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16/05/2012 | FRANCE | N°10-20157

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mai 2012, 10-20157


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu le principe à travail égal, salaire égal, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 11 octobre 1982 par la Régie des transports de Marseille en qualité de comptable, avec le statut d'agent de maîtrise ; qu'elle a obtenu le statut cadre à effet du 1er juillet 1999 et a occupé le poste de responsable des assurances ; que soutenant qu'elle aurait dû obtenir le maintien de son ancienneté réelle de 16 ans et 8 mois lor

s de son passage au statut "cadre" en application de la décision unilatérale...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu le principe à travail égal, salaire égal, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 11 octobre 1982 par la Régie des transports de Marseille en qualité de comptable, avec le statut d'agent de maîtrise ; qu'elle a obtenu le statut cadre à effet du 1er juillet 1999 et a occupé le poste de responsable des assurances ; que soutenant qu'elle aurait dû obtenir le maintien de son ancienneté réelle de 16 ans et 8 mois lors de son passage au statut "cadre" en application de la décision unilatérale n° 138-76 du 27 décembre 1976, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappels de salaire, de congés payés afférents et de dommages-intérêts ;
Attendu que pour débouter la salariée de ces demandes, l'arrêt énonce qu'elle ne verse aucun document prouvant une mise à l'écart discrétionnaire ou partielle de la décision unilatérale de décembre 1976, ni que l'absence de proposition d'une négociation, à l'instar de celle dont a bénéficié M. Y... soit discriminatoire, porte atteinte au principe d'égalité de traitement faute d'établir qu'elle était dans la même situation que cet autre salarié, avec une promotion liée à un surcroît de responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que Mme X... comme M. Y... avaient tous deux fait l'objet d'une promotion au statut cadre, mais que seul ce dernier avait bénéficié du maintien de l'intégralité de son ancienneté réelle, ce dont il résultait qu'il appartenait à l'employeur de justifier que cette différence de traitement reposait sur une cause objective et pertinente, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la Régie des transports de Marseille aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Régie des transports de Marseille et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X...

MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté Madame X... de sa demande tendant à se voir appliquer la décision du 27 décembre 1976 et son ancienneté réelle et totale décomptée à partir de sa promotion au statut de cadre à compter de juillet 1999, et de sa demande de rappels de salaire et congés payés afférents, et de rappels de primes, d'indemnités et gratifications correspondants ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que les dispositions de l'article 22 de la convention collective relatives au changement de classification , ont le même objet que la décision du 27 décembre 1976, à savoir, préciser quelles règles son applicables en matière d'ancienneté lorsqu'un agent change de groupe professionnel ; que la salariée reconnaît qu'il existe un conflit entre la décision de 1976 et les dispositions de la convention collective, relatives aux règles de calcul de l'ancienneté lors du passage d'un groupe professionnel à un autre, mais soutient qu'en cas de concours de normes, c'est la règle la plus favorable qui doit recevoir application ; que, néanmoins, il est constant qu'une norme conventionnelle nouvelle ayant le même objet se substitue à l'engagement unilatéral qui n'est pas une norme négociée, même si elle est moins favorable ; qu'en conséquence les dispositions de l'article 22 de la convention collective, qui s'étaient substituées à l'engagement unilatéral litigieux, ont été légitimement appliquées à Michèle X... lorsqu'elle a été promue cadre au mois de juillet 1999 ; que la RTM ne remet pas valablement en cause le jugement en ce qu'il a retenu qu'aucun des accords susvisés n'avait le même objet que l'engagement du 27 décembre 1976 ; qu'en effet, même si l'accord du 27 décembre 1984 propose une variante possible à la grille conventionnelle de majoration de l'ancienneté des cadres, crée une nouvelle grille de majoration pour ancienneté, favorisant les jeunes cadres, pour autant, cet accord ne traite pas la question précise abordée le 27 décembre 1976, à savoir, la reprise d'ancienneté lors du passage de la catégorie agent de maîtrise à la catégorie CADRE ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que l'encagement unilatéral du 27 décembre 1976 n'a pas été remplacé par l'un des accords collectifs opposés par la RTM ; que l'appelante combat le jugement, en ce qu'il a retenu que l'article 22 de la convention collective du 23 juin 1986 s'est substitué à l'engagement unilatéral du 27 décembre 1976, en faisant valoir que l'accord d'entreprise du 29 octobre 1993 a fait « reprendre, effet « à un ensemble de normes collectives dénoncées en juin 1992 » visées en annexe », et pour ce qui est de l'ancienneté : « mesures prises en application des décisions du conseil d'administration du 17 mai 1958 et tous autres textes connexes et subséquents en la matière » ; que toutefois la RTM objecte justement que cet accord ne vise que des « accords » et non des mesures unilatérales telles que la décision du 27 décembre 1976, au cas où il serait retenu qu'elle a pris fin, du fait de l'accord du 27 décembre 1984 ; que l'appelante oppose ensuite les dispositions de l'article 7 de la convention collective du 23 juin 1986, qui stipule que « toutefois, elle ne peut être, en aucun cas, la cause de restriction d'avantages acquis … résultant de contrats collectifs précédents ou de contrats individuels », et celles de l'article 13 de l'annexe 1, selon lesquelles : « les dispositions du présent annexe ne peuvent en aucun cas restreindre les avantages acquis antérieurement, soit à titre personnel, soit du fait des usages... » ; qu'elle soutient, qu'ainsi, cette convention collective stipule expressément le maintien des avantages acquis antérieurement, ce qui interdit à l'article 22 de remettre en cause la décision du 27 décembre 1976 ; que l'article 16 de la convention collective du 23 juin 1948, prévoyait les mêmes dispositions que l'article 22 de celle de 1986, en cas de changement de catégorie « quand un agent de maîtrise devient CADRE » ; qu'ainsi, la décision du 27 décembre 1976 s'analysait déjà en une amélioration de la situation des salariés, que l'article 22 ne pouvait remettre en cause ; que l'article 22 ne serait jamais appliqué lors du passage du statut « d'agent d'exécution », à celui « d'agent de maîtrise », ne le serait que pour celui d'« agent de maîtrise » à celui de « cadre », sans qu'une raison objective soit donnée à cette différence de traitement ; que la décision de décembre 1976 serait écartée de façon discrétionnaire et partielle, au seul détriment des agents de maîtrise promus cadres ; qu'elle prouve qu'un agent de maîtrise promu cadre, Mr Y..., a négocié le maintien intégral de son ancienneté réelle, le fait qu'une telle négociation ne soit pas proposée à tous les agents de maîtrise promus cadres caractérisant une atteinte au principe d'égalité de traitement ; que toutefois, la RTM objecte justement que Michèle X... vise vainement la clause des acquis de la convention collective de 1986, pour prétendre à une application automatique de la décision du 27 décembre 1976 ; qu'en effet un droit ne reste acquis que s'il a été ouvert que si le salarié en a déjà bénéficié ; que tel n'est pas le cas de l'appelante, passée cadre en 1999 soit bien après l'adoption de l'article 22 de la convention collective du 23 juin 1986, date à laquelle le droit au bénéfice de la décision du 27 décembre 1976 n'était pas né pour elle, n'était qu'éventuel ; que l'accord de 1993 n'a remis en vigueur que les accords dénoncés en 1992 et non les usages ; que par ces motifs ajoutés le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de Michèle X... fondées sur la décision unilatérale du 27 décembre 1976, l'appelante ne versant aucun élément prouvant une mise à l'écart discrétionnaire ou partielle de la décision unilatérale de décembre 1976, ni que l'absence de proposition d'une négociation, à l'instar de celle dont a bénéficié Mr Y... soit discriminatoire, porte atteinte au principe d'égalité de traitement faute d'établir qu'elle était dans la même situation que cet autre salarié, avec une promotion liée à un surcroît de responsabilité ;
ET AUX MOTIFS adoptés QU'il est de jurisprudence constante qu'une norme conventionnelle nouvelle ayant le même objet se substitue à l'engagement unilatéral qui n'est pas une norme négociée même si elle est moins favorable ;
ALORS QUE Madame X... se prévalait de l'accord du 29 octobre 1993, postérieur à la convention collective du 11 octobre 1986, et soutenait qu'il avait remis en vigueur l'usage résultant de la décision de la RTM du 27 décembre 1976, lequel ne pouvait donc avoir été dénoncé par cette convention ; qu'en retenant que l'accord de 1993 n'a remis en vigueur que les accords dénoncés en 1992 et non les usages alors que cet accord stipulait que les « accords visés en annexe qui avaient été dénoncés le 2 juin 1992 ... » et qui ont repris effet par l'accord collectif du 29 octobre 1993 étaient pour ce qui concerne la « majoration pour ancienneté » « les mesures prises en application des décisions du Conseil d'Administration du 17/05/58 et tous les autres textes connexes et subséquents en la matière », la cour d'appel a violé ledit accord du 29 octobre 1993 ;
ALORS subsidiairement QUE l'article 7 de la convention collective nationale des transports publics urbains du 11 octobre 1986 précise que la nouvelle convention « ne peut être en aucun cas la cause de restriction d'avantages acquis par les salariés résultant de contrats collectifs précédents ou de contrats individuels » ; que l'article 13 de l'annexe concernant le personnel d'encadrement énonce que « les dispositions de la présente annexe ne peuvent, en aucun cas, restreindre les avantages acquis, soit à titre personnel, soit du fait des usages, ou en application des contrats individuels ou collectifs ... » ; qu'en décidant que les dispositions de l'article 22 de la convention collective nationale des transports publics se sont substituées à l'engagement unilatéral de la RTM du 27 décembre 1976 motif pris de ce qu'elle n'est pas une norme négociée, même si elle est plus favorable sans prendre en considération les articles 7 et 13 de la convention collective qui garantissaient le maintien des avantages acquis soit du fait des usages, soit des contrats individuels ou collectifs, la cour d'appel a violé les articles 7 et 13 de la convention collective nationale des transports publics du 11 octobre 1986 ;
ALORS surtout QU'un avantage individuel acquis est celui qui procure au salarié un droit dont il bénéficie à titre personnel et qui correspond à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; qu'en décidant qu'un droit ne reste acquis que s'il a été ouvert et que le salarié en a déjà bénéficié pour conclure que tel n'est pas le cas de Madame X... qui est passée cadre en 1999, soit bien après l'adoption de l'article 22 de la convention collective du 23 juin 1986 « date à laquelle le droit au bénéfice de la décision du 27 décembre 1976 n'était pas né pour elle, n'était qu'éventuel », la cour d'appel a violé l'article L. 2261-13 du code du travail ;
ALORS plus subsidiairement encore QU'un accord collectif ne saurait déroger au principe d'égalité de traitement ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la négociation de Monsieur Y..., agent de maîtrise promu cadre, portant sur le maintien intégral de son ancienneté en application de la décision du 27 décembre 1976, contrairement aux dispositions de l'article 22 de la convention collective, avait été proposée à tous les agents promus cadres, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe de l'égalité de traitement entre les salariés ;
ALORS surtout QUE s'il appartient au salarié qui invoque une violation du principe d'égalité de traitement de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de traitement en matière de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; qu'en reprochant à Madame X... de n'avoir pas versé d'élément prouvant une mise à l'écart discrétionnaire ou partielle de la décision unilatérale de 1976, quand sa demande avait précisément pour objet d'obtenir la prise en compte de son ancienneté réelle dont elle avait été privée, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et partant, violé les dispositions de l'article 1315 du code civil ;
QU'en lui reprochant de n'avoir pas établi qu'elle était dans la même situation que Monsieur Y... « avec une promotion liée à un surcroît de responsabilité », quand cette condition n'était nullement exigée par la décision du 27 décembre 1976, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi que celle-ci ne prévoit pas, et partant violé les dispositions de l'article 1315 du code civil et les dispositions de la décision du 27 décembre 1976.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20157
Date de la décision : 16/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mai. 2012, pourvoi n°10-20157


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20157
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