LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte la société Aubin imprimeur du désistement de son pourvoi en tant que dirigé contre la société Axa France IARD ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Bedouk éditions (la société Bedouk), a commandé à la société Aubin imprimeur (la société Aubin) l'impression de 25 000 exemplaires "au mieux du papier", de son guide des lieux de congrès et séminaires 2006, livrables les 6 ou 7 décembre 2005 au plus tard ; que la livraison effectuée entre le 7 décembre 2005 et le 30 janvier 2006 n'a porté que sur 22 783 ouvrages ; que la société Bedouk, après avoir confié à un autre imprimeur l'impression des exemplaires manquants, a assigné la société Aubin en paiement de diverses sommes et indemnités pour exécution incomplète de la commande ;
Attendu que pour condamner la société Aubin à payer à la société Bedouk les sommes de 35 940,17 euros HT et 40 000 euros de dommages-intérêts, la cour d'appel a retenu que seule la confirmation de commande de la société Bedouk engage la société Aubin en l'absence de contestation de sa part à réception de cette dernière, et qu'en conséquence la non exécution de la commande porte sur 2217 exemplaires manquants ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la commande portait sur 25 000 exemplaires "au mieux du papier", ce dont il résultait que le nombre de 25 000 n'était qu'indicatif, la cour d'appel a dénaturé le contrat et violé l'article susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Aubin imprimeur à payer à la société Bedouk éditions la somme de 35 940 euros HT et celle de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 23 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne la société Bedouk aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils pour la société Aubin imprimeur
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Aubin Imprimeur à payer à la société Bedouk Editions les sommes de 35.940,17 € HT et 40.000 € de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement déféré ;
Aux motifs que sur la commande et son exécution, au soutien de son appel, la société Bedouk Editions fait valoir que la commande qu'elle a passée avec la société Aubin Imprimeur porte bien sur 25.000 exemplaires et non sur un nombre aléatoire de plus ou moins 5 % de la commande comme le soutient la société Aubin Imprimeur ; que sur ce point, il convient de retenir que seule la confirmation de la commande de la société Bedouk Editions engage la société Aubin Imprimeur en l'absence de contestation de sa part à réception de cette dernière ; qu'en conséquence il est démontré par les éléments versés aux débats et au demeurant non sérieusement contestés par la société Aubin Imprimeur, que seuls 22.783 exemplaires ont été imprimés et livrés et que, par voie de conséquence, la non-exécution de la commande par Aubin Imprimeur porte bien sur 2.217 exemplaires manquants ; que, sur la qualité du papier, au soutien de son appel, la société Bedouk Editions fait valoir que la preuve n'est pas rapportée d'un papier soit défectueux soit inapproprié à l'usage auquel il est destiné ; qu'il résulte des éléments versés aux débats que le papier utilisé pour l'impression des ouvrages commandés par la société Bedouk Editions a été fourni par cette dernière étant retenu que la société Aubin Imprimeur, en sa qualité de professionnel de l'imprimerie, n'a émis aucune réserve quant au choix et à la qualité du papier qui lui a été fourni ; qu'il en a été de même lorsque la société Aubin Imprimeur a commencé à exécuter la commande et alors qu'au surplus elle a reçu ultérieurement des feuilles de papier émanant du même fournisseur et de la même qualité sans que cela n'appelle de sa part de réserves particulières ; que l'expert mandaté par la société Stora n'a pas relevé d'anomalies particulières concernant les feuilles de papier fournies alors que la société Aubin Imprimeur ne justifie en aucune façon, sur un plan purement matériel et technique, de la défectuosité du papier fourni ; que la société Aubin Imprimeur, qui ne démontre en aucune manière que le lot de papier qui lui a été livré à l'origine de la commande n'était pas conforme, ne peut donc réclamer à la société Bedouk Editions le coût de la livraison supplémentaire de papier que rien ne justifiait ; qu'en conséquence, la société Aubin Imprimeur ne peut être déclarée que seule responsable du défaut de livraison à la date convenue ainsi que de la non impression des 2217 exemplaires manquants du guide ; qu'il convient en conséquence de réformer le jugement déféré ; que, sur la somme due au titre des ouvrages commandés et effectivement livrés, eu égard aux éléments qui précèdent, la société Aubin Imprimeur ne peut réclamer que le coût des ouvrages réellement imprimés et livrés ; qu'à ce titre, elle ne peut donc prétendre qu'à la somme de 96.694,65 euros HT ainsi d'ailleurs que le reconnaît la société Bedouk Editions ; qu'il convient en conséquence de faire droit à concurrence de cette somme à la demande de la société Aubin Imprimeur, le jugement déféré étant sur ce point réformé ; que cette somme portera intérêts au taux contractuel à compter du 11 avril 2006 date de la première mise en demeure ; que, sur le préjudice, tout d'abord, que la responsabilité de la société Aubin Imprimeur ayant été retenue, il y a lieu de la déclarer mal fondée en sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice qu'elle aurait subi, le jugement déféré étant sur ce point réformé ; que, s'agissant du préjudice invoqué par la société Bedouk Editions, il est essentiellement constitué par les conséquences du retard dans la livraison et les tracas que cela a engendré ainsi que par le surcoût des exemplaires manquants lesquels auraient été en toute hypothèse payés si la commande avait été exécutée dans son intégralité en temps et en heure ; que, par ailleurs, le fait que la société Bedouk Editions, en cause d'appel, a modifié les éléments caractérisant son préjudice ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile contrairement à ce que soutient la société Aubin Imprimeur ; qu'eu égard à ces éléments, la société Bedouk Edtions a dû débourser une somme de 45.145,15 euros HT pour les faire imprimer alors que la société Aubin Imprimeur lui aurait facturé la somme de 9.204,98 euros ; qu'il en résulte pour la société Bedouk Editions un surcoût de 35.940,17 euros ; que s'agissant du préjudice lié à la perte de crédibilité, aux divers tracas et temps passés par le personnel de la société Bedouk Editions auprès de la clientèle pour pallier à la carence de la société Aubin Imprimeur, la Cour dispose d'éléments suffisants pour chiffrer l'ensemble de ces postes de préjudice à 40.000 euros ; qu'en conséquence, il y a lieu d'allouer à la société Bedouk Editions la somme globale de 75.940,17 euros laquelle, en raison de son caractère indemnitaire, portera intérêts au taux légal à compter du jugement déféré ;
ALORS, d'une part, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la commande passée par la société Bedouk Editions portait sur 25.000 exemplaires « au mieux du papier » avec une variation de prix « le mille en + » ou « le mille en - », d'où résultait clairement que le nombre d'exemplaires ne constituait qu'un montant indicatif en raison des contraintes normales liées au travail d'impression et non impératif ; d'où il résulte qu'en décidant que la société Aubin Imprimeur avait manqué à son obligation contractuelle en ne livrant pas 25.000 exemplaires exactement pour la condamner à indemniser le coût assumé par la société Bedouk Editions pour faire imprimer par une autre entreprise les 2.217 exemplaires manquants ainsi que les préjudices subis de ce fait, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la convention des parties en violation de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, d'autre part et en toute hypothèse, QUE la société Aubin Imprimerie rappelait, dans ses conclusions d'appel, que la société Bedouk Editions avait accepté l'éventualité que le nombre d'exemplaires à livrer ne soit pas exactement de 25.000 puisque la commande était faite « au mieux du papier» et avait expressément admis le seuil de tolérance de plus ou moins 5,5 % sur la quantité d'exemplaires livrés ainsi qu'il résultait de sa commande et de sa lettre recommandée du 27 février 2006 se référant à la tolérance admise par la fédération FICG ; qu'en se bornant alors à retenir que le nombre d'exemplaires devant être livrés par la société Aubin Imprimeur était de 25.000 et non un nombre variant de plus ou moins 5 %, pour la condamner à indemniser le coût assumé par la société Bedouk Editions pour faire imprimer par une autre entreprise les 2.217 exemplaires manquants ainsi que les préjudices subis du fait de l'insuffisance de la livraison, sans répondre à ces conclusions pourtant pertinentes dès lors qu'elles avaient une incidence sur l'appréciation de la faute commise par la société Aubin Imprimeur, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.