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28/04/2011 | FRANCE | N°10-30251

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 avril 2011, 10-30251


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom 1er décembre 2009), que la société Vita Médical Ltd, devenue Cyclopharm Ltd, a conclu en 2000 un accord de distribution exclusive d'un produit pour l'ensemble de l'Europe avec la société Laboratoires Cyclopharma ; qu'une société commune, Cyclomédica Europe, a été constituée en 2002 par la société Laboratoires Cyclopharma et la société Vita Médical, pour la distribution du produit ; qu'en 2007, la société Cyclomédica Europe est devenue fil

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom 1er décembre 2009), que la société Vita Médical Ltd, devenue Cyclopharm Ltd, a conclu en 2000 un accord de distribution exclusive d'un produit pour l'ensemble de l'Europe avec la société Laboratoires Cyclopharma ; qu'une société commune, Cyclomédica Europe, a été constituée en 2002 par la société Laboratoires Cyclopharma et la société Vita Médical, pour la distribution du produit ; qu'en 2007, la société Cyclomédica Europe est devenue filiale à 100 % de la société Cyclopharm Ltd et s'est vu confier la distribution exclusive du produit en Europe à l'exception de la France, conservée par la société Laboratoires Cyclopharma ; que M. Y... a été engagé par la société Laboratoires Cyclopharma le 5 septembre 2004 en qualité de directeur commercial international, ses frais et son salaire, à concurrence de 90 %, étant payés par la société Cyclomédica Europe ; qu'il a été licencié pour faute lourde le 6 juillet 2007, son employeur lui reprochant d'avoir l'intention, en collaboration avec la société Cyclopharm Ltd, de créer une société dénommée Cyclomédica France, filiale de cette dernière, pour distribuer le produit en France ainsi que de débaucher certains salariés de la société Laboratoires Cyclopharma ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de M. Y... sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer des dommages-intérêts et diverses indemnités, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une société n'appartient à un groupe que si elle dépend d'une société dominante qui, soit possède directement ou indirectement plus de la moitié de son capital social, soit la contrôle effectivement et forme avec elle un même ensemble économique ; qu'en se bornant à relever, pour retenir que la sociéé Laboratoires Cyclopharma faisait partie du groupe Cyclopharm et déduire que les agissements du salarié ne justifiaient pas son licenciement, que ces deux sociétés avaient des dirigeants communs, que le site internet du groupe mentionnait «l'adresse courriel Cyclopharma» du salarié et que ce dernier était payé en partie par Cyclopharm Ltd, sans constater, soit que la société Cyclopharm Ltd possédait directement ou indirectement plus de la moitié du capital social de la société Laboratoires Cyclopharma, soit qu'elle la contrôlait effectivement et formait avec elle un même ensemble économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-1 du code du travail et des articles L. 233-1, L. 233-3 et L. 233-16 du code de commerce ;
2°/ qu'à titre subsidiaire, la société intégrée à un groupe conserve sa personnalité juridique et le lien de subordination existant avec ses salariés ; qu'à l'inverse, dépourvu de personnalité morale, le groupe n'a pas de pouvoir de subordination sur les salariés ; que ces derniers ne peuvent par conséquent, sans commettre de faute, privilégier les intérêts du groupe aux dépens de ceux de l'employeur ; qu'ainsi, en décidant que le détournement d'activité du salarié n'était pas fautif dés lors qu'il n'avait fait en cela que «se soumett re légitimement aux ordres» des dirigeants du groupe Cyclopharm auquel appartenait la société Laboratoires Cyclopharma, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134, alinéa 1, du code civil ;
3°/ qu'à titre plus subsidiaire, le fait que le salarié travaille et soit intégré dans le groupe ne l'exonère pas de son obligation de loyauté à l'égard de son employeur ; que la cour d'appel a relevé la qualité d'employeur de la société Laboratoires Cyclopharma (p. 8 § 1) ; que dès lors, en décidant que la circonstance que M. Y... soit intervenu «comme salarié du groupe Cyclopharm » et qu'il ait agi à la demande de ses dirigeants l'exonérait de son obligation de loyauté à l'égard de la société Laboratoires Cyclopharma, la cour de Riom a violé les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail et 1134, alinéa 3, du code civil ;
4°/ qu'à titre subsidiaire, le licenciement disciplinaire pour cause réelle et sérieuse n'implique pas que le salarié ait conscience de son comportement fautif ; qu'en déduisant que le licenciement de M. Y... n'avait pas de cause réelle et sérieuse de ce qu'il «ne pouvait avoir conscience d'être déloyal envers son employeur» (arrêt p. 8 § 1), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'ayant relevé qu'il existait des liens étroits entre les sociétés du groupe Cyclopharm Ltd mais également entre les sociétés Laboratoires Cyclopharma, Cyclopharm Ltd et Cyclomédica Europe, que la société Laboratoires Cyclopharma était le distributeur exclusif en France d'un produit dont la société Cyclopharm Ltd était le fournisseur, que le directeur général de la société Laboratoires Cyclopharma faisait partie de l'équipe directoriale de la société Cyclopharm Ltd, que M. Y..., quoique directeur commercial international de la société Laboratoires Cyclopharma recevait la quasi totalité de sa rémunération de la société Cyclomédica Europe et était placé dans les organigrammes sous le contrôle du directeur exécutif de la société Cyclomédica Europe, lequel était également directeur général de la société Cyclopharm Ltd, la cour d'appel a pu en déduire que ces trois sociétés appartenaient à un même ensemble économique ;
Attendu, ensuite, qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a constaté que le projet reproché au salarié avait été conduit par celui-ci à la demande du directeur général de la société Cyclopharm Ltd et directeur exécutif de la société Cyclomédica Europe sous l'autorité duquel il était placé et sans aucune dissimulation à son employeur direct, a pu décider qu'aucune faute ne pouvait être reprochée au salarié ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Laboratoires Cyclopharma aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Laboratoires Cyclopharma à payer à M. Y... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Laboratoires Cyclopharma
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR décidé que le licenciement de Monsieur Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la Société LABORATOIRES CYCLOPHARMA à payer au salarié les sommes de 90.000,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 15.159,62 € à titre d'indemnité de licenciement et de 23.761,50 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre diverses sommes à titre de congés payés y afférents et de complément sur l'indemnité compensatrice de congés payés, d'AVOIR ordonné le remboursement des indemnités de chômage payées au salarié dans la limite de six mois et d'AVOIR condamné l'exposante à payer la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « pour justifier des griefs énoncés dans la lettre de licenciement, la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA produit aux débats : - le procès verbal de constat d'huissier dressé contradictoirement le 06 juillet 2007 et relatant le processus de la copie du disque dur de l'ordinateur portable professionnel de l'intéressé et de sa messagerie ; - différents courriels alors trouvés, émis ou reçus par Monsieur Jean-Louis Y... tous en langue anglaise et donc non exploitables ; - des courriels échangés du 21 juin au 03 juillet 2007, entre le même et Messieurs Z..., A..., traduits en langue française ; qu'il ressort de ces éléments que des négociations étaient effectivement menées entre le salarié, le Directeur Général et le Secrétaire de la société Cyclopharm Limited pour mettre en place une structure Cyclomédica France dans laquelle Monsieur Jean-Louis Y... serait impliqué et était chargé de s'entourer de personnes nécessaires à cette organisation ; que cet état de fait n'est d'ailleurs pas contesté par le salarié tout comme il ne dément pas que cette entité devait avoir pour but de diffuser le produit Technegas en France ; que Monsieur Jean-Louis Y... verse à son dossier diverses plaquettes concernant CYCLOPHARM desquelles il résulte que : - en 2006, Monsieur B... faisait bien partie des "Directors" du groupe et Monsieur Y... de l'équipe de management de celui-ci, étant indiqué qu'il a rejoint en 2004 CYCLOMEDICA EUROPE ; - à même date, apparaissent les rémunérations qui leur sont servies ; - en 2007, la candidature de Monsieur B... en qualité de "Director" était soumise aux votes au sein de CYCLOPHARM ; - en juillet 2007, la cessation de l'emploi de Monsieur Y... ; - en janvier 2008, le départ du Bureau de Monsieur B..., Directeur non exécutif ; qu'il produit également un relevé du site internet de CYCLOMEDICA sur lequel est référencé comme contact Monsieur Y... pour CYCLOMEDICA France mais avec l'adresse courriel de CYCLOPHARMA ; que de ces divers éléments se déduit une imbrication entre les différentes sociétés du groupe CYCLOPHARM mais également entre les attributions, notamment de Monsieur B... qui dirige la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA, et de Monsieur Jean-Louis Y... qui apparaît directement comme salarié du groupe ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA que ce dernier était rémunéré en presque totalité par CYCLOMEDICA EUROPE qui prenait en charge 90 % de son salaire mais également ses frais ; qu'or, les auteurs des courriels échangés avec l'intéressé à propos du projet de création de CYCLOMEDICA France étaient, à l'époque, pour Monsieur Z..., Directeur exécutif de CYCLOMEDICA Australie et Directeur Général de CYCLOPHARM LTD et pour Monsieur A..., Secrétaire Général de cette dernière société ; que dans les organigrammes du groupe, Monsieur Jean-Louis Y... était donc placé sous la hiérarchie de Monsieur Z..., lequel, par l'intermédiaire de CYCLOMEDICA EUROPE lui versait sa rémunération ; que la lecture des courriels traduits démontre bien que le salarié n'a fait que répondre principalement aux demandes de Monsieur Z... qui désirait connaître les possibilités de création d'une société en FRANCE pour la distribution du Technegas ; qu'il convient de rappeler que le groupe CYCLOPHARM est le fournisseur de ce produit, la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA en étant le distributeur exclusif en France en vertu d'un contrat signé entre ces deux entités ; que dans ce contexte, Monsieur Jean-Louis Y... qui se soumettait légitimement aux ordres de Monsieur Z..., ne pouvait avoir conscience d'être déloyal envers son employeur, la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA, qui ne lui versait pratiquement que 10 % de son seul salaire et dont le dirigeant occupait lui-même une place au bureau directorial du groupe ; que d'ailleurs, force est de constater que l'intéressé n'a pas cherché à cacher l'étude du projet pour laquelle il était sollicité puisque tous les courriels ont été émis ou reçus sur l'ordinateur professionnel situé dans son bureau, au sein de la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA ; qu'il sera ajouté que Monsieur Jean-Louis Y... précise, sans être formellement démenti, que le projet avait pour but, en présence de relations tendues, de pallier un éventuel refus de renouvellement du contrat de distribution du Technegas par la S.A. LABORATOIRES CYCLOPHARMA ; qu'il sera aussi constaté que ce projet n'a pas abouti et que la société est bien demeurée le distributeur exclusif qu'elle était avant le licenciement, ainsi qu'il résulte des débats ; que dès lors, aucune faute et encore moins une intention de nuire ne peuvent être retenues, dans ces circonstances, à l'encontre de Monsieur Jean-Louis Y... et il s'ensuit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement qui a décidé du contraire étant infirmé sur ce point ; que compte tenu des circonstances de la cause, notamment la durée de la présence du salarié au sein de l'entreprise, sa rémunération mensuelle brute, le caractère brutal et vexatoire de la mesure, le préjudice résultant pour lui de son licenciement sera réparé par le versement de la somme de 90.000,00 € » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'une société n'appartient à un groupe que si elle dépend d'une société dominante qui, soit possède directement ou indirectement plus de la moitié de son capital social, soit la contrôle effectivement et forme avec elle un même ensemble économique ; qu'en se bornant à relever, pour retenir que la société LABORATOIRES CYCLOPHARMA faisait partie du groupe CYCLOPHARM et déduire que les agissements du salarié ne justifiaient pas son licenciement, que ces deux sociétés avaient des dirigeants communs, que le site internet du groupe mentionnait « l'adresse courriel CYCLOPHARMA » du salarié et que ce dernier était payé en partie par CYCLOPHARM LDT, sans constater, soit que la société CYCLOPHARM LDT possédait directement ou indirectement plus de la moitié du capital social de la société LABORATOIRES CYCLOPHARMA, soit qu'elle la contrôlait effectivement et formait avec elle un même ensemble économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-1 du code du travail et des articles L.233-1, L. 233-3 et L 233-16 du code de commerce ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE (à titre subsidiaire) la société intégrée à un groupe conserve sa personnalité juridique et le lien de subordination existant avec ses salariés ; qu'à l'inverse dépourvu de personnalité morale, le groupe n'a pas de pouvoir de subordination sur les salariés ; que ces derniers ne peuvent par conséquent, sans commettre de faute, privilégier les intérêts du groupe aux dépens de ceux de l'employeur ; qu'ainsi en décidant que le détournement d'activité du salarié n'était pas fautif dés lors qu'il n'avait fait en cela que « se soumett re légitimement aux ordres » des dirigeants du groupe CYCLOPHARM auquel appartenait la société LABORATOIRES CYCLOPHARMA (p. 7 § 6 à 9), la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 alinéa 1 du code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE (à titre plus subsidiaire) le fait que le salarié travaille et soit intégré dans le groupe ne l'exonère pas de son obligation de loyauté à l'égard de son employeur ; que la cour d'appel a relevé la qualité d'employeur de la société LABORATOIRES CYCLOPHARMA (p. 8 § 1) ; que dés lors en décidant que la circonstance que Monsieur Y... soit intervenu « comme salarié du groupe CYCLOPHARM » et qu'il ait agi à la demande de ses dirigeants l'exonérait de son obligation de loyauté à l'égard de la société LABORATOIRES CYCLOPHARMA, la cour de RIOM a violé les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail et 1134 alinéa 3 du code civil ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE (à titre subsidiaire) le licenciement disciplinaire pour cause réelle et sérieuse n'implique pas que le salarié ait conscience de son comportement fautif ; qu'en déduisant que le licenciement de Monsieur Y... n'avait pas de cause réelle et sérieuse de ce qu'il « ne pouvait avoir conscience d'être déloyal envers son employeur » (arrêt p. 8 § 1), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-30251
Date de la décision : 28/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 01 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 avr. 2011, pourvoi n°10-30251


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.30251
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