LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 29 septembre 2010), que M. X..., engagé le 1er mars 2001 par la société SM ravalement en qualité de conducteur de travaux, a été licencié pour faute lourde le 19 novembre 2007 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à verser diverses sommes au salarié, alors, selon le moyen :
1°/ que rien n'interdit à deux témoins ayant assisté aux mêmes événements d'établir deux attestations, relatant les mêmes faits, rédigées dans des termes voisins, similaires ou identiques ; qu'en l'espèce, en retenant que la rédaction similaire de deux attestations leur enlèverait toute force probante, la cour d'appel a violé l'article 202 du code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
2°/ que nul ne saurait se constituer une preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, en s'étant fondée sur des déclarations émanant du salarié lui-même pour en conclure que ce dernier n'avait pas commis de faute, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3°/ qu'il est constant qu'en l'espèce, tant M. Y... que M. Z... étaient très clairement mis en cause par la société SM ravalement concernant les faits qui étaient reprochés à M. X... et qui, en définitive, avaient entraîné son licenciement ; que, dès lors, en se fondant sur les déclarations de ces mêmes MM. Y... et Z... pour estimer que M. X... n'avait pas commis de faute, sans rechercher si, face aux accusations dont eux-mêmes faisaient l'objet, ces personnes n'avaient pas tout intérêt à défendre la thèse et les affirmations soutenues par le salarié licencié et si, en conséquence, leurs déclarations n'étaient pas nécessairement dépourvues de fiabilité et de force probante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de fait et de preuve qui leur étaient soumis ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société SM ravalement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SM ravalement à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour la société SM ravalement.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. Patrick X... par la société SM RAVALEMENT SARL ne reposait ni sur une faute lourde, ni sur une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'avoir condamné l'employeur au paiement de 1. 911, 80 € au titre de la perte de salaire sur mise à pied, outre 191, 18 € de congés payés afférents, de 3. 823, 61 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre 382, 36 € de congés payés afférents, de 955, 90 € d'indemnité légale de licenciement, de 16. 000, 00 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 10. 000, 00 € de dommages-intérêts pour préjudice moral et de 1. 000, 00 € et 800, 00 € au titre des frais irrépétibles, respectivement, exposés en première instance et en cause d'appel ;
Aux motifs que « la lettre de licenciement datée du 19 novembre 2007 indique : « Par lettre recommandée avec accusé de réception du 05/ 11/ 07, nous vous avons convoqué le mercredi 14 novembre 2007 à 9 heures pour un entretien sur une éventuelle mesure de licenciement vous concernant.
Lors de cet entretien, nous vous avons fait part des griefs suivants :
Vous avez été recruté le 01/ 03/ 01, en qualité de conducteur de travaux. Dans le cadre de vos fonctions, vous avez en charge d'organiser le travail des équipes dans le respect des procédures de l'entreprise, à savoir le respect des fiches de travaux conformément à nos devis.
Or, lors des travaux commandés par Monsieur Z...,... 51370 SAINT BRICE COURCELLES, il était prévu la réalisation de la façade arrière et le pignon gauche. J'ai constaté personnellement que la façade avant et le mur en limite de propriété sur façade arrière ont été réalisés sans devis ni bons de commande.
Interrogé sur ce point, Monsieur Z..., notre client, nous a informé avoir demandé un chiffrage de ces travaux et que Monsieur Y..., notre commercial, et vous-même lui aviez proposé de réaliser les travaux moyennant le paiement en numéraire des travaux correspondants, sans devis préalable, ni facturation. Après son accord, vous avez commandé aux compagnons en place de réaliser le travail avec les matériaux de l'entreprise pendant les heures de travail.
Vous vous êtes bien évidemment abstenu de m'informer de ces travaux supplémentaires qui n'ont donc pas pu être facturés, nous causant ainsi un grave préjudice.
Ces faits sont caractéristiques de détournement de clientèle, de travail dissimulé, d'abus de confiance et dénotent une volonté manifeste de nuire à notre entreprise.
Vos propos, lors de l'entretien préalable, en présence de votre conseiller salarié, relèvent pour leur part de la diffamation et de la calomnie.
Il s'agit de faits graves que nous ne pouvons tolérer.
En conséquence, nous nous voyons dans l'obligation de procéder à votre licenciement immédiat pour faute lourde sans préavis ni indemnités d'aucune sorte.
Par ailleurs la mesure de mise à pied, prise à titre conservatoire qui vous a été notifiée le 31 octobre 2007, ne vous sera pas rémunérée … »
… que la société se prévaut d'une faute lourde, contestée par le salarié, dont la charge de la preuve lui incombe ;
… que l'employeur soutient qu'il existe un devis qui précise clairement les travaux et notamment le ravalement de la façade arrière et du pignon gauche et non la façade avant et un mur de clôture, mais ne produit aucun document justifiant ses dires, le marché de travaux ne comportant aucun descriptif pas plus que le document intitulé « devis normal au tarif entreprise » et non signé ; que la facture indique « réalisation de travaux de ravalement selon devis N° 07474 du 11 septembre 2007 » ;
… que l'employeur produit des attestations de salariés, Messieurs B... et C..., qui indiquent qu'ils ont effectué des travaux supplémentaires et que Messieurs Y... et X... étaient venus pour faire le devis, mais n'avaient pris aucune mesure et étaient entrés avec le client dans la maison un quart d'heure et étaient ressortis le sourire aux lèvres en leur donnant l'ordre de faire les travaux sans qu'il ait jamais eu de feuille de travail ; que Monsieur C... ajoute « nous savions bien qu'il touchait de l'argent des clients » en parlant de Monsieur Y... ; que Monsieur B... conclut ainsi son attestation « Ils pouvaient donc mettre la société en péril et nuire à tous les salariés » ;
Mais … que la rédaction similaire de deux attestations leur enlève toute force probante ; qu'au surplus, aucun n'a été témoin de la perception de sommes par Monsieur X..., ce qu'ils ont confirmé lors de l'enquête de police ;
… qu'il résulte des déclarations de Messieurs Y... et X... que ces travaux ont été réalisés à titre commercial à l'initiative de Monsieur Y..., commercial de l'entreprise, car Monsieur Z... était un bon client et que les travaux supplémentaires étaient minimes et qu'il a demandé à Monsieur X... de les réaliser, ce que ce dernier a accepté ; que Monsieur X... était donc couvert par la décision du commercial ; que Monsieur Z... déclare qu'il pensait que tous les travaux devaient être réalisés mais que Monsieur Y... lui avait montré le devis, et qu'il lui avait demandé de stopper les travaux s'il ne faisait pas le tout et que le commercial avait pris la décision de faire un geste commercial et de réaliser le reste des travaux sans supplément, soit environ 4 mètres carrés de plus, et qu'il avait demandé au conducteur de travaux, Monsieur X..., de faire les travaux supplémentaires, sans qu'aucune somme ne soit versée ; que concernant le mur mitoyen, c'est le peintre qui l'avait fait en disant que cela faisait partie de la façade arrière, ce que confirme Monsieur B... dans sa déclaration à la police ; qu'enfin Monsieur Z... a indiqué que Monsieur F..., gérant de la société SM RAVALEMENT, l'avait menacé de déposer plainte contre lui s'il ne faisait pas une attestation indiquant qu'il « avait payé les travaux de la façade avant au noir » ;
… que la société ne justifie pas d'une faute de Monsieur X... telle qu'énoncée dans la lettre de licenciement ; que le licenciement est dès lors sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera confirmé y compris sur les sommes allouées, la Cour ne trouvant aucun motif de réformation, à défaut pour Monsieur X... de justifier d'une préjudice supplémentaire dont les premiers juges n'auraient pas tenu compte ou eu connaissance et sans qu'il y ait lieu de modifier le montant de l'astreinte fixée par le jugement dont appel » ;
1. Alors que, d'une part, rien n'interdit à deux témoins ayant assisté aux mêmes événements d'établir deux attestations, relatant les mêmes faits, rédigées dans des termes voisins, similaires ou identiques ; qu'en l'espèce, en retenant que la rédaction similaire de deux attestations leur enlèverait toute force probante, la Cour d'appel a violé l'article 202 du Code de Procédure civile, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
2. Alors que, d'autre part, nul ne saurait se constituer une preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, en s'étant fondée sur des déclarations émanant du salarié lui-même pour en conclure que ce dernier n'avait pas commis de faute, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
3. Alors qu'enfin, il est constant qu'en l'espèce, tant M. Y... que M. Z... étaient très clairement mis en cause par la société SM RAVALEMENT concernant les faits qui étaient reprochés à M. X... et qui, en définitive, avaient entraîné son licenciement ; que, dès lors, en se fondant sur les déclarations de ces mêmes MM. Y... et Z... pour estimer que M. X... n'avait pas commis de faute sans rechercher si, face aux accusations dont eux-mêmes faisaient l'objet, ces personnes n'avaient pas tout intérêt à défendre la thèse et les affirmations soutenues par le salarié licencié et si, en conséquence, leurs déclarations n'étaient pas nécessairement dépourvues de fiabilité et de force probante, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du Code civil.