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26/10/2010 | FRANCE | N°09-71904

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 octobre 2010, 09-71904


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X..., Z... et Y... ont cédé à la société Rolland la totalité des actions composant le capital de la société Paladine et garanti au bénéfice de cette dernière l'exactitude des déclarations figurant dans l'acte de cession ; qu'il était précisé que des réclamations pourraient être présentées à ce titre pendant une période de douze mois, qu'elles devraient être faites par lettre recommandée avec accusé de réception, que les cédants faisaient élection de dom

icile au siège de la société Green Recovery à Paris et que toutes les notificati...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X..., Z... et Y... ont cédé à la société Rolland la totalité des actions composant le capital de la société Paladine et garanti au bénéfice de cette dernière l'exactitude des déclarations figurant dans l'acte de cession ; qu'il était précisé que des réclamations pourraient être présentées à ce titre pendant une période de douze mois, qu'elles devraient être faites par lettre recommandée avec accusé de réception, que les cédants faisaient élection de domicile au siège de la société Green Recovery à Paris et que toutes les notifications seraient faites au domicile élu ; que les sociétés Rolland et Paladine ont, sur le fondement de la garantie, fait assigner MM. X..., Z... et Y... en paiement d'une certaine somme ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que les sociétés Rolland et Paladine font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable leur demande de mise en jeu de la garantie alors, selon le moyen :
1° / qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, les sociétés Rolland et Paladine produisaient, parmi les " pièces versées aux débats " qu'a examinées la cour d'appel, la lettre du 15 février 2005 envoyée à MM. X..., Z... et Y..., en recommandé avec accusé de réception, ainsi qu'il ressort de l'enveloppe comprenant l'avis de passage du facteur ; qu'en affirmant dès lors que les sociétés Rolland et Paladine ont adressé le 15 février un courrier sans recommandé avec accusé de réception à l'adresse élue à Paris, boulevard Malesherbes, et que les pièces versées aux débats ne permettent pas de constater que ce courrier a été effectivement adressé en recommandé avec accusé de réception, la cour d'appel a dénaturé ladite pièce et méconnu le principe susvisé ;
2° / que les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, les sociétés Rolland et Paladine faisaient valoir et justifiaient que la société Rolland avait envoyé un courrier recommandé avec accusé de réception le 15 février 2005 à MM. X..., Y... et Z... à l'adresse du 26 boulevard Malesherbes à Paris qui était celle du siège social où les cédants avaient fait élection de domicile, conformément au protocole et celle à laquelle la lettre a été reçue le 21 février ; qu'en affirmant qu'il n'était contesté par aucune des parties que les sociétés Rolland et Paladine avaient adressé le 15 février 2005 un courrier sans recommandé avec accusé de réception à l'adresse élue à Paris, boulevard Malesherbes quand les sociétés Rolland et Paladine soutenaient exactement le contraire, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des sociétés Rolland et Paladine et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le courrier du 15 février 2005 avait été adressé à MM. X..., Z... et Y... à l'adresse du domicile élu sans mention de la société Green Recovery et que ce courrier était revenu au destinataire avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée ", ce dont elle a déduit que le défaut de respect des précisions insérées dans le protocole avait eu pour conséquence de ne pas permettre d'informer les cédants de la mise en jeu de la garantie, la cour d'appel a pu retenir, abstraction faite des motifs surabondants justement critiqués par le moyen, que le courrier du 15 février 2005 n'avait eu aucun effet ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Mais sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour retenir que la garantie n'avait pas été régulièrement mise en jeu par le courrier recommandé reçu par MM. X..., Z... et Y... le 21 février 2005, l'arrêt, après avoir énoncé que, si la demande pouvait être faite le dernier jour du délai, soit le 19 février 2005, il appartient aux demandeurs de justifier que tel a été le cas, et relevé que ceux-ci versent pour toute preuve de l'envoi à cette date un calendrier de l'année 2005 selon lequel le 20 février était un dimanche en soutenant qu'il en découle nécessairement que l'envoi de la lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé le 21 février a été fait le 19 février, retient que dès lors que certains bureaux de poste sont ouverts le dimanche et que les sociétés Rolland et Paladine ne produisent pas aux débats le récépissé daté qui a été nécessairement délivré par la poste lors de l'envoi du courrier reçu le 21 février, il convient de constater que la preuve n'est pas rapportée que la demande a été adressée aux appelants le 19 février ;
Attendu qu'en se fondant ainsi sur la circonstance que certains bureaux de postes sont ouverts le dimanche, sans avoir préalablement sollicité les explications des parties sur cet élément de fait qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la quatrième branche du moyen :
Vu l'article 642 du code de procédure civile ;
Attendu que le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ;
Attendu qu'en statuant comme elle a fait, après avoir constaté que le délai de mise en oeuvre de la garantie expirait le samedi 19 février 2005, ce dont il résultait que ce délai était prorogé jusqu'au lundi 21 février 2005 et que la lettre recommandée reçue par les garants ce même 21 février 2005 n'était pas tardive, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne MM. X..., Z... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer la somme globale de 2 500 euros aux sociétés Rolland et Paladine ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour les sociétés Rolland et Paladine.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable la demande des sociétés ROLLAND ET PALADINE de mise en jeu de la « garantie de déclaration » de Messieurs X..., Y... et Z... ;
AUX MOTIFS QUE l'article 9 du protocole précise les modalités de mise en jeu de la garantie : « Les réclamations au titre de la présente garantie pourront être présentées pendant une période de 12 mois à compter de la réalisation de la cession, objet des présentes. Le cessionnaire pourra demander la mise en jeu de la présente garantie à tout moment jusqu'au dernier jour du délai ci-dessus et ce quand bien même les sommes éventuellement dues à la société de la réclamation ne seraient pas connues ou déterminables le dernier jour dudit délai à partir du moment où le cessionnaire aura notifié la réclamation aux garants... ». Elle devra se faire par lettre recommandée avec accusé de réception ou notification d'exploit d'huissier adressé à l'un ou l'autre des garants au domicile élu ci-dessous » ; l'article 13 indique : « Pour l'exécution des présentes, les parties font élection de domicile :- le cessionnaire en son siège social,- les cédants au siège social de la société GREEN RECOVERY, savoir, Paris (75008), 26 boulevard Malesherbes.. Toutes les notifications ou communications seront faites au domicile élu.. ». Selon les explications et les documents fournis aux débats, il n'est contesté par aucune des parties :- que le 19 février 2005 est le dernier jour du délai pour mettre en jeu la garantie,- que les sociétés intimées ont adressé le 15 février un courrier en ce sens aux appelants, que ce courrier sans recommandé avec accusé de réception à l'adresse élue à Paris, boulevard Malesherbes, sans mention de la société GREEN RECOVERY est revenu au destinataire avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée »,- qu'un second courrier a été adressé par lettre recommandé avec accusé de réception à la même adresse à la société GREEN RECOVERY, contenant les lettres adressées à chacun des appelants, dont il a été accusé réception le 21 février 2005 ; le courrier adressé le 15 février qui a été retourné aux expéditeurs (les intimées) qui soutiennent que « les cédants faisant preuve d'une incontestable mauvaise foi ont déclaré ou fait déclarer au facteur qu'ils n'habitaient pas à l'adresse indiquée », que la lettre du 15 février 2005 a interrompu le délai de garantie dès lors qu'il a été envoyé à la bonne adresse, même s'il n'a pas été retiré ; les appelants soutiennent qu'il ne saurait avoir aucun effet ; aucun élément ne permet de soutenir que les appelants ont déclaré qu'ils n'habitaient pas à l'adresse indiquée et sont ainsi de mauvaise foi ; par ailleurs les pièces versées aux débats ne permettent pas de constater que ce courrier a été effectivement adressé en recommandé avec accusé de réception ; en réalité, le défaut de respect des précisions insérées dans le protocole d'accord a eu pour conséquence de ne pas permettre d'informer les appelants de la mise en jeu de la garantie ; le courrier du 15 février n'a aucun effet, notamment celui d'interrompre la prescription ; au regard des termes du protocole, le cessionnaire peut demander la mise en jeu « jusqu'au dernier jour du délai », de sorte que la demande peut être adressée aux appelants le 19 février 2005, dernier jour du délai ; le cessionnaire doit justifier que cette demande a été faite ce dernier jour ; il verse pour toute preuve de l'envoi à cette date un calendrier de l'année 2005, selon lequel le 20 février est un dimanche, ce dont il découle nécessairement que l'envoi de la lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé le 21 février a été fait le 19 février ; dès lors que certains bureaux de poste sont ouverts le dimanche et que les sociétés intimées ne produisent pas aux débats le récépissé date qui a été nécessairement délivré par la poste lors de l'envoi du courrier reçu le 21 février, il convient de constater que la preuve n'est pas rapportée que la demande a été adressée aux appelants le 19 février ; la mise en jeu de la garantie de déclaration n'a pas été faite conformément aux termes convenus par les parties, de sorte qu'elle ne peut avoir d'effet ;

ALORS, D'UNE PART, OU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, les exposantes produisaient parmi les « pièces versées aux débats » qu'a examinées la cour d'appel, la lettre du 15 février 2005 envoyée à Messieurs X..., Z... et Y..., en recommandée avec accusé de réception, ainsi qu'il ressort de l'enveloppe comprenant l'avis de passage du facteur (productions n° 2 et 5) ; qu'en affirmant dès lors que les sociétés ROLLAND et PALADINE ont adressé le 15 février 2005 un courrier sans recommandé avec accusé de réception à l'adresse élue à Paris, boulevard Malesherbes, et que les pièces versées aux débats ne permettent pas de constater que ce courrier a été effectivement adressé en recommandé avec accusé de réception, la cour d'appel a dénaturé ladite pièce et méconnu le principe susvisé ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, les sociétés ROLLAND et PALADINE faisaient valoir et justifiaient (bordereau de communication de pièces et pièce n° 3) que la société ROLLAND avait envoyé un courrier recommandé avec accusé de réception le 15 février 2005 à Messieurs X..., Y... et Z... à l'adresse du 26 boulevard Malesherbes à Paris qui était celle du siège social où les cédants avaient fait élection de domicile, conformément au protocole et celle à laquelle la lettre a été reçue le 21 février (conclusions d'appel p. 7, dernier alinéa) ; qu'en affirmant qu'il n'était contesté par aucune des parties que les sociétés ROLLAND et PALADINE avaient adressé le 15 février 2005 un courrier sans recommandé avec accusé de réception à l'adresse élue à Paris, boulevard Malesherbes quand les sociétés ROLLAND et PALADINE soutenaient exactement le contraire, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des sociétés ROLLAND et PALADINE et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en l'espèce, il n'était ni soutenu, ni même simplement allégué que la lettre de mise en jeu de la garantie aurait pu être adressée le dimanche 20 février 2005 ; qu'en affirmant que certains bureaux de poste étaient ouverts le dimanche et que la lettre de mise en jeu de la garantie avait donc pu être envoyée le dimanche 20 février, sans avoir préalablement provoqué les explications des parties sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant que le 19 février 2005 était un samedi, et que les parties étaient convenues que les cessionnaires pouvaient demander la mise en jeu de la garantie jusqu'au dernier jour du délai de douze mois courants à compter de la réalisation de la cession, ce délai, qui expirait le samedi 19 février 2005, était prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, soit le lundi 21 février 2005 ; qu'en se fondant, pour estimer que la mise en jeu de la garantie n'avait pas été faite dans le délai contractuel, sur l'affirmation que les sociétés ROLLAND et PALADINE avaient pu adresser leur lettre recommandée le dimanche 20 février au prétexte que certains bureaux de poste sont ouverts le dimanche et qu'elles ne produisaient pas aux débats le récépissé daté délivré par la poste, la cour d'appel, qui a constaté que cette lettre recommandée avait été reçue le 21 février 2005, ce dont il s'évinçait qu'elle avait nécessairement été adressée avant le dernier jour du délai qui intervenait le 21 février 2005, qui a statué par des motifs inopérants, impropres à établir que la lettre recommandée n'avait été adressée dans le délai contractuel, a violé les articles, 640, 642 et 668 du code de procédure civile et 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-71904
Date de la décision : 26/10/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 15 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 oct. 2010, pourvoi n°09-71904


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.71904
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