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09/02/2011 | FRANCE | N°09-41585

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 février 2011, 09-41585


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 février 2009), que M. X... a été engagé par la société Alpro intérim le 25 mai 1999 en qualité de technico-commercial et promu ultérieurement chef d'agence ; que le salarié, qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire et a signé une transaction le 22 octobre 2003, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Alpro intérim fait grief à l'arrêt d'annuler la transaction du 22 octobre 2003,

de dire que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et séri...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 février 2009), que M. X... a été engagé par la société Alpro intérim le 25 mai 1999 en qualité de technico-commercial et promu ultérieurement chef d'agence ; que le salarié, qui a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire et a signé une transaction le 22 octobre 2003, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Alpro intérim fait grief à l'arrêt d'annuler la transaction du 22 octobre 2003, de dire que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer des sommes à titre de congés payés non versés, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et du chef de la nullité de la clause de non-concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que la transaction peut être conclue dès l'instant où le salarié a eu connaissance du détail des motifs de la rupture de son contrat de travail décidée par l'employeur ; qu'en l'espèce, il n'était pas discuté que le salarié s'était vu remettre en main propre sa lettre de licenciement le 20 octobre 2003 ; qu'en jugeant néanmoins que la transaction conclue le 22 octobre suivant était nulle pour la raison inopérante tenant à l'absence de preuve de ce que la lettre de licenciement aurait été antérieurement notifiée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil, ensemble l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ que l'aveu exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques ; qu'en déduisant en l'espèce de ses écritures la reconnaissance de ce qu'elle aurait notifié au salarié sa lettre de licenciement le 24 octobre 2004, quand ce dernier contredisait ce fait en indiquant que la lettre de licenciement avait été envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception le 20 octobre 2004, ce dont il résultait à tout le moins le caractère équivoque de ce prétendu avec, la cour d'appel a violé l'article 1356 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la transaction du 22 octobre 2003 avait été conclue en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Alpro intérim fait grief à l'arrêt d'annuler la transaction du 22 octobre 2003, de dire que le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement; qu'en consacrant en l'espèce l'ensemble de ses motifs à la collusion frauduleuse qu'elle alléguait, sans aucunement examiner les autres griefs qu'elle invoquait à l'encontre du salarié dans la lettre de licenciement, tels que l'absence fautive de relance de ses débiteurs -c'est-à-dire l'absence de suivi des clients- et surtout l'inertie fautive du salarié pour tenter de remédier à la situation difficultueuse qu'il avait créée -c'est-à-dire l'absence de toute prospection pour trouver de nouveaux clients,- la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ que si la faute lourde nécessite que soit établie l'intention du salarié de nuire à son employeur, il n'est pas exigé en revanche que la lettre de licenciement portant notification d'un licenciement pour faute lourde évoque expressément cette intention de nuire du salarié ; qu'en déduisant en l'espèce l'absence de faute lourde du salarié de la circonstance inopérante que la lettre de licenciement n'évoquait pas expressément son intention de nuire, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-26 et L. 1232-6 du code du travail ;
3°/ que caractérise une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise le fait pour un salarié de se livrer pour le compte de son employeur à une opération d'envergure, en méconnaissance des usages du secteur d'activité auquel il appartient et de ses obligations contractuelles lui imposant notamment de s'assurer de la viabilité financière de son cocontractant, peu important à cet égard que soit caractérisée une intention fautive du salarié ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que le salarié avait contracté, pour le compte de son employeur, avec une société dont il a omis de vérifier la viabilité financière et dont il s'est abstenu de réclamer le paiement dans un délai raisonnable suivant la date d'exigibilité des premières factures ; qu'en jugeant en l'espèce que les fautes alléguées n'étaient pas établies, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
4°/ que dans sa décision du 27 septembre 2006, la chambre d'instruction de la cour d'appel de Versailles a jugé que "M. X..., s'il a agi avec légèreté (...) n'a pas accepté ce contrat en sachant que le contractant n'honorerait pas ses obligations", ce dont il résultait seulement l'absence de toute intention fautive du salarié lors des faits qui lui étaient reprochés; qu'en déduisant néanmoins des termes de cette décision que l'ensemble des faits reprochés au salarié n'était pas établi pour en déduire l'absence de tout comportement fautif -même non intentionnel- du salarié de nature à justifier son licenciement, la cour d'appel a violé le principe faisant interdiction aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ;
5°/ que le juge ne peut accueillir ou rejeter une demande sans examiner l'ensemble des pièces apportées aux débats par les parties ; qu'en l'espèce, elle produisait l'état des marges commerciales de la société de mai 1999 à août 2003 ; qu'en ne se fondant que sur les seuls calculs effectués par le salarié pour déduire tant l'existence de la créance alléguée que l'exactitude des montants réclamés au titre du client Alpha express depuis 2000, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ que nul ne peut se constituer titre à lui-même ; qu'en se fondant exclusivement sur les calculs effectués par le salarié pour le client Alpha express sur l'ensemble de la période 2000-2003 pour estimer qu'il pouvait prétendre à un rappel de commissions d'un montant égal aux sommes réclamées, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, examinant tous les griefs visés dans la lettre de licenciement et constatant que l'employeur avait eu l'entière connaissance des faits reprochés au salarié au plus tard le 31 juillet 2003 en sorte qu'ils étaient prescrits en application de l'article L. 1332-4 du code du travail, le 7 octobre 2003, au jour de l'engagement de la procédure disciplinaire de licenciement, a décidé à bon droit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et a fixé, sur la base des éléments de preuve qu'elle a souverainement appréciés, le montant des sommes dues au salarié ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Alpro intérim fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... la somme de 10 356,60 euros à titre de dommages-intérêts du chef de la nullité de la clause de non-concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 7.4 de la convention collective applicable aux salariés permanents des entreprises de travail temporaire prévoit qu'aucune contrepartie financière ne peut être due pendant la durée de la clause de non-concurrence lorsque la rupture du contrat de travail est justifiée par une faute grave ou lourde ; que la censure de l'arrêt en ce qu'il a écarté tant la faute lourde que la faute grave du salarié entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation du chef du dispositif par lequel les juges ont indemnisé le salarié au regard de la prétendue nullité de la clause de non-concurrence, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ qu'est valable la clause de non-concurrence indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, tenant compte des spécificités de l'emploi du salarié et comportant l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière, peu important que cette obligation s'impose à lui en application d'une stipulation insérée au contrat de travail ou d'une disposition impérative de la convention collective applicable à la relation de travail ; qu'en l'espèce, l'article 7.4 de la convention collective applicable prévoyait, en contrepartie du respect d'une clause de non-concurrence, le versement d'une somme mensuelle égale à 20 % de la moyenne mensuelle de la rémunération du salarié au cours de ses trois derniers mois de présence dans l'entreprise pour la première année et à 10 % pour la seconde année ; qu'en jugeant nulle la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail du salarié en raison de la prétendue absence de contrepartie financière, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 7.4 de la convention collective applicable aux salariés permanents des entreprises de travail temporaire ;
3°/ que les dommages-intérêts doivent être fixés à la mesure du préjudice subi par la victime; qu'en se fondant, en l'espèce, pour déterminer le montant des dommages et intérêts devant être alloués au salarié en réparation du préjudice résultant de la nullité de la clause de non-concurrence, sur l'évaluation qu'elle avait faite de son propre préjudice si le salarié n'avait pas respecté la clause, sans aucunement évaluer le préjudice réellement subi par le salarié, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu, d'une part, que le rejet du deuxième moyen rend la première branche du troisième moyen sans objet ;
Attendu, d'autre part, que le contrat de travail du salarié qui comportait une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie pécuniaire ne se référait pas à la convention collective nationale des salariés permanents des entreprises de travail temporaire ni à aucune autre convention collective applicable ; que la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle était nulle ;
Et attendu, enfin, que le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue ; que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait respecté la clause de non-concurrence pendant deux ans et que sa demande n'était pas excessive, a souverainement estimé le montant des dommages-intérêts qui lui étaient dus ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Alpro intérim aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alpro intérim à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Alpro intérim
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la transaction du 22 octobre 2003, d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... par la société ALPRO INTERIM est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société ALPRO INTERIM à payer à Monsieur X... les sommes de 4.070,56 € à titre de congés payés non versés, de 7.383,81 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 738,38 € de congés payés afférents, de 1.524,73 € d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêt au taux légal du jour de la convocation devant le bureau de conciliation, de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, et de 10.356,60 € à titre de dommages et intérêts du chef de la nullité de la clause de nonconcurrence avec intérêt légal au jour de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE : « La transaction ayant pour objet de prévenir ou terminer une contestation, celle-ci ne peut être valablement conclue par le salarié licencié que lorsqu'il a eu connaissance effective des motifs du licenciement par la réception de la lettre de licenciement prévue à l'article L.1234-3 du Code du travail ; aucune transaction ne peut être conclue en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception, la remise en mains propres de la lettre de licenciement ne palliant en aucun cas le défaut d'envoi par lettre recommandée avec accusé de réception ;En l'espèce, il résulte des productions qu'il y a bien eu une remise en mains propres, dont la date, soit le 20 octobre 2003, est discutée par le salarié, qui la situe le 22 octobre 2003, date de la signature de la transaction, mais qu'en tout cas, la notification de la lettre de licenciement aurait été faite, de l'aveu même de l'employeur, le 24 octobre 2003, la preuve de cet envoi et de sa réception n'est pas même rapportée ;La transaction est de ce seul chef, et sans qu'il soit besoin d'analyser son contenu, nulle et de nul effet ; le jugement doit être infirmé ».
1. ALORS QUE la transaction peut être conclue dès l'instant où le salarié a eu connaissance du détail des motifs de la rupture de son contrat de travail décidée par l'employeur ; qu'en l'espèce, il n'était pas discuté que le salarié s'était vu remettre en mains propres sa lettre de licenciement le 20 octobre 2003 ; qu'en jugeant néanmoins que la transaction conclue le 22 octobre suivant était nulle pour la raison inopérante tenant à l'absence de preuve de ce que la lettre de licenciement aurait été antérieurement notifiée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil, ensemble l'article L.1232-6 du Code du travail ;
2. ALORS QUE l'aveu exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques ; qu'en déduisant en l'espèce des écritures de l'employeur, page 13, la reconnaissance par l'employeur de ce qu'il aurait notifié au salarié sa lettre de licenciement le 24 octobre 2004, quand ce dernier contredisait ce fait, page 8, en indiquant que la lettre de licenciement avait été envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception le octobre 2004, ce dont résultait à tout le moins le caractère équivoque de ce prétendu aveu, la Cour d'appel a violé l'article 1356 du Code civil ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... par la société ALPRO INTERIM est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société ALPRO INTERIM à payer à Monsieur X... les sommes de 7.310,24 € à titre de rappels de commissions, outre 731,02 € de congés payés sur ce rappel, de 4.070,56 € à titre de congés payés non versés, de 7.383,81 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 738,38 € de congés payés afférents, de 1.524,73 € d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêt au taux légal du jour de la convocation devant le bureau de conciliation, de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, et de 10.356,60 € à titre de dommages et intérêts du chef de la nullité de la clause de non-concurrence avec intérêt légal au jour de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE :« Sur le licenciement :En application de l'article L.1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ;En l'espèce, la société ALPRO INTERIM ne disconvient pas qu'elle a eu connaissance des impayés imputables à la société T2I dès fin juillet 2003 ; il ressort du procès-verbal d'assemblée générale ordinaire du 31 juillet 2003, qu'elle produit, tenue uniquement entre Madame Y..., en sa double qualité de représentante de la société ALPHA EXPRESS HOLDING, associée majoritaire, et d'associée personnellement, Monsieur X... et Madame Z..., présente comme pressentie pour reprendre la gérance de la société, qu'à cette date, Monsieur X... a remis son rapport de gérance, lequel intégrait nécessairement la situation financière de l'entreprise, en ce compris les impayés litigieux ;Elle soutient qu'il ne s'agit que d'une connaissance incomplète, ne portant pas sur le grief du licenciement relatif à l'entente entre Monsieur X... et la société T2I ;La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :‘Dans le cadre de vos attributions de technico-commercial, vous avez cru devoir, au mois de novembre 2002, engager la société ALPRO INTERIM sans une opération des plus hasardeuses, en mettant des intérimaires à la disposition d'une entreprise utilisatrice dont vous connaissiez la précarité financière, pour entretenir des relations d'amitié notoires avec son dirigeant.L'entreprise utilisatrice ayant déposé son bilan peu après, il en est résulté une créance impayée pour la société ALPRO INTERIM de 93.750,78 €, pareille créance étant de nature à compromettre irrémédiablement la pérennité de l'entreprise.Bien pis, vous avez maintenu secrète cette information jusqu'à la fin du mois de juillet 2003, alors que la créance était née en novembre 2002.Par ailleurs, ce contexte s'est aggravé par le fait que vous n'avez plus assuré aucun suivi des clients existants ni aucune prospection pour en trouver de nouveaux de manière à tenter de redresser la situation.L'ensemble des faits qui vous sont reprochés caractérisent à l'évidence la faute lourde'.Il résulte sans ambiguïté de ces termes que le grief de complaisance alléguée est énoncé par référence à une amitié prétendument notoire, donc connue de l'employeur, et qu'il serait complété par une dissimulation dolosive, ayant en tout cas pris fin juillet 2003 ; la faute lourde ne peut résulter que d'une intention de nuire ; elle n'est pas évoquée ;La société ALPRO INTERIM ne rapporte en tout cas pas la preuve de ‘découvertes' postérieures à fin juillet 2003, relatives au surplus à des faits prétendus dont la juridiction pénale a jugé définitivement qu'ils n'étaient pas établis en ces termes :‘L'examen de l'information révèle que les rapports contractuels entre la société T2I et ALPRO INTERIM ont pu être noués du fait que Madame A... était déjà en relation d'affaires avec Monsieur X..., gérant l'ALPRO ; en revanche, aucune concertation frauduleuse entre Monsieur A..., Madame A... et Monsieur X... en vue d'obtenir d'ALPRO INTERIM une prestation de service que le premier n'avait pas l'intention de payer n'a été établie ; en effet, Monsieur A..., dirigeant de T2I se trouvait avant de contracter avec ALPRO INTERIM dans une situation où il devait obtenir rapidement la disposition de travailleurs intérimaires pour honorer un contrat passé avec PSA et dont l'exécution lui aurait permis de régler la société de travail temporaire ; c'est dans ces conditions que sa femme avait pris contact avec Monsieur X..., lequel, s'il a agi avec légèreté en reprenant un contrat de fourniture de travailleurs intérimaires que le groupe SELPRO avait rompu avec T2I du fait de plusieurs factures impayées, n'a pas selon l'information, accepté ce contrat en sachant que le contractant n'honorerait pas ses obligations ; .... de l'examen de ces actes, il ne résulte donc pas que Monsieur A... ait commis des manoeuvres frauduleuses pour contracter avec ALPRO INTERIM ; en conséquence les interventions de Madame A... et de Monsieur X... dans ses relations contractuelles avec ALPRO INTERIM ne peuvent constituer des actes de complicité'.La société qui a la charge de la preuve de la faute n'en rapporte pas l'existence par l'action pénale et n'apporte aucun autre élément devant la Cour de nature à établir les fautes alléguées ;S'agissant par conséquent de faits non démontrés, l'employeur ne peut dès lors prétendre à une ‘découverte' tardive, alors encore que la ‘notoriété' est expressément invoquée dans la lettre de licenciement ; au surplus, la société ALPRO INTERIM a participé à l'arrangement destiné à obtenir un paiement malgré la situation de liquidation judiciaire, ainsi que le relève encore l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 27 septembre 2006 en ces termes :‘L'unique remboursement d'un montant de 1.953,06 € a été réalisé par la société NORAAC, dont Monsieur A... était salarié, à l'aide d'une facture établie par ALPHA EXPRESS dont la présidente était Madame Y... pour des prestations non effectives' ;La facture en cause est versée par la société ALPRO INTERIM elle-même aux débats, et elle date du 31 juillet 2003, manifestant ainsi la connaissance exacte des faits prétendument fautifs à cette date ;La société ALPRO INTERIM a eu entière connaissance des faits reprochés dès au plus tard le 31 juillet 2003 ; en poursuivant seulement le licenciement le 7 octobre 2003, date en outre incertaine quant à son authenticité, elle a dépassé le délai de deux mois prévu par le texte susvisé ;Les faits invoqués à l'appui de la procédure disciplinaire sont prescrits, cette procédure est dépourvue de motif et le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;Il convient d'infirmer le jugement et de tirer toutes conséquences du défaut de cause réelle et sérieuse ;Sur l'indemnisation du licenciement :La détermination des droits de Monsieur X... passe par l'examen de sa réclamation de commissions retenues pour les mois de juillet et août 2003, et des commissions demeurées impayées sur un client depuis décembre 2000 ; elles augmentent sa rémunération si la prétention est accueillie ;Sur le rappel de commissions : Monsieur X... expose, sans être contredit, qu'il a parfaitement restitué les commissions qui lui avaient été réglées au titre des opérations avec la société T2I, finalement impayées ; il réclame en revanche des commissions sur d'autres opérations, qui ont été retenues par la société ALPRO INTERIM sur les bulletins de salaires d'août et septembre 2003, ainsi qu'il en justifie ; il y a lieu à condamnation pour 2.489,76 euros, outre congés payés ;S'agissant des commissions depuis décembre 2000, la société ALPRO INTERIM ne peut sérieusement disconvenir que le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes lui avait enjoint de produire les listings, et les calculs rigoureux faits par le salarié pour le client ALPHA EXPRESS sur l'ensemble de la période sont justifiés ; il y a lieu à condamnation pour 4.820,48 €, outre congés payés ;La société ALPRO INTERIM doit finalement de ce chef 7.310,24 € et 731,02 €, le jugement étant encore infirmé ;Sur les indemnités de rupture : Monsieur X... demande paiement de rémunérations qui lui sont nécessairement dues et dont le quantum, conforme à ses droits, ne peut être contesté au regard de la prise en compte de la rémunération afférente à un arriéré de commission ; il y a lieu de condamner la société ALPRO INTERIM à lui payer :- 4.070,56 euros à titre de congés payés non versés,- 7.383,81 d'indemnité compensatrice de préavis et 738,38 euros de congés payés afférents,- 1.524,73 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement (application de la convention collective en son article 7-2 privilégiant le salaire moyen des trois derniers mois s'il est supérieur à celui des douze derniers mois) ;Sur les dommages et intérêts : Sur la réparation du préjudice né du caractère abusif, il n'y a eu aucun retour à l'emploi, avec une longue période de chômage, et les droits en matière de retraite ont été nécessairement réduits ; la Cour dispose des éléments suffisants pour fixer le montant des dommages et intérêts à charge de la société ALPRO INTERIM à la somme de 50.000 € ».
1. ALORS QUE le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en consacrant en l'espèce l'ensemble de ses motifs à la collusion frauduleuse alléguée par l'employeur, sans aucunement examiner les autres griefs qu'il invoquait à l'encontre du salarié dans la lettre de licenciement, tels que l'absence fautive de relance des débiteurs de l'employeur - c'est-à-dire l'absence de suivi des clients - et surtout l'inertie fautive du salarié pour tenter de remédier à la situation difficultueuse qu'il avait créée - c'est-à-dire l'absence de toute prospection pour trouver de nouveaux clients -, la Cour d'appel a violé l'article L.1232-6 du Code du travail ;
2. ALORS QUE si la faute lourde nécessite que soit établie l'intention du salarié de nuire à son employeur, il n'est pas exigé en revanche que la lettre de licenciement portant notification d'un licenciement pour faute lourde évoque expressément cette intention de nuire du salarié ; qu'en déduisant en l'espèce l'absence de faute lourde du salarié de la circonstance inopérante que la lettre de licenciement n'évoquait pas expressément son intention de nuire, la Cour d'appel a violé les articles L.3141-26 et L.1232-6 du Code du travail ;
3. ALORS subsidiairement QUE caractérise une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise le fait pour un salarié de se livrer pour le compte de son employeur à une opération d'envergure, en méconnaissance des usages du secteur d'activité auquel il appartient et de ses obligations contractuelles lui imposant notamment de s'assurer de la viabilité financière de son cocontractant, peu important à cet égard que soit caractérisée une intention fautive du salarié ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que le salarié avait contracté, pour le compte de son employeur, avec une société dont il a omis de vérifier la viabilité financière et dont il s'est abstenu de réclamer le paiement dans un délai raisonnable suivant la date d'exigibilité des premières factures ; qu'en jugeant en l'espèce que les fautes alléguées n'étaient pas établies, la Cour d'appel a violé les articles L.1234-5 et L.1234-9 du Code du travail ;
4. ALORS QUE dans sa décision du 27 septembre 2006, la chambre d'instruction de la Cour d'appel de Versailles a jugé que « Monsieur X..., s'il a agi avec légèreté ... , n'a pas accepté ce contrat en sachant que le contractant n'honorerait pas ses obligations », ce dont résultait seulement l'absence de toute intention fautive du salarié lors des faits qui lui étaient reprochés ; qu'en déduisant néanmoins des termes de cette décision que l'ensemble des faits reprochés au salarié n'était pas établi pour en déduire l'absence de tout comportement fautif - même non intentionnel - du salarié de nature à justifier son licenciement, la Cour d'appel a violé le principe faisant interdiction aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ;
5. ALORS QUE le juge ne peut accueillir ou rejeter une demande sans examiner l'ensemble des pièces apportées aux débats par les parties ; qu'en l'espèce, l'employeur produisait l'état des marges commerciales de la société de mai 1999 à août 2003 (production en appel n° 18) ; qu'en ne se fondant que sur les seuls calculs effectués par le salarié pour déduire tant l'existence de la créance alléguée que l'exactitude des montants réclamés au titre du client ALPHA EXPRESS depuis 2000, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6. ALORS QUE nul ne peut se constituer titre à lui-même ; qu'en se fondant exclusivement sur les calculs effectués par le salarié pour le client ALPHA EXPRESS sur l'ensemble de la période 2000-2003 pour estimer qu'il pouvait prétendre à un rappel de commissions d'un montant égal aux sommes réclamées, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société ALPRO INTERIM à payer à Monsieur X... la somme de 10.356,60 € à titre de dommages et intérêts du chef de la nullité de la clause de non-concurrence avec intérêt légal au jour de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE : « Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ; La clause de non-concurrence énoncée au contrat de travail du 25 mai 1999 ne comporte aucune contrepartie financière ; elle est nulle ; Monsieur X... se réfère aux dispositions de l'article 7-4 de la convention collective applicable pour calculer sa réclamation ; cet article exclut toute rémunération du respect d'une clause de nonconcurrence en cas de faute lourde ou grave, mais il n'en a pas été établi en l'espèce, et la société ALPRO INTERIM est mal fondée à vouloir se retrancher derrière cette exclusion ; Toutefois, il y a lieu à requalification de la demande, qui se rapporte en fait à des dommages et intérêts pour respect d'une clause de non-concurrence nulle, respect certain compte tenu de l'absence d'emploi pendant la durée de deux ans ; l'employeur avait de son côté prévu à son profit une pénalité de deux ans de salaire mensuel en cas de non respect ; la demande de Monsieur X..., au regard de cette stipulation, n'est en aucun cas excessive ; Il y a lieu, par infirmation renouvelée du jugement, de condamner la société ALPRO INTERIM au paiement de 10.356,60 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef » ;
1. ALORS QUE l'article 7.4 de la Convention collective applicable aux salariés permanents des entreprises de travail temporaire prévoit qu'aucune contrepartie financière ne peut être due pendant la durée de la clause de non-concurrence lorsque la rupture du contrat de travail est justifiée par une faute grave ou lourde ; que la censure de l'arrêt en ce qu'il a écarté tant la faute lourde que la faute grave du salarié entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif par lequel les juges ont indemnisé le salarié au regard de la prétendue nullité de la clause de non-concurrence, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
2. ALORS subsidiairement QU'est valable la clause de non-concurrence indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, tenant compte des spécificités de l'emploi du salarié et comportant l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière, peu important que cette obligation s'impose à lui en application d'une stipulation insérée au contrat de travail ou d'une disposition impérative de la convention collective applicable à la relation de travail ; qu'en l'espèce, l'article 7.4 de la Convention collective applicable prévoyait, en contrepartie du respect d'une clause de non-concurrence, le versement d'une sommes mensuelle égale à 20 % de la moyenne mensuelle de la rémunération du salarié au cours de ses trois derniers mois de présence dans l'entreprise pour la première année, et à 10 % pour la seconde année ; qu'en jugeant nulle la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail du salarié en raison de la prétendue absence de contrepartie financière, la Cour d'appel a violé par refus d'application l'article 7.4 de la convention collective applicable aux salariés permanents des entreprises de travail temporaire;
3. ALORS QUE les dommages et intérêts doivent être fixés à la mesure du préjudice subi par la victime ; qu'en se fondant en l'espèce, pour déterminer le montant des dommages et intérêts devant être alloués au salarié en réparation du préjudice résultant de la nullité de la clause de non-concurrence, sur l'évaluation qu'avait faite l'employeur de son propre préjudice si le salarié n'avait pas respecté la clause, sans aucunement évaluer le préjudice réellement subi par le salarié, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41585
Date de la décision : 09/02/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 fév. 2011, pourvoi n°09-41585


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.41585
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