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20/10/2010 | FRANCE | N°09-41960

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 octobre 2010, 09-41960


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 février 2009), que M. X... a été engagé par la société G. Chevalier en qualité d'attaché commercial, puis promu directeur commercial le 1er avril 2002 ; que la société G. Chevalier a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 6 décembre 2006 ; que M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 18 décembre 2006 ; que le lendemain, M. Y..., liquidateur de la société G. Chevalier, a notifié au salarié qu'il revenait sur la mesure de li

cenciement et le considérait comme "démissionnaire" depuis le 11 décembre 2006 ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 février 2009), que M. X... a été engagé par la société G. Chevalier en qualité d'attaché commercial, puis promu directeur commercial le 1er avril 2002 ; que la société G. Chevalier a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 6 décembre 2006 ; que M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 18 décembre 2006 ; que le lendemain, M. Y..., liquidateur de la société G. Chevalier, a notifié au salarié qu'il revenait sur la mesure de licenciement et le considérait comme "démissionnaire" depuis le 11 décembre 2006 ; que par lettre du 3 janvier 2007, M. X... s'est opposé à l'annulation ou à la rétractation de son licenciement et a demandé paiement des salaires et indemnités lui revenant à ce titre ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à dire son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et condamner son employeur au paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire ;
Sur le moyen unique, en ce qu'il critique les chefs de dispositif ayant fixé la créance du salarié à titre de rappel de salaire, de rappel de prime de fin d'année, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de dommages-intérêts pour préjudice distinct de celui résultant de la rupture :
Attendu que le moyen n'est pas recevable, d'une part en ce que M. Y..., liquidateur de la société G. Chevalier, qui a demandé la confirmation du jugement ayant fixé le montant des sommes dues au salarié à titre de rappel de salaire, de rappel de prime de fin d'année et d'indemnités de licenciement et de préavis avec congés payés afférents, est irrecevable à critiquer les chefs de dispositif de l'arrêt qui a confirmé le jugement sur ces chefs de demande, d'autre part en ce que le moyen n'articule aucun grief quant à la disposition ayant alloué au salarié des dommages-intérêts pour préjudice distinct de la rupture ;
Sur le moyen unique, en ce qu'il critique le chef de dispositif ayant fixé la créance du salarié à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail de M. X... est fondée sur la prise d'acte de la démission du salarié par M. Y..., agissant en qualité de liquidateur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que l'employeur ne peut pas valablement renoncer au licenciement prononcé sans l'accord du salarié ; qu'à défaut d'un tel accord, le licenciement continue de produire effet de sorte que le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement, peu important la lettre envoyée postérieurement par l'employeur pour imputer la rupture au salarié et le comportement de l'employeur après le refus par le salarié de la rétractation du licenciement ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que le liquidateur judiciaire a notifié à M. X... son licenciement pour motif économique par courrier du 18 décembre 2006, et qu'il a ensuite voulu rétracter ce licenciement par une lettre du 19 décembre 2006, dans laquelle il indiquait considérer M. X... comme démissionnaire depuis le 11 décembre 2006, mais que le salarié s'est opposé à cette rétractation ; qu'en jugeant cependant que la rupture du contrat de travail résultait non du licenciement mais de la prise d'acte de la démission par le liquidateur judiciaire, pourtant postérieure, au prétexte que ce dernier avait manifestement renoncé au licenciement économique dès lors qu'il avait considéré que la démission, rétroactive au 11 décembre 2006, constituait la cause de la rupture du contrat de travail, et avait persisté dans sa volonté de considérer le salarié comme démissionnaire en refusant, malgré les injonctions du salarié, de revenir sur sa décision dans un courrier du 4 janvier 2007, en mentionnant la démission comme motif de rupture du contrat de travail sur l'attestation ASSEDIC du 18 janvier 2007 et en s'abstenant du versement des salaires et accessoires dus au salarié dans le cadre du licenciement économique, la cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu que M. Y..., liquidateur de la société G. Chevalier, qui a déclaré renoncer au licenciement économique qu'il a prononcé ne peut, sans se contredire au détriment de M. X... et ainsi violer le principe de la loyauté des débats, soutenir ensuite que le contrat de travail a été rompu par ce licenciement ; que le moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... en qualité de liquidateur de la société G. Chevalier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements G. Chevalier
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il avait dit que Monsieur X... avait été licencié pour motif économique le 18 décembre 2006, d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... était fondée sur la prise d'acte de la démission du salarié par Maître Y... ès qualité et produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR fixé la créance de Monsieur X... au passif de la liquidation judiciaire de la société ETABLISSEMENTS G. CHEVALIER aux sommes de 892,16 € à titre de rappel de salaire pour la période du 11 au 18 décembre 2006, 74,35 € à titre de rappel de prime de fin d'année, 14.932,57 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 10.873,23 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1.183,97 € au titre des congés payés afférents, 21.750 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 100 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct et 700 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE la société ETABLISSEMENTS G. CHEVALIER qui exerçait une activité de commerce de gros en fruits et légumes a engagé Monsieur X... le 1er septembre 1994 en qualité d'attaché commercial dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet ; que le salarié a été promu directeur commercial le 1er avril 2002 ; que le 6 décembre 2006, le tribunal de commerce de Nantes a déclaré la société ETABLISSEMENTS G. CHEVALIER en état de liquidation judiciaire avec arrêt immédiat de l'activité et désigné Maître Y... en qualité de liquidateur judiciaire ; qu'une procédure de licenciement collectif pour motif économique a immédiatement été engagée et Monsieur X... s'est vu notifier son licenciement par courrier du 18 décembre 2006 le dispensant de l'exécution de son préavis et le déliant de la clause de non-concurrence ; que le 19 décembre 2006, Maître Y..., ès qualité de liquidateur judiciaire, a adressé à Monsieur X... un courrier rédigé en ces termes : «Dans le prolongement de la mesure de licenciement qui vous a été notifiée le 18 décembre dernier, je viens d'apprendre que depuis plusieurs mois vous prépariez votre départ à la concurrence en transférant les dossiers clients des Etablissements CHEVALIER. Vous vous êtes présentés à l'entretien préalable avec le véhicule de la société concurrente. Ces faits revêtent une gravité telle que je me vois dans l'obligation de remettre en cause le principe de votre licenciement dès lors que vous avez rompu de facto votre contrat de travail et que vous devez être considéré comme démissionnaire à compter du 11 décembre 2006. En conséquence, la lettre de licenciement qui vous a été notifiée le 18 décembre dernier est nulle et non avenue…» ; qu'après avoir en vain contesté les termes de ce courrier et sollicité son retrait ainsi que le paiement des sommes dues au titre du licenciement économique, Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes le 12 avril 2007 ; que Maître Y... reconnaît qu'il n'avait pas la possibilité, sauf accord du salarié concerné, de remettre en cause le motif du licenciement déjà notifié qui s'imposait à lui ; qu'en conséquence, eu égard au refus officiel de Monsieur X... de remettre en cause son licenciement pour motif économique, Maître Y... sollicite qu'il lui soit décerné acte de son accord exprès pour considérer comme définitif et devant être validé sans réserve le licenciement pour motif économique initialement notifié ; que Monsieur X... rappelle qu'il a contesté à deux reprises le courrier du 19 décembre 2006 par lequel Maître Y... prenait acte de sa démission et fait valoir que la reconnaissance tardive du licenciement pour motif économique par Maître Y... ne change en rien les conséquences liées au courrier du 19 décembre 2006 le considérant comme démissionnaire ; que s'il est exact que la lettre de licenciement pour motif économique est intervenue antérieurement à celle considérant Monsieur X... comme démissionnaire, il n'en demeure pas moins que Maître Y... a considéré que cette démission, rétroactive au 11 décembre 2006, constituait la cause de la rupture de son contrat de travail ; qu'en effet, s'il est constant que par courriers du 3 janvier 2007 et du 14 février 2007, Monsieur X... a enjoint Maître Y... de revenir sur cette décision, celui-ci a clairement refusé dans un courrier du 4 janvier 2007 puis en mentionnant la démission comme motif de rupture du contrat de travail sur l'attestation Assedic du 18 janvier 2007 ; qu'indépendamment du fait que l'analyse des diverses attestations et des pièces versées aux débats par le salarié ne permettent pas de considérer que son comportement durant la période précédant la liquidation judiciaire de la société des ETABLISSEMENTS G. CHEVALIER démontrait une manifestation claire et non équivoque de sa volonté de mettre fin aux relations contractuelles avec son employeur, la rupture effectuée par Maître Y... ès qualité est fondée sur cette démission ou plus exactement sur la «prise d'acte de sa démission par l'employeur» alors que cette possibilité ne lui était pas ouverte ; que l'erreur manifeste commise par Maître Y... ne lui permet pas de revenir sur sa décision et de redonner effet à un licenciement économique auquel il a manifestement renoncé comme le démontre nt les documents relatifs à la rupture remis au salarié et le fait qu'il s'est abstenu du versement des salaires et accessoires dus au salarié dans le cadre du licenciement économique ; que Maître Y... ayant ainsi persisté dans sa volonté de considérer le salarié comme démissionnaire, il lui appartient d'en assumer les effets ; que la « prise d'acte de la démission du salarié » par le représentant de l'employeur ne pouvant constituer valablement une cause de rupture du contrat de travail, elle doit par conséquent produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef ; (…) que Monsieur X... a subi un préjudice distinct, découlant de la remise d'une attestation ASSEDIC ayant pour motif la démission ; que cette situation n'a généré aucun préjudice financier puisqu'il a été engagé par un nouvel employeur dès le 19 décembre 2006 ; qu'il lui sera alloué la somme de 100 € en réparation du préjudice résultant de l'établissement de documents de rupture non conformes ;
ALORS QUE l'employeur ne peut pas valablement renoncer au licenciement prononcé sans l'accord du salarié ; qu'à défaut d'un tel accord, le licenciement continue de produire effet de sorte que le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement, peu important la lettre envoyée postérieurement par l'employeur pour imputer la rupture au salarié et le comportement de l'employeur après le refus par le salarié de la rétractation du licenciement ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que le liquidateur judiciaire a notifié à Monsieur X... son licenciement pour motif économique par courrier du 18 décembre 2006, et qu'il a ensuite a voulu rétracter ce licenciement par une lettre du 19 décembre 2006, dans laquelle il indiquait considérer Monsieur X... comme démissionnaire depuis le 11 décembre 2006, mais que le salarié s'est opposé à cette rétractation ; qu'en jugeant cependant que la rupture du contrat de travail résultait non du licenciement mais de la prise d'acte de la démission par le liquidateur judiciaire, pourtant postérieure, au prétexte que ce dernier avait manifestement renoncé au licenciement économique dès lors qu'il avait considéré que la démission, rétroactive au 11 décembre 2006, constituait la cause de la rupture du contrat de travail, et avait persisté dans sa volonté de considérer le salarié comme démissionnaire en refusant, malgré les injonctions du salarié, de revenir sur sa décision dans un courrier du 4 janvier 2007, en mentionnant la démission comme motif de rupture du contrat de travail sur l'attestation Assedic du 18 janvier 2007 et en s'abstenant du versement des salaires et accessoires dus au salarié dans le cadre du licenciement économique, la cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41960
Date de la décision : 20/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 26 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 oct. 2010, pourvoi n°09-41960


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.41960
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