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16/05/2012 | FRANCE | N°10-19576

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mai 2012, 10-19576


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 avril 2010) rendu sur renvoi après cassation (Soc., 3 juillet 2008, n° 06-45.268), que M. X... a été engagé le 26 juillet 1998 par la société HLC Helicap en qualité de pilote d'hélicoptère pour effectuer des vols pour le SAMU de Montpellier, moyennant un salaire mensuel de 12 850 francs outre les primes de vol ; que l'article 4 du contrat de travail prévoyait que le fonctionnement normal prévu par le SAMU était le relais d'un jour sur deux

ou d'une semaine sur deux, le pilote assurant la garde permanente dans l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 avril 2010) rendu sur renvoi après cassation (Soc., 3 juillet 2008, n° 06-45.268), que M. X... a été engagé le 26 juillet 1998 par la société HLC Helicap en qualité de pilote d'hélicoptère pour effectuer des vols pour le SAMU de Montpellier, moyennant un salaire mensuel de 12 850 francs outre les primes de vol ; que l'article 4 du contrat de travail prévoyait que le fonctionnement normal prévu par le SAMU était le relais d'un jour sur deux ou d'une semaine sur deux, le pilote assurant la garde permanente dans les locaux du SAMU où une chambre était à sa disposition ; qu'à la suite d'un accord relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail au sein de la société Hélicap, M. X... a signé un avenant le 16 août 2000, précisant que la durée annuelle de travail correspondait à un forfait individuel ne pouvant dépasser 154 jours de mise à disposition SAMU par année civile ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de divers rappels de salaire ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs, alors, selon le moyen :
1°/ que le temps de travail effectif s'entend du temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que les heures de présence effectuées dans une chambre spécialement mise à disposition sur le lieu de travail afin de répondre à tout moment à toute sollicitation sont des heures de travail effectif ; que le contrat de travail de M. X... prévoyait : «Le fonctionnement normal prévu pour les SAMU sera le relai d'un jour sur deux ou d'une semaine sur deux le pilote assurant la garde permanente dans les locaux du SAMU où une chambre sera mise à sa disposition » et encore que « le pilote sera logé par le SAMU et nourri à la charge de la société Hélicap par le SAMU (…) (il) devra être présent une semaine sur deux ou un jour sur deux sans tenir compte des dimanches et des jours fériés» ce dont il s'inférait que pendant les jours d'astreinte, M. X... était à la disposition de l'employeur, devait se conformer à ses directives et ne pouvait vaquer à ses occupations personnelles, devant rester sur la base même du SAMU; qu'en refusant de prendre en compte les heures de mise à disposition de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, l'article L. 3121-1 du code du travail et l'article D. 422-10 du code de l'aviation civile ensemble l'article 14 de l'annexe I de la convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères par fausse application ;
2°/ que la fonction de pilote d'hélicoptère affecté aux urgences du SAMU, par les conditions de secours d'urgence qu'il infère, ne peut être assimilée à une fonction de pilote d'avion de transport de passagers ou de marchandises ; que le pilote d'hélicoptère affecté au SAMU doit rester à disposition nuit et jour pendant le temps de travail en vue d'interventions d'urgence ; que dès lors la directive 93/104 du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail lui est bien applicable, n'excluant que le transport aérien ; que l'article 2 de cette directive dispose que constitue un «‘temps de travail': toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales» ; qu'au sens de ce texte il convient de considérer qu'un service de garde selon le régime de la présence physique dans l'hôpital constitue dans son intégralité du temps de travail au sens de cette directive, alors même que l'intéressé est autorisé à se reposer sur ce lieu pendant les périodes où ses services ne sont pas sollicités ; que le principe d'équivalence instauré par le droit national doit nécessairement respecter les règles minimales de protection imposées par ce texte; qu'en appliquant l'article D. 422-10 du code de l'aviation civile et l'article 14 de l'annexe I de la convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères qui ne prennent pas en compte le temps de mise à disposition de l'employeur, la cour d'appel a violé lesdits articles par fausse application ensemble l'article L. 3121-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 ;
Mais attendu, d'abord, qu'en retenant que les heures supplémentaires ne pouvant être décomptées qu'au-delà du nombre d'heures de vol prévu par l'article D. 422-10 du code de l'aviation civile, les temps d'inaction ne peuvent donc être assimilés à un temps de vol afin de déterminer le seuil de déclenchement ouvrant droit à des heures supplémentaires, la cour de renvoi a statué en conformité avec l'arrêt de cassation qui l'avait saisie ; que le moyen, qui appelle la Cour de cassation à revenir sur la doctrine affirmée par son précédent arrêt, est irrecevable ;
Attendu, ensuite, que l'activité de secours d'urgence par hélicoptère, qui consiste à acheminer par aéronef d'un point d'origine à un point de destination des passagers en situation de détresse, constitue du transport aérien et n'entre pas dans le champ d'application de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de rappel des heures supplémentaires et repos compensateurs et de rectification des bulletins de paie et rejeté sa demande de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le rappel des heures supplémentaires et repos compensateurs, qu'il résulte des éléments fournis par les parties que la société était bénéficiaire d'un marché émanant d'un hôpital public afin d'organiser un secours d'urgence consistant en une intervention immédiate d'un hélicoptère ; que l'appelant a donc été affecté à cette tâche et lui a été demandé de rester présent en permanence sur le site de décollage de l'appareil ou à proximité de celui-ci pendant des gardes 24 heures sur 24 selon un rythme d'une semaine sur deux ; que selon l'article L. 212-2 du Code du travail dans sa rédaction alors applicables, des décrets déterminent les modalités d'application de l'article L. 212-1 pour l'ensemble des branches d'activité ou des professions ou pour une branche ou une profession particulière, fixent notamment l'aménagement et la répartition des horaires de travail, les périodes de repos, les conditions de recours aux astreintes, les dérogations permanentes ou temporaires applicables dans certains cas et pour certains emplois et les modalités de récupération des heures de travail perdues et les mesures de contrôle de ces diverses dispositions ; que selon l'article D. 422-10 du Code de l'aviation civile la durée de travail effective prévue à l'article L. 212-I du Code du travail correspond à une durée mensuelle moyenne de 75 heures de vol réparties sur l'année ou une durée mensuelle de 78 heures de vol réparties sur l'année selon l'option choisie par l'entreprise ; que ces textes, codifiés depuis, découlent directement du décret 51-539 du 23 mars 1951 déterminant les modalités d'application de la loi du 21 juin 1936 sur la durée du travail du personnel navigant dans les entreprises de transport et de travail aérien ; qu'il s'agit d'un texte dérogatoire aux règles du droit commun, instituées par le Code du travail pour une profession déterminée quant à la durée du travail ; que cette dérogation ne prévoit pas un système d'équivalent du calcul de la durée du travail qui serait applicable au temps d'inaction ; qu'également sont sans influence une mention du contrat de travail faisant référence au Code du travail et des mentions sur les bulletins de paie indiquant un temps de travail de 169 heures, l'employeur pouvant apporter la preuve contraire de l'inexactitude ou de l'erreur de ces mentions ; que par ailleurs l'article 14 de l'annexe I de la Convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères applicables jusqu'en décembre 2003 prévoit que le déclenchement des heures supplémentaires a lieu au-delà d'un certain nombre d'heures de vol ; que selon les dispositions du code de l'aviation civile, seul le temps de vol doit être assimilé à un temps de travail effectif ; que les temps d'inaction tels qu'invoqués par l'appelant consistent pour une partie seulement en des temps d'attente de vol en étant à disposition dans un local d'habitation situé à proximité de l'aire de stationnement de l'appareil ; que les heures supplémentaires ne pouvant être légalement décomptées qu'au-delà du nombre d'heures de vol prévu par l'article D- 422-10, ces temps d'inaction ne peuvent donc être assimilés à un temps de vol afin de déterminer le seuil de déclenchement ouvrant droit à des heures supplémentaires ; que le jugement déféré a donc considéré à juste titre que l'ensemble de ces heures ne constituait pas un travail effectif et qu'elles ne devaient pas s'analyser comme des heures supplémentaires, étant observé que le nombre d'heures de vol invoqué par l'appelant est inférieur aux seuils réglementairement et conventionnellement cidessus rappelés; que dès lors le jugement doit être confirmé de ce chef; que la demande relative à des dommages et intérêts compensant le préjudice subi par la privation de repos compensateur n'est pas fondée dans la mesure où l'appelant ne pouvait être bénéficiaire d'un repos compensateur durant sa période de travail »
ALORS QUE 1°) le temps de travail effectif s'entend du temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que les heures de présence effectuées dans une chambre spécialement mise à disposition sur le lieu de travail afin de répondre à tout moment à toute sollicitation sont des heures de travail effectif ; que le contrat de travail de Monsieur X... prévoyait : « Le fonctionnement normal prévu pour les SAMU sera le relai d'un jour sur deux ou d'une semaine sur deux le pilote assurant la garde permanente dans les locaux du SAMU où une chambre sera mise à sa disposition » et encore que « le pilote sera logé par le SAMU et nourri à la charge de HELICAP par le SAMU (…) (il) devra être présent une semaine sur deux ou un jour sur deux sans tenir compte des dimanches et des jours fériés » ce dont il s'inférait que pendant les jours d'astreinte, Monsieur X... était à la disposition de l'employeur, devait se conformer à ses directives et ne pouvait vaquer à ses occupations personnelles, devant rester sur la base même du SAMU; qu'en refusant de prendre en compte les heures de mise à disposition de l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, l'article L 3121-1 du Code du travail et l'article D. 422-10 du Code de l'aviation civile ensemble l'article 14 de l'annexe I de la Convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères par fausse application ;
ALORS QUE 2°) la fonction de pilote d'hélicoptère affecté aux urgences du SAMU, par les conditions de secours d'urgence qu'il infère, ne peut être assimilée à une fonction de pilote d'avion de transport de passagers ou de marchandises; que le pilote d'hélicoptère affecté au SAMU doit rester à disposition nuit et jour pendant le temps de travail en vue d'interventions d'urgence ; que dès lors la directive 93/104 du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail lui est bien applicable, n'excluant que le transport aérien ; que l'article 2 de cette directive dispose que constitue un « ‘temps de travail': toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales » ; qu'au sens de ce texte il convient de considérer qu'un service de garde selon le régime de la présence physique dans l'hôpital constitue dans son intégralité du temps de travail au sens de cette directive, alors même que l'intéressé est autorisé à se reposer sur ce lieu pendant les périodes où ses services ne sont pas sollicités; que le principe d'équivalence instauré par le droit national doit nécessairement respecter les règles minimales de protection imposées par ce texte; qu'en appliquant l'article D. 422-10 du Code de l'aviation civile et l'article 14 de l'annexe I de la Convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères qui ne prennent pas en compte le temps de mise à disposition de l'employeur, la Cour d'appel a violé lesdits articles par fausse application ensemble l'article L. 3121-1 du Code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-19576
Date de la décision : 16/05/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 27 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mai. 2012, pourvoi n°10-19576


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.19576
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