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17/11/2010 | FRANCE | N°09-66755

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 novembre 2010, 09-66755


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L.1232-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la caisse d'épargne des pays lorrains le 1er avril 1993 en qualité d'organisateur-comptable au sein de la direction financière ; que son contrat de travail stipulait que son lieu de travail était "au siège de (l')entreprise", situé à l'époque à Villers-lès-Nancy ; que le salarié a obtenu un co

ngé pour convenances personnelles du 1er septembre 2003 au 31 août 2005 ; qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L.1232-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la caisse d'épargne des pays lorrains le 1er avril 1993 en qualité d'organisateur-comptable au sein de la direction financière ; que son contrat de travail stipulait que son lieu de travail était "au siège de (l')entreprise", situé à l'époque à Villers-lès-Nancy ; que le salarié a obtenu un congé pour convenances personnelles du 1er septembre 2003 au 31 août 2005 ; que dans l'intervalle, la fusion de la caisse d'épargne des pays lorrains avec la caisse d'épargne de Lorraine-Nord a abouti à la création de la caisse d'épargne de Lorraine (la caisse) dont le siège est à Metz ; que la caisse ayant notifié à M. X... par lettre du 8 août 2005 sa nouvelle affectation à Metz, le salarié l'a refusée par lettre du 23 août 2005 et n'est pas revenu travailler à compter du 1er septembre 2005 ; que l'employeur ayant licencié M. X... pour faute grave par lettre du 23 janvier 2006, ce dernier a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour accueillir ces demandes, l'arrêt énonce qu'aucune clause de mobilité n'a été convenue entre les parties, que la nouvelle localisation du travail de M. X..., Metz, se situe à cinquante-six kilomètres, dans un secteur géographique différent de son emploi originel, qu'il s'ensuit que l'employeur a imposé une modification du contrat de travail à M. X... qui était en droit de la refuser, comme il l'a fait par sa lettre du 23 août 2005 ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi le changement de localisation du lieu de travail entre les communes de Villers-lès-Nancy et Metz, distantes de cinquante-six kilomètres, serait intervenu dans un secteur géographique différent, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'épargne de Lorraine
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Caisse d'Epargne de Lorraine à verser à Monsieur X... une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de préavis et les congés payés afférents, une indemnité de licenciement et une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est ainsi motivée :

"Les faits qui vous sont reprochés et qui vous ont été exposés lors de l'entretien précité sont votre absence injustifiée depuis le 1er septembre 2005, date correspondant à celle de la reprise de votre travail à l'issue de votre congé sans solde pour convenance personnelle. Cette situation n'est pas pour nous étonner car vous vous étiez engagé dans un projet que vous avez mené à son terme. Ainsi que vous l'avez indiqué lors de l'entretien préalable, vous êtes désormais fonctionnaire et parfaitement satisfait de votre sort. Bien évidemment vous n'aviez aucune intention de retour dans l'entreprise puisque vous avez obtenu - grâce notamment à l'autorisation d'absence de deux ans que nous vous avions accordée - la formation et la titularisation que vous recherchiez en tant qu'enseignant, statut incompatible avec toute autre activité professionnelle dans le secteur privé. Nous considérons que ces faits constituent une faute grave qui rend impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise." (Sic) ;
que la faute grave est celle qui ne permet pas le maintien du salarié dans l'entreprise ; que c'est à l'employeur de démontrer la faute grave du salarié ; qu'en l'espèce, le fait que Monsieur X... n'ait pas repris son travail à compter du 1er septembre 2005 n'est pas contesté ; que Monsieur X... affirme que la nouvelle affectation qui lui a été proposée ne respecte pas les dispositions de l'article L 3142-95 du Code du Travail aussi bien en ce qui concerne les fonctions qui sont inférieures à celles qu'il occupait avant son départ que du point de vue du lieu de travail (Metz au lieu de Nancy) ; qu'il ajoute que sa titularisation dans la fonction publique ne faisait pas obstacle à ce qu'il occupe un poste à la Caisse d'Epargne de Lorraine ; que l'employeur fait valoir que la notification de la nouvelle classification de Monsieur X... n'a suscité aucune réaction de sa part, que le réemploi du salarié, devenu fonctionnaire, était interdit et qu'en tout état de cause l'affectation de Monsieur X... à Metz n'est que l'application de la clause du contrat de travail selon laquelle le salarié est affecté au siège de l'entreprise ;
qu'elle ajoute que la qualification résultant de la nouvelle grille conventionnelle n'est pas inférieure à la précédente ; qu'elle observe qu'en tout état de cause Monsieur X... n'a subi aucun préjudice puisqu'il est fonctionnaire de catégorie A, ce choix expliquant à lui seul son refus de réintégrer la Caisse d'Epargne ; que le principe du droit du salarié à retrouver son emploi n'est pas contesté ; que bien que la Caisse d'Epargne de Lorraine se réfère à l'article L 122-32-16 ancien du Code du Travail (article L 3142-84 nouveau) relatif au congé pour création d'entreprise, qui ne s'applique pas au cas présent, elle ne remet pas en cause la garantie du maintien du poste de travail ou d'un poste similaire ; que l'article L 3142-95 du Code du Travail relatif au congé sabbatique, invoqué par Monsieur X..., est le texte applicable ;
que si la durée d'un tel congé est limitée à onze mois par le Code du Travail, le statut du personnel des caisses d'épargne, texte plus favorable aux salariés, a pu légalement augmenter cette durée et la porter à deux ans maximum ; que l'article 64 du statut du personnel des caisses d'épargne prévoit en effet qu'«il peut être accordé des congés sans traitement pour convenances personnelles sur la demande de l'intéressé. Ces congés ne peuvent être inférieurs à un an ni supérieurs à deux ans. A l'expiration de ce délai, le salarié doit réintégrer son poste ou est considéré comme démissionnaire.
Dans ce dernier cas, il en est averti quinze jours à l'avance par lettre recommandée, par l'employeur» ; que les dispositions combinées de ces textes prévoient que le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente ; qu'en tout état de cause, quelles que soient les dispositions applicables, le contrat de travail étant suspendu pendant le congé pour convenances personnelles de l'article 64 du statut du personnel précité, le contrat ne peut être modifié au retour du salarié de sorte que le principe de l'immutabilité du contrat de travail s'applique nécessairement ;
qu'il s'ensuit que le salarié est en droit de refuser un poste impliquant une modification de son contrat de travail, que cette modification affecte les fonctions ou le lieu de travail ; (…) que du point de vue des fonctions exercées et de la qualification, la modification du contrat de travail alléguée ne peut donc être retenue ; qu'en ce qui concerne le lieu de travail, s'il est constant que le lieu du travail prévu dans la description de poste annexée à la lettre d'engagement du 15 mars 1993 contresignée par le salarié mais également dans cette lettre elle-même était le siège de l'entreprise, il est incontestable que ce siège était fixé à Villers-les-Nancy, où s'est déroulée toute la carrière de Monsieur X... ;
qu'aucune clause de mobilité n'a été convenue entre les parties ; que la nouvelle localisation du travail de Monsieur X..., Metz, se situe à 56 kilomètres, dans un secteur géographique différent de son emploi originel ; qu'il s'ensuit que l'employeur a imposé une modification du contrat de travail à Monsieur X... qui était en droit de la refuser, comme il l'a fait par sa lettre du 23 août 2005 ; que le fait qu'il travaille désormais à Verdun ne peut être considéré comme une renonciation à se prévaloir de la stabilité de son lieu de travail dans le cadre de son contrat de travail le liant à la Caisse d'Epargne de Lorraine ;
quant à la qualité de fonctionnaire titulaire de Monsieur X..., elle ne dispensait pas la Caisse d'Epargne de Lorraine de respecter les dispositions précitées de l'article L 3142-95 du Code du Travail dans la mesure où, comme il l'a affirmé à plusieurs reprises, Monsieur X... se réservait de choisir entre son poste d'enseignant et le poste que la Caisse d'Epargne devait lui proposer, à charge pour l'intéressé de démissionner de son emploi public si nécessaire ; que dès lors, la Caisse d'Epargne de Lorraine ne pouvait reprocher à Monsieur X... l'abandon de son poste ; que le licenciement est, par suite, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
1. ALORS QUE le contrat de travail prévoyait que le lieu de travail de Monsieur X... était fixé au siège de l'entreprise ; qu'ainsi, le changement de lieu de travail résultant du déplacement du siège social ne constituait pas une modification du contrat de travail, même s'il n'intervenait pas dans le même secteur géographique ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2. ALORS subsidiairement QUE le changement de lieu de travail intervenant dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ; que pour apprécier si le nouveau lieu de travail est dans le même secteur géographique que l'ancien, le juge doit s'attacher non seulement à la distance séparant l'ancien du nouveau lieu de travail mais également aux moyens de desserte de chacun de ces lieux ; qu'en se bornant, pour dire que le nouveau lieu de travail était dans un secteur géographique différent du précédent, à relever qu'ils étaient séparés de 56 kms, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1232-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-66755
Date de la décision : 17/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 27 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 nov. 2010, pourvoi n°09-66755


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.66755
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