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21/09/2011 | FRANCE | N°10-13403

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-13403


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 décembre 2009), que M. X... a été engagé le 26 janvier 2002 par la société Saline d'Einville en qualité de responsable de production ; qu'à l'issue d'un arrêt maladie et de deux examens, le médecin du travail a, le 16 avril 2007, déclaré le salarié inapte à son poste ; qu'ayant été licencié le 15 mai 2007 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, celui-ci a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que

l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement sans cause réelle e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 décembre 2009), que M. X... a été engagé le 26 janvier 2002 par la société Saline d'Einville en qualité de responsable de production ; qu'à l'issue d'un arrêt maladie et de deux examens, le médecin du travail a, le 16 avril 2007, déclaré le salarié inapte à son poste ; qu'ayant été licencié le 15 mai 2007 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, celui-ci a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer des sommes à titre de dommages-intérêts et d'indemnités de préavis et de congés payés, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'un salarié est déclaré inapte à son poste, l'employeur doit rechercher des possibilités de reclassement, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que tenu à cet égard d'une simple obligation de moyens, l'employeur ne peut se voir reprocher de ne pas avoir recherché d'autres postes que ceux proposés au salarié inapte s'il n'est pas constaté que des possibilités de reclassement auraient été effectivement négligées ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de ne pas avoir recherché d'autres solutions de reclassement que celles identifiées et proposées avant le second avis d'inaptitude et réitérées après ce second avis, sans constater que d'autres possibilités existaient, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°/ qu'en reprochant à l'employeur de ne verser aux débats aucune pièce pour caractériser l'impossibilité, au-delà des postes proposés, de reclasser le salarié au sein de l'entreprise, quand l'employeur versait aux débats le registre du personnel établissant l'absence de postes disponibles autres que ceux proposés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir exactement rappelé que l'employeur est, en application de l'article L. 1226-2 du code du travail, tenu de proposer au salarié, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude de celui-ci à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel a retenu à bon droit que la recherche de reclassement devait être effectuée postérieurement au second avis du médecin du travail et que l'employeur ne saurait reprocher au salarié de ne pas lui avoir indiqué quel poste lui convenait ;
Et attendu qu'après avoir relevé que les seuls postes proposés correspondaient à ceux déjà déclarés non conformes par le médecin du travail, la cour d'appel, appréciant souverainement la portée des éléments de fait et de preuve produits devant elle, a constaté que l'employeur ne justifiait pas, postérieurement au second avis d'inaptitude, de l'impossibilité de reclassement du salarié; qu'elle a ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Saline d'Einville aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Saline d'Einville à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Saline d'Einville
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société SALINE d'EINVILLE à lui payer 30.000 euros de dommages et intérêt, 6.846 euros bruts au titre du préavis outre congés payés afférents et une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné le remboursement par la SA SALINE d'EINVILLE à l'organisme concerné des indemnités de chômage effectivement versées à Monsieur X... par suite de son licenciement
AUX MOTIFS QUE «selon les articles L.122-2 à L.1226-4 du Code du travail, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications formulées sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail ; que si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de lui verser, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi occupé avant la suspension du contrat de travail ; Attendu que l'employeur ne peut prononcer le licenciement que s'il justifie de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions prévues ci-dessus ; que l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de rechercher des possibilités de reclassement ; Attendu qu'en l'espèce, la lettre de licenciement est ainsi rédigée : "Au terme des visites médicales des 26 mars et 16 avril 2007 vous avez été déclaré inapte définitif à tous les postes de l'entreprise par le docteur Pascale Y.... Dès que nous avons eu connaissance du premier avis d'inaptitude, nous avons étudié de manière approfondie les possibilités éventuelles de reclassement. C'est ainsi qu'en date du 5 avril 2007 nous vous avons adressé deux propositions de reclassement compatibles avec le premier avis médical d'inaptitude précité pour avoir été élaboré en concertation avec le médecin du travail. Par lettre en date du 12 avril 2007, vous avez refusé les propositions de reclassement qui vous avaient été faites en invoquant notamment de prétendues « conditions de travail qui seraient à changer». Malgré nos demandes répétées d'apporter toute précision quant aux conditions de travail qu'il conviendrait à votre sens de changer afin de nous permettre d'affiner notre recherche de reclassement, vous vous êtes retranchés derrière l'avis de la médecine du travail duquel découlait, selon vous, une incompatibilité automatique à tous les postes de l'entreprise. Dans ces conditions, nous vous avons par courrier recommandé A. R. du 27 avril 2007 réitéré les propositions de reclassement qui avaient été faites en date du 5 avril 2007 tout en y apportant de légers ajustements. Suite à notre entretien du 11 mai et à votre courrier du 14 mai 2007, aux termes duquel vous refusiez expressément les propositions de reclassement qui vous avaient été soumises, nous nous voyons contraints de partager l'avis du Médecin du Travail et vous confirmons que nous ne pouvons vous offrir un poste de reclassement. C'est pourquoi nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour inaptitude à tous les postes de l'entreprise" (Sic) ; Attendu qu'en l'espèce. Monsieur X... soutient que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse au motif d'une part, que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement en lui proposant des postes non compatibles avec son état de santé et d'autre part, que son inaptitude n'est que la conséquence de l'attitude fautive de son employeur ; Que, sur l'obligation de reclassement, il résulte des pièces produites aux débats que : - le premier avis médical du 26 mars 2007 a déclaré Monsieur X... "inapte au poste responsable technique dans les conditions de travail actuelles, pas de proposition de poste du médecin du travail, serait apte à un poste responsable, mais dans une autre entreprise, à revoir le 16 avril", - par courrier du 5 avril 2007, la SA SALINE d'EINVILLE a proposé à Monsieur X... deux postes de reclassement, un poste de gestionnaire de projets et dossiers et un contrat de prestation de service avec une création d'entreprise par le salarié, - le 12 avril 2007, Monsieur X... a refusé ces postes, estimant que la première proposition correspondait quasiment à son poste actuel et que la seconde supposait la rupture de son contrat de travail, - le second avis médical du 16 avril 2007 a déclaré Monsieur X... "inapte définitif au poste responsable technique et à tous les postes de l'entreprise", - par courrier du 17 avril 2007, la société a demandé au salarié, suite à son refus des postes proposés, de lui indiquer les conditions de travail qui seraient à changer pour parvenir à un reclassement, - le 18 avril 2007, le médecin du travail a indiqué à l'employeur que les propositions de reclassement faites à Monsieur X... étaient incompatibles avec l'avis d'inaptitude du 26 mars 2007 et lui a précisé qu'il venait de déclarer le salarié inapte définitif à tous les postes de l'entreprise, - par courrier du 27 avril 2007, la SA SALINE d'EINVILLE a de nouveau demandé à Monsieur X... de lui indiquer les conditions de travail à changer et réitéré ses propositions formulées le 12 avril 2007 ; Attendu que les propositions de reclassement faites par la SA SALINE d'EINVILLE le 12 avril 2007, soit entre les deux avis médicaux d'inaptitude, ne peuvent constituer une recherche régulière de reclassement puisque la recherche de reclassement doit être effectuée après le second avis médical d'inaptitude ; Qu'en outre, la SA SALINE d'EINVILLE se devait de rechercher de nouvelles possibilités de reclassement après le courrier du médecin du travail en date du 18 avril 2007 estimant les propositions du 12 avril incompatibles avec l'état de santé du salarié et le refus de ce dernier ; que l'employeur devait rechercher par lui-même les postes susceptibles de convenir au salarié compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail sur son aptitude et ne peut reprocher au salarié de ne pas lui avoir indiqué quel poste lui convenait ou quelles modifications il fallait apporter aux conditions de travail ; qu'enfin, en proposant à nouveau à Monsieur X... le 27 avril 2007 les mêmes postes que ceux déjà proposés le 12 avril, malgré l'avis négatif du médecin du travail et le refus du salarié, la SA SALINE d'EINVILLE n'a pas respecté son obligation de reclassement en ne recherchant pas de nouvelles possibilités de reclassement ; que si elle soutient que les profils de poste proposés avaient été modifiés, il apparaît, à la lecture comparée des courriers des 12 et 27 avril 2007, que la description des deux postes est exactement la même et que la seule modification est la rémunération du poste de gestionnaire de projets qui passe de 1 800 € brut pour 104 heures à 2 000 € brut pour la même durée de travail ; que dès lors, la SA SALINE d'EINVILLE ne peut sérieusement soutenir avoir modifié les postes proposés ; qu'il s'ensuit que la SA SALINE d'EINVILLE n'a pas respecté son obligation de reclassement, étant précisé qu'elle ne produit aucune pièce pour caractériser l'impossibilité de reclasser le salarié au sein de l'entreprise et qu'elle ne justifie d'aucune nouvelle recherche de reclassement après le second avis médical ; Qu'au surplus, il est constaté que les propositions de poste faites par l'employeur étaient incompatibles avec le second avis médical du 17 avril 2007 ; qu'en effet, les tâches de la première proposition correspondent en grande partie au poste de responsable technique pour lequel Monsieur X... a été déclaré inapte et la seconde proposition ne constitue pas un reclassement dans l'entreprise, mais une proposition de prestation de service supposant qu'il n'y ait plus de contrat de travail ; Attendu en conséquence qu'il est établi que la SA SALINE d'EINVILLE n'a pas respecté son obligation de reclassement et que le licenciement de Monsieur X... est dénué de cause réelle et sérieuse ; que le préjudice subi par Monsieur X... par suite de son licenciement abusif, compte tenu de son ancienneté, de son âge et du fait qu'il ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieure à son licenciement, sera réparé par l'allocation d'une somme que la Cour est en mesure de fixer à 30 000 € ; Attendu que, les conditions de l'article L 1235-4 du Code du travail étant réunies, il sera ordonné le remboursement par la SA SALINE d'EINVILLE à l'organisme concerné des indemnités de chômage effectivement versées à Monsieur X... par suite de son licenciement et ce, dans la limite de trois mois ; Que le jugement déféré est infirmé» ;
1) ALORS QUE lorsqu'un salarié est déclaré inapte à son poste, l'employeur doit rechercher des possibilités de reclassement, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que tenu à cet égard d'une simple obligation de moyens, l'employeur ne peut se voir reprocher de ne pas avoir recherché d'autres postes que ceux proposés au salarié inapte s'il n'est pas constaté que des possibilités de reclassement auraient été effectivement négligées ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de ne pas avoir recherché d'autres solutions de reclassement que celles identifiées et proposées avant le second avis d'inaptitude et réitérées après ce second avis, sans constater que d'autres possibilités existaient, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-2 du Code du travail ;
2) ALORS QU'en reprochant à l'employeur de ne verser aux débats aucune pièce pour caractériser l'impossibilité, au-delà des postes proposés, de reclasser le salarié au sein de l'entreprise, quand l'employeur versait aux débats le registre du personnel (production d'appel n°44 et 46) établissant l'absence de postes disponibles autres que ceux proposés, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-13403
Date de la décision : 21/09/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 18 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2011, pourvoi n°10-13403


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13403
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