquels l'agence avait déposé une plainte pénale, ce qui, compte tenu des relations conflictuelles des parties au moment de la démission de la salariée, était de nature à exclure que cette dernière ait songé à rédiger sa lettre de démission en s'engageant d'elle-même à ne pas faire de concurrence à son employeur et, par suite, qu'elle ait exprimé une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé qu'il ne ressort d'aucun élément de la cause que c'est à la suite d'une convocation de l'employeur que la salariée aurait été contrainte de rédiger sa lettre de démission; que c'est de sa propre initiative, hors la présence de l'employeur, qu'elle l'a rédigée; qu'il n'est pas non plus établi que l'employeur se soit engagé à ne pas déposer plainte en échange de sa démission, a pu décider que la démission de la salariée était claire et non équivoque; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991 rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mlle X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que la rupture de son contrat de travail résultait du fait de sa démission non équivoque.
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE le 25 janvier 2006, Mlle X... a remis à son employeur une première ainsi rédigée : «Je soussignée... présente ma démission pour convenance personnelle. Celle-ci est demandée à compter du 31 janvier 2006. Je vous confirme mon engagement à ne pas travailler dans une autre agence de voyages à Aix-en-Provence et dans la zone des Milles» ; qu'elle a le même jour remis une deuxième lettre à laquelle avait été ajoutée après la date du 31 janvier 2006, la mention «et sans effectuer mon préavis légal» ; (…) ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que, lors de l'établissement du bilan pour l'année 2005, il a été constaté que des espèces, pour un montant de 74 625,76 euros, n'avaient pas été déposées en banque, ces faits étant découverts par le directeur financier, le vendredi 20 janvier 2006 ; que Mlle X..., en charge des caisses quotidiennes et des versements d'espèces auprès de la banque et, M. Y..., également chargé des même dépôts, ont été convoqués à un entretien sans que l'appelante ne formule aucune déclaration relativement à ces faits ; (…) ; que, le mardi 24 janvier 2006, la direction faisait part à Mlle X... des constatations précitées ; que cette dernière avait alors reconnu qu'elle détournait à son profit, depuis six mois, des espèces en expliquant qu'elle annulait la saisie d'espèces sur des factures clients et déclarait ne pas savoir quelle somme elle avait exactement détournée ; (…) ; qu'elle s'était alors engagée à rembourser son employeur dès perception de son gain ; (…) ; qu'il apparaît que, le mardi 25 janvier 2006, l'appelante a alors rédigé les lettres susvisées ; que concomitamment à ce litige professionnel, le directeur de l'agence Voyages Eurafrique dépose une plainte pénale contre Mlle X... pour "détournements de fonds" ; que c'est en vain que l'appelante prétend que sa démission n'est ni claire ni non équivoque dès lors qu'elle ne démontre pas que les lettres précitées ont été écrites sous la menace ou la contrainte ; qu'il ne ressort d'aucun des éléments de la cause que c'est à la suite d'une convocation de l'employeur qu'elle a été contrainte de rédiger lesdites lettres le 25 janvier 2006 alors qu'elle avait déjà reconnu les faits lors de l'entretien de la veille ; que les attestations établies par les autres salariés de la société démontrent que l'appelante a rédigé les lettres de sa seule initiative, hors la présence de son employeur alors qu'il ressort également de son audition postérieure par les services de police qu'elle avait déclaré, le 31 janvier 2006, avoir donné sa démission tout en assumant ses actes ; que la rédaction de deux lettres, une rajoutant que la salariée ne désirait pas effectuer son préavis, ne démontre pas la contrainte dès lors que l'employeur fait justement observer que ce rajout pouvait s'expliquer par la situation engendrée par le fait que la salariée ne pouvait assumer sa présence au sein de l'entreprise alors qu'elle n'avait rien fait pour dissiper les soupçons qui pesaient sur l'ensemble de son équipe, l'ensemble des salariés ayant été convoqués le 23 janvier ; qu'il ne ressort pas non plus des éléments de la cause que l'employeur se soit engagé à ne pas déposer une plainte pénale en l'échange de la démission de l'appelante qui s'est rendue, jusqu'au 27 janvier 2006, au sein de l'agence puis a bénéficié de 4 jours de congés ; qu'ainsi, les premiers juges ont pu valablement estimer que la démission était claire et non équivoque et le jugement sera confirmé de ce chef ; que c'est également en vain que l'appelante prétend que l'employeur lui a lors de sa démission imposé une clause de non-concurrence alors qu'il apparaît que cet engagement est unilatéral et qu'aucune contrainte ne ressort des éléments déjà analysés alors qu'il est en outre constant qu'une telle clause n'était pas contenue dans le contrat de travail initial ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de sa demande en paiement de dommages et intérêts de ce chef ;
1°/ ALORS QUE la démission doit, au moment où elle est donnée, résulter d'une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté qu'à la suite de son entretien du 24 janvier 2006 devant le directeur général de l'agence et au cours duquel elle avait reconnu avoir détourné à son profit, depuis six mois, des espèces pour un montant de 74 625,76 euros et s'être engagée à rembourser cette somme, Mlle X... avait, dès le lendemain, soit le 25 janvier 2006, remis à son employeur une première lettre de démission, aussitôt corrigée par une seconde avec l'ajout de sa renonciation au délai légal de préavis et souligné que le directeur de l'agence Voyages Eurafrique avait dès le 26 janvier 2006 déposé une plainte pénale contre la salariée pour détournements de fonds, a néanmoins, pour dire claire et non équivoque la démission de Mlle X..., affirmé qu'il ne ressortait d'aucun élément de la cause que cette dernière avait été contrainte, à la suite de la convocation de son employeur, de rédiger lesdites lettres de démission, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que les circonstances dans lesquelles la salariée avait, dès le lendemain de l'aveu de faits pénalement punissables et pour lesquels l'employeur avait aussitôt déposé plainte, présenté sa démission avec renonciation au délai légal de préavis, excluaient une volonté claire et non équivoque de démissionner, et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail.
2°/ ALORS QU'en retenant, pour dire claire et non équivoque la démission donnée par la salariée le 25 janvier 2006, soit le lendemain de l'aveu de faits pénalement punissables, qu'il ne ressortait d'aucun élément de la cause que l'employeur se soit engagé à ne pas déposer une plainte pénale en l'échange de la démission de la salariée, tout en constatant que dès le lendemain de la démission de Mlle X..., le 26 janvier 2006, la société Voyages Eurafrique avait déposé une plainte pour "détournements de fonds" contre cette dernière qui, en charge des caisses quotidiennes et des versements d'espèces auprès de la banque, avait reconnu le 24 janvier 2006 avoir détourné à son profit, depuis six mois, des espèces en annulant la saisie d'espèces sur des factures clients, ce qui, compte tenu de la gravité des faits reprochés à la salariée, était de nature à justifier la mise en oeuvre par l'employeur d'une procédure de licenciement à son encontre et, donc, à exclure la manifestation par la salariée d'une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail.
3°/ ALORS QU'en affirmant encore, pour dire que c'était vainement que la salariée prétendait que l'employeur lui avait imposé, lors de sa démission, une clause de non-concurrence, que cet engagement était unilatéral, tout en ayant constaté que Mlle X... avait donné sa démission après avoir avoué des faits légalement punissables et pour lesquels l'agence avait déposé une plainte pénale, ce qui, compte tenu des relations conflictuelles des parties au moment de la démission de la salariée, était de nature à exclure que cette dernière ait songé à rédiger sa lettre de démission en s'engageant d'elle-même à ne pas faire de concurrence à son employeur et, par suite, qu'elle ait exprimé une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Mlle X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour nullité de la clause de non-concurrence.
AUX MOTIFS QUE c'est également en vain que l'appelante prétend que l'employeur lui a lors de sa démission imposé une clause de nonconcurrence alors qu'il apparaît que cet engagement est unilatéral et qu'aucune contrainte ne ressort des éléments déjà analysés alors qu'il est en outre constant qu'une telle clause n'était pas contenue dans le contrat de travail initial ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de sa demande en paiement de dommages et intérêts de ce chef ;
ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 8), Mlle X... soutenait qu'en l'absence de contrat de travail écrit stipulant l'existence d'une clause de non-concurrence à son égard, l'engagement pris dans sa lettre de démission du 25 janvier 2006 de ne pas concurrencer son employeur sans contrepartie financière, était nul et de nul effet ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la salariée de sa demande en dommages et intérêts, que cet engagement était unilatéral, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions précitées et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-10812
Date de la décision : 19/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 31 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 sep. 2012, pourvoi n°11-10812


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10812
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