LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., a été engagée par M. Y... le 1er octobre 1975 en qualité d'attachée de presse et qu'elle est devenue, à compter du 1er juin 2001, responsable d'édition, statut cadre catégorie C3 ; que par lettre en date du 6 janvier 2006, elle a été licenciée pour motif économique par la société La Compagnie des éditions de la Lesse (société de la Lesse) qui avait succédé par transmission universelle du patrimoine le 15 novembre 2005 à la société Edisud devenue auparavant son employeur ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes liées à la requalification de son contrat de travail devenu à temps partiel et de demandes relatives à la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société de la Lesse fait grief à l'arrêt de requalifier le contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et de la condamner à payer des sommes aux titres de rappel de salaire entre mai 2001 et avril 2006, d'indemnité compensatrice de congés payés et de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors, selon le moyen :
1°/ que s'il est en principe exigé de l'employeur qu'il apporte la preuve d'une acceptation expresse de la modification du contrat de travail, l'acceptation tacite peut être retenue si le comportement du salarié ne laisse place à aucune équivoque et manifeste clairement sa volonté de renoncer à la situation antérieure ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que, faute d'acceptation expresse par Mme X... de la réduction de la durée de son temps de travail, il devait être fait droit à sa demande de requalification de son temps partiel en un temps complet, sans même s'expliquer sur l'absence totale de protestation de la salariée pendant douze années consécutives, alors même que lui était remis chaque mois un bulletin de paie mentionnant une durée de travail de 135 heures, ce dont il ressortait sans équivoque l'existence d'un accord au moins verbal de sa part à la modification litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ qu'en affirmant, pour faire droit à la demande de Mme X... de requalification de son temps partiel en un temps complet et lui allouer les sommes qu'elle réclamait à ce titre, que si à partir de février 1996, sa présence dans l'entreprise avait été réduite avec l'accord de l'employeur, sa durée effective de travail n'aurait pas été diminuée, l'absence d'allégement de sa tâche l'ayant contrainte à réaliser à son domicile personnel toutes les tâches qu'elle ne pouvait effectuer pendant son temps de travail officiel ainsi qu'en attestait M. A... et Mme de B..., quand les attestations de ces deux personnes indiquaient uniquement que la salariée partageait son temps de travail entre son domicile et son bureau, sans à aucun moment préciser le nombre d'heures passées dans l'un ou dans l'autre, de sorte qu'il n'était pas permis d'en conclure qu'elle aurait effectué en réalité 169 heures mensuelles au lieu des 135 heures indiquées sur son bulletin de paie, la cour d'appel a dénaturé lesdites attestations et a violé en conséquence les dispositions de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que dès lors qu'il était constant et non contesté que si la durée du temps de travail de la salariée avait été diminuée par son employeur de l'époque, sa rémunération était demeurée inchangée, de sorte qu'elle avait continué à percevoir jusqu'à son licenciement le salaire correspondant à un temps plein ; qu'en lui octroyant néanmoins l'ensemble des sommes qu'elle réclamait à titre de rappel de salaire, d'indemnité compensatrice de congés payés et de complément d'indemnité de licenciement résultant de la requalification de son contrat en un contrat à temps complet, alors qu'elle n'avait subi aucune perte de rémunération du fait de la modification de la durée de son temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les bulletins de salaire mentionnaient un horaire de travail de 135 heures au lieu des 169 heures effectuées sans avenant écrit définissant sa nouvelle durée de travail, sa répartition sur la semaine ou sur le mois et que la réduction du temps de travail n'avait jamais été effective, l'employeur n'ayant pas réduit sa charge de travail et que la salariée avait poursuivi son travail comme avant, la cour d'appel a, dans l'exercice de son pouvoir souverain, exactement décidé que le seul fait d'avoir, pendant des années, reçu des bulletins de salaire mentionnant le nouvel horaire inexact, sans protester, ne valait pas preuve d'une acceptation tacite de cette modification du contrat ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit et partant irrecevable en sa troisième branche, est mal fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen, pris en ses quatre premières branches :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement pour motif économique dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement pour motif économique peut être justifié par la nécessité de réorganiser l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité ; que cette réorganisation n'implique pas l'existence de difficultés économiques actuelles, mais une anticipation des risques et, le cas échéant, des difficultés à venir ; qu'en retenant, dès lors, l'absence de preuve des difficultés économiques rencontrées par la société de la Lesse pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X..., alors que la cause initiale du licenciement était la nécessité de réorganiser l'entreprise, nécessité non subordonnée à l'existence de telles difficultés, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ que la réalité de la suppression du poste d'un salarié, cause actuelle de son licenciement pour motif économique, s'apprécie au jour de la rupture ; qu'en se contentant dès lors d'affirmer, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X..., que deux ouvrages auraient paru en 2007 dans la ligne éditoriale qu'elle dirigeait, sans rechercher si à la date du 6 janvier 2006, date de notification de son licenciement, son poste avait ou non été supprimé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que la société de la Lesse avait versé aux débats les courriers qu'elle avait envoyés le 17 octobre 2005 à la société Edition du Plaisancier, à la société Calade, à la Librairie maritime d'Outre-mer et à la société les Editions du Gerfaut les interrogeant sur l'existence en leur sein d'un poste disponible susceptible d'être proposé à Mme X... ainsi que les réponses négatives, en date du 9 et du 10 novembre de ces dernières ; qu'elle avait en outre justifié avoir proposé à la salariée deux postes : l'un de secrétaire d'édition statut non-cadre sous contrat à durée indéterminée, l'autre d'éditeur de manuels techniques statut non-cadre sous contrat à durée déterminée à temps partiel, propositions que l'intéressée avait refusées ; qu'en se contentant dès lors d'affirmer, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'il appartenait à la société d'effectuer une recherche sérieuse de reclassement quand cette dernière avait justifié de la réalité de ses efforts, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
4°/ qu'en retenant, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X... que, dès avant l'engagement de la procédure de licenciement, la société avait proposé un départ transactionnel, " ce qui contredirait sa prétendue tentative de reclassement ", quand la circonstance qu'une négociation transactionnelle ait pu être évoquée entre les parties n'autorisait nullement à conclure à l'absence de sérieux des offres de reclassement effectivement proposées à la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant rappelé qu'il appartenait à la société de la Lesse d'effectuer une recherche sérieuse et de faire des propositions de reclassement compte tenu de sa polyvalence et constaté que l'employeur avait limité sa tentative de reclassement à des courriers remis en main propre au directeur d'Edisud, et à différentes autres sociétés du groupe de la Lesse qu'il présidait, qui ont fait l'objet à chaque fois d'un courrier de refus très laconique et que le compte rendu de la réunion avec les délégués du personnel ne mentionne aucune recherche de reclassement, ce dont il résultait que n'avaient été ni envisagées ni formulées des offres de reclassement précises, concrètes et personnalisées ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société à payer une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement l'arrêt retient qu'eu égard à la requalification, la cour élèvera à 80 000 euros l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, allouera en sus 2 000 euros pour irrégularité de la procédure faute de preuve d'un préjudice plus ample ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société La Compagnie des éditions de la Lesse a payer la somme de 2 000 euros d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 16 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société La Compagnie des éditions de la Lesse aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Compagnie des éditions de la Lesse à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société La Compagnie des éditions de la Lesse.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat à temps partiel de Mme X... devait être requalifié en un contrat à temps complet et d'avoir condamné en conséquence la COMPAGNIE DES EDITIONS DE LA LESSE à lui verser les sommes de 39. 277, 03 € à titre de rappel de salaire entre mai 2001 et avril 2006, de 3. 927, 70 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés et de 8. 871, 92 € à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE pour rejeter la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel, en temps complet, le Conseil de prud'hommes a retenu, en substance, qu'au 1er février 1996, la Société EDISUD a modifié le temps de travail d'Anne-Marie X..., en mentionnant sur ses bulletins de salaire un horaire de 135 heures mais en maintenant sa rémunération brute dans toutes ses composantes ; que Anne-Marie X... affirme n'avoir jamais donné son accord express à cette modification de son contrat de travail, et réclame pour la période de mai 2001 à avril 2006, postérieure à la prescription quinquennale, les sommes ci-après :-39. 277, 03 € à titre de rappel de salaire,-3. 927, 70 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents au rappel de salaire,-8. 871, 92 € à titre de complément d'indemnité de licenciement sur la base du rappel de salaire pour la période considérée ; qu'elle soutient que la Société EDISUD a procédé à la modification de son temps de travail sans avoir au préalable recueilli son acceptation claire et non équivoque, qu'EDISUD n'a jamais soumis à l'acceptation de Anne-Marie X... un contrat de travail écrit comportant notamment la nouvelle durée de travail, que la durée effective de travail n'a jamais été réduite ; qu'à l'appui de ses dires, elle produit deux attestations, la première, de Monsieur A... qui indique qu'elle partageait son temps de travail entre son domicile et son bureau à EDISUD, la seconde, de Madame DE B..., qui atteste, également, que de 1996 à son arrêt de maladie en 1999, elle a partagé l'exécution de son travail entre son bureau de l'entreprise et son domicile ; que l'employeur, en réplique, produit un courrier d'Anne-Marie X... en date du 6 juillet 1998, dans lequel celle-ci sollicite l'accord de son employeur pour exercer son activité à domicile, accord confirmé par l'employeur dans un courrier du 24 juillet 1998 ; que l'employeur rappelle également que l'absence d'écrit relativement au temps partiel ne crée qu'une présomption simple et non une présomption irréfragable ; qu'il rappelle, enfin, que pendant 12 ans la salariée n'a jamais émis le moindre écrit ou la moindre revendication à ce titre ; que de tout ceci, il résulte, à partir de la lecture des bulletins de salaire, que malgré l'absence d'écrit, l'employeur était bien lié-à Anne-Marie X... par un contrat de travail à temps partiel et que ses demandes ne sauraient prospérer ; qu'Anne-Marie X... combat justement cette motivation, en soulignant, à bon droit, que l'employeur a modifié, sans son accord, son temps de travail en mentionnant sur les bulletins de salaire 135 heures au lieu des 169 heures effectuées, sans avenant écrit définissant sa prétendue nouvelle durée de travail, sa répartition sur la semaine ou sur le mois ; que, surtout, cette prétendue réduction du temps de travail n'a jamais été effective, l'employeur n'ayant pas réduit sa charge de travail ; que le fait qu'elle ait poursuivi son travail comme avant, pendant des années, reçu des bulletins de salaire mentionnant le nouvel horaire inexact, sans protester, ne vaut pas preuve d'une acceptation tacite de cette modification du contrat ; que l'employeur a procédé de la sorte pour contrer l'évolution à la hausse de sa rémunération ; que si, à partir de février 1996, sa présence dans l'entreprise a été réduite, avec l'accord de l'employeur, pour autant, sa durée effective de travail n'a pas été réduite, l'absence d'allégement de sa tâche l'ayant contrainte à réaliser à son domicile personnel toutes les tâches qu'elle ne pouvait plus effectuer pendant son nouveau temps de travail officiel ; que cela est attesté par M. A..., délégué du personnel et par Madame DE B... ; que de la sorte, elle s'est tenue constamment à la disposition de son employeur, pendant 169 heures par mois, a été empêchée d'effectuer une activité complémentaire faute de pouvoir connaître son temps disponible ; qu'en cet état, par réformation du jugement, la Cour fera droit à la demande de requalification en temps complet, retiendra un salaire de base de l'ordre de 3. 800 € environ, accueillera les demandes afférentes aux sommes de 39. 277, 03 € de rappel de salaire entre mai 2001 et avril 2006, 3. 927, 70 € d'indemnité compensatrice de congés payés, 8. 871, 92 € de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, le calcul lui-même de ces sommes n'étant pas discuté ;
ALORS, D'UNE PART, QUE s'il est en principe exigé de l'employeur qu'il apporte la preuve d'une acceptation expresse de la modification du contrat de travail, l'acceptation tacite peut être retenue si le comportement du salarié ne laisse place à aucune équivoque et manifeste clairement sa volonté de renoncer à la situation antérieure ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que, faute d'acceptation expresse par Mme X... de la réduction de la durée de son temps de travail, il devait être fait droit à sa demande de requalification de son temps partiel en un temps complet, sans même s'expliquer sur l'absence totale de protestation de la salariée pendant 12 années consécutives, alors même que lui était remis chaque mois un bulletin de paie mentionnant une durée de travail de 135 heures, ce dont il ressortait sans équivoque l'existence d'un accord au moins verbal de sa part à la modification litigieuse, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant, pour faire droit à la demande de Mme X... de requalification de son temps partiel en un temps complet et lui allouer les sommes qu'elle réclamait à ce titre, que si à partir de février 1996, sa présence dans l'entreprise avait été réduite avec l'accord de l'employeur, sa durée effective de travail n'aurait pas été diminuée, l'absence d'allégement de sa tâche l'ayant contrainte à réaliser à son domicile personnel toutes les tâches qu'elle ne pouvait effectuer pendant son temps de travail officiel ainsi qu'en attestait M. A... et Mme DE B..., quand les attestations de ces deux personnes indiquaient uniquement que la salariée partageait son temps de travail entre son domicile et son bureau, sans à aucun moment préciser le nombre d'heures passées dans l'un ou dans l'autre, de sorte qu'il n'était pas permis d'en conclure qu'elle aurait effectué en réalité 169 heures mensuelles au lieu des 135 heures indiquées sur son bulletin de paie, la Cour d'appel a dénaturé lesdites attestations et a violé en conséquence les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;
ET ALORS, ENFIN, QUE dès lors qu'il était constant et non contesté que si la durée du temps de travail de la salariée avait été diminuée par son employeur de l'époque, sa rémunération était demeurée inchangée, de sorte qu'elle avait continué à percevoir jusqu'à son licenciement le salaire correspondant à un temps plein ; qu'en lui octroyant néanmoins l'ensemble des sommes qu'elle réclamait à titre de rappel de salaire, d'indemnité compensatrice de congés payés et de complément d'indemnité de licenciement résultant de la requalification de son contrat en un contrat à temps complet, alors qu'elle n'avait subi aucune perte de rémunération du fait de la modification de la durée de son temps de travail, la Cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
II est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement pour motif économique de Mme X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné en conséquence la COMPAGNIE DES EDITIONS DE LA LESSE à lui verser les sommes de 80. 000 € de dommages intérêts à ce titre et de 2. 000 € pour irrégularité de la procédure ;
AUX MOTIFS QUE la SA LA COMPAGNIE DE LA LESSE maintient que le licenciement économique aurait une cause réelle et sérieuse, en faisant valoir que la restructuration de l'entreprise, sa réorganisation étaient nécessaires pour sauvegarder la compétitivité du groupe, que ses comptes de résultat pour l'exercice 2004-2005, traduisent une perte de 2. 676. 187 €, qu'elle a bien supprimé la ligne éditoriale dont cette salariée avait la charge, que les délégués du personnel ont été régulièrement avisés des mesures prises la concernant, que sans cette restructuration, il est à penser qu'elle aurait déposé le bilan, qu'elle justifierait d'efforts sérieux de reclassement, par la production de réponses négatives à ses demandes, ces éléments ayant été rapportés et débattus devant les délègues du personnel, ce reclassement ayant été recherché au niveau du groupe ; que toutefois, pour juger que l'employeur ne justifie pas de recherches sérieuses de reclassement, le Conseil de Prud'hommes a retenu justement que la lettre de licenciement est ainsi rédigée « Comme nous vous l'indiquions au cours de notre entretien du 25 novembre 2005, nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour un motif économique. Cette décision est directement liée à la nécessité pour notre entreprise de réorganiser ses services, en particulier celui du pôle éditorial et donc de le restructurer et ce encore afin de sauvegarder la compétitivité de notre entreprise. Votre licenciement est justifié par les éléments suivants-dans le cadre du rachat de la Société EDISUD par le Groupe FINANCIERE DE LA LESSE le 5 juillet 2005, nous sommes amenés à réviser la politique éditoriale,- votre fonction dans l'entreprise consiste essentiellement et au travers de votre qualification de responsable d'édition à réaliser un programme éditorial sur des thèmes concernant le Magreb, effectuer la recherche d'auteurs sur les thèmes correspondants. Or, il s'avère que la politique éditoriale retenue vise à supprimer cette ligne éditoriale dont vous avez la charge. Cela nous conduit à supprimer le poste que vous occupez. Par conséquent, nous nous voyons contraints de prononcer votre licenciement. Comme nous l'indiquions lors de la réunion des délégués du personnel, aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée, tant au sein de l'entreprise, qu'au niveau du groupe et ce malgré nos recherches effectives en ce sens, que lors de notre entretien préalable, nous vous avons indiqué que vous pouviez bénéficier du congé de reclassement. Vous avez jusqu'au 12 décembre 2005 pour y adhérer. Or à ce jour vous ne nous avez pas fait connaître votre choix. La présente lettre constitue donc la notification de votre licenciement économique » ; qu'Anne-Marie X... a fait remarquer que les lignes éditoriales dont elle a eu la charge au cours de sa longue collaboration professionnelle avec la Société EDISUD, ne se limitaient pas au monde berbère et arabo-musulman et a communiqué, à cet effet, plusieurs témoignages d'auteurs ; qu'il appartenait donc à la Société LA COMPAGNIE DE LA LESSE d'effectuer une recherche sérieuse et d'apporter des possibilités de reclassement compte tenu de sa polyvalence ; que la Société a limité sa tentative de reclassement à des courriers remis en main propre à Monsieur D..., Directeur d'EDISUD, et à différentes autres sociétés du groupe ; que celui-ci en réponse a répondu à chaque fois par un courrier de refus très laconique ; qu'en début d'année 2006, deux postes de responsables d'édition ont été pourvus au sein du groupe :- Nathalie E..., dans l'entreprise d'édition MARDAGA,- François F...dans l'entreprise d'édition VAGNON ; que par ailleurs, le compte rendu de la réunion avec les délégués du personnel ne mentionne aucune recherche de reclassement ; qu'enfin, il convient également de relever que, dès avant l'engagement de la procédure de licenciement, la Société avait proposé un départ transactionnel, ce qu'elle a confirmé au cours de l'entretien préalable, ce qui contredit sa prétendue tentative de reclassement ; que c'est donc surabondamment, mais justement, que la salariée souligne que la lettre de licenciement n'est motivée que par une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité « de l'entreprise », sans référence aux difficultés économiques ou aux contraintes financières ; qu'elle n'énonce pas en quoi une menace pesait sur le secteur d'activité du groupe auquel appartient l'employeur, ni en quoi la réorganisation annoncée était de nature à sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe, en quoi la suppression de la ligne éditoriale sur le Maghreb était nécessaire et utile ; qu'en réalité, le seul objectif était de faire des économies en licenciant les salariées les plus âgées ; qu'elle prouve par de nombreux témoignages d'auteurs que sa ligne éditoriale ne se limitait pas au monde berbère et arabo-musulman, et surtout que, plus d'un an après son licenciement, sa ligne éditoriale n'a pas été supprimée, comme l'établit le catalogue « EDITIONS EDISUD » pour 2007, qui fait état de deux ouvrages parus en 2007 ; qu'enfin, l'employeur n'apporte aucune justification établissant que ses prévisions d'une situation économique du groupe pour les années postérieures au licenciement se soient révélées exactes, ses pièces comptables ne concernant que les années, 2004 pour le groupe, 2005 pour elle-même ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'eu égard à la requalification, la Cour élèvera à 80. 000 € l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, allouera en sus 2. 000 € pour irrégularité de la procédure faute de preuve d'un préjudice plus ample ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le licenciement pour motif économique peut être justifié par la nécessité de réorganiser l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité ; que cette réorganisation n'implique pas l'existence de difficultés économiques actuelles, mais une anticipation des risques et, le cas échéant, des difficultés à venir ; qu'en retenant, dès lors, l'absence de preuve des difficultés économiques rencontrées par la Société COMPAGNIE DES EDITIONS DE LA LESSE pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X..., alors que la cause initiale du licenciement était la nécessité de réorganiser l'entreprise, nécessité non subordonnée à l'existence de telles difficultés, la Cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la réalité de la suppression du poste d'un salarié, cause actuelle de son licenciement pour motif économique, s'apprécie au jour de la rupture ; qu'en se contentant dès lors d'affirmer, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X..., que deux ouvrages auraient paru en 2007 dans la ligne éditoriale qu'elle dirigeait, sans rechercher si à la date du 6 janvier 2006, date de notification de son licenciement, son poste avait ou non été supprimé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
ALORS, ENCORE, QUE la Société LA COMPAGNIE DES EDITIONS DE LA LESSE avait versé aux débats les courriers qu'elle avait envoyés le 17 octobre 2005 à la Société EDITION DU PLAISANCIER, à la Société CALADE, à la LIBRAIRIE MARITIME D'OUTRE MER et à la Société LES EDITIONS DU GERFAUT les interrogeant sur l'existence en leur sein d'un poste disponible susceptible d'être proposé à Mme X... ainsi que les réponses négatives, en date du 9 et du 10 novembre de ces dernières ; qu'elle avait en outre justifié avoir proposé à la salariée deux postes : l'un de secrétaire d'édition statut non-cadre sous contrat à durée indéterminée, l'autre d'éditeur de manuels techniques statut non-cadre sous contrat à durée déterminée à temps partiel, propositions que l'intéressée avait refusées ; qu'en se contentant dès lors d'affirmer, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'il appartenait à la Société d'effectuer une recherche sérieuse de reclassement quand cette dernière avait justifié de la réalité de ses efforts, la Cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
ALORS, ENSUITE, QU'en retenant, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X... que, dès avant l'engagement de la procédure de licenciement, la Société avait proposé un départ transactionnel, « ce qui contredirait sa prétendue tentative de reclassement », quand la circonstance qu'une négociation transactionnelle ait pu être évoquée entre les parties n'autorisait nullement à conclure à l'absence de sérieux des offres de reclassement effectivement proposées à la salariée, la Cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, QUE selon l'article 455 du Code de procédure civile, tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que pour condamner la COMPAGNIE DES EDITIONS DE LA LESSE à verser à Mme X... la somme de 2. 000 € « pour irrégularité de la procédure », la Cour d'appel n'a exprimé aucun motif permettant à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle ; qu'elle a ainsi méconnu les exigences du texte susvisé.