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23/03/2011 | FRANCE | N°09-66216

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 mars 2011, 09-66216


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 31 juillet 1995 en qualité de VRP exclusif par la société Michel Brasier, dont l'activité a été reprise par la société Saga ; que M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 9 juillet 2004 ; que contestant le bien-fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation de son employeur au paiement notamment de dommages-intérêts pour rupture abusive et d'une indemnité spéciale de rupture ; >Sur les premier et deuxième moyens, réunis :
Attendu que l'employeur fait ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 31 juillet 1995 en qualité de VRP exclusif par la société Michel Brasier, dont l'activité a été reprise par la société Saga ; que M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 9 juillet 2004 ; que contestant le bien-fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation de son employeur au paiement notamment de dommages-intérêts pour rupture abusive et d'une indemnité spéciale de rupture ;
Sur les premier et deuxième moyens, réunis :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de décider que le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement d'une somme à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement qui invoque une suppression d'un emploi résultant de la cessation d'un secteur d'activité obérant la compétitivité de l'entreprise énonce un motif économique de licenciement ; qu'en décidant que le licenciement de M. X... qui avait pour motif, la suppression de son poste consécutive à une rentabilité insuffisante du secteur d'activité du salarié et la suppression de ce secteur d'activité ne constituait pas un motif économique de licenciement la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ que la réorganisation de l'entreprise mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir, sans être subordonnée à des difficultés économiques à la date du licenciement constitue un motif économique ; qu'en retenant que le licenciement économique était subordonné à des difficultés économiques sérieuses rendant indispensable cette suppression, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que de plus, ce n'est que si les agissements fautifs de l'employeur commis en connaissance de cause ont rendu nécessaire la réorganisation de l'entreprise et la suppression de poste invoquées que le licenciement économique peut être dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'en énonçant que l'employeur n'avait pas apporté l'assistance nécessaire au salarié en ne livrant pas dans les délais les clients sur le secteur, et qu'il était de mauvaise foi sous prétexte qu'il avait procédé au licenciement du salarié six mois après son affectation, la cour d'appel n'a pas caractérisé la faute grave et intentionnelle de l'entreprise ayant provoqué la suppression du poste du salarié et du secteur d'activité que la décision n'est pas justifiée au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
4°/ que le licenciement économique d'un salarié peut intervenir en cas de suppression d'emploi lorsque le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise s'avère impossible ; qu'en affirmant que l'employeur n'avait pas fait de recherche de reclassement au travers d'une formation et d'une adaptation du salarié, sans constater qu'il existait des postes à pourvoir dans l'entreprise, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu que la lettre de licenciement pour motif économique doit mentionner celle des raisons économiques prévues par la loi invoquée par l'employeur et son incidence sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié licencié ; qu'à défaut le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la lettre de licenciement faisait état de l'insuffisance de l'activité générée par le secteur attribué au salarié eu égard aux frais auxquels la société devait faire face, a décidé à bon droit que cette lettre ne mentionnait pas la cause économique du licenciement, de sorte que le celui-ci était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 ;
Attendu que selon cet article, l'indemnité spéciale de rupture, qui n'est cumulable ni avec l'indemnité légale de licenciement, ni avec l'indemnité de clientèle, est calculée sur la rémunération moyenne mensuelle des douze derniers mois, déduction faite des frais professionnels, et à l'exclusion de la partie fixe convenue de cette rémunération ;
Attendu que pour allouer au salarié une somme à titre d'indemnité spéciale de rupture, l'arrêt retient que c'est à tort que l'employeur refuse le versement de cette indemnité en indiquant que M. X... n'a pas perçu de rémunération à la commission pendant sa dernière année d'exercice puisqu'il a bénéficié, pendant toute la durée de sa présence au sein de la société Saga d'une rémunération forfaitaire fixe brute mensuelle de 4 000 euros ; qu'en effet, le courrier du 1er septembre 2003, invoqué par les parties précisait que pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2004, le taux de commission serait fixé à 5 %, puis à 3, 5 %, mais que jusqu'à la fin de l'année 2004 et pour le cas où la moyenne mensuelle des commissions calculées suivant les modalités énoncées s'avérerait inférieure à 4 000 euros, il serait prévu que la société garantirait une rémunération forfaitaire brute de 4 000 euros par mois ; que ces dispositions se bornant à garantir pendant un an au VRP affecté sur un nouveau secteur un minimum forfaitaire de 4 000 euros, qui ne saurait être assimilé à une partie fixe de la rémunération, ont donc maintenu un système de rémunération à la commission, ouvrant droit à l'application de l'article 14 de la convention collective ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la seule rémunération perçue par le salarié pendant la période de référence, était une somme mensuelle forfaitaire garantie contractuellement de 4 000 euros, ce dont il résultait qu'il s'agissait d'une rémunération fixe, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Saga à payer à M. X... la somme de 17 936 euros à titre d'indemnité spéciale de rupture, l'arrêt rendu le 15 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me de Y..., avocat aux Conseils pour la société Saga
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR décidé que le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la société SAGA employeur à lui payer une somme de 24. 000 € à ce titre
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement adressée à Monsieur Olivier X... est rédigée comme suit : « votre contrat de travail est rompu pour le motif suivant : l'activité générée par le secteur qui vous a été attribué est trop insuffisante eu égard aux frais auxquels nous devons faire face dans l'éventualité d'une poursuite d'activité et nous renonçons donc à y maintenir un représentant. Nous avons évoqué ensemble votre reclassement qui n'est pas envisageable au sein de notre société, n'ayant aucun autre poste à vous proposer correspondant à votre qualification ; par conséquent nous vous notifions votre licenciement pour motif économique. (suppression de poste) » ; la cour considère que c'est après une analyse exacte des faits et en fonction de motifs justes et pertinents qu'elle reprend à son compte, que le conseil de prud'hommes a dit ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse relevant notamment qu'aucune difficulté économique de l'entreprise n'était avancée, aucun document comptable produit et l'énonciation du motif de licenciement ne répondant pas aux exigences fixées par l'ancien article L 321, devenu L 1233-3 du code du travail en cas de licenciement économique ; en effet, s'il n'est effectivement pas nécessaire d'attendre le dépôt de bilan pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, le cas échéant par une suppression de poste, encore faut-il que les difficultés économiques sérieuses rendant indispensable cette suppression soient établies ce qui n'est pas le cas ; elle confirme également le motif du conseil de prud'hommes en ce qui concerne l'absence de recherche sérieuse de reclassement, le cas échéant à travers l'adaptation du poste du salarié licencié ; en outre ce licenciement apparaît tout à la fois précipité comme ayant été engagé moins de six semaines après que le VRP a été affecté sur un nouveau secteur et révélateur d'une certaine mauvaise foi de la part de l'employeur ; en effet dans la mesure où ce secteur était tenu précédemment par un autre VRP l'employeur ne pouvait en ignorer les difficultés et devait apporter toute l'assistance nécessaire à Monsieur Olivier X... alors que celui-ci produit plusieurs courriers de réclamation de clients de son nouveau secteur, se plaignant de ne pas être livré correctement et dans les délais par la société SAGA, circonstance qui n'est pas utilement contestée par l'employeur et qui n'est guère favorable, bien évidemment à un bon développement de la clientèle ;
1° ALORS QUE la lettre de licenciement qui invoque une suppression d'un emploi résultant de la cessation d'un secteur d'activité obérant la compétitivité de l'entreprise énonce un motif économique de licenciement ; qu'en décidant que le licenciement de Monsieur X... qui avait pour motif, la suppression de son poste consécutive à une rentabilité insuffisante du secteur d'activité du salarié et la suppression de ce secteur d'activité ne constituait pas un motif économique de licenciement la cour d'appel a violé les articles L 1232-6 et L 1233-3 du code du travail
2° ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir, sans être subordonnée à des difficultés économiques à la date du licenciement constitue un motif économique ; qu'en retenant que le licenciement économique était subordonné à des difficultés économiques sérieuses rendant indispensable cette suppression, la cour d'appel a encore violé l'article L1233-3 du code du travail
3° ALORS QUE, de plus, ce n'est que si les agissements fautifs de l'employeur commis en connaissance de cause ont rendu nécessaire la réorganisation de l'entreprise et la suppression de poste invoquées que le licenciement économique peut être dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'en énonçant que l'employeur n'avait pas apporté l'assistance nécessaire au salarié en ne livrant pas dans les délais les clients sur le secteur, et qu'il était de mauvaise foi sous prétexte qu'il avait procédé au licenciement du salarié 6 mois après son affectation, la cour d'appel n'a pas caractérisé la faute grave et intentionnelle de l'entreprise ayant provoqué la suppression du poste du salarié et du secteur d'activité que la décision n'est pas justifiée au regard de l'article L 1233-3 du code du travail
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR décidé que la société SAGA avait manqué à son obligation de reclassement et de l'avoir condamnée à payer à Monsieur X... une indemnité de 24. 000 € à titre d'indemnité sans cause réelle et sérieuse
AUX MOTIFS propres QUE la cour d'appel confirmé les motifs du conseil de prud'homme en ce qui concerne l'absence de recherche sérieuse de reclassement ;
AUX MOTIFS adoptés QUE la société Saga se contente d'avancer qu'aucun poste de la qualification de Monsieur X... ne pouvait être proposé ; or une nouvelle fois cette définition ne correspond pas à la volonté du législateur qui impose une recherche sérieuse au travers de la formation et de l'adaptation du salarié licencié, qu'aucune demande n'a été effectuée dans ce sens ;
ALORS QUE le licenciement économique d'un salarié peut intervenir en cas de suppression d'emploi lorsque le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise s'avère impossible ; qu'en affirmant que l'employeur n'avait pas fait de recherche de reclassement au travers d'une formation et d'une adaptation du salarié, sans constater qu'il existait des postes à pourvoir dans l'entreprise, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 1233-4 du code du travail
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR alloué à Monsieur X... la somme de 17. 936 € à titre de solde d'indemnité spéciale de rupture avec intérêts à compter de la convocation devant le bureau de conciliation
AUX MOTIFS QUE l'article 14 de la convention collective des VRP applicable prévoit le règlement d'une indemnité spéciale de rupture dont Monsieur Olivier X... a demandé le bénéfice par courrier du 8 décembre 2004 en renonçant à l'indemnité de clientèle qui doit être calculée « sur la rémunération moyenne mensuelle des 12 derniers mois à l'exclusion de la partie fixe convenue de cette rémunération » ; or c'est à tort que l'employeur refuse le versement de cette indemnité en indiquant que Monsieur Olivier X... n'a pas perçu de rémunération à la commission pendant sa dernière année d'exercice puisqu'il a bénéficié pendant toute la durée de sa présence au sein de la Sarl SAGA, d'une rémunération forfaitaire fixe brute mensuelle de 4000 € ; en effet le courrier du 1er septembre 2003 invoqué par les parties précisait que pour la période du premier janvier au 31 décembre 2004, le taux de commission serait fixé à 5 % puis à 3, 5 % mais que jusqu'à la fin décembre 2004 et pour le cas où la moyenne mensuelle des commissions calculées suivant les modalités énoncées s'avérait inférieure à 4000 €, il serait prévu que la société garantirait une rémunération forfaitaire brute de 4000 € par mois ; que ces dispositions se bornant à garantir pendant un an au VRP affecté sur un nouveau secteur un minimum forfaitaire de 4000 € qui ne saurait être assimilé à une partie fixe de la rémunération ont donc maintenu un système de rémunération à la commission, ouvrant droit à l'application de l'article 14 de la convention collective ; ainsi les modifications introduites dans le contrat de travail par ce courrier du 1er septembre 2003, n'ont pas changé le mode de rémunération de l'intéressé qui est resté intégralement une rémunération à la commission ; il sera donc fait droit à la demande de Monsieur Olivier X... sur ce point étant relevé que la somme de 17. 936 € sollicités correspond à un solde qui prend en compte le versement de l'indemnité légale de licenciement de 10. 864 E qui lui a déjà été versée mais n'était pas due en cas d'allocation de l'indemnité spéciale de rupture ;
ALORS QUE l'indemnité spéciale de rupture peut se substituer à l'indemnité de clientèle pour les représentants rémunérés à la commission ; que le VRP qui n'a perçu qu'une rémunération fixe ne peut prétendre à l'indemnité spéciale de rupture ; que la cour d'appel a constaté que le contrat prévoyait une rémunération à la commission et en cas de commissions inférieures à 4000 € mensuelles, une rémunération forfaitaire égale a ce montant ; qu'en énonçant que le salarié qui n'avait perçu que le minimum forfaitaire garanti n'avait pas perçu une rémunération fixe, mais avait été rémunéré à la commission si bien qu'il pouvait prétendre à l'indemnité spéciale de rupture, la cour d'appel a violé l'article 14 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-66216
Date de la décision : 23/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 mar. 2011, pourvoi n°09-66216


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.66216
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