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21/02/2012 | FRANCE | N°10-27966

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 février 2012, 10-27966


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Midi Tielles qui commercialise des plats cuisinés dans les grandes surfaces et notamment des tielles sétoises, reprochant à la société Coudène Michel (société Coudène) d'utiliser pour les mêmes produits un emballage identique à celui qu'elle avait conçu et d'apposer une étiquette également identique, l'a assignée pour concurrence déloyale et parasitaire ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sept

ième branches :
Attendu que la société Coudène fait grief à l'arrêt de l'avoir...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Midi Tielles qui commercialise des plats cuisinés dans les grandes surfaces et notamment des tielles sétoises, reprochant à la société Coudène Michel (société Coudène) d'utiliser pour les mêmes produits un emballage identique à celui qu'elle avait conçu et d'apposer une étiquette également identique, l'a assignée pour concurrence déloyale et parasitaire ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et septième branches :
Attendu que la société Coudène fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser les sommes de 132 780 euros et 30 000 euros à titre de dommages-intérêts à la société Midi Tielles pour parasitisme économique et concurrence déloyale, alors, selon le moyen :
1°/ que le simple fait de copier un produit concurrent qui n'est pas protégé par des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale et la recherche d'une économie au détriment d'un concurrent n'est pas en tant que telle fautive mais procède de la liberté du commerce et de la libre concurrence, sous réserve de respecter les usages loyaux du commerce ; qu'en se bornant à constater que la société Midi Tielles avait développé et conçu des emballages répondant aux caractéristiques fonctionnelles des produits qu'elle commercialise, pour en déduire qu'elle était titulaire d'une « valeur économique protégeable » interdisant à la société Coudène commercialisant des produits similaires aux siens, de copier ses emballages non protégés par des droits de propriété intellectuelle, et de réaliser ainsi une économie, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil et la liberté du commerce et de l'industrie ;
2°/ qu'interdiction est faite aux juges de dénaturer les pièces qui lui sont soumises ; que les photographies versées aux débats représentant les tielles commercialisées par la société Coudène, les tielles commercialisées par la société Midi Tielles et les tielles concurrentes côte à côte montraient que l'emballage des tielles commercialisées par la société Midi Tielles comportait un liseré bleu et jaune à vocation esthétique, qui ne figurait nullement sur l'emballage des tielles commercialisées par la société Coudène, et que chacun des emballages était revêtu d'une étiquette comportant des signes distinctifs des produits très différents ; qu'en affirmant qu'il résulte de ces photographies que les emballages des tielles commercialisées par ces deux sociétés sont « rigoureusement identiques », la cour d'appel a dénaturé les photographies versées aux débats en violation du principe susvisé ;
3°/ qu''en affirmant péremptoirement que la présentation dans l'emballage litigieux était de nature à « alimenter la confusion dans l'esprit du consommateur » sans cependant expliquer en quoi la seule présentation de tartes salées dans un emballage thermoformé en plastique transparent, était susceptible de créer une confusion dans l'esprit des consommateurs sur les produits qu'ils contenaient, lorsqu'en outre les étiquettes les revêtant, bien que de taille similaire et placées au même endroit, comportaient des signes distinctifs très différents permettant d'identifier clairement les produits et l'identité de leurs producteurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 et 1383 du code civil ;
4°/ qu'en tout état de cause ne constitue pas un acte de concurrence déloyale ni un acte de concurrence parasitaire, l'utilisation pour la commercialisation d'un plat cuisiné d'un emballage identique à celui utilisé par des concurrents pour la commercialisation de produits similaires lorsque les caractéristiques de cet emballage sont dictées par les contraintes techniques liées au produit lui-même ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que selon la société Midi Tielles elle-même, pour commercialiser ses tielles, elle a « conçu un emballage thermoformé avec une découpe spécifique alliant l'esthétique, le maintien en place d'un produit fragile (tartelette en pâte brisée aux fruits de mer) dont il fallait garantir l'intégrité et la bonne conservation dans le temps », ce dont il s'évinçait que de l'aveu même de la partie adverse, la forme de l'emballage répondait essentiellement à des contraintes techniques dictées par la nature du produit ; que la cour d'appel a elle-même relevé que « les caractéristiques de l'emballage étaient « fonctionnelles » consistant en la « protection et conservation d'un produit fragile pour permettre sa distribution à une échelle industrielle » ; qu'en affirmant néanmoins que les caractéristiques de l'emballage litigieux ne résultaient pas de contraintes techniques, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article 1382 et 1383 du code civil ;
5°/ que l'exposante faisait en outre valoir que l'emballage en plastique transparent thermoformé était banal, couramment utilisé pour la distribution industrielle de produits comportant les mêmes caractéristiques, ce dont elle justifiait en versant aux débats des photographies d'emballages de produits de même nature ; qu'elle ajoutait que le procédé même de conception de ces emballages (thermoformage) était lui-même banal et couramment utilisé dans le secteur de l'agro-alimentaire ; qu'en s'abstenant de rechercher comme elle y était invitée si le recours à un emballage thermoformé en plastique transparent pour présenter un produit cuisiné vendu au rayon traiteur n'était pas un procédé banal exclusif de toute concurrence déloyale ou parasitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
6°/ que les limites du litige sont fixées par les prétentions respectives des parties ; que la société Midi Tielles sollicitait à titre de dommages-intérêts, d'une part une somme de 132 780 euros correspondant à l'économie réalisée par la société Coudène, et d'autre part, une provision de 50 000 euros à valoir sur son préjudice résultant de la perte ou du manque à gagner en termes de chiffre d'affaires et de bénéfices qu'elle avait subi du fait des agissements de l'exposante, dont elle sollicitait l'évaluation par un expert ; que la cour d'appel, après lui avoir accordé la somme de 132 780 euros correspondant à l'économie réalisée par la société Coudène, et constaté que la société Midi Tielles ne fournissait aucun élément comptable révélant que les fautes de l'intimée avaient eu des répercussions néfastes sur son chiffre d'affaires et sur son bénéfice, pour la débouter de sa demande de provision et d'expertise, a néanmoins cru devoir lui accorder une somme de 30 000 euros « à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la société Coudène qui a délibérément choisi de développer son produit dans le sillage de la société appelante » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté qu'il ressortait des éléments du dossier et notamment des photographies versées aux débats que les emballages des produits litigieux étaient rigoureusement identiques à ceux de la société Midi Tielles, tant en ce qui concerne les formes que les dimensions, l'arrêt relève que, si le recours à un emballage thermoformé s'explique par des contraintes techniques liées à la nature des produits, il n'en est pas de même pour la forme des emballages ; qu'il relève encore que l'ancien gérant de la société Midi Tielles, qui avait participé à la mise au point technique et à la conception de l'emballage des tielles, est entré au service d'une société intermédiaire à laquelle la société Coudène s'est adressée pour la fabrication de ses propres emballages ; qu'il constate enfin que la société Coudène appose sur ses emballages, au même endroit que la société Midi Tielles, une étiquette de mêmes dimensions ; que de ses constatations et appréciations, exemptes de dénaturation, la cour d'appel a pu déduire que la société Coudène avait commis des actes de concurrence déloyale en créant un risque de confusion dans l'esprit du consommateur et adopté un comportement parasitaire en tirant indûment profit des investissements réalisés par la société Midi Tielles pour développer un produit concurrent et a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en deuxième lieu, que, dès lors qu'il n'était pas reproché à la société Coudène d'avoir reproduit un procédé de thermoformage, la cour d'appel n'avait pas à procéder à la recherche visée à la cinquième branche ;
Attendu, enfin, que la société Midi Tielles ayant fait valoir que le comportement déloyal de la société Coudène lui avait causé un trouble commercial ne serait-ce que moral, c'est, sans dénaturer les termes du litige que la cour d'appel a condamné cette société au paiement d'une somme de 30 000 euros ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ces branches ;
Mais sur le moyen pris en sa sixième branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société Coudène au paiement de la somme de 132 780 euros, l'arrêt retient que cette somme correspond à l'économie réalisée par cette société pour le développement de son produit ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice subi du fait d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme ne s'identifie pas à l'économie réalisée par l'auteur de ces actes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Coudène Michel à payer la somme de 162 780 euros à la société Midi Tielles, l'arrêt rendu le 19 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne la société Midi Tielles aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Coudene Michel.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société Michel COUDENE convaincue de parasitisme économique et de concurrence déloyale au préjudice de la Sas MIDITIELLES et d'AVOIR en conséquence condamné l'exposante à verser à la société MIDI TIELLES 162 780 euros à titre de dommages et intérêts, fait interdiction à la société Michel COUDENE d'utiliser pour la commercialisation de ses tielles des emballages thermoformé identiques à ceux développés et utilisés par la société MIDI-TIELLES, assorti cette interdiction d'une astreinte de 500 euros par infraction constatée, ordonné la publication aux frais de la société Michel COUDENE de la présente décision dans deux journaux professionnels choisis par la société MIDI TIELLES et condamné la société Michel COUDENE à verser à la société MIDI TIELLES la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE « L'action poursuivie par l'appelante ne se situe pas dans la sphère du droit des marques ou modèles mais bien dans le sillage de la concurrence déloyale. Demanderesse, elle doit apporter la preuve qu'elle est titulaire d'une valeur économique dont l'intimée s'est emparée à moindre coût ; L'appelante affirme sans être démentie qu'elle a été la première à proposer à la vente des tielles industrielles (dès 2002). Elle explique que pour les commercialiser, au terme de ses recherches elle a conçu un emballage thermoformé avec une découpe spécifique alliant l'esthétique, le maintien en place d'un produit fragile (tartelette en pâte brisée aux fruits de mer) dont il fallait garantir l'intégrité et la bonne conservation dans le temps. Or, il ressort des éléments du dossier et notamment des photographies versées aux débats que la société Coudène, est arrivée sur le marché de la tielle industrielle en 2006 avec des emballages rigoureusement identiques à ceux utilisés par la société appelante. En effet, dans les deux cas, il s'agit d'emballages thermoformé rectangulaires (deux tielles) ou carré (quatre tielles), de dimensions similaires et dont les réceptacles destinés à abriter et maintenir les tielles sont conçus de façon identique. L'appelante explique, et l'intimée ne démontre pas le contraire, que ce ne sont pas des contraintes techniques qui imposent la forme de l'emballage. La similitude des deux emballages est telle, qu'elle ne peut être que le résultat d'une volonté délibérée de copier. Au demeurant, l'appelante rapporte la preuve de ce fait par la production de l'attestation circonstanciée de monsieur Yvon Y... qui a été directeur commercial de la société Coudène du 01/ 03/ 1993 au 01/ 02/ 2007. Ce dernier écrit : « En 2005, la société Coudène souhaitait mettre au point un emballage spécifique pour la commercialisation de tielles. En ma qualité de directeur commercial j'ai été pleinement associé à ce projet. La mise au point de l'emballage était technique et nécessitait des études approfondies. La société Coudène étant pressée de mettre ses tielles sur le marché, elle a cherché à bénéficier du savoir-faire industriel et du résultat des études déjà réalisées par la société Midi-Tielles. N° 1 sur ce produit. En effet, la société Midi-Tielles avait mis au point un emballage spécifique. Pour profiter des avancées industrielles et des secrets de fabrication de la société Midi-Tielles, la société Coudène s'est rapprochée d'un partenaire industriel avec laquelle elle entretenait des liens très étroits, la société Senfas (dirigeant, M Z...). La société Senfas abritait dans ses locaux la société Sud Gastronomie, dont M. Coudène et M Z... étaient les associés, et qu'ils avaient spécifiquement créée pour fabriquer des tielles. Le dirigeant de la société Senfas avait une implication officielle dans la société Sud Gastronomie, puisqu'il en était également le dirigeant. La société Sud Gastronomie avait embauché M A..., ancien gérant et ancien salarié de la société Midi-Tielles. M B..., compte tenu des fonctions qu'il occupait précédemment chez Midi-Tielles, a eu accès à toutes les études et la conception de l'emballage des tielles. Aussi il a pu en faire profiter la société Sud-Gastronomie par l'intermédiaire de la société Senfas, à qui Coudène avait donné des instructions spécifiques. Il voulait la même chose que ce qui était fait chez Midi-Tielles. (.../...) ». Les protestations de l'intimée et son argumentaire pour tenter de jeter le doute sur la crédibilité de cette attestation ne résistent pas à l'examen. En effet, compte tenu du poste qu'il occupait dans la société Coudène, l'attestant ne pouvait ignorer les stratégies commerciales développées par l'entreprise Coudène. Il était dans l'entreprise lorsque la société Coudène a préparé l'arrivée sur le marché de ses tielles et monsieur A...qui a eu un rôle important dans la mise au point technique de l'emballage des tielles de l'intimée était bien présent dans la société partenaire Sud Gastronomie au moment de la mise au point de l'emballage et dans la société intimée lors du lancement du produit. Pour ne pas manquer d'alimenter encore la confusion dans l'esprit du consommateur entre les produits concurrents, la société intimée appose sur ses emballages, au même endroit que la société appelante, une étiquette aux dimensions similaires. Les fautes de la société Coudène sont suffisamment caractérisées. Cet emballage que la société intimée a réussi à copier représente en raison de ses caractéristiques fonctionnelles (protection et conservation d'un produit fragile pour permettre sa distribution à une échelle industrielle) une valeur économique certaine qui à ce titre est protégée. En s'emparant de cette valeur, à moindre coût, pour le développement d'un produit concurrent dont elle cherche à inscrire le développement dans le sillage du produit distribué avec succès par l'appelante, l'intimée cause un préjudice à sa concurrente. Ce préjudice sera indemnisé par une somme égale au montant de l'économie faite par l'intimée sur le développement d'un emballage performant soit, au vu des documents et factures produits aux débats, par une somme de 132. 780 €. Il lui sera alloué en sus une somme de 30. 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la société Coudène qui a délibérément choisi de développer son produit dans le sillage de la société appelante. Il sera également fait interdiction à l'intimée d'utiliser des emballages identiques à ceux de l'appelante, comme explicité au dispositif de la présente décision, et l'appelante pourra publier la présente décision, aux frais de l'intimée, dans deux journaux professionnels de son choix, sans que le coût de chaque insertion n'excède la somme de 4. 500 € ; que l'appelante, qui ne fournit aucun élément comptable qui révélerait que les fautes de l'intimée pourraient avoir d'autres répercussions dommageables sur son activité, sera déboutée de sa demande d'expertise »

1. ALORS QUE le simple fait de copier un produit concurrent qui n'est pas protégé par des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale et la recherche d'une économie au détriment d'un concurrent n'est pas en tant que telle fautive mais procède de la liberté du commerce et de la libre concurrence, sous réserve de respecter les usages loyaux du commerce ; qu'en se bornant à constater que la société MIDI TIELLES avait développée et conçu des emballages répondant aux caractéristiques fonctionnelles des produits qu'elle commercialise, pour en déduire qu'elle était titulaire d'une « valeur économique protégeable » interdisant à la société Michel COUDENE commercialisant des produits similaires aux siens, de copier ses emballages non protégés par des droits de propriété intellectuelle, et de réaliser ainsi une économie, la Cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil et la liberté du commerce et de l'industrie ;
2. ALORS QU'interdiction est faite aux juges de dénaturer les pièces qui lui sont soumises ; que les photographies versées aux débats représentant les tielles commercialisées par la société Michel COUDENE (pièce n° 1 produite par l'exposante), les tielles commercialisées par la société MIDI TIELLES (pièce n° 14 produite par l'exposante), et les tielles concurrentes côte à côte (pièce adverse n° 10) montraient que l'emballage des tielles commercialisées par la société MIDI TIELLES comportait un liseré bleu et jaune à vocation esthétique, qui ne figurait nullement sur l'emballage des tielles commercialisées par la société Michel COUDENE, et que chacun des emballages était revêtu d'une étiquette comportant des signes distinctifs des produits très différents ; qu'en affirmant qu'il résulte de ces photographies que les emballages des tielles commercialisées par ces deux sociétés sont « rigoureusement identiques », la Cour d'appel a dénaturé les photographies versées aux débats en violation du principe susvisé ;
3. ALORS EN OUTRE QU'en affirmant péremptoirement que la présentation dans l'emballage litigieux était de nature à « alimenter la confusion dans l'esprit du consommateur » sans cependant expliquer en quoi la seule présentation de tartes salées dans un emballage thermoformé en plastique transparent, était susceptible de créer une confusion dans l'esprit des consommateurs sur les produits qu'ils contenaient, lorsqu'en outre les étiquettes les revêtant, bien que de taille similaire et placées au même endroit, comportaient des signes distinctifs très différents permettant d'identifier clairement les produits et l'identité de leurs producteurs, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 et 1383 du Code civil ;
4. ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE ne constitue pas un acte de concurrence déloyale ni un acte de concurrence parasitaire, l'utilisation pour la commercialisation d'un plat cuisiné d'un emballage identique à celui utilisé par des concurrents pour la commercialisation de produits similaires lorsque les caractéristiques de cet emballage sont dictées par les contraintes techniques liées au produit lui-même ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que selon la société MIDI TIELLES elle-même, pour commercialiser ses tielles, elle a « conçu un emballage thermoformé avec une découpe spécifique alliant l'esthétique, le maintien en place d'un produit fragile (tartelette en pâte brisée aux fruits de mer) dont il fallait garantir l'intégrité et la bonne conservation dans le temps » (arrêt attaqué p 5), ce dont il s'évinçait que de l'aveu même de la partie adverse, la forme de l'emballage répondait essentiellement à des contraintes techniques dictées par la nature du produit ; que la Cour d'appel a elle-même relevé que « les caractéristiques de l'emballage étaient « fonctionnelles » consistant en la « protection et conservation d'un produit fragile pour permettre sa distribution à une échelle industrielle » (arrêt attaqué p 6) ; qu'en affirmant néanmoins que les caractéristiques de l'emballage litigieux ne résultaient pas de contraintes techniques, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article 1382 et 1383 du Code civil ;
5. ALORS QUE l'exposante faisait en outre valoir que l'emballage en plastique transparent thermoformé était banal, couramment utilisé pour la distribution industrielle de produits comportant les mêmes caractéristiques, ce dont elle justifiait en versant aux débats des photographies d'emballages de produits de même nature (conclusions d'appel de l'exposante p 3-4) ; qu'elle ajoutait que le procédé même de conception de ces emballages (thermoformage) était lui-même banal et couramment utilisé dans le secteur de l'agro-alimentaire (conclusions d'appel de l'exposante p 8) ; qu'en s'abstenant de rechercher comme elle y était invitée si le recours à un emballage thermoformé en plastique transparent pour présenter un produit cuisiné vendu au rayon traiteur n'était pas un procédé banal exclusif de toute concurrence déloyale ou parasitaire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;
6. ALORS QUE lorsque le demandeur en concurrence déloyale réclame la réparation du trouble commercial qu'il prétend subir, il doit établir par des éléments comptables, une perte financière ou un manque à gagner ; qu'il résultait des propres constatations de l'arrêt attaqué que la société MIDI TIELLES ne fournissait aucun élément comptable révélant que les fautes de l'intimée avaient eu des répercussions néfastes sur son chiffre d'affaires et sur son bénéfice ; qu'en lui accordant cependant « une somme égale au montant de l'économie faite par l'intimée sur le développement d'un emballage performant soit, au vu des documents et factures produits aux débats, par une somme de 132. 780 € », la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
7. ALORS ENFIN QUE les limites du litige sont fixées par les prétentions respectives des parties ; que la société MIDI TIELLES sollicitait à titre de dommages et intérêts, d'une part une somme de 132 780 € correspondant à l'économie réalisée par la société Michel COUDENE, et d'autre part, une provision de 50 000 € à valoir sur son préjudice résultant de la perte ou du manque à gagner en termes de chiffre d'affaires et de bénéfices qu'elle avait subi du fait des agissements de l'exposante, dont elle sollicitait l'évaluation par un expert (conclusions d'appel de la société MIDI TIELLES p 14, 15 et 17) ; que la Cour d'appel, après lui avoir accordé la somme de 132 780 € correspondant à l'économie réalisée par la société Michel COUDENE, et constaté que la société MIDI TIELLES ne fournissait aucun élément comptable révélant que les fautes de l'intimée avaient eu des répercussions néfastes sur son chiffre d'affaires et sur son bénéfice, pour la débouter de sa demande de provision et d'expertise, a néanmoins cru devoir lui accorder une somme de 30 000 € « à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la société Coudène qui a délibérément choisi de développer son produit dans le sillage de la société appelante » ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-27966
Date de la décision : 21/02/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 19 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 fév. 2012, pourvoi n°10-27966


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27966
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