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06/12/2011 | FRANCE | N°10-23413

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 06 décembre 2011, 10-23413


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par contrat du 16 décembre 2002 et un avenant du même jour, la société Gelpat (le preneur) et la société GE capital équipement finance (le crédit-bailleur) ont conclu un contrat de crédit-bail portant sur une machine commandée à la société Tonelli group SRL (le fournisseur) suivant facture pro-forma du 26 novembre 2002 ; que le contrat prévoyait le versement d'un acompte de 30 % à la commande, l'engagement solidaire du preneur à rembourser l'acompte au bailleur en

cas d'absence de livraison, et la fixation au 30 avril 2003 de la date ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par contrat du 16 décembre 2002 et un avenant du même jour, la société Gelpat (le preneur) et la société GE capital équipement finance (le crédit-bailleur) ont conclu un contrat de crédit-bail portant sur une machine commandée à la société Tonelli group SRL (le fournisseur) suivant facture pro-forma du 26 novembre 2002 ; que le contrat prévoyait le versement d'un acompte de 30 % à la commande, l'engagement solidaire du preneur à rembourser l'acompte au bailleur en cas d'absence de livraison, et la fixation au 30 avril 2003 de la date limite de réception de la machine ; que le 23 décembre 2002, le crédit-bailleur a ratifié la commande et versé au fournisseur un acompte de 30 % d'un montant de 80 940,56 euros ; que la machine n'ayant pas été livrée ni réceptionnée, le crédit-bailleur a notifié au preneur son refus de proroger l'accord de financement et l'a assigné en restitution de l'acompte ; que le preneur a assigné en intervention forcée le fournisseur ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen, qui est recevable :
Vu les articles 1134 et 1184 du code civil ;
Attendu que pour condamner le preneur à verser au bailleur la somme de 8 940,06 euros, l'arrêt retient que la résiliation du contrat de vente entraîne la résiliation subséquente du contrat de crédit-bail, que les dispositions de l'article 6-3 de ce contrat prévoient que "dans le cas où le contrat de crédit-bail est résilié consécutivement à la résolution ou à l'annulation du contrat de vente, pour quelque cause que ce soit, le locataire... doit régler au bailleur une indemnité hors taxes égale à 10 % du montant des loyers", et qu'il y a lieu de faire droit à la demande de la société GE capital finance à hauteur de 10 % de l'acompte versé de 80 940,56 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que l'indemnité était calculée en fonction du montant des loyers, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Gelpat à verser à la société GE capital équipement finance la somme de 8 940,06 euros avec intérêts au taux légal à compter de son prononcé, l'arrêt rendu le 3 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet en conséquence, quant à ce, la cause et les parties, dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société GE capital équipement finance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils pour la société Gelpat
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société Gelpat, crédit-preneur de sa demande en dommages et intérêts fondée sur le manquement de la société GE Capital Equipement Finance, crédit bailleur, à son obligation de conseil ;
AUX MOTIFS QUE : « la société GE Capital Equipement Finances, organisme de crédit bail, n'était tenue dans ses rapports avec le locataire demandeur au financement d'aucun devoir de conseil sur l'opportunité et les conditions techniques de l'acquisition envisagée, dont l'objet relevait exclusivement de l'activité de la compétence spécifique du locataire, qui n'était pas un profane, pour laquelle les tractations duraient depuis plus d'un an et dont le coût important impliquait une réflexion interne préalable poussée de l'acquéreur, d'ailleurs assistée d'un conseil en ingénierie ; qu'au surplus, la société Gelpat n'invoquant rien des difficultés financières à la réalisation du projet, l'obstacle étant exclusivement d'ordre technique, que la société GE Capital Equipement Finances n'était pas davantage tenue d'exiger une garantie bancaire à première demande que la société Tonelli Groupe SRL se déclarait donc prête à fournir, sous réserve de disposer d'une date d'expiration de cette garantie » ;
ALORS QUE : le crédit bailleur est tenu d'un devoir de conseil à l'égard du preneur non-averti ; que, pour juger que la société GE Capital Equipement Finances n'était tenue à aucun devoir de conseil, la cour d'appel a considéré que la société Gelpat n'était pas un profane, sans rechercher si elle n'était pas non-avertie s'agissant de l'acquisition d'un matériel technique extrêmement particulier ; qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS 2°) QUE : la société Gelpat soutenait que la société GE Capital Equipement Finance avait manqué à son devoir de conseil, d'une part, en s'abstenant de solliciter la fourniture d'une garantie bancaire de la part de la société Tonelli, et, d'autre part, « à tout le moins, en s'abstenant d'attirer l'attention de la concluante la société Gelpat sur la nécessité d'une telle garantie » ; que la cour d'appel a purement et simplement délaissé ce second moyen, pour ne répondre qu'au premier, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Gelpat, crédit-preneuse, de ses demandes en résiliation du contrat de fournitures aux torts de la société Tonelli Groupe SRL, fournisseur, d'AVOIR prononcé la résiliation à ses torts et de l'AVOIR condamnée à verser la somme de 80.940,56 € à la société Tonelli Group SRL ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' : « il est acquis que la société Gelpat n'a pas répondu aux demandes techniques présentées par la société Tonelli Group SRL via la société Tuffreau le 3 février 2003, demande réitérée, et que la société Tonelli Group SRL ne pouvait engager la construction de ce matériel coûteux et complexe, qui justifiait des délais de livraison de quatre mois, sans connaître les caractéristiques de l'implantation chez le client, en termes de réseaux et d'amenée des fluides et en termes de positionnement au sein de l'entreprise, au regard notamment de la hauteur de la machine. De plus, le contrat prévoyait que la mise en service était à la charge de la société Tonelli Group SRL, et facturée en tant que telle, ce qui impliquait que celle-ci dispose en amont des informations indispensables à cette mise en service dans les locaux de la société Gelpat. Ces demandes, qui étaient à l'évidence dans l'intérêt de l'acquéreur, étaient contractuellement prévues dès lors que le devis établi par la société Tonellli Group SRL le 19 septembre 2001 prévoyait que le délai de livraison commençait à courir à réception de la commande écrite accompagnée du chèque d'acompte et des données techniques nécessaires à la réalisation du matériel. La facture proforma du 26 novembre 2002 faisait suite à une première facture proforma identique du 17 septembre 2002 accompagnée du devis du 19 septembre 2001 (luimême suivi d'échanges de courriers accompagnés de plans), signée de la société Gelpat et accompagné de la mention manuscrite « le présent descriptif est accompagné par celui de votre devis du 19 septembre 2001 établi par la société Tuffreau n°… sur la base duquel j'ai accepté la présente commande ». La lecture combinée de ces divers éléments contractuels permet d'affirmer que la société Gelpat était tenue de fournir à la société Tonelli Group SRL les éléments sollicités par celle-ci, qui ne pouvait sans ceuxci engager la fabrication, et alors qu'elle avait disposé des plans au cours de la phase précontractuelle, en application des stipulations contractuelles et à tout le moins du principe d'exécution de bonne foi des contrats, en vertu de laquelle elle devait mettre la société Tonelli Group SRL en mesure de procéder utilement à la fabrication de la machine. Il est en outre mentionné que des représentants de la société Tonelli Group SRL se sont rendus à l'usine de la société Gelpat le 15 mai 2003, et pour autant, la société Gelpat n'a pas renvoyé les plans signés après cette entrevue in situ qui devait lui permettre de finaliser l'opération ; de même, il est rappelé qu'alors que le permis de construire, dont la nécessité pouvait apparaître à la lecture des plans communiqués au cours de la période précontractuelle, a été obtenu le 22 octobre 2003,la construction projetée n'a pas été engagée. Le contrat est donc résilié aux torts de la société Gelpat ; que la société Tonelli Group SRL a encaissé l'acompte de 80.940,56 euros versé par la société GE Capital Equipement Finance. Pour en garder le bénéfice, elle se prévaut des dispositions contractuelles aux termes desquelles en cas de défaut de paiement, les sommes déjà versées resteront acquises à titre de dédommagement. Cependant, la société Gelpat objecte à juste titre que cette disposition figure dans l'article des conditions générales relatif à la clause de réserve de propriété, dont la mise en oeuvre suppose la livraison préalable de l'objet du contrat, laquelle n'est pas en l'espèce intervenue. La société Tonelli Group SRL ne peut donc s'en prévaloir utilement. En revanche, le non respect par la société Gelpat de ses obligations contractuelles, sanctionné par la résiliation du contrat à ses torts lui ouvre droit à dommage et intérêts en application de l'article 1147 du code civil. Il sera fait droit sur ce fondement à la demande de la société Tonelli Group SRL, et la cour estime devoir fixer à 80.940,56 euros le montant des dommages et intérêts au regard des atermoiements et de la mauvaise foi de la société Gelpat. De ce fait, la société Tonelli Group SRL est fondée à conserver le montant de l'acompte et le jugement sera confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « que la société Gelpat a régulièrement souscrit deux contrats, un contrat de vente auprès de Tonelli et un contrat de financement auprès de Gecef, ces deux contrats s'imposent aux parties sur le fondement de l'article 1134 du code civil ; que Gelpat ne s'appuie sur aucun fondement juridique pour solliciter la résiliation des contrats ; Gelpat sera déboutée de ce chef de demande ; que Tonelli demande au tribunal de constater que l'inexécution du contrat passé entre elle Gelpat n'est due qu'à la carence de Gelpat ; que le devis établi par Tonelli le 19 septembre 2001 précise : « le délai de livraison commence à courir à réception de la commande écrite accompagnée d'un chèque d'acompte et données techniques nécessaires à la réalisation du matériel », la commande a été ratifiée le 16 janvier 2003 par Gelpat, Tonelli indique n'avoir jamais reçu les données techniques, qui ne sont d'ailleurs pas versées au débat ; que par courrier du 17 septembre 2003, réitéré par un courrier recommandé du 30 avril 2004, Tonelli écrit à Gelpat ne pas être en mesure de pouvoir exécuter le contrat, ne disposant pas des directives techniques définitives ; que Gelpat ne démontre aucun manquement de Tonelli dans les respect des ses obligations, que Tonelli a fait preuve d'une grande patience, la carence de Gelpat a rendu impossible la fabrication et qui plus est la livraison à ce jour, attendu que les conditions générales de vente de Tonelli précisent que toutes les sommes versées à titre d'acompte resteront acquises à Tonelli à titre de dédommagement » ;
ALORS 1°), QUE : le vendeur est tenu d'une obligation d'information, même en faveur d'un acheteur professionnel, dès lors que celui-ci n'a pas la maîtrise technique lui permettant de contracter de manière éclairée ; que, pour résilier le contrat aux torts exclusifs de la société Gelpat, la cour d'appel a considéré que cette société était défaillante en ce qu'elle n'avait pas délivré des informations utiles à son cocontractant, la société Tonelli Group SRL ; que la société Gelpat faisait valoir, pour sa part, que la société Tonelli Group SRL était tenue d'un devoir de conseil et de renseignement à son égard (cf. conclusions page 20,in fine) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le fabriquant n'avait pas manqué à sa propre obligation de conseil et de renseignement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1184 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Gelpat à verser à la société GE Capital Equipement Finance la somme de 8.094,06 euros ;
AUX MOTIFS QUE : « la résiliation du contrat de vente entraîne la résiliation subséquente du contrat de crédit bail entre la société Gelpat et la société GE Capital Equipement finance. De ce fait, la société GE Capital Equipement Finance est fondée en application des dispositions contractuelles, article 6-3, qui prévoient que « dans le cas où le contrat de crédit bail est résilié consécutivement à la résolution ou à l'annulation du contrat de vente, pour quelque cause que ce soit, le locataire…doit régler au bailleur une indemnité hors taxe égale à 10% du montant des loyers. En l'espèce, il n'a pas été perçu de loyers, mais la société GE Capital Equipement Finance formule sa demande à hauteur de 10 % de l'acompte versé de80.940,56 euros, soit à la somme de 8.094,06 euros » ;
ALORS QUE : la cour d'appel a constaté, d'une part, que les dispositions contractuelles applicables prévoient « dans le cas où le contrat de crédit bail est résilié consécutivement à la résolution ou à l'annulation du contrat de vente, pour quelque cause que ce soit, le locataire…doit régler au bailleur une indemnité hors taxe égale à 10 % du montant des loyers » et, d'autre part, qu'en l'espèce, « il n'a pas été perçu de loyers » ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande de la Société Ge Capital Equipement Finance à hauteur de 10 % de l'acompte versé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1134 et 1182 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-23413
Date de la décision : 06/12/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 03 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 06 déc. 2011, pourvoi n°10-23413


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.23413
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