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14/12/2010 | FRANCE | N°09-71707

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 décembre 2010, 09-71707


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2009), que M. X..., qui était gérant de la société Déco Rénov habitat (société DRH), a cédé le 13 janvier 2006 à la société JPF investissements les parts sociales qu'il détenait dans cette société et s'est interdit dans le même temps de se rétablir ou de s'intéresser directement ou indirectement dans une société de même nature ; que MM. Y... et Z..., qui étaient salariés de la société DRH, ont démissionné respectivement les 21 mai

et 29 juin 2007 et ont constitué, le 26 juin 2007, avec Mme A..., compagne de M....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2009), que M. X..., qui était gérant de la société Déco Rénov habitat (société DRH), a cédé le 13 janvier 2006 à la société JPF investissements les parts sociales qu'il détenait dans cette société et s'est interdit dans le même temps de se rétablir ou de s'intéresser directement ou indirectement dans une société de même nature ; que MM. Y... et Z..., qui étaient salariés de la société DRH, ont démissionné respectivement les 21 mai et 29 juin 2007 et ont constitué, le 26 juin 2007, avec Mme A..., compagne de M. X... et belle-mère de M. Y..., la société Fenêtres passion pour exercer la même activité de fabrication et d'installation de fenêtres ; que M. B..., également employé de la société DRH, a démissionné le 29 juin 2007 avec effet au 29 juillet 2007 pour rejoindre le 1er octobre 2007 la société Fenêtres passion ; que les sociétés DRH, JPF investissements et Diffusion varoise de menuiserie, ces deux dernières détenant des parts dans la première, invoquant tant une violation des dispositions contractuelles que celles des articles 1626 et 1382 du code civil par MM. X..., Y... et B... ainsi que par la société Fenêtres passion, les ont assignés afin d'obtenir réparation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie font grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société DRH et la société JPF investissements de leurs demandes à l'encontre de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un intéressement indirect dans une société de la nature de celle cédée, au sens de la convention du 13 janvier 2006, la création, après la cession des parts sociales, par la concubine de longue date du cédant, infirmière de profession n'ayant jamais occupé aucune fonction dans une société commerciale et ignorant tout du métier de la menuiserie, aux côtés de son gendre, ex-salarié responsable commercial de la société cédée et du technicien de cette même société, d'une entreprise absolument identique à celle dont les parts ont été cédées, ayant le même fournisseur et la même cible de clientèle que celle-ci ; qu'en jugeant le contraire, par des motifs inopérants tirés de la séparation des patrimoines des concubins, la cour d'appel a violé la loi des parties, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2°/ que le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que Mme C..., expert en écriture et graphitique près la cour d'appel a conclu son rapport en indiquant que " les mentions manuscrites de date et de lieu " 20/ 9/ 65 à Voiron " apposées au paragraphe B de la déclaration préalable d'embauche à en-tête " Fenêtres passion " et celles des sept documents censées émaner de M. Georges X... relèvent d'une même main " ; qu'en retenant que cette experte conclut que " les écrits présentent des automatismes semblables ", pour retenir que cette affirmation est insuffisante à prouver que M. X... est le rédacteur de la mention apposée sur la déclaration d'embauche, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise graphologique et a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'implication de M. X... dans la vie de la société Fenêtres passion n'est pas démontrée dès lors qu'aucune des pièces produites n'attestent de sa présence régulière dans les locaux de la société, et que la circonstance que le nom du comptable ou de l'expert comptable ne soit pas mentionné sur le bilan fiscal 2007 de la société Fenêtres passion ne peut prouver l'implication de M. X... dans la vie de la société ; qu'en l'état de ces constatations qui relèvent de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve produits et dont il résulte que M. X... n'avait pas violé la clause de non-concurrence, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie font grief à l'arrêt d'avoir dit qu'aucun fait de concurrence déloyale n'était démontré à l'encontre de M. B... et de la société Fenêtres passion envers la société DRH et d'avoir débouté cette société et les sociétés JPF investissements et Diffusion varoise de menuiserie de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, alors, selon le moyen :
1°/ que la caractérisation de la faute de concurrence déloyale n'exige pas la constatation d'un élément intentionnel ; qu'en retenant, pour rejeter l'action en concurrence déloyale dirigée contre M. B..., qu'une volonté de nuire n'est pas démontrée, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
2°/ que commet une faute constitutive de concurrence déloyale le salarié qui, ayant pris la décision de démissionner de son emploi, indique son numéro de téléphone personnel sur les devis adressés aux clients de son employeur et conserve ce même numéro de téléphone dans le cadre de ses nouvelles fonctions auprès d'une société concurrente ; qu'ayant constaté que M. B... avait indiqué son numéro de téléphone portable personnel sur des devis établis à son nom en avril, juin et juillet 2007, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en jugeant qu'aucun fait de concurrence déloyale n'était établi à son encontre et a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
3°/ que le juge ne peut méconnaître les termes du litige, tels qu'ils sont fixés par les conclusions respectives des parties ; que la société DRH faisait valoir que M. B... avait indiqué son numéro de téléphone personnel sur tous les devis qu'il avait établis à compter d'avril 2007, ce que ce dernier ne contestait pas puisqu'au contraire il prétendait avoir agi sur instruction de son employeur ; qu'en retenant que ces références ne figuraient que sur trois devis établis à son nom, en avril, juin et juillet 2007, cependant que ces trois devis avaient été produits à titre d'échantillon de l'ensemble de ceux établis par M. B... au titre de la période considérée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, tels qu'ils étaient fixés par les conclusions respectives des parties et a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
4°/ que commet une faute constitutive de concurrence déloyale le salarié qui, ayant pris la décision de démissionner de son emploi, organise le transfert de clientèle vers sa nouvelle entreprise, et à cette fin, rature sur l'agenda de l'ancien employeur où sont notés tous les rendez-vous avec les clients le nom de ces clients de façon à ce qu'ils soient totalement illisibles et non identifiables par son employeur après son départ ; que la société DRH avait produit les feuilles de l'agenda 2007 faisant apparaître qu'au cours des mois de juin et juillet 2007, pas moins de quarante-huit noms de clients mentionnés dans cet agenda avaient été raturés et étaient illisibles ; qu'en retenant, pour écarter la faute de M. B..., que M. D... avait indiqué être l'auteur de plusieurs de ces ratures pour annuler ses rendez-vous après son départ, comme le faisait valoir M. B..., sans s'expliquer sur la teneur de cette attestation, dans laquelle M. D... indique avoir seulement, à l'issue du mois qu'il a passé en mai 2007 au sein de l'entreprise DRH, " annulé trois rendez-vous que j'avais pris au magasin et par conséquent les avoir rayés du cahier tout simplement ", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a fait que répondre aux conclusions des sociétés DRH, JPF investissements et Diffusion varoise de menuiserie qui soutenaient que M. B... avait fait preuve d'une volonté de leur nuire ;
Attendu, en second lieu, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, et qui a relevé que le numéro de téléphone portable de M. B... ne figurait que sur trois devis d'avril, juin et juillet 2007 et que rien ne permettait d'établir que l'agenda 2007, sur lequel certains noms de clients avaient été raturés, était l'agenda personnel de M. B... et que celui-ci était l'auteur des ratures, a retenu, sans méconnaître les termes du litige, qu'aucune faute ne pouvait être imputée à ce dernier ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie font grief à l'arrêt d'avoir dit qu'aucun fait de concurrence déloyale n'était démontré à l'encontre de M. Y... et de la société Fenêtres passion envers la société DRH et de les avoir déboutées de l'intégralité de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un acte de concurrence déloyale le fait pour un ancien salarié de démarcher, dans le cadre de l'activité concurrente qu'il a créée, la clientèle de son ancien employeur ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que le nom de quatre vingt dix clients de la société DRH figure sur la liste de clients établie par M. Y..., ancien salarié, dans le cadre de l'activité de l'entreprise concurrente qu'il a créée postérieurement à son départ ; qu'en retenant, pour considérer que la preuve du détournement de son fichier clientèle n'est pas établie par la société DRH, que vingt et un des devis concernant ces clients sont postérieurs au départ de M. Y... de l'entreprise et que deux autres noms comportaient des adresses différentes, sans s'expliquer sur la présence de près de soixante dix clients de la société DRH, antérieurs au départ de M. Y..., sur le fichier clientèle de la société Fenêtres passion qu'il a créée après avoir quitté son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'en ne précisant pas si les clients de la société Fenêtres passion qui attestent l'avoir contactée au vu de publicités ou sur le conseil d'amis ou de relations, pour faire jouer la concurrence, sont également des clients de la société DRH pour lesquels celle-ci avait établi des devis avant le départ de M. Y..., et dans cette hypothèse, s'il s'agit de tous ces clients de la société DRH, la cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants à écarter tout détournement de clientèle de la part de M. Y..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que M. Y... n'était pas lié par une clause de non-concurrence, c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve produits que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a considéré que la preuve n'était pas rapportée d'un détournement du fichier de la clientèle de la société DRH par M. Y... et la société Fenêtres passion ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des écritures des sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie devant la cour d'appel, qu'elles aient soutenu que les clients de la société Fenêtres passion attestant l'avoir contactée au vu de publicités ou sur les conseils de relations n'auraient pas été d'anciens clients de la société DRH ; que le grief, nouveau, est mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit qu'irrecevable en sa seconde branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que les quatrième et cinquième moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour les sociétés JPF investissements, DRH et Diffusion varoise de menuiserie

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la Société DRH et la société JPF Investissements de leurs demandes à l'encontre de M. Georges X... ;
Aux motifs propres que M. X... n'est pas associé de la société Fenêtres Passion ; que la circonstance que sa concubine, Mme A..., qui est aussi la belle-mère de M. Y..., gérant de la société Fenêtres Passion, soit l'un des trois associés de cette société ne suffit pas à démontrer son implication active et habituelle dans la direction et la gestion de cette société, le concubinage entraînant une séparation juridique des patrimoines des deux concubins ; que le rapport d'expertise en écriture établi le 19 septembre 2008 à la demande de la sarl Deco Renov Habitat et de la sas JPF Investissements par Mme Chantal C..., expert en écriture et graphistique près la Cour d'appel, après examen de photocopies d'une déclaration d'embauche dactylographiée à l'exception des mentions manuscrites « 20/ 9/ 65 à Voiron » au nom de la société Fenêtres Passion (…), n'établit pas que M. X... soit le rédacteur de cette mention ; que si l'expert conclut que les écrits présentent des automatismes semblables, cette affirmation est insuffisante à prouver que M. X... est le rédacteur de la courte mention apposée sur la déclaration d'embauche, alors que des différences existent par ailleurs et que seules des photocopies ont été étudiées ; qu'en tout état de cause l'implication de M. X... dans la vie de la société n'est pas démontrée, aucune des pièces produites n'attestant de sa présence régulière dans les locaux de la société, alors qu'il est soutenu qu'il serait en charge de la gestion administrative et comptable ; que la circonstance que le nom du comptable ou de l'expert comptable ayant établi les bilans ne soit pas mentionné sur le bilan fiscal 2007 de la société Fenêtres Passion, tout comme sur les bilans de la société Deco Renov Habitat dressés par M. X..., ne peut prouver l'implication de celui-ci dans la vie de la société ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges que l'acte de cession signé le 13 janvier 2006 entre M. X..., cédant, et la SAS JPF Investissements, cessionnaire comprend la clause suivante : « « Le cédant s'interdit le droit de se rétablir ou de s'intéresser directement ou indirectement, même comme simple associé commanditaire, dans une société de la nature de celle vendue ou dans un fonds de même nature que celui exploité par la société objet des présentes, pendant une durée de trois (3) ans à compter de ce jour, dans un rayon de cent (100) kilomètres à vol d'oiseau du fonds principal « exploitait » par ladite société, sous peine de dommages-intérêts envers le cessionnaire et tous autres acquéreurs successifs, outre le droit qu'ils auraient de faire cesser la contravention ou de faire fermer l'établissement ouvert au mépris de la présente clause » ; … qu'il est constant que M. X... n'apparaît à aucun titre dans la société Fenêtres Passion ; que le seul lien existant entre M. X... et la société nouvellement créée est Mme A... dont il est établi qu'elle est sa concubine ; que toutefois la relation de concubinage ne fait pas obstacle à la séparation juridique des patrimoines, indépendamment de la possible confusion de fait ; que dès lors, la clause contractuelle qui fait référence à un intérêt même indirect du cédant ne pourra être appliquée à l'égard de M. X..., aucune preuve n'étant rapportée de ce que ce dernier aurait un intérêt financier même indirect dans le patrimoine de sa concubine, l'avis d'imposition de M. X... pour un montant de 125. 691 € étant à cet égard insuffisant à établir son intéressement financier aux résultats de l'entreprise nouvellement créée ;
ALORS D'UNE PART QUE constitue un intéressement indirect dans une société de la nature de celle cédée, au sens de la convention du 13 janvier 2006, la création, après la cession des parts sociales, par la concubine de longue date du cédant, infirmière de profession n'ayant jamais occupé aucune fonction dans une société commerciale et ignorant tout du métier de la menuiserie, aux côtés de son gendre, ex-salarié responsable commercial de la société cédée et du technicien de cette même société, d'une entreprise absolument identique à celle dont les parts ont été cédées, ayant le même fournisseur et la même cible de clientèle que celle-ci ; qu'en jugeant le contraire, par des motifs inopérants tirés de la séparation des patrimoines des concubins, la Cour d'appel a violé la loi des parties, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que Mme C..., expert en écriture et graphitique près la Cour d'appel a conclu son rapport en indiquant que « les mentions manuscrites de date et de lieu « 20/ 9/ 65 à VOIRON » apposées au paragraphe B de la déclaration préalable d'embauche à en-tête « Fenêtres Passion » et celles des sept documents censées émaner de M. Georges X... relèvent d'une même main » ; qu'en retenant que cette experte conclut que « les écrits présentent des automatismes semblables », pour retenir que cette affirmation est insuffisante à prouver que M. X... est le rédacteur de la mention apposée sur la déclaration d'embauche, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise graphologique et a violé l'article 1134 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit qu'aucun fait de concurrence déloyale n'est démontré à l'encontre de M. B... et de la société Fenêtres Passion envers la Sarl Deco Renov Habitat et d'avoir débouté la Sarl Deco Renov Habitat, la Sas JPF Investissements et la SA Diffusion Varoise de Menuiserie de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
Aux motifs que la société Deco Renov Habitat reproche à M. B... d'avoir mentionné son numéro de téléphone portable sur les devis remis aux clients à partir d'avril 2007 ; que cependant, ces références ne figurent que sur quelques uns des nombreux devis établis à son nom, un en avril, un en juin et un en juillet 2007 ; qu'ainsi, en l'absence de pratique systématique démontrant une volonté de nuire, le détournement de clientèle reproché à M. B... n'est pas établi ; que la société Deco Renov Habitat ne peut reprocher à M. B... d'avoir raturé certains noms de clients figurant sur un agenda 2007 à partir de juin 2007 dans le but de lui dissimuler le nom des clients alors qu'il n'est pas démontré, d'une part, que cet agenda dont seuls quelques feuillets photocopiés sont versés aux débats, était personnel à M. B...- les mentions y figurant telles que « EVE » ou « visite médicale Alex » tendant à établir l'inverse, d'autre part, que Monsieur B... soit l'auteur de ces ratures, le procès-verbal d'huissier les constatant ayant été dressé le 13 décembre 2007 plus de 4 mois après le départ de M. B... de l'entreprise, alors que M. D... a indiqué être l'auteur de plusieurs de ces ratures pour annuler ses rendez-vous lors de son départ ;
ALORS D'UNE PART QUE la caractérisation de la faute de concurrence déloyale n'exige pas la constatation d'un élément intentionnel ; qu'en retenant, pour rejeter l'action en concurrence déloyale dirigée contre M. B..., qu'une volonté de nuire n'est pas démontrée, la Cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE commet une faute constitutive de concurrence déloyale le salarié qui, ayant pris la décision de démissionner de son emploi, indique son numéro de téléphone personnel sur les devis adressés aux clients de son employeur et conserve ce même numéro de téléphone dans le cadre de ses nouvelles fonctions auprès d'une société concurrente ; qu'ayant constaté que M. B... avait indiqué son numéro de téléphone portable personnel sur des devis établis à son nom en avril, juin et juillet 2007, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en jugeant qu'aucun fait de concurrence déloyale n'était établi à son encontre et a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
ALORS ENSUITE QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige, tels qu'ils sont fixés par les conclusions respectives des parties ; que la société Deco Renov Habitat faisait valoir que M. B... avait indiqué son numéro de téléphone personnel sur tous les devis qu'il avait établis à compter d'avril 2007, ce que ce dernier ne contestait pas puisqu'au contraire il prétendait avoir agi sur instruction de son employeur (ses conclusions d'appel, p. 8) ; qu'en retenant que ces références ne figuraient que sur trois devis établis à son nom, en avril, juin et juillet 2007, cependant que ces trois devis avaient été produits à titre d'échantillon de l'ensemble de ceux établis par M. B... au titre de la période considérée, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, tels qu'ils étaient fixés par les conclusions respectives des parties et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE commet une faute constitutive de concurrence déloyale le salarié qui, ayant pris la décision de démissionner de son emploi, organise le transfert de clientèle vers sa nouvelle entreprise, et à cette fin, rature sur l'agenda de l'ancien employeur où sont notés tous les rendez-vous avec les clients le nom de ces clients de façon à ce qu'ils soient totalement illisibles et non identifiables par son employeur après son départ ; que la société Deco Renov Habitat avait produit les feuilles de l'agenda 2007 faisant apparaître qu'au cours des mois de juin et juillet 2007, pas moins de 48 noms de clients mentionnés dans cet agenda avaient été raturés et étaient illisibles ; qu'en retenant, pour écarter la faute de M. B..., que M. D... avait indiqué être l'auteur de plusieurs de ces ratures pour annuler ses rendez-vous après son départ, comme le faisait valoir M. B..., sans s'expliquer sur la teneur de cette attestation, dans laquelle M. D... indique avoir seulement, à l'issue du mois qu'il a passé en mai 2007 au sein de l'entreprise Deco Renov Habitat, « annulé 3 rendez-vous que j'avais pris au magasin et par conséquent les avoir rayés du cahier tout simplement », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit qu'aucun fait de concurrence déloyale n'est démontré à l'encontre de M. Y... et de la société Fenêtres Passion envers la Sarl Deco Renov Habitat et d'avoir débouté la Sarl Deco Renov Habitat, la Sas JPF Investissements et la SA Diffusion Varoise de Menuiserie de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
Aux motifs que pour démontrer le détournement de sa clientèle par M. Y..., la société Deco Renov Habitat verse aux débats une liste de noms de « prospects » envoyée par courriel par « Fenêtres Passion » à « Moi Laurent Y... » arrivée par erreur le 24 novembre 2007 sur la boite de Deco Renov Habitat, intitulée « Etat liste client » comportant 206 noms et adresses référencés ; que la société Deco Renov Habitat qui a ouvert de courriel qui ne lui était pas destiné fait valoir avoir établi des devis pour 90 de ces prospects en 2006 et 2007 avant la création de la société concurrente ; que cependant cette assertion est erronée, 21 des devis qu'elle verse aux débats étant postérieurs tant aux démissions de M. Y... et de M. B... qu'à la création de la société Fenêtres Passion et pour au moins deux autres, comportent des adresses différentes de celles notées sur la liste des clients de Fenêtres Passion ; que la société Deco Renov Habitat ne rapporte pas la preuve du détournement de son fichier clientèle par ses anciens salariés, alors au demeurant que beaucoup de clients figurant sur cette liste des clients de la société Fenêtres Passion attestent l'avoir contactée au vu de publicités ou sur le conseil d'amis ou de relations, pour faire jouer la concurrence ;
ALORS D'UNE PART QUE constitue un acte de concurrence déloyale le fait pour un ancien salarié de démarcher, dans le cadre de l'activité concurrente qu'il a créée, la clientèle de son ancien employeur ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que le nom de 90 clients de la société Deco Renov Habitat figure sur la liste de clients établie par M. Y..., ancien salarié, dans le cadre de l'activité de l'entreprise concurrente qu'il a créée postérieurement à son départ ; qu'en retenant, pour considérer que la preuve du détournement de son fichier clientèle n'est pas établie par la société Deco Renov Habitat, que 21 des devis concernant ces clients sont postérieurs au départ de M. Y... de l'entreprise et que deux autres noms comportaient des adresses différentes, sans s'expliquer sur la présence de près de 70 clients de la société Deco Renov Habitat, antérieurs au départ de M. Y..., sur le fichier clientèle de la société Fenêtres Passion qu'il a créée après avoir quitté son employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QU'en ne précisant pas si les clients de la société Fenêtres Passion qui attestent l'avoir contactée au vu de publicités ou sur le conseil d'amis ou de relations, pour faire jouer la concurrence, sont également des clients de la société Deco Renov Habitat pour lesquels celle-ci avait établi des devis avant le départ de M. Y..., et dans cette hypothèse, s'il s'agit de tous ces clients de la société Deco Renov Habitat, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants à écarter tout détournement de clientèle de la part de M. Y..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'aucun fait de concurrence déloyale n'est démontré à l'encontre de M. B..., de M. Y... et de la société Fenêtres Passion envers la Sarl Deco Renov Habitat et d'avoir débouté la Sarl Deco Renov Habitat, la Sas JPF Investissements et la SA Diffusion Varoise de Menuiserie de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
Aux motifs que la clientèle est libre et pour démontrer la concurrence déloyale dont elle dit être victime de la part de la société Fenêtres Passion, la société Deco Renov Habitat doit démontrer non seulement le départ de clients vers le concurrent mais aussi caractériser les manoeuvres illicites ou déloyales destinées à détourner cette clientèle ; qu'il ne peut être reproché à la société Fenêtres Passion d'avoir recruté les salariés de la société Deco Renov Habitat alors que la création de cette société par deux anciens salariés n'est pas en elle-même un acte de concurrence déloyale ; que seul M. B... après sa démission de la société Deco Renov Habitat le 29 juillet 2007 a été embauché par la société le 1er octobre 2007 en tant que technico commercial ; qu'il est constant cependant qu'après son départ, la société Deco Renov Habitat a poursuivi son activité, à l'aide d'une équipe de technico-commerciaux et de poseur mis en place ; qu'il n'est pas démontré qu'elle ait été désorganisée à la suite de ce départ, alors que deux autres technico-commerciaux y travaillant déjà comme le démontrent les devis produits et connaissant l'entreprise, ont poursuivi leur activité au sein de cette société ; que la pratique de prix « d'ouverture » et de remises « exceptionnelles lancement magasin » par une société démarrant son activité relève de la liberté du commerce ; qu'elle ne constitue pas à elle seule un acte de concurrence déloyale alors qu'il n'est pas établi que les prix ainsi pratiqués soient abusivement bas par rapport au prix de revient, ni que cette pratique destinée à faire connaître une nouvelle entreprise ait pour objet d'éliminer les sociétés concurrentes ; que la remise de 50 %, reprochée à la société Fenêtres Passion, portant sur les seules options et non sur l'ensemble du stock de cette société, ne peut constituer une pratique concurrentielle abusive ; que ces mesures ne s'analysent pas en un acte de détournement de clientèle mais en un acte de gestion de cette société nouvellement créée ; que la réalisation par la société Fenêtres Passion d'une campagne publicitaire se déroulant sur le même type de supports que ceux choisis par la société Deco Renov Habitat pour sa publicité, effectuée aux mêmes périodes, n'est pas de nature à engendrer une confusion dans l'esprit des clients alors que les deux sociétés ont des adresses et des noms très différents, et que la conception publicitaire est différente ; que le fait pour deux entreprises ayant la même activité, de recourir aux mêmes fournisseurs et d'utiliser le même logiciel pour l'édition des devis et factures ne démontre pas plus la volonté de créer une confusion entre les deux sociétés, la société Fenêtres Passion ayant au contraire intérêt à se démarquer de sa concurrente ; que la campagne de dénigrement reprochée à la société Fenêtres Passion, invoquée par la société Deco Renov Habitat, n'est pas démontrée ; que les actes de concurrence déloyale par détournement de clientèle ou désorganisation de l'entreprise n'étant pas démontrés, la société Deco Renov Habitat et son associée cessionnaire la société JPF Investissements seront déboutées de l'intégralité de leurs demandes ;
ALORS QUE le fait pour une société nouvelle composée de la concubine de l'ancien dirigeant d'une société concurrente et des trois anciens salariés de cette société, dont ils constituaient immédiatement avant l'équipe technicocommerciale et qui en ont détourné la liste des clients, de vendre les mêmes produits, d'utiliser le même logiciel pour l'édition des devis et factures, de réaliser une campagne publicitaire sur les mêmes supports que cette société concurrente et aux mêmes périodes en proposant des prix dits « d'ouverture » et des remises exceptionnelles tend à établir une confusion dans l'esprit de la clientèle entre ces deux sociétés et constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en se bornant à retenir que la pratique de prix d'ouverture et de remises par la société Fenêtres Passion ne constitue pas à elle seule un acte de concurrence déloyale, et à écarter les uns après les autres les divers éléments invoqués par la société Deco Renov Habitat à l'appui de son action en concurrence déloyale contre la société Fenêtres Passion, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la conjonction de tous les comportements critiqués et similitudes entretenues par celle-ci ne caractérisait pas, comme l'avait retenu le premier juge, un comportement déloyal dans la concurrence, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Deco Renov Habitat à verser à la société Fenêtres Passion une somme de 6. 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
Aux motifs que les commentaires peu élogieux rapportés par des clients sur la moralité des dirigeants de la société Fenêtres Passion et l'avenir obéré de cette société constituent des actes de dénigrement dépassant le cadre d'une saine polémique commerciale ; que la réalité de ces propos tenus en septembre, octobre et novembre 2008 est attestée par Mme E..., Monsieur F..., Monsieur G..., Madame H..., Madame I...dans les formes prescrites par l'article 202 du Code de procédure civile ; que les écrits produits aux débats par la société Deco Renov Habitat ne satisfaisant pas aux conditions de l'article 202 du Code précité, et établis en janvier 2009, hormis deux rédigés dans des termes similaires datés de novembre 2008, ne contredisent pas utilement les témoignages précités ; que la société Fenêtres Passion a subi un préjudice moral qui sera réparé par la condamnation de la société Deco Renov Habitat à lui verser une somme de 6. 000 € ;
ALORS QUE le juge ne peut rejeter une attestation comme non conforme aux exigences de l'article 202 du Code de procédure civile sans préciser en quoi l'irrégularité constatée constituait l'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public faisant grief à la partie qui l'attaque ; qu'en rejetant les attestations produites par la société Deco Renov Habitat pour contester les propos qui lui étaient imputés par la société Fenêtres Passion, au motif qu'elles ne satisfont pas aux conditions de l'article 202 du Code de procédure civile, la Cour d'appel a violé ce texte.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-71707
Date de la décision : 14/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 déc. 2010, pourvoi n°09-71707


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Gaschignard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.71707
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