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03/04/2012 | FRANCE | N°10-19074

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 avril 2012, 10-19074


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 23 mars 2010), que la société Saur, qui exploitait le service de distribution d'eau potable d'un syndicat intercommunal, a demandé à la société Aquitaine de gestion urbaine et rurale (la société Agur), qui lui a succédé dans cette activité à la suite d'une procédure de mise en concurrence, le remboursement du montant des recettes afférentes à l'eau distribuée aux abonnés pour la période comprise entre le dernier relevé du 31 octobre 2002 et le 31 décembr

e 2002, date d'échéance du contrat d'affermage ; la société Agur ayant refus...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 23 mars 2010), que la société Saur, qui exploitait le service de distribution d'eau potable d'un syndicat intercommunal, a demandé à la société Aquitaine de gestion urbaine et rurale (la société Agur), qui lui a succédé dans cette activité à la suite d'une procédure de mise en concurrence, le remboursement du montant des recettes afférentes à l'eau distribuée aux abonnés pour la période comprise entre le dernier relevé du 31 octobre 2002 et le 31 décembre 2002, date d'échéance du contrat d'affermage ; la société Agur ayant refusé, la société Saur l'a assignée sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Saur fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que, selon une jurisprudence acquise en 1997 et bien assise, «le fait d'avoir commis une imprudence ou une négligence ne prive pas celui qui en s'appauvrissant a enrichi autrui de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause» ; qu'en effet, seule une faute dolosive, lourde, ou d'une particulière gravité est susceptible de priver l'appauvri de son recours ; ainsi, qu'en commençant à déclarer que «le successeur de l'action de in rem verso repose en premier lieu sur un comportement exempt de toute faute de la part de l'appauvri (faute qui deviendrait la cause de l'appauvrissement)», la cour d'appel s'est fondée tout d'abord sur un principe erroné régissant l'enrichissement sans cause et violant l'article 1371 du code civil ;
2°/ qu'en énonçant, pour rejeter la demande de la société Saur, qu'«au cas d'espèce, le contrat d'affermage venant à expiration à date certaine et une procédure d'appel d'offres ayant été lancée plus d'un an avant l'expiration du contrat, il appartenait à la société Saur de prendre les dispositions nécessaires pour l'établissement des comptes à la cessation de son contrat» et qu' «en s'abstenant de le faire, sans justifier d'une impossibilité ou d'un quelconque usage en la matière, la société Saur a commis une faute» alors qu'une telle faute d'abstention ne constitue pas à l'évidence une faute dolosive, lourde, ou d'une particulière gravité mais une simple faute d'imprudence ou de négligence qui ne prive pas, comme on l'a rappelé, l'appauvri de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause, la cour d'appel a encore violé lesdits principes et l'article 1371 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la société Saur ne dispose d'aucun relevé exact des consommations pour la période en cause et ne produit aucun autre élément pour justifier le montant de sa demande, la note de calcul émanant de ses propres services étant sans valeur juridique ; qu'il en déduit que la société Saur ne rapporte pas la preuve d'un appauvrissement corrélatif à un enrichissement dont la société Agur aurait bénéficié ; qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Saur fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis, sans examiner, fût-ce sommairement, tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en jugeant, en l'espèce, que la société Saur n'avait pas justifié de l'usage professionnel d'un seul relevé annuel des consommations, alors qu'elle s'était prévalue, dans ses écritures d'appel, des factures et d'un mail du 29 janvier 2003 rédigés par la société Agur pour prouver l'existence de la pratique professionnelle, la cour d'appel n'a pas examiné, même de façon sommaire, les éléments de preuve produits ou invoqués par la société Saur au soutien de sa prétention ; qu'en conséquence, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'il n'existe aucun usage ni aucune obligation contractuelle consistant à assurer en fin de contrat une campagne de relève des compteurs pour solder l'exploitation ; qu'il retient encore, par motifs propres et adoptés, que le contrat d'affermage venant à expiration à date certaine et une procédure d'appel d'offres ayant été lancée plus d'un an avant l'expiration du contrat, il appartenait à la société Saur de prendre les dispositions nécessaires pour l'établissement des comptes à la cessation de son contrat, ce qu'elle s'était abstenue de faire sans justifier d'une impossibilité ou d'un quelconque usage en la matière ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Saur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Aquitaine de gestion urbaine et rurale la somme de 2 500 euros ; rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen qui en a délibéré, en remplacement du président, à l'audience publique du trois avril deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société Saur
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé la décision déférée qui a débouté la société SAUR de sa demande tendant à ce que la société AGUR soit condamnée, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, au paiement de la somme de 45 430, 79 euros, augmentée des intérêts légaux ;
AUX MOTIFS QUE « le succès de l'action de in rem verso repose en premier lieu sur un comportement exempt de toute faute de la part de l'appauvri (faute qui deviendrait la cause de l'appauvrissement) ; qu' au cas d'espèce, le contrat d'affermage venant à expiration à date certaine et une procédure d'appel d'offres ayant été lancée plus d'un an avant l'expiration du contrat, il appartenait à la Sas SAUR de prendre les dispositions nécessaires pour l'établissement des comptes à la cessation de son contrat ; qu' en s'abstenant de le faire, sans justifier d'une impossibilité ou d'un quelconque usage en la matière, la Sas SAUR a commis une faute qui est la cause du manque à gagner qu'elle déplore » (arrêt, p.4) ;
ALORS QUE, en premier lieu, selon une jurisprudence acquise en 1997 et bien assise, « le fait d'avoir commis une imprudence ou une négligence ne prive pas celui qui en s'appauvrissant a enrichi autrui de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause» ; qu'en effet, seule une faute dolosive, lourde, ou d'une particulière gravité est susceptible de priver l'appauvri de son recours ; ainsi, qu'en commençant à déclarer que « le succès de l'action de in rem verso repose en premier lieu sur un comportement exempt de toute faute de la part de l'appauvri (faute qui deviendrait la cause de l'appauvrissement) », la Cour d'appel s'est fondée tout d'abord sur un principe erroné régissant l'enrichissement sans cause et violé l'article 1371 du Code civil ;
ALORS QUE, en second lieu, en énonçant, pour rejeter la demande de la société SAUR, qu'« au cas d'espèce, le contrat d'affermage venant à expiration à date certaine et une procédure d'appel d'offres ayant été lancée plus d'un an avant l'expiration du contrat, il appartenait à la Sas Saur de prendre les dispositions nécessaires pour l'établissement des comptes à la cessation de son contrat » et qu' « en s'abstenant de le faire, sans justifier d'une impossibilité ou d'un quelconque usage en la matière, la Sas Saur a commis une faute » alors qu'une telle faute d'abstention ne constitue pas à l'évidence une faute dolosive, lourde, ou d'une particulière gravité mais une simple faute d'imprudence ou de négligence qui ne prive pas, comme on l'a rappelé, l'appauvri de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause, la Cour d'appel a encore violé lesdits principes et l'article 1371 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé la décision déférée qui a débouté la société SAUR de sa demande tendant à ce que la société AGUR soit condamnée, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, au paiement de la somme de 45 430, 79 euros, augmentée des intérêts légaux ;
AUX MOTIFS QUE « le succès de l'action de in rem verso repose en premier lieu sur un comportement exempt de toute faute de la part de l'appauvri (faute qui deviendrait la cause de l'appauvrissement) ; qu' au cas d'espèce, le contrat d'affermage venant à expiration à date certaine et une procédure d'appel d'offres ayant été lancée plus d'un an avant l'expiration du contrat, il appartenait à la Sas SAUR de prendre les dispositions nécessaires pour l'établissement des comptes à la cessation de son contrat ; qu' en s'abstenant de le faire, sans justifier d'une impossibilité ou d'un quelconque usage en la matière, la Sas SAUR a commis une faute qui est la cause du manque à gagner qu'elle déplore » (arrêt, p.4) ;
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis, sans examiner, fût-ce sommairement, tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en jugeant, en l'espèce, que la société SAUR n'avait pas justifié de l'usage professionnel d'un seul relevé annuel des consommations, alors qu'elle s'était prévalue, dans ses écritures d'appel, des factures et d'un mail du 29 janvier 2003 rédigés par la société AGUR pour prouver l'existence de la pratique professionnelle, la Cour d'appel n'a pas examiné, même de façon sommaire, les éléments de preuve produits ou invoqués par la société SAUR au soutien de sa prétention ; qu'en conséquence, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-19074
Date de la décision : 03/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 23 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 avr. 2012, pourvoi n°10-19074


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.19074
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