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29/03/2012 | FRANCE | N°10-27278

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 mars 2012, 10-27278


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 2010), que M. X... a été engagé à compter du 1er février 2005 en qualité d'agent d'exploitation par la société Eamus Cork Security (ECS) ; que, par jugement du 23 novembre 2009, le conseil de prud'hommes a condamné la société ECS à verser au salarié diverses sommes à titre de rappels de salaires et a débouté la société de sa demande de remboursement de trop perçus salariaux ; que M. X... a été licencié pour faute grave par lettre du 10 décembre

2009, l'employeur lui reprochant notamment des insultes proférées juste après ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 2010), que M. X... a été engagé à compter du 1er février 2005 en qualité d'agent d'exploitation par la société Eamus Cork Security (ECS) ; que, par jugement du 23 novembre 2009, le conseil de prud'hommes a condamné la société ECS à verser au salarié diverses sommes à titre de rappels de salaires et a débouté la société de sa demande de remboursement de trop perçus salariaux ; que M. X... a été licencié pour faute grave par lettre du 10 décembre 2009, l'employeur lui reprochant notamment des insultes proférées juste après que le conseil de prud'hommes ait rendu son jugement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui verser diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'en se bornant à relever, pour juger le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse, que les injures proférées par ce dernier le 23 novembre 2009 devaient s'analyser en un «simple mouvement d'humeur» sans statuer sur les autres griefs énoncés dans la lettre de licenciement tirés du non-respect répété des horaires de travail et des actes d'insubordination répétés du salarié qui avait déjà été sanctionné pour avoir injurié et giflé un autre salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ que constitue une faute grave le fait pour un salarié arrivé à son poste de travail une heure et demi après l'horaire prévu, de répondre à son employeur qui lui demande des explications : «tu es directeur mais tu n'as de couille au cul» ; qu'en relevant, pour dire que les injures proférées par M. X... à l'égard de son employeur le 23 novembre 2009 étaient un simple mouvement d'humeur, que ce jour-là, le retard du salarié s'expliquait par le prononcé du jugement du conseil de prud'hommes de Dunkerque dans un litige l'opposant à son employeur et qu'à son retour ce dernier lui avait fait remarquer son absence injustifiée en indiquant que cette absence aurait des répercussions financières quand ces circonstances sont impropres à caractériser une provocation ou une exigence illégitime de l'employeur de nature à excuser le comportement menaçant et injurieux du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ qu'en affirmant encore que la véritable cause de licenciement résidait dans la notification du jugement du conseil de prud'hommes de Dunkerque rendu au profit du salarié, sans analyser ne serait-ce que succinctement les pièces sur lesquelles elle se fondait, la concomitance entre cette notification et la procédure de licenciement étant à elle-seule insuffisante à caractériser le lien de causalité entre la procédure prud'homale et le licenciement dès lors que la réalité des griefs fondant cette mesure n'était pas contestée, la cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'abstraction faite du motif erroné tiré de l'application de l'article L. 1134-4 du code du travail, la cour d'appel a fait ressortir que la cause véritable de licenciement résidait dans la notification du jugement du conseil de prud'hommes venant juste d'être rendu au profit du salarié ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Eamus Cork Security aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Eamus Cork Security et la condamne à payer, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 500 euros à la SCP Hémery et Thomas-Raquin ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Eamus Cork Security

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, D'AVOIR condamné la société Eamus Cork Security à lui verser les sommes de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts, 423,36 euros au titre du salaire afférent à la mise à pied conservatoire, outre les congés payés y afférents, 1.070,18 euros à titre d'indemnité de licenciement, 2.675,45 euros à titre d'indemnité de préavis, outre les congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ; qu'aux termes de l'article L. 122-14-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre prévue à l'article L. 122-14-1 du même code ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux énoncés dans celle-ci, peut important les motifs allégués antérieurement ou en cours de procédure ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement est motivée comme la cour l'a citée dans la parties faits et procédure de l'arrêt ; qu'il résulte des éléments versés aux débats que si M. X... ne conteste pas avoir dit à son employeur «tu es directeur mais tu n'as pas de couilles au cul», la cour constate toutefois, que le 23 novembre 2009, M. X... s'était mis d'accord avec un collègue afin de pouvoir s'absenter durant deux heures pour se rendre au conseil de prud'hommes de Dunkerque prendre connaissance du jugement rendu dans le litige l'opposant à son employeur ; que son collègue n'a pu toutefois le remplacer et qu'en rentrant le directeur de l'entreprise lui a fait remarquer son absence injustifiée et lui a indiqué que cette absence aurait des conséquences financières, ce qui a conduit le salarié à manifester un mouvement d'humeur et à tenir les propos précités ; qu'aux termes de l'article L. 1134-4 du code du travail, est nul et de nul effet le licenciement d'un salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa faveur, lorsqu'il est établi que le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l'employeur en raison de cette action en justice ; que dans ce cas, l'indemnité ne peut être inférieure à six mois de salaire ; que la cour estime que tel est le cas compte tenu de la concomitance entre la notification du jugement donnant raison au salarié et l'engagement de la procédure de licenciement et le comportement du salarié le 23 novembre 2009, compte tenu des circonstances, n'étant pas de nature à constituer en l'espèce une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le comportement de l'employeur porte une atteinte inadmissible au droit fondamental à un recours juridictionnel ; qu'il y lieu dès lors de dire que le licenciement et sans cause réelle et sérieuse ;

ALORS, 1°), QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'en se bornant à relever, pour juger le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse, que les injures proférées par ce dernier le 23 novembre 2009 devaient s'analyser en un «simple mouvement d'humeur» sans statuer sur les autres griefs énoncés dans la lettre de licenciement tirés du non-respect répété des horaires de travail et des actes d'insubordination répétés du salarié qui avait déjà été sanctionné pour avoir injurié et giflé un autre salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

ALORS, 2°), QUE constitue une faute grave le fait pour un salarié arrivé à son poste de travail une heure et demi après l'horaire prévu, de répondre à son employeur qui lui demande des explications : «tu es directeur mais tu n'as de couille au cul» ; qu'en relevant, pour dire que les injures proférées par M. X... à l'égard de son employeur le 23 novembre 2009 étaient un simple mouvement d'humeur, que ce jour-là, le retard du salarié s'expliquait par le prononcé du jugement du conseil de prud'hommes de Dunkerque dans un litige l'opposant à son employeur et qu'à son retour ce dernier lui avait fait remarquer son absence injustifiée en indiquant que cette absence aurait des répercussions financières quand ces circonstances sont impropres à caractériser une provocation ou une exigence illégitime de l'employeur de nature à excuser le comportement menaçant et injurieux du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

ALORS, 3°), QU'en affirmant encore que la véritable cause de licenciement résidait dans la notification du jugement du conseil de prud'hommes de Dunkerque rendu au profit du salarié, sans analyser ne serait-ce que succinctement les pièces sur lesquelles elle se fondait, la concomitance entre cette notification et la procédure de licenciement étant à elle-seule insuffisante à caractériser le lien de causalité entre la procédure prud'homale et le licenciement dès lors que la réalité des griefs fondant cette mesure n'était pas contestée, la cour d'appel qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Eamus Cork Security à payer à M. X... des sommes au titre de rappels de salaires, d'heures supplémentaires, d'heures de nuit, des dimanches et jours fériés sur la base d'un taux horaire de 10, 15 euros et D'AVOIR débouté la société Eamus Cork Security de sa demande reconventionnelle en paiement d'un trop-perçu salarial ;

AUX MOTIFS QUE pour la période considérée, soit d'avril 2006 au mois de décembre 2008 n'apparaissent sur les fiches de paie de M. X... ni heures de nuit, ni heures supplémentaires, ni majorations pour travail le dimanche alors que de telles mentions apparaissent avant le mois d'avril 2006, date à laquelle le salaire est passé à un taux de 10,15 euros et à compter de janvier 2009, lorsque le taux horaire a été baisé à 8,81 euros ; qu'il est manifeste que loin de constituer le résultat d'une erreur informatique comme le soutient l'employeur, ce taux de 10,15 euros a été attribué volontairement par l'employeur en contrepartie des astreintes auxquelles le salarié était de nouveau soumis comme le démontre la fiche de planification de mars 2008 de M. X... qui comprend des jours d'astreinte à domicile ainsi que les fiches de planification pour cette période le mentionnant comme «intervenant», ce qui était la qualification supérieure prévue dans l'avenant du 29 novembre 2005 ; que ce taux a été attribué pendant presque trois années, l'employeur ne découvrant selon lui son «erreur» qu'en réponse à une réclamation du salarié quant au paiement des majorations pour heures de nuit et travail le dimanche prévues par la convention collective, lesquelles majorations n'ayant pas été payées par l'employeur durant toute la période durant laquelle il versait un salaire aux taux horaire de 10,15 euros ;

ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer le principe du contradictoire ; que si lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être rapportée la preuve contraire ; qu'en relevant, pour appliquer un taux horaire de 10,15 euros, que ce taux avait été volontairement appliqué par la société ECS en contrepartie d'astreintes effectuées par le salarié comme cela résulte de la fiche de planification pour le mois de mars 2008 cependant qu'elle avait relevé que les parties avaient repris oralement leurs conclusions et qu'il ne résultait pas de ces dernières, en particulier de celles du salarié, que M. X... ait prétendu avoir effectué des astreintes en contrepartie d'un rémunération supérieure à celle correspondant à classification, la cour d'appel a violé les articles 7 alinéa 2 et 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27278
Date de la décision : 29/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 mar. 2012, pourvoi n°10-27278


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27278
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