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11/01/2011 | FRANCE | N°09-66843

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 janvier 2011, 09-66843


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 17 décembre 2008), que Mme X... a été engagée par la SA Grands Magasins de la Samaritaine en qualité de vendeuse le 12 juin 1990 ; qu'un protocole de rupture amiable pour motif économique a été signé entre les parties le 10 novembre 2006 ; qu'en contrepartie des versements prévus par le protocole, la salariée a déclaré "être remplie de ses droits ayant pour origine l'exécution ou la rupture de son contrat de travail avec la société" ;

qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 17 décembre 2008), que Mme X... a été engagée par la SA Grands Magasins de la Samaritaine en qualité de vendeuse le 12 juin 1990 ; qu'un protocole de rupture amiable pour motif économique a été signé entre les parties le 10 novembre 2006 ; qu'en contrepartie des versements prévus par le protocole, la salariée a déclaré "être remplie de ses droits ayant pour origine l'exécution ou la rupture de son contrat de travail avec la société" ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de prime de caisse pour la période s'écoulant entre le 1er janvier 2005 et le 31 août 2007, outre des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Les Grands Magasins de la Samaritaine fait grief au jugement de la condamner à payer à Mme X... diverses sommes au titre des primes de caisse du 1er janvier 2005 au 31 août 2007, des congés payés afférents, ainsi que des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur soulevait l'irrecevabilité des demandes de la salariée en faisant valoir qu'elle avait expressément renoncé, dans le protocole de rupture régularisé le 10 novembre 2006, à toute demande ayant pour origine l'exécution ou la rupture du contrat de travail ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en cas d'intégration d'une prime dans le salaire mensuel de base, le salarié qui a perçu le nouveau salaire mensuel ne peut solliciter, une deuxième fois, le paiement de la prime ; qu'en se bornant, pour accorder à la salariée un rappel de prime de caisse, à relever que cette prime n'était par le passé pas incluse dans sa rémunération mensuelle, que cette prime était disjointe sur le bulletin de paie, qu'il s'agissait d'un avantage acquis et que Mme X... n'avait jamais été informée de l'intégration de cette prime de caisse dans sa rémunération, le conseil de prud'hommes, qui a retenu des motifs inopérants à justifier le règlement de la prime litigieuse, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

3°/ que tout aussi subsidiairement les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour établir que la prime de caisse réclamée avait été intégrée dans le salaire de base et réglée, l'employeur produisait le procès-verbal de désaccord du 3 mai 2004 annonçant l'intégration dans le fixe mensuel brut, à compter du 1er mai 2004, de la prime de caisse pour le personnel bénéficiant de cette prime d'une part, les bulletins de paie de la salariée d'avril et de mai 2004 faisant apparaître que le salaire fixe avait été augmenté de 69,36 euros, montant non contesté de la prime de caisse d'autre part ; qu'en se bornant à relever qu'il apparaissait, au vu de la liasse des bulletins de paie versés par la salariée pour la période considérée courant à compter de janvier 2005, que la prime de caisse n'avait pas été versée, sans à aucun moment viser ni analyser, serait-ce sommairement, les bulletins des mois d'avril et mai 2004 produits par l'employeur qui révélaient l'intégration de ladite prime dans le salaire de base depuis une période antérieure à celle revendiquée par la salariée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que la rupture d'un commun accord du contrat de travail à durée indéterminée a pour seul objet de mettre fin aux relations des parties ; qu'elle ne constitue pas une transaction destinée à mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture définitive du contrat de travail, et ne peut avoir pour effet, peu important les termes de l'accord, de priver le salarié des droits nés de l'exécution du contrat de travail ; que par ce motif de pur droit, relevé d'office par la Cour après avis donné aux parties, le jugement n'encourt pas la critique de la première branche du moyen ;

Et attendu, ensuite, que le conseil de prud'hommes ayant constaté que la salariée n'avait pas été informée de l'intégration alléguée de la prime de caisse dans le salaire, ce dont il résultait que celle-ci lui était inopposable, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1153, alinéa 4, du code civil ;

Attendu que pour condamner la société Les Grands Magasins de la Samaritaine à payer à Mme X... des dommages-intérêts pour résistance abusive, le jugement retient que Mme X... percevait bien une prime de caisse antérieurement au 1er janvier 2005, que la Samaritaine qui par ailleurs dispose des services et moyens nécessaires au respect de la législation n'a pas cru devoir répondre au courrier du 10 juin 2005 de la salariée réclamant ladite prime, que la résistance de la société Samaritaine à ne pas payer cette prime de caisse est abusive, que le préjudice résultant du non-versement de cette prime sera justement réparé par l'attribution de 1 500 euros ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser pour la salariée l'existence d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement par l'employeur et causé par sa mauvaise foi, le conseil de prud'hommes a violé l'article susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il alloue à Mme X... la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts, le jugement rendu le 17 décembre 2008, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Paris, autrement composé ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille onze et signé par Mme Piquot, greffier de chambre, présente lors du prononcé.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Les Grands Magasins de la Samaritaine

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société GRANDS MAGASINS DE LA SAMARITAINE à payer à Madame X... 1.995,20 € au titre des primes de caisse du 1er janvier 2005 au 31 août 2007 et 199,52 au titre des congés payés afférents, ainsi que 1.500 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1384 du Code civil (sic) et 750 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE Madame X... percevait bien une prime de caisse antérieurement au 1er janvier 2005 ; que le règlement intérieur n'est pas fourni ; que LA SAMARITAINE, qui par ailleurs dispose des services et moyens nécessaires au respect de la législation n'a pas cru devoir répondre au courrier du 10 juin 2005 de la salariée réclamant ladite prime de caisse ; que par le passé cette prime n'était pas incluse dans sa rémunération mensuelle ; que cette prime était disjointe sur le bulletin de paie ; qu'il s'agit d'un avantage acquis ; que la résistance de LA SAMARITAINE à ne pas payer cette prime de caisse est abusive ; que Madame X... n'a jamais été informée de l'intégration de cette prime de caisse dans sa rémunération ; que le préjudice résultant du non-versement de cette prime sera justement réparé par l'attribution de 1.500 €, la salariée ne justifiant pas de l'étendue de son préjudice ; que la demanderesse verse aux débats sa liasse de bulletins de paie pour la période considérée ; qu'il apparaît que la prime de caisse n'a pas été versée ; qu'en conséquence, condamna LA SAMARITAINE à payer 1.995,20 € outre les congés payés y afférents à Madame X... au titre des primes de caisse ;

1. ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur soulevait l'irrecevabilité des demandes de la salariée en faisant valoir qu'elle avait expressément renoncé, dans le protocole de rupture régularisé le 10 novembre 2006, à toute demande ayant pour origine l'exécution ou la rupture du contrat de travail ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2. ALORS subsidiairement QU'en cas d'intégration d'une prime dans le salaire mensuel de base, le salarié qui a perçu le nouveau salaire mensuel ne peut solliciter, une deuxième fois, le paiement de la prime ; qu'en se bornant, pour accorder à la salariée un rappel de prime de caisse, à relever que cette prime n'était par le passé pas incluse dans sa rémunération mensuelle, que cette prime était disjointe sur le bulletin de paie, qu'il s'agissait d'un avantage acquis et que Madame X... n'avait jamais été informée de l'intégration de cette prime de caisse dans sa rémunération, le conseil de prud'hommes, qui a retenu des motifs inopérants à justifier le règlement de la prime litigieuse, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

3. ALORS tout aussi subsidiairement QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour établir que la prime de caisse réclamée avait été intégrée dans le salaire de base et réglée, l'employeur produisait le procès-verbal de désaccord du 3 mai 2004 annonçant l'intégration dans le fixe mensuel brut, à compter du 1er mai 2004, de la prime de caisse pour le personnel bénéficiant de cette prime d'une part, les bulletins de paie de la salariée d'avril et de mai 2004 faisant apparaître que le salaire fixe avait été augmenté de 69,36 euros, montant non contesté de la prime de caisse d'autre part ; qu'en se bornant à relever qu'il apparaissait, au vu de la liasse des bulletins de paie versés par la salariée pour la période considérée courant à compter de janvier 2005, que la prime de caisse n'avait pas été versée, sans à aucun moment viser ni analyser, serait-ce sommairement, les bulletins des mois d'avril et mai 2004 produits par l'employeur qui révélaient l'intégration de ladite prime dans le salaire de base depuis une période antérieure à celle revendiquée par la salariée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société GRANDS MAGASINS DE LA SAMARITAINE à payer à Madame X..., en sus des intérêts au taux légal sur le rappel de prime de caisse à compter de la date de réception, par la défenderesse, de la convocation devant le bureau de conciliation, 1.500 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1384 du Code civil (sic) et 750 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QUE Madame X... percevait bien une prime de caisse antérieurement au 1er janvier 2005 ; que le règlement intérieur n'est pas fourni ; que LA SAMARITAINE, qui par ailleurs dispose des services et moyens nécessaires au respect de la législation n'a pas cru devoir répondre au courrier du 10 juin 2005 de la salariée réclamant ladite prime de caisse ; que par le passé cette prime n'était pas incluse dans sa rémunération mensuelle ; que cette prime était disjointe sur le bulletin de paie ; qu'il s'agit d'un avantage acquis ; que la résistance de LA SAMARITAINE à ne pas payer cette prime de caisse est abusive ; que Madame X... n'a jamais été informée de l'intégration de cette prime de caisse dans sa rémunération ; que le préjudice résultant du non-versement de cette prime sera justement réparé par l'attribution de 1.500 €, la salariée ne justifiant pas de l'étendue de son préjudice ;

1. ALORS QUE les dommages intérêts résultant du retard dans l'exécution d'une obligation au paiement d'une somme d'argent ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, lesquels ne courent que du jour de la sommation de payer ; que le juge ne peut allouer au créancier des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires qu'à la condition de caractériser, d'une part, la mauvaise foi du débiteur, d'autre part, l'existence d'un préjudice indépendant du retard de paiement ; que le conseil de prud'hommes qui a accordé à la salariée des dommages et intérêts pour réparer le préjudice résultant du non-versement de la prime de caisse, versement auquel l'employeur a par ailleurs été condamné, et qui n'a au surplus pas caractérisé la mauvaise foi du débiteur, a violé l'article 1153 du Code civil ;

2. ALORS en tout état de cause QU'en se bornant à relever que l'employeur, qui dispose des services et moyens nécessaires au respect de la législation n'a pas cru devoir répondre au courrier du 10 juin 2005 de la salariée réclamant la prime de caisse, que cette prime, qui par le passé n'était pas incluse dans sa rémunération mensuelle, constituait un avantage acquis, que «la résistance de LA SAMARITAINE à ne pas payer cette prime de caisse est abusive» et que Madame X... n'avait jamais été informée de l'intégration de cette prime de caisse dans sa rémunération, le conseil de prud'hommes n'a en rien caractérisé la faute qui serait constitutive d'un abus et a donc violé l'article 1382 du Code civil (l'article 1384 du Code civil visé par l'arrêt résultant manifestement d'une erreur matérielle).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-66843
Date de la décision : 11/01/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 17 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jan. 2011, pourvoi n°09-66843


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.66843
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