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16/11/2010 | FRANCE | N°09-69056

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 novembre 2010, 09-69056


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2009) statuant en référé, que la société Heart Of La Défense (la société Hold) a acquis le 10 juillet 2007, par l'intermédiaire d'une société civile immobilière, l'ensemble immobilier appelé "Coeur Défense", lequel a été donné en location à divers locataires parmi lesquels les sociétés Air liquide, Wyeth Phamaceuticals France et HSBC France ; que pour les besoins de cette acquisition, la société Hold a contracté auprès d

e la société Lehman Brothers Bankhaus Aktiengesellschaft (le prêteur) deux prêts, g...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2009) statuant en référé, que la société Heart Of La Défense (la société Hold) a acquis le 10 juillet 2007, par l'intermédiaire d'une société civile immobilière, l'ensemble immobilier appelé "Coeur Défense", lequel a été donné en location à divers locataires parmi lesquels les sociétés Air liquide, Wyeth Phamaceuticals France et HSBC France ; que pour les besoins de cette acquisition, la société Hold a contracté auprès de la société Lehman Brothers Bankhaus Aktiengesellschaft (le prêteur) deux prêts, garantis notamment par une cession de créances professionnelles portant sur l'ensemble des créances au titre des baux existants ou futurs conclus par la société Hold ; que les prêts portant intérêts à taux variable, la société Hold a conclu deux contrats de couverture de taux avec la société Lehman Brothers international (la contrepartie), elle-même garantie par la société Lehman Brothers Holdings INC (le garant) ; qu'en août 2007, le prêteur a mis en place une opération de titrisation conjointement avec la banque Goldman Sachs International Bank ; que dans le cadre de cette opération, a été constitué le 10 août 2007 le fonds commun de titrisation Windermere XII (le FCT), la société Eurotitrisation intervenant en qualité de société de gestion ; qu'à la suite de l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de la contrepartie et du garant, les contrats de couverture n'étaient plus conformes aux critères de notation, constituant un cas de défaut ; que les négociations menées avec la société Eurotitrisation n'ayant pu aboutir, la société Hold a demandé et obtenu, le 3 novembre 2008, du tribunal de commerce, l'ouverture à son profit d'une procédure de sauvegarde, M. Y... étant désigné administrateur judiciaire ; qu'après avoir formé tierce opposition à cette décision, le FCT a procédé, le 7 novembre 2008, à la notification des cessions de créances professionnelles ; que la société Hold a alors engagé une procédure tendant à voir consigner l'ensemble des montants qui lui sont dus par les locataires et à être autorisée à employer ces montants pour effectuer un certain nombre de règlements destinés à permettre le fonctionnement de l'immeuble ;
Attendu que la société Eurotitrisation, agissant en qualité de société de gestion du FCT, fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ordonnance de référé rendue le 16 décembre 2008 ayant nommé M. Y..., séquestre des sommes qui seront payées par les locataires de l'immeuble Coeur de Défense, intervenants volontaires à l'instance de référé, à compter de la signification de l'ordonnance, dit que ces derniers devront s'acquitter entre ses mains de leurs obligations envers la société Hold, dit que M. Y... devra déposer les sommes ainsi reçues sur un compte ouvert spécialement à cet effet et générateur d'intérêts, dit qu'il sera autorisé à prélever sur ces sommes celles nécessaires pour le bon fonctionnement de l'immeuble, dit qu'il sera mis fin à sa mission lorsqu'une décision de justice réglant le différend entre la société Hold et la société Eurotitrisation agissant en qualité de société de gestion du FCT sera devenue définitive et fait interdiction aux locataires qui ne sont pas intervenus à l'instance de payer toute somme pour s'acquitter de leurs obligations nées du contrat de bail dans l'attente d'une décision de justice qui leur sera opposable, alors, selon le moyen :
1°/ que même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée, qu'elle prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau et que, étant sortie du patrimoine du cédant, son paiement n'est pas affecté par l'ouverture de la procédure collective de celui-ci postérieurement à cette date ; que si la cession de créance faite à titre de garantie, qui implique la restitution du droit cédé au cas où la créance garantie viendrait à être payée, n'opère qu'un transfert provisoire de la titularité de ce droit, l'éventualité de la restitution de la créance au cédant reste subordonnée à l'épuisement de l'objet de la garantie consentie ; que, tant que les prêts garantis par la cession de créances ne sont pas remboursés, le cessionnaire est donc investi de la propriété des créances de loyer cédées à titre de garantie quelle que soit la date de leur exigibilité, sans que sa propriété soit affectée par l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, les créances étant sorties de son patrimoine ; qu'en ordonnant le séquestre des créances de loyers au seul motif d'un différend élevé par le cédant sur les effets de la cession et d'une contestation du droit du cessionnaire de se prévaloir de la propriété des créances de loyers cédées, alors qu'il n'était pas justifié d'un litige sérieux sur la propriété des créances dont la cession à titre de garantie n'était pas remise en cause, la cour d'appel a violé les articles 1961 du code civil, L. 313-24 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en l'absence de litige sérieux sur la propriété des créances cédées à titre de garantie que ne peut affecter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, le différend élevé par celui-ci sur les effets de la cession en raison de l'ouverture de la procédure de sauvegarde n'est pas de nature à justifier la mesure de séquestre sollicitée ; qu'en l'ordonnant néanmoins, la cour d'appel a violé l'article 872 du code de procédure civile ;
3°/ que, en l'état de la propriété du cessionnaire sur les créances cédées à titre de garantie que ne peut affecter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, le dommage imminent tenant à la nécessité pour celui-ci de pouvoir s'acquitter des dépenses d'entretien de l'immeuble et au risque de disparition des fonds s'ils étaient remis au cessionnaire ne peut justifier une mesure de séquestre ordonnée dans le seul intérêt du cédant étranger au droit de propriété du cessionnaire auquel elle porte atteinte ; qu'en l'ordonnant néanmoins, la cour d'appel a violé l'article 873 du code de procédure civile, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4°/ que le juge des référés ne peut, au motif d'une contestation sérieuse sur le droit pour le cessionnaire de se prévaloir de la propriété des créances de loyers cédées à titre de garantie, ordonner le séquestre des sommes à verser par les locataires tout en autorisant le séquestre à prélever sur ces sommes celles nécessaires pour le bon fonctionnement de l'immeuble ; qu'une telle mesure, qui conduit à la dissipation des sommes ainsi prélevées, n'est pas conservatoire et prive le cessionnaire de la propriété de ces fonds si son droit de propriété sur les créances cédées devait être reconnu aux termes de la décision de justice à intervenir réglant le différend l'opposant au cédant ; qu'en ordonnant de telles mesures préjudiciables aux droits du cessionnaire, la cour d'appel a violé les articles 872 et 873 du code de procédure civile, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, en premier lieu, que loin de se borner à relever l'existence d'un différend sur le droit du cessionnaire de se prévaloir de la propriété des créances de loyers cédées, l'arrêt retient que la notification des cessions a été étendue au paiement des loyers et des charges récupérables et taxes, quand les obligations de sécurité de cet immeuble, classé comme recevant du public de première catégorie et étant de grande hauteur, engendrent des coûts d'exploitation importants auxquels il est impératif de faire face avec les revenus générés par les baux incluant le règlement des charges récupérables à bonne date ; que par ce seul motif, non critiqué, la cour d'appel a justifié la mesure de séquestre ordonnée ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant relevé qu'à défaut de règlement des charges, le risque était, tant pour la société Hold que pour les locataires, de se trouver confrontés à une décision de fermeture pour des raisons de sécurité, de sorte que l'intérêt commun à toutes les parties était de préserver la valeur du bien immobilier, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les exigences de l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a fait ressortir que la mesure de séquestre avait pour objet de prévenir un dommage imminent ;
Attendu, enfin, qu'après avoir relevé que la notification de la cession avait porté également sur les charges récupérables et souligné le risque de disparition des fonds, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que, par une décision motivée, la cour d'appel a autorisé le règlement des dépenses nécessaires au fonctionnement de l'immeuble par prélèvement sur les sommes séquestrées ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eurotitrisation aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Eurotitrisation
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance de référé rendue le 16 décembre 2008 ayant nommé Maître Christophe Y..., indépendamment de sa mission d'administrateur de la société HEART OF LA DEFENSE, séquestre des sommes qui seront payées par les locataires de l'immeuble Coeur de Défense, intervenants volontaires à l'instance de référé, à compter de la signification de l'ordonnance ; dit que ces derniers devront s'acquitter entre ses mains de leurs obligations envers la société HEART OF LA DEFENSE ; dit que Maître Y... devra déposer les sommes ainsi reçues sur un compte ouvert spécialement à cet effet et générateur d'intérêts ; dit qu'il sera autorisé à prélever sur ces sommes celles nécessaires pour le bon fonctionnement de l'immeuble ; dit qu'il sera mis fin à sa mission lorsqu'une décision de justice réglant le différend entre la société HEART OF LA DEFENSE et la société EUROTITRISATION agissant en qualité de société de gestion du fonds commun de titrisation WINDERMERE XII sera devenue définitive ; et fait interdiction aux locataires qui ne sont pas intervenus à l'instance de payer toute somme pour s'acquitter de leurs obligations nées du contrat de bail dans l'attente d'une décision de justice qui leur sera opposable ;
Aux motifs que « le contrat-cadre du 10 juillet 2007 rappelle en page 3 que « le cédant a accepté de céder à titre de garantie aux cessionnaires, selon les modalités des articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier les créances visées ci-après » ; que les trois premiers paragraphes de l'article 2 intitulé « cession de créances professionnelles à titre de garantie » sont rédigés dans les termes identiques suivants : « A la sûreté et en garantie de l'exécution par le cédant des obligations garanties, le cédant cède à titre de garantie aux cessionnaires, dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier et selon les modalités du présent contrat (…) » ; que l'article 2.1 vise, parmi les créances cédées, « (a) toutes les créances présentes et futures dont bénéficie ou est susceptible de bénéficier le cédant en vertu de tout contrat de bail (les « créances de bail ») ; que l'acte de cession de créances professionnelles ou bordereau Dailly signé le même jour, complétant le contrat-cadre, désigne le cédant sous l'appellation « cédant à titre de garantie », précise au titre du « transfert de l'acte de cession » que « le présent acte de cession de créances professionnelles à titre de garantie est stipulé à ordre » et rappelle dans l'en-tête qu'il est soumis aux dispositions des articles L. 313-23 à 313-24 du Code monétaire et financier ; que, selon la société EUROTITRISATION, la cession de créance à titre de garantie ne signifie pas qu'il s'agit d'une sûreté et, étant réalisée par la voie du bordereau Dailly, elle constitue une cession en pleine propriété conformément à l'article L. 313-24, alinéa 1er, du Code monétaire et financier qui dispose que « même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au propriétaire la propriété de la créance cédée » ; que, dès lors qu'aux termes de l'article L. 313-27 du même code, « la cession (…) prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances (…) », la propriété de l'intégralité des créances de loyers a été transférée à la date du 10 juillet 2007 au FCT et la date d'exigibilité des créances cédées, avant ou après l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, est sans incidence sur les droits du cessionnaire, la notification de la cession Dailly n'étant pas une formalité de constitution contribuant à donner plein effet à la cession à titre de garantie ; que, selon la société HOLD et Maître Y... agissant en sa qualité d'administrateur judiciaire, la cession à titre de garantie a un caractère accessoire à l'obligation qui est garantie, elle remplit les finalités d'une sûreté par opposition à celles d'un véritable transfert de propriété, que l'utilisation du terme « propriété » dans le Code monétaire et financier a contribué à créer une confusion ; que, cependant, la cession en garantie n'entraîne qu'un transfert subordonné de la propriété ; qu'en conséquence, la qualité de propriétaire du FCT est entièrement assujettie à sa qualité de créancier et sa propriété dépend de la reconnaissance, de la consistance et de la persistance de sa créance, sa propriété étant automatiquement perdue avec l'extinction de la créance garantie ; qu'ainsi, s'agissant d'une cession ayant une fonction de garantie, l'efficacité des cessions Dailly de créances futures nées postérieurement au jugement d'ouverture est paralysée ; que la créance invoquée étant antérieure à ce jugement, les dispositions des articles L. 622-7, L. 622-21 et L. 622-30 du Code de commerce relatives à l'arrêt des poursuites individuelles s'appliquent ; que Maître Y... ajoute que, à supposer que l'ouverture de la procédure de sauvegarde ne suspende pas les poursuite et que la règle des contrats en cours ne s'applique pas, la société EUROTITRISATION qui revendique la propriété de créances cédées qui se trouvent en possession de la société HOLD devra agir selon la procédure de revendication prévue aux articles L. 624-9 et suivants du Code de commerce ; qu''il est ainsi établi qu'il existe entre la société EUROTITRISATION en sa qualité de société de gestion du FCT, d'une part, et la société HOLD et Maître Y... ès-qualité, d'autre part, un différend autour des effets de la cession de créances de bail consentie par la société HOLD « à la sûreté et en garantie de l'exécution par le cédant des obligations garanties » qui ne peut être tranché que par le juge du fond, qui est désormais saisi du litige, ce dont il résulte qu'il existe une contestation sérieuse sur le droit pour la société EUROTITRISATION de se prévaloir au nom du FCT de la propriété des créances de bail, observation faite, d'une part, qu'elle a procédé entre les mains de Maître Z... ès-qualité une « déclaration de créance privilégiée » au passif de la société HOLD au titre du solde des prêts – soit 1.638.950.000 € en principal outre les intérêts – soit la somme de 25.436.321, 89 € déjà exigible à la date du 9 janvier 2009 – et, d'autre part, qu'elle a étendu la notification des cessions au paiement non seulement des loyers mais également des charges récupérables et taxes, lesquels ont pourtant vocation à compenser des dépenses ; qu'en outre, l'immeuble dont s'agit est classé comme recevant du public de 1re catégorie et immeuble de grande hauteur et qu'il est soumis à ce titre à des prescriptions très strictes contre les risques d'incendie et de panique et plus particulièrement aux règles de sécurité impératives des articles L. 122-1 et suivants et L. 123-2 et suivants du Code de la construction et de l'habitation, ce qui engendre des coûts d'exploitation importants auxquels il est impératif de faire face avec les revenus générés par les baux comprenant au demeurant le règlement des charges récupérables, à bonne date, au risque, à défaut, tant pour la société HOLD que pour ses locataires de se trouver confrontés à une décision de fermeture pour des raisons de sécurité ; qu'ainsi l'urgence, au sens de l'article 872 du Code de procédure civile, est caractérisée à la fois par les échéances trimestrielles de versement des loyers par les sociétés locataires – qui sont menacées d'être exposées à un double paiement – comme ce fut le cas devant le premier juge à l'approche du terme du premier trimestre 2009 et comme c'est le cas le jour à la Cour statue à l'approche du terme du troisième trimestre 2009 et par la nécessité pour la société HOLD de s'acquitter des dépenses d'entretien de l'immeuble ; que, de même, la situation – que l'engagement pris par la société EUROTITRISATION de rétrocéder les sommes nécessaires après approbation d'un budget restant à sa discrétion ne saurait pallier – dans laquelle se trouverait la société HOLD placée en l'absence de tout revenu au titre des baux dans l'impossibilité d'assurer la gestion de l'immeuble et ainsi de répondre de ses obligations de propriétaire et de bailleur au risque d'entraîner la fermeture de l'immeuble, est constitutive d'un dommage imminent qu'il entre dans les pouvoirs du juge des référés de prévenir en application de l'article 873 du Code précité, même en présence de la contestation sérieuse sur la propriété des créances de bail et les effets attachés à la cession de ces créances ; qu'il importe enfin de garantir la société HOLD contre le dommage imminent que constituerait le risque de disparition des fonds s'ils devaient être remis dans le cadre des cessions de créances à la société EUROTITRISATION en sa qualité de société de gestion, dès lors que le FCT n'ayant pas la personnalité morale, il sera procédé à leur distribution au profit des porteurs dont l'identité n'est pas révélées des obligations émises, lesquelles sont cotées sur le marché de Dublin ; qu'il s'ensuit que les conditions d'intervention du juge des référés sont réunies sur le fondement tant de l'article 872 que de l'article 873, alinéa 1er, du Code de procédure civile ; que l'article 1961 du Code civil dispose que « la justice peut ordonner le séquestre (…) 2° d'un immeuble ou d'une chose mobilière dont la propriété ou la possession est litigieuse entre deux ou plusieurs personnes (…) » ; qu'ainsi, la nomination d'un séquestre judiciaire constitue par nature une mesure conservatoire laquelle, tout en préservant les droits respectifs des parties en litige, est en outre la mieux à même d'assurer la sécurité juridique des paiements effectués par les sociétés locataires intimées dès lors qu'en exécutant une décision de justice assortie de plein droit de l'exécution provisoire elles pourront se prévaloir des dispositions de l'article 1240 du Code civil aux termes duquel « le payement fait de bonne foi à celui qui est en possession de la créance est valable, encore que le possesseur en soit par la suite évincé » ; que, dans ces conditions, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de dire que les paiements effectués par les sociétés locataires entre les mains du séquestre seront réputés libératoires quelle que soit l'issue à intervenir de la contestation au fond opposant la société HOLD à la société EUROTITRISATION en sa qualité de société de gestion du FCT » ;
Alors, d'une part, que même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée, qu'elle prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau et que, étant sortie du patrimoine du cédant, son paiement n'est pas affecté par l'ouverture de la procédure collective de celui-ci postérieurement à cette date ; que si la cession de créance faite à titre de garantie, qui implique la restitution du droit cédé au cas où la créance garantie viendrait à être payée, n'opère qu'un transfert provisoire de la titularité de ce droit, l'éventualité de la restitution de la créance au cédant reste subordonnée à l'épuisement de l'objet de la garantie consentie ; que, tant que les prêts garantis par la cession de créances ne sont pas remboursés, le cessionnaire est donc investi de la propriété des créances de loyer cédées à titre de garantie quelle que soit la date de leur exigibilité, sans que sa propriété soit affectée par l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, les créances étant sorties de son patrimoine ; qu'en ordonnant le séquestre des créances de loyers au seul motif d'un différend élevé par le cédant sur les effets de la cession et d'une contestation du droit du cessionnaire de se prévaloir de la propriété des créances de loyers cédées, alors qu'il n'était pas justifié d'un litige sérieux sur la propriété des créances dont la cession à titre de garantie n'était pas remise en cause, la Cour d'appel a violé les articles 1961 du Code civil, L. 313-24 du Code monétaire et financier, ensemble l'article 1er du protocole n°1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Alors, d'autre part, qu'en l'absence de litige sérieux sur la propriété des créances cédées à titre de garantie que ne peut affecter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, le différend élevé par celui-ci sur les effets de la cession en raison de l'ouverture de la procédure de sauvegarde n'est pas de nature à justifier la mesure de séquestre sollicitée ; qu'en l'ordonnant néanmoins, la Cour d'appel a violé l'article du Code de procédure civile ;
Alors, encore, que, en l'état de la propriété du cessionnaire sur les créances cédées à titre de garantie que ne peut affecter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard du cédant, le dommage imminent tenant à la nécessité pour celui-ci de pouvoir s'acquitter des dépenses d'entretien de l'immeuble et au risque de disparition des fonds s'ils étaient remis au cessionnaire ne peut justifier une mesure de séquestre ordonnée dans le seul intérêt du cédant étranger au droit de propriété du cessionnaire auquel elle porte atteinte ; qu'en l'ordonnant néanmoins, la Cour d'appel a violé l'article 873 du Code de procédure civile, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Alors, enfin, que, subsidiairement, le juge des référés ne peut, au motif d'une contestation sérieuse sur le droit pour le cessionnaire de se prévaloir de la propriété des créances de loyers cédées à titre de garantie, ordonner le séquestre des sommes à verser par les locataires tout en autorisant le séquestre à prélever sur ces sommes celles nécessaires pour le bon fonctionnement de l'immeuble ; qu'une telle mesure, qui conduit à la dissipation des sommes ainsi prélevées, n'est pas conservatoire et prive le cessionnaire de la propriété de ces fonds si son droit de propriété sur les créances cédées devait être reconnu aux termes de la décision de justice à intervenir réglant le différend l'opposant au cédant ; qu'en ordonnant de telles mesures préjudiciables aux droits du cessionnaire, la Cour d'appel a violé les articles 872 et 873 du Code de procédure civile, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-69056
Date de la décision : 16/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 nov. 2010, pourvoi n°09-69056


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.69056
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