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29/03/2011 | FRANCE | N°10-19740

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 mars 2011, 10-19740


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 octobre 2009), que la société Parc d'activités de Blotzheim (la société), marchand de biens, a acquis, entre le 30 juin 1989 et le 20 novembre 1992, des terrains et a bénéficié du régime de faveur en matière de droits d'enregistrements prévu par l'article 1115 du code général des impôts en s'engageant à les revendre dans le délai prévu par ce texte, qui expirait le 31 décembre 1998 en vertu d'une prorogation légale ; que, le 5 mars 2002, l'administration

fiscale lui a notifié un redressement qui a été ramené à 419 078 euros ; qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 octobre 2009), que la société Parc d'activités de Blotzheim (la société), marchand de biens, a acquis, entre le 30 juin 1989 et le 20 novembre 1992, des terrains et a bénéficié du régime de faveur en matière de droits d'enregistrements prévu par l'article 1115 du code général des impôts en s'engageant à les revendre dans le délai prévu par ce texte, qui expirait le 31 décembre 1998 en vertu d'une prorogation légale ; que, le 5 mars 2002, l'administration fiscale lui a notifié un redressement qui a été ramené à 419 078 euros ; qu'après mise en recouvrement et paiement, la société a formé une réclamation contentieuse, qui a été rejetée le 4 octobre 2004 ; que, le 28 décembre 2004, la société a assigné le directeur des services fiscaux du Haut-Rhin devant le tribunal de grande instance qui, par jugement du 16 février 2007, a dit que la force majeure était caractérisée pour les acquisitions effectuées avant que l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 ait fait l'objet de mesures de publicité et qu'elle n'était pas caractérisée pour les acquisitions postérieures ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'imposition mis en recouvrement le 31 janvier 2003 et dus au titre des acquisitions postérieures à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 et, à défaut, à la publication ou à l'affichage de l'arrêté du 11 juillet 1990, alors, selon le moyen, que la nécessité de recherches ultérieures permettant de déterminer si un bien immobilier a été revendu dans le délai imparti par l'article 1115 du code général des impôts s'apprécie pour chaque acte enregistré, en fonction des diligences qui ont été nécessaires à l'administration pour connaître l'absence de revente des biens visés dans l'acte ; qu'en se fondant, pour juger que la révélation à l'administration fiscale de l'absence de revente des terrains acquis par la société du Parc d'activité de Blotzheim avait nécessité des recherches ultérieures et pour en déduire que le droit de reprise de l'administration fiscale se prescrivait pas dix ans, sur le fait que le très grand nombre de parcelles acquises avait nécessairement nécessité de telles recherches, cependant que la nécessité de recherches ultérieures ne pouvait être appréciée globalement, et devait être faite séparément pour chaque acte enregistré, la cour d'appel a violé les articles 1115 du code général des impôts, L. 180 et L. 186 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L. 180 et L. 186 du Livre des procédures fiscales que le délai abrégé du droit de reprise pour les droits d'enregistrement n'est opposable à l'administration que si l'exigibilité des droits a été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité, sans qu'il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures ; que si ce délai court à compter de l'acte de revente, en l'absence de revente, il part de l'expiration du délai dans lequel le contribuable exonéré devait mettre en oeuvre son obligation prise en vertu de l'article 1115 du code général des impôts ; qu'ayant relevé que le délai dans lequel la société était tenue de revendre les terrains expirait le 31 décembre 1998, que la notification de redressement avait été faite le 5 mars 2002, et que la procédure de redressement, retraçant plus de cent soixante mutations de parcelles entre 1989 et 1992, démontrait que la surveillance du respect de l'engagement pris par la société a nécessité le recours à des recherches ultérieures de sorte que les conditions prévues pour l'application de la prescription abrégée de l'article L. 180 du Livre des procédures fiscales n'étaient pas réunies, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes sus-visés ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que la société Parc d'activité de Blotzheim faisait valoir (conclusions d'appel de la société Parc d'activité de Blotzheim en date du 6 novembre 2008, page 9, § 5) que le non-respect de l'engagement de revente devait être imputé à la force majeure pour les acquisitions effectuées postérieurement à la publication de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 pour lesquelles des compromis de vente engageant irrévocablement la société avaient été signés avant cette publication ; qu'en considérant que l'impossibilité de revendre consécutive au projet d'extension de l'aéroport Bâle-Mulhouse n'était pas imprévisible en ce qui concerne les acquisitions effectuées postérieurement à la publicité de l'arrêté du 17 mai 1990 sans répondre au moyen tiré de ce que, pour une partie de ces acquisitions, la société Parc d'activité de Blotzheim était engagée irrévocablement par des compromis de vente antérieurs à cette publicité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel n'avait pas à répondre aux énonciations des conclusions qui ne tiraient pas de conséquence juridique des faits qu'elles affirmaient ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Parc d'activités de Blotzheim aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Parc d'activités de Blotzheim
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Parc d'Activités de Blotzheim de ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'imposition mis en recouvrement le 31 janvier 2003 et dus au titre des acquisitions postérieures à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 et, à défaut, à la publication ou à l'affichage de l'arrêté du 11 juillet 1990 ;
AUX MOTIFS QUE « la société PAB prétend que la procédure de redressement effectuée le 5 mars 2002 est irrégulière au motif que le délai de reprise était prescrit en application de l'article L. 180 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de cet article que l'administration fiscale dispose en matière de droits d'enregistrement d'un délai de reprise expirant le 31 décembre de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'exigibilité des droits a suffisamment été révélée par l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration, sans qu'il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures ; qu'en l'espèce, la procédure de redressement retraçant plus de 160 mutations de parcelles entre 1989 et 1992, il résulte de ce nombre très élevé d'acquisitions que la surveillance du respect de l'engagement pris par la société PAB de revendre les terrains en cause dans le délai légal de l'article 1115 du Code général des impôts a nécessairement nécessité le recours à des recherches ultérieures ; que dès lors les conditions prévues pour l'application de la prescription abrégée de l'article L. 180 du livre des procédures fiscales ne sont pas réunies ; qu'il en résulte que seule la prescription de droit commun de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales est applicable » ;
ALORS QUE la nécessité de recherches ultérieures permettant de déterminer si un bien immobilier a été revendu dans le délai imparti par l'article 1115 du Code général des impôts s'apprécie pour chaque acte enregistré, en fonction des diligences qui ont été nécessaires à l'administration pour connaître l'absence de revente des biens visés dans l'acte ; qu'en se fondant, pour juger que la révélation à l'administration fiscale de l'absence de revente des terrains acquis par la société du Parc d'Activité de Bloztheim avait nécessité des recherches ultérieures et pour en déduire que le droit de reprise de l'administration fiscale se prescrivait pas dix ans, sur le fait que le très grand nombre de parcelles acquises avait nécessairement nécessité de telles recherches, cependant que la nécessité de recherches ultérieures ne pouvait être appréciée globalement, et devait être faite séparément pour chaque acte enregistré, la cour d'appel a violé les articles 1115 du Code général des impôts, L. 180 et L. 186 du Livre des procédures fiscales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Parc d'Activités de Blotzheim de ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'imposition mis en recouvrement le 31 janvier 2003 et dus au titre des acquisitions postérieures à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 et, à défaut, à la publication ou à l'affichage de l'arrêté du 11 juillet 1990 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « c'est à juste titre que le Tribunal a considéré qu'à partir de la publicité par publication ou affichage de l'arrêté du 17 mai 1990 la société PAB ne pouvait plus ignorer que le projet de ZAC était frappé d'incertitudes et qu'en poursuivant néanmoins l'acquisition de terrains jusqu'au 20 novembre 1992, elle a pris un risque qu'il lui appartenait d'assumer ; que c'est en effet cet arrêté préfectoral mettant la commune de Blotzheim en demeure de réviser son plan d'occupation des sols qui a mis en lumière l'opposition entre les deux projets concurrents et les difficultés qui allaient survenir de leur confrontation ; que le fait que les arrêtés préfectoraux des 17 mai 1990 et 11 juillet 1990 aient été ultérieurement annulés au motif qu'ils avaient été pris sur le fondement d'une délibération illégale du conseil d'administration de l'aéroport et que ce n'est que par deux nouveaux arrêtés préfectoraux du 12 août 1996 et 17 octobre 1996 que la procédure d'extension de l'aéroport a été relancée, est sans influence sur le caractère prévisible des difficultés invoquées ; qu'à compter de la publicité de l'arrêté du 17 mai 1990, la société PAB était en effet en mesure de connaître le projet d'extension de l'aéroport ; que ce projet étant dès lors connu ce que la société PAB admet dans ses conclusions d'appel, sa réalisation ne pouvant alors revêtir qu'un caractère prévisible et ce quand bien même le conseil d'administration de l'aéroport ait dû attendre 1996 pour pouvoir procéder légalement à l'opération d'extension ; que cette prévisibilité exclut la force majeure pour les acquisitions postérieures à la publicité de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « pour que la force majeure soit reconnue, il faut que : les événements aient été imprévisibles au moment de l'acte d'acquisition ; l'impossibilité de revendre doit être irrésistible lors du délai d'exécution pour revendre ; qu'il convient d'observer que l'arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation sus-visé a limité à deux les critères de la force majeure : l'imprévisibilité et l'irrésistibilité ; que si le caractère irrésistible doit s'apprécier au moment du délai d'exécution pour revendre le caractère imprévisible doit s'apprécier lors de l'engagement du débiteur de l'obligation puisque, si l'événement était prévisible, le débiteur devait soit s'abstenir de s'engager, soit prendre les moyens nécessaires pour tenir son engagement ; que la revente devait être entreprise dans un délai de cinq ans pour les biens acquis avant le 1er janvier 1991 et de quatre ans pour les biens acquis après cette date ; que l'exécution d'une obligation sur plusieurs années accentue l'imprévisibilité au moment de la signature de l'engagement ; que la délibération du Conseil municipal de Blotzheim décidant de confier la réalisation du parc d'activité à la SARL Parc d'activité de Blotzheim est intervenue le 11 janvier 1990, soit à peine un mois après la délibération du conseil d'administration de l'aéroport qui a eu lieu le 6 décembre 1989 ; que les premières acquisitions sont antérieures à la délibération du Conseil d'Administration de l'aéroport puisqu'elles ont eu lieu dès juin 1989 ; qu'en ce qui concerne les acquisitions réalisées postérieurement à la délibération du conseil d'administration de l'aéroport, il convient d'observer que les séances de ce dernier sont confidentielles et ne font l'objet d'aucune publication, ainsi qu'il est précisé à l'article 10.5 des statuts régissant le fonctionnement du conseil d'administration de l'aéroport Bâle-Mulhouse ; qu'aucun élément du dossier ne démontre que les démarches entreprises par le conseil d'Administration en vue notamment de réserver les terrains nécessaires à l'extension de l'aéroport aient été portées à la connaissance des tiers, fussent-ils des professionnels de l'immobilier ; que ce type d'opération est nécessairement secret notamment dans le but d'empêcher les spéculations et les manifestations des riverains qui peuvent craindre des nuisances sonores et des moins-values de leurs biens ; que le premier acte administratif faisant l'objet d'une publicité est l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 publié dans le Recueil des Actes administratifs, voire affiché dans la commune et dont la SARL Parc d'Activité de Blotzheim, professionnel de l'immobilier, devait nécessairement avoir connaissance ; qu'il résulte de ces constatations que l'extension de l'aéroport constituait pour la SARL Parc d'activité de Bloztheim un événement imprévisible jusqu'à la publication ou l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 ; qu'à partir de la publication de l'arrêté préfectoral, la SARL Parc d'Activité de Blotzheim ne pouvait ignorer que le projet de ZAC était frappé d'incertitudes ; qu'en poursuivant néanmoins l'acquisition de terrains jusqu'au 20 novembre 1992, la SARL Parc d'Activité de Blotzheim a pris un risque qu'il lui appartient d'assumer ; que la circonstance que l'arrêté préfectoral ait été annulé par la juridiction administrative est sans effet quant à l'appréciation du caractère imprévisible de l'événement dès lors que cette annulation est intervenue postérieurement à l'engagement de la SARL Parc d'Activité de Bloztheim ; qu'il en résulte que le caractère d'imprévisibilité est : -reconnu pour la période antérieure à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 ; rejeté pour la période postérieure à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 ; (…) que l'imprévisibilité n'étant pas démontrée pour la période postérieure à la publication ou à l'affichage de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990, à défaut de l'arrêté du 11 juillet 1990, il n'appartient pas au tribunal de rechercher l'irrésistibilité pour cette période (…) »
ALORS QUE la société Parc d'activité de Bloztheim faisait valoir (conclusions d'appel de la société Parc d'activité de Blotzheim en date du 6 novembre 2008, page 9, § 5) que le non respect de l'engagement de revente devait être imputé à la force majeure pour les acquisitions effectuées postérieurement à la publication de l'arrêté préfectoral du 17 mai 1990 pour lesquelles des compromis de vente engageant irrévocablement la société avaient été signés avant cette publication ; qu'en considérant que l'impossibilité de revendre consécutive au projet d'extension de l'aéroport Bâle-Mulhouse n'était pas imprévisible en ce qui concerne les acquisitions effectuées postérieurement à la publicité de l'arrêté du 17 mai 1990 sans répondre au moyen tiré de ce que, pour une partie de ces acquisitions, la société Parc d'activité de Blotzheim était engagée irrévocablement par des compromis de vente antérieurs à cette publicité, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-19740
Date de la décision : 29/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 16 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 mar. 2011, pourvoi n°10-19740


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.19740
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