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29/06/2011 | FRANCE | N°10-15082

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 juin 2011, 10-15082


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 décembre 2009), que Mme X... a été engagée par la société Messier Hispano Bugatti aux droits de laquelle se trouve la société Messier Dowty, le 2 juillet 1979 en qualité d'employée administrative ; que, s'estimant victime d'une discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne la progression de sa carrière et son coefficient de classement, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de domma

ges-intérêts et de reclassification ; que l'union locale CGT de Vélizy est...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 décembre 2009), que Mme X... a été engagée par la société Messier Hispano Bugatti aux droits de laquelle se trouve la société Messier Dowty, le 2 juillet 1979 en qualité d'employée administrative ; que, s'estimant victime d'une discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne la progression de sa carrière et son coefficient de classement, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts et de reclassification ; que l'union locale CGT de Vélizy est intervenue à l'instance ; que la cour d'appel a estimé la discrimination constituée et a procédé à une reconstitution de carrière pour la période postérieure au 31 décembre 2004 ;

Attendu que Mme X... et l'Union locale CGT font grief à l'arrêt de n'allouer à la salariée qu'une certaine somme à titre de dommages-intérêts et de rejeter sa demande principale de repositionnement à certains coefficients alors, selon le moyen :

1°/ que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; que la cour d'appel ayant constaté que l'employeur avait violé la classification professionnelle en refusant à Mme X..., en raison de son sexe, l'emploi « d'acheteur » et le coefficient 240 correspondant en 1987, ainsi que l'emploi d' « agent commercial » et le coefficient 270 correspondant en 1990 aurait dû reconstituer sa carrière à partir de ces dates et ordonner les rappels de salaires correspondants ; qu'en n'ordonnant le reclassement de Mme X... au coefficient 285 palier 3 et les rappels de salaires correspondants qu'à partir de juillet 2004 et en se contentant pour les 15 ans qui précèdent d'une réparation des préjudices subis évalués à 8 180,17 euros, la cour d'appel a méconnu le principe de réparation intégrale et violé l'article L. 1132-1 du code du travail, ensemble l'article L. 1142-1 du code du travail ;

2°/ que les juges qui ont constaté que des salariés de l'un des deux sexes étaient mieux rémunérés que des salariés de l'autre sexe doivent accorder à ces derniers la rémunération la plus élevée lorsqu'ils ont relevé que ces salariés exerçaient un travail de valeur égale ; que la cour d'appel ayant, au terme d'un examen approfondi, relevé que Mme X... avait, au plus tard au début 2007, exercé un travail de valeur égale à ceux de MM. Y... et Z..., elle devait accorder à Mme X..., au plus tard à compter de 2007, la rémunération plus élevée que percevaient ces deux salariés masculins ; qu'en jugeant que Mme X... devait être rémunérée au coefficient 305, palier 1 à compter de juillet 2007, alors qu'elle a elle-même relevé que M. Y... était rémunéré au coefficient 305 palier 3 dès le 1er juillet 2001 et au coefficient 335 palier F dès le 1er août 2004 et que M. Z... était rémunéré au coefficient 305 palier 1 dès le 1er avril 1998 et au coefficient 365 palier F, dès le 1er avril 2006, la cour d'appel n'a pas tiré les conclusions qui s'imposaient de ses propres constatations et violé ainsi les articles L. 3121-2 et L. 3221-7 du code du travail ;

3°/ que les juges du fond doivent motiver leur décision et, notamment, préciser en quoi, s'ils la rejettent, la demande formulée par l'une des parties n'est pas fondée ; qu'après avoir constaté que Mme X... avait été victime d'une discrimination en raison de son sexe dans le déroulement de sa carrière, la cour d'appel a jugé que celle-ci était fondée en sa demande de classement professionnel au coefficient 285, palier 3 à compter de juillet 2004 et au palier 4 de ce coefficient à compter de juillet 2006 et au coefficient 305, palier 1 à compter de juillet 2007 et au rappel de salaire correspondant ; que ce faisant, la cour d'appel n'a tenu compte que de la demande subsidiaire qu'avait formulée Mme X... en ignorant sa demande principale visant à faire fixer, au cas où la discrimination serait établie, son niveau au coefficient 335 palier 3 au 1er janvier 2005 avec toutes les augmentations de salaires intervenues depuis et la qualification d'agent commercial ; qu'en s'abstenant ainsi d'expliquer sur quels éléments elle s'est fondée pour écarter la demande principale de la salariée et procéder à une modification du calendrier que celle-ci lui avait soumis, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu en premier lieu qu'il résulte des conclusions de Mme X... devant la cour d'appel ainsi que des énonciations de l'arrêt que, pour la période antérieure au 31 décembre 2004, celle-ci n'avait pas demandé à la cour d'appel de procéder à sa reclassification à un certain coefficient mais seulement des dommages-intérêts ;

Attendu en second lieu, qu'ayant retenu que ce n'est qu'à compter de l'année 2007 que la salariée établissait faire des propositions commerciales, comme ses collègues masculins, la cour d'appel a pu en déduire, compte tenu de l'expérience moindre en la matière de la salariée par rapport à ses deux collègues, qu'elle devait être classée à un coefficient inférieur ;

Attendu, enfin, qu'ayant accueilli, pour la période postérieure à juillet 2004, la demande subsidiaire de la salariée de reclassification à certains coefficients, la cour d'appel a nécessairement motivé sa décision de rejeter la demande principale de la salariée de reclassification à des coefficients supérieurs ;

D'où il suit qu'irrecevable en sa première branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... et le syndicat Union locale CGT de Vélizy aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X... et le syndicat Union locale CGT de Vélizy.

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de n'avoir, tout en reconnaissant l'existence de la discrimination alléguée, alloué à Madame X... que 8 180,17 euros et aux syndicats CGT 800 euros chacun à titre de dommages et intérêts, et d'avoir débouté Madame X... de sa demande principale de repositionnement aux coefficients auxquels elle aurait dû être classée selon son calendrier si elle n'avait pas été victime d'une telle discrimination et des rappels de salaires et des dommages et intérêts correspondants,

AUX MOTIFS QUE Mme X... fonde sa demande sur une inégalité de traitement pour un même travail entre les hommes et les femmes et une discrimination à raison de son sexe. La loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, invoquée par l'employeur, qui a créé l'article L.l134-5 du Code du travail prévoyant que l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination, n'est pas rétroactive. La demande de Mme X... en réparation jusqu'au 3l décembre 2004 de ses préjudices résultant d'une discrimination se prescrit par 30 ans. Selon l'article L.3221-2 du Code du travail, l'employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité des rémunérations entre les hommes et les femmes. Aux termes de l'article L.3221-4, sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. Aux termes de l'article L.3221-5, les disparités de rémunération entre les établissements d'une même entreprise ne peuvent pas, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale être fondées sur l'appartenance des salariés de ces établissements à l'un ou l'autre sexe. Il résulte des dispositions combinées des articles L 1132-1 et L 1134-1 du code du travail, que le salarié qui se prétend victime d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Aux termes de la convention collective, les administratifs et techniciens sont classés en cinq niveaux dont chacun comporte 3 échelons affectés d'un coefficient. Dans la grille de salaire de la société MESSIER DOWTY, chaque coefficient est assorti de cinq paliers allant de 0 à 4, le passage d'un palier au palier supérieur s'effectuant par l'effet d'une augmentation individuelle portant la rémunération du salarié au niveau de celle du palier supérieur, les conditions d'octroi de cette augmentation n'étant pas précisées et ne ressortant pas des pièces du dossier. Mme X... soutient que l'existence d'une discrimination sexuelle à son égard résulte - d'une inégalité de traitement entre les hommes et les femmes, générale, dans l'entreprise, - d'une inégalité de traitement à son égard au vu du panel de comparaison adéquat, - d'une inégalité de traitement entre elle et ses collègues de travail ayant des fonctions comparables ou de valeur égale, - d'une absence de valorisation de ses fonctions au cours de l'exécution de son contrat de travail. Les rapports Egalité Professionnelle montrent, notamment, par catégorie (employés, techniciens, cadres) que les femmes ont toujours un salaire inférieur aux hommes, et au moins jusqu'en 2004, aucun élément n'étant à cet égard produit pour la période postérieure, qu'un nombre infime de femmes dépassait le coefficient 285. Il ne peut être tiré aucun enseignement du panel de 14 personnes, lui-même tiré d'un panel plus important produit par l'employeur, qui, sans indication des noms des personnes concernées ni de leurs fonctions à l'embauche et entre leur embauche et 2006, n'est en fait qu'une énumération de dates d'embauchés entre le 12 janvier 1976 et le 1er avril 1981 avec en regard la mention du sexe (F ou M), la catégorie à l'embauche (employé, ouvrier, technicien) et en 2006 (employé ou technicien) et les salaires à l'embauche et en 2006. Mme X... compare sa situation avec celle de M Y..., M. Z... et M. A... et soutient que l'inégalité de traitement dont elle a été victime a été notamment créée par une absence de valorisation de ses fonctions au cours de l'exécution de son contrat de travail, contrairement à MM. Y... et B... : qu'à deux reprises, à l'occasion d'une mutation acceptée, en janvier 1987 au service achats et en 1990 au service commercial, elle s'est vue refuser le niveau de classification, la qualification (acheteur puis agent commercial), le coefficient et la rémunération correspondant à ses fonctions. Mme X... et M. Y... sont nés en 1958 et M. Z... est né en 1959. Mme X... est titulaire d'un CAP dessinateur en construction mécanique. Elle a été embauchée le 2 juillet 1979 au niveau 2, échelon 1, coefficient 170 palier 0. M. Y... n'a aucun diplôme. 11 a été embauché, par la société ERAM, en septembre 1979 en qualité d'employé ordonnancement niveau II, échelon 3, coefficient 190. M. Z... est titulaire d'un CAP dessin en bâtiment. Il a été engagé par la société ERAM le 1er avril 1981 en qualité d'employé méthodes niveau II échelon 1 coefficient 170. Les contrats de travail de MM. Y... et Z... ont été repris par la société MESSIERDOWTY à compter du 1er janvier 1994, avec l'ancienneté acquise antérieurement. La situation de MM. Y... et Z... ne peut être prise en considération pour la période antérieure au 1er janvier 1994 que pour apprécier l'évolution de carrière de Mme X..., la convention collective qui leur était applicable étant la même, dès lors que la société ERAM était une société juridiquement distincte de la société MESSIER HISPANO BUGATI puis de la société MESSIER DOWTY jusqu'à ce que cette dernière reprenne son activité. Mme X... assure la gestion et l'administration des commandes Airbus GB. L'emploi mentionné sur ses bulletins de paie et plans de développement personnel (entretien d'évaluation) est « employée service administratif». Au 1er janvier 1994, Mme X... était depuis le 1er décembre 1991 au niveau 3, échelon 3, coefficient 240, palier 1 (atteignant le 1er juillet 1994 le palier 2, le 1er juillet 1997 le palier 3, le 1er juillet 1998 le palier 4) ; elle a été promue le 1er juillet 2000 au niveau 4, échelon I, coefficient 255, palier 3 (atteignant le 1er juillet 2001 le palier 4), le 1er janvier 2002 au niveau 4, échelon 2, coefficient 270, palier 3 (atteignant le 1er janvier 2003 le palier 4, le 1er juillet 2004 un palier D) et le 1er juillet 2007 au niveau 4, échelon 3, coefficient 285 palier D. Ayant occupé antérieurement les emplois, au sein de la société ERAM, d'employé ordonnancement, d'agent de lancement, d'agent de gestion de production et en dernier lieu d'agent technico commercial niveau IV, échelon 2, coefficient 270, M. Y... a été repris, par la société MESSIER DOWTY, avec ce classement professionnel positionné au palier 3, en qualité de technicien. Il a atteint le palier 4 du coefficient 270 le 1er janvier 1995 et été classé le 1er mai 1997 au niveau 4, échelon 3, coefficient 285, palier 2, (atteignant le 1er juillet 1998 le palier 3, le 1er janvier 1999 le palier 4, le 1er juillet 2000 un palier D), le 1er juillet 2001 au niveau 5 échelon 1 coefficient 305, palier 3 (atteignant le 1er juillet 2003 le palier 4) et le 1er août 2004 niveau 5 échelon 2 coefficient 335 palier F. Ayant occupé antérieurement les emplois, au sein de la société ERAM, d'employé méthodes, d'agent de lancement et d'agent de gestion de production et en dernier lieu d'agent technico commercial niveau IV, échelon 2, coefficient 270, M. Z... a été repris, par la société MESSIER DOWTY, niveau 4, échelon 3, coefficient 285 palier 1, en qualité de technicien. Après avoir atteint le 1er avril 1996 le palier 2 et le 1er mars 1997 palier 3.. il a été classé le 1er avril 1998 niveau 5 échelon 1 coefficient 305 palier 1, le 1er juillet 1999 palier 3, le 1er juillet 2000 palier 4, puis, le 1er juillet 2001 niveau 5 échelon 2 coefficient 335 palier F et le 1er avril 2005 niveau 5 échelon 3 coefficient 365 palier F. M. A... est né le 3 août 1979 et est titulaire d'un BTS techniques commerciales. Il a été embauché par la société MESSIER DOWTY le 1er janvier 2005, en qualité d'employé service administratif, niveau 4 échelon 3 coefficient 285 palier 3 ; ayant atteint le 1er août 2005 le palier 4 de ce coefficient, il a été classé le 1er janvier 2006 au niveau 5 échelon 1 coefficient 305 palier 2. M. Z... a pour mission, selon la société MESSIER DOWTY, le suivi et la relation directe avec deux principaux clients, Dassault et Doraier, de la « Business Unit Commuters (avions régionaux de moins de 100 places) ». Aux termes du plan de développement personnel, produit par l'employeur, du 30 mars 2004, M. Z... est affecté au département commercial ayant pour responsable Thomas P.L, sa fonction est « agent commercial » et le responsable « matriciel » est M. C.... Les responsabilités clés de M. Z... sont : - assurer et manager la gestion des commandes clients, - assurer la satisfaction des demandes clients, - émettre et élaborer les propositions commerciales, - être l'interface au sein de M-D sous couvert de la fonction programme,- supporter le programme manager au cours du développement et durant la vie d'un programme. L'employeur soutient que compte tenu de ses compétences techniques, M. Z... se déplace, et ses compétences techniques et budgétaires, acquises au sein de la société ERAM, lui permettent d'avoir une fonction de « support programme (être l'interface avec le bureau d'études, l'usine de production, pour veiller au respect des normes qualité exigées par le client, participer aux réunions avions service) ». Il résulte du plan de développement personnel, produit par l'employeur, du 24 février 2005 de M. Y..., que ce dernier est affecté au département ADV-BU militaire, sa fonction est « administration des ventes » et ses responsabilités clés sont : - convertir les exigences client OE en besoin usine (commandes, modifications, facturations etc) - gestion administrative avions militaires et hélicoptères, - élaboration et suivi de CIEEMG et AEMG (autorisations d'exportation de matériel de guerre) pour tous les programmes militaires, - élaboration des instructions d'expédition et suivi chez le transporteur pour l'exportation, - suivi des imputations douanières pour renouvellement des AEMG. Les postes d'employé méthodes, d'agent de lancement, d'agent de gestion de production et d'agent technico commercial ne permettent pas de déduire, contrairement à ce que prétend l'employeur, l'acquisition par M. Z... de compétences techniques, lesquelles ne sont pas autrement établies, pas plus qu'il n'est démontré que de telles connaissances sont utiles à l'exercice de ses fonctions. M. C... atteste seulement que M. Z... a une bonne connaissance des processus de fabrication et des contraintes industrielles, par exemple des délais, et une connaissance des matériels (conception et processus de qualification), ces qualités lui étant indispensables pour expliquer et justifier des retards éventuels de livraison à ses clients. Or, l'explication et la justification des raisons des retards de livraison auprès des clients, qui entrent dans la mission « gérer et administrer les commandes » de l'activité « administration des ventes », qui est celle de Mme X..., contrairement à l'affirmation de M. C..., nécessitent seulement de s'informer auprès des services, production ou livraison, au niveau desquels ils se produisent. La tâche consistant à « supporter le programme manager » trouve sa traduction dans la fiche de compétences dans la mission « gérer et administrer les commandes » de l'activité « administration des ventes » dans la responsabilité « supporter le directeur de programme », en d'autres termes, assister le directeur de programme. N'étant pas démontrée une acquisition par M. Z... d'une compétence technique supérieure à celle qu'a pu acquérir Mme X... dans l'exercice de ses fonctions, les plans de développements professionnels de cette dernière montrent que l'exigence de la satisfaction du client est équivalente et que la salariée n'hésite pas à entrer en relation avec les autres services, y compris le bureau d'études. L'attestation de M. D..., responsable des programmes militaires et hélicoptères, atteste que M. Y..., rejoignant son équipe en 1997 a assuré la gestion commerciale des programmes Dassault (série et rechange) et notamment faisait des propositions commerciales pour des équipements en réparation, et confirme le changement d'activités en 2003 de M. Y..., auquel il a été confié les activités d'administration des ventes pour les programmes militaires, en janvier 2004, en plus, l'administration des ventes du programme Coréen T50 et en août 2004 la gestion des autorisations d'exportation de matériel de guerre. L'employeur soutient que l'établissement et le suivi des autorisations préalables de négociation et d'exportation en matière de matériels de guerre est une mission considérée à valeur ajoutée confiée à M. Y... en raison de ses connaissances techniques de ces matériels ainsi que de ses qualités relationnelles avec les interlocuteurs tels que la direction des douanes, de l'aviation, des armées, des affaires stratégiques, les ambassades. Les connaissances techniques de M. Y... ne sont pas non plus démontrées, ne peuvent se déduire des postes occupés au sein de la société ERAM. Il n'est pas non plus démontré que les tâches de M. Y... concernant les autorisations d'exportation, qui nécessairement ne peuvent concerner que les matériels militaires, consistent en des formalités autres que la transmission de documents aux autorités administratives compétentes, dont la décision n'est pas sujette à négociation. Enfin, il n'apparaît pas que le prétendu double rattachement, hiérarchique et matriciel, dans un même département, confère au travail de M. Z... et de M. Y... une valeur supplémentaire. Le plan de développement du 24 février 2004 de Mme X... indique qu'elle remplace M. Y... pendant ses absences sur le programme militaire, qu'en l'absence de Mme E..., responsable du département commerce, elle prend en charge la réunion du PIC et du compte rendu, qu'elle a, comme M. Y..., pour responsabilité de convertir les exigences client OE en besoin usine, qu'elle gère des urgences en chaîne et est l'interface avec les metteurs au point, l'usine et le client. Le plan de développement du 2l février 2005 mentionne que Mme X... a formé M. A... sur A320 pour assurer les absences et qu'elle a pour objectif de le former pour une reprise des programmes A380 et A340 pour une autonomie mi-2005. La hiérarchie de Mme X... ayant proposé en février 2004 son passage au coefficient 285, palier 3, sans être entendue puisqu'il n'a été accordé à la salariée qu'une augmentation individuelle entraînant un « déplafonnement » au palier D du coefficient 270, a encore, en vain, proposé en févier 2005 son passage au coefficient 285, palier 4, tandis que M. A... était affecté à l'équipe ADV Airbus en renfort pour permettre une meilleure répartition de la charge de travail, laquelle constituait un frein à l'attribution à la salariée de plus de programme et moins d'ADV. Il convient encore de relever que Mme X... utilise la langue anglaise dans ses relations avec la Grande Bretagne et qu'elle n'est pas contredite sur l'ignorance de cette langue par M. Y.... Toutefois, Mme X..., qui contestant les dires de l'employeur, soutient que comme ses collègues, elle fait des propositions commerciales, n'en apporte pas la preuve avant 2007, les pièces auxquelles elie fait référence étant le document d'évaluation de son activité de 2007 mentionnant parmi ses responsabilités clés l'émission des propositions de commerciales pour les réparations et le document lui fixant ses objectifs pour 2008, dont l'élaboration et l'émission des propositions de commandes directement au client. Au surplus, d'une part, Mme X... ayant été mutée en janvier 1987 au service achats où sa fonction était dans la classification des emplois « acheteur », en refusant à la salariée, par lettre du 6 juin 1989, une revalorisation de son coefficient 215 à hauteur du coefficient 240, correspondant à l'emploi d'acheteur de la filière achats sous une nouvelle appellation « administratif niveau III échelon 3 » dans la filière administratifs, au seul motif que le réajustement dont elle avait fait l'objet l'année précédente ne saurait en aucun cas se reproduire régulièrement, qu'il n'accepte pas de considérer que les postes doivent être globalement revalorisés à hauteur du coefficient 240 et que son évolution de carrière sera réalisée dans le cadre des budgets, l'employeur n'a pas respecté la classification des emplois. D'autre part, de la même manière, une nouvelle demande de Mme X... de mutation au service commercial ayant été acceptée et l'avis de modification de sa situation mentionnant son ancienne situation « acheteur » et sa nouvelle situation « agent commercial » au 1er octobre 1990, et la classification des emplois, qui manifestement, vu la photocopie produite, était au verso de cet avis, mentionnant l'emploi de commercial au coefficient 270 de la convention collective, l'employeur, qui n'a pas, alors, attribué à la salariée ce coefficient, a méconnu la classification des emplois. En conséquence, et étant observé qu'elle a toujours fait l'objet d'appréciation satisfaisante, il est établi que Mme X... a été victime d'une discrimination indirecte. Eu égard à l'évolution de sa carrière et du contenu de ses fonctions, elle est fondée en sa demande de classement professionnel au coefficient 285, palier 3 à compter de juillet 2004 et au palier 4 de ce coefficient à compter de juillet 2006 et au coefficient 305, palier 1 à compter de juillet 2007 et au rappel de salaire correspondant et à la réparation du préjudice subi jusqu'au 31 décembre 2004, financier, calculé sur 15 ans et sur la base de la différence des coefficients et compte tenu de l'ancienneté de la salariée qui s'établit à la somme de 7.180,17 €, et moral évalué à la somme de 1.000€, soit un montant total de 8.180,17 €. Sur la demande de l'Union locale CGT de Vélizy et le syndicat CGT MESSIER Vélizy : L'action des organisations syndicales étant recevable et leur demande, vu ce qui précède justifiée, l'employeur devra leur verser à chacune 800 € à titre de dommages-intérêts. Sur les demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile : L'employeur succombant supportera les dépens. L'équité commande d'accueillir à hauteur de 1.200 € la demande de Mme X... fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile et à hauteur de 300 € la demande des organisations syndicales.

ALORS, D'UNE PART, QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; que la Cour d'appel ayant constaté que l'employeur avait violé la classification professionnelle en refusant à Madame X..., en raison de son sexe, l'emploi « d'acheteur » et le coefficient 240 correspondant en 1987, ainsi que l'emploi d' « agent commercial » et le coefficient 270 correspondant en 1990 aurait dû reconstituer sa carrière à partir de ces dates et ordonner les rappels de salaires correspondants; qu'en n'ordonnant le reclassement de Madame X... -au coefficient 285 palier 3- et les rappels de salaires correspondants qu'à partir de juillet 2004 et en se contentant pour les 15 ans qui précèdent d'une réparation des préjudices subis -évalués à 8.180,17 Euros-, la Cour d'appel a méconnu le principe de réparation intégrale et violé l'article 1132-1 du Code du travail, ensemble l'article L.1142-1 du Code du travail.

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges qui ont constaté que des salariés de l'un des deux sexes étaient mieux rémunérés que des salariés de l'autre sexe doivent accorder à ces derniers la rémunération la plus élevée lorsqu'ils ont relevé que ces salariés exerçaient un travail de valeur égale ; que la Cour d'appel ayant, au terme d'un examen approfondi, relevé que Madame X... avait, au plus tard au début 2007, exercé un travail de valeur égale à ceux de Messieurs Y... et Z..., elle devait accorder à Madame X... , au plus tard à compter de 2007, la rémunération plus élevée que percevaient ces deux salariés masculins ; qu'en jugeant que Madame X... devait être rémunérée au coefficient 305, palier 1 à compter de juillet 2007, alors qu'elle a elle-même relevé que Monsieur Y... était rémunéré au coefficient 305 palier 3 dès le 1er juillet 2001 et au coefficient 335 palier F dès le 1er août 2004 et que Monsieur Z... était rémunéré au coefficient 305 palier 1 dès le 1er avril 1998 et au coefficient 365 palier F, dès le 1er avril 2006, la Cour d'appel n'a pas tiré les conclusions qui s'imposaient de ses propres constatations et violé ainsi les articles L.3121-2 et L.3221-7 du Code du travail.

ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE les juges du fond doivent motiver leur décision et, notamment, préciser en quoi, s'ils la rejettent, la demande formulée par l'une des parties n'est pas fondée ; qu'après avoir constaté que Madame X... avait été victime d'une discrimination en raison de son sexe dans le déroulement de sa carrière, la Cour d'appel a jugé que celle-ci était fondée en sa demande de classement professionnel au coefficient 285, palier 3 à compter de juillet 2004 et au palier 4 de ce coefficient à compter de juillet 2006 et au coefficient 305, palier 1 à compter de juillet 2007 et au rappel de salaire correspondant ; que ce faisant, la Cour d'appel n'a tenu compte que de la demande subsidiaire qu'avait formulée Madame X... en ignorant sa demande principale visant à faire fixer, au cas où la discrimination serait établie, son niveau au coefficient 335 palier 3 au 1er janvier 2005 avec toutes les augmentations de salaires intervenues depuis et la qualification d'agent commercial ; Qu'en s'abstenant ainsi d'expliquer sur quels éléments elle s'est fondée pour écarter la demande principale de la salariée et procéder à une modification du calendrier que celle-ci lui avait soumis, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-15082
Date de la décision : 29/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 04 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jui. 2011, pourvoi n°10-15082


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15082
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