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15/09/2010 | FRANCE | N°09-41949

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 septembre 2010, 09-41949


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 février 2009), que Mme X... a été engagée le 17 décembre 2003 en qualité d'agent de service hospitalier de nuit, par la société Les Jonquilles gérant une maison de retraite ; qu'elle avait notamment pour fonction d'assurer l'entretien et l'hygiène des résidents ; qu'elle a été licenciée le 16 avril 2007 pour faute grave, l'employeur lui reprochant un acte de maltraitance dans la nuit du 16 au 17 février 2007 sur une résidente et d'avo

ir laissé cette dernière sans soins le 3 avril ;
Attendu que la salariée fa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 février 2009), que Mme X... a été engagée le 17 décembre 2003 en qualité d'agent de service hospitalier de nuit, par la société Les Jonquilles gérant une maison de retraite ; qu'elle avait notamment pour fonction d'assurer l'entretien et l'hygiène des résidents ; qu'elle a été licenciée le 16 avril 2007 pour faute grave, l'employeur lui reprochant un acte de maltraitance dans la nuit du 16 au 17 février 2007 sur une résidente et d'avoir laissé cette dernière sans soins le 3 avril ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir déboutée de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes du rapport de la mission d'inspection conjointe de la DDASS en date du 12 janvier 2007, il avait été constaté, outre le comportement déplacé du directeur, M. Y..., et de l'Infirmière référente, Mme Y..., à l'égard des résidents et du personnel, la présence de nuit d'un seul agent, non qualifié, pour assurer une charge de travail extrêmement lourde alors que l'un des engagements de la convention tripartite signée en 2002 entre la Sarl Les Jonquilles, le Conseil général et la DDASS était d'assurer, en plus de la présence de cet agent, celle d'un agent qualifié qui aurait permis notamment d'assurer en binôme la toilette des résidents non valides ; que la société Les Jonquilles, qui n'avait ni appliqué les termes de la convention, ni tenu aucun compte des injonctions de la DDASS, ne pouvait, dans ces conditions, valablement reprocher à Mme X..., travaillant seule de nuit en qualité d'agent de service hospitalier (ASH) non qualifié, de ne pas avoir effectué, le 3 avril 2007, le change de l'une des résidentes, Mme Z..., dès lors qu'elle aurait dû être assistée pour l'exécution de cette tâche par un agent qualifié ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que le fait d'avoir laissé sans soin cette résidente serait constitutif d'une faute justifiant la rupture des relations contractuelles alors que la salariée ne pouvait être tenue pour responsable des dysfonctionnements de l'établissement imputables exclusivement à son employeur, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ qu'en vertu du contrat de travail, l'employeur est tenu envers le salarié d'une obligation de sécurité de résultat qui lui impose, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des salariés ; que Mme X... avait, par lettre en date du 19 février 2007, alerté son employeur sur l'agression dont elle avait été victime dans la nuit du 16 au 17 février de la part d'une des résidentes, Mme Z..., atteinte de la maladie d'Alzheimer, et avait sollicité de lui qu'il trouve des solutions à ce problème en prenant toutes les mesures nécessaires pour éviter qu'un tel événement ne se reproduise ; qu'en affirmant, dès lors que le grief invoqué par l'employeur constituait une faute justifiant le licenciement de Mme X... sans rechercher si la Sarl Les Jonquilles avait satisfait à l'obligation de sécurité de résultat qui pesait sur elle en assurant la sécurité de la salariée dans les soins qu'elle apportait seule aux résidents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 ancien article L. 230-2, I , L. 4121-2 ancien article L. 230-2, II et L. 1235-1 ancien article L. 122-14-3 du Code du travail ;
3°/ que Mme X... avait alerté son employeur, par un mot rédigé le matin même, puis par une lettre en date du 19 février 2007, de ce qu'elle avait été victime, alors qu'elle tentait de la changer, d'une agression, dans la nuit du 16 au 17 février, de la part d'une résidente atteinte de la maladie d'Alzheimer, qui lui avait porté des coups de poing violents à la tête et l'avait plaquée à terre en la tirant par les cheveux, ce qui avait justifié un arrêt de travail de quinze jours ; qu'elle avait sollicité de son employeur, au terme de son courrier, qu'il apporte une solution à ce type de problème ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que le grief tenant à l'absence de change de cette résidente le 3 avril 2007 et à l'état innommable dans lequel elle se serait trouvée au matin justifiait le licenciement de Mme X..., sans même rechercher si, entre le 19 février et le 3 avril, l'employeur avait cherché à remédier à la situation sur laquelle la salariée l'avait alertée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 ancien article L. 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui répondant comme elle le devait aux conclusions prétendument omises, a retenu que la salariée, qui n'avait à aucun moment informé l'infirmière de garde de difficultés particulières, avait laissé sans soins, la nuit entière, l'une des résidentes de la maison de retraite, a pu décider que ce seul fait constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le moyen, nouveau et irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Mme X... avait été licenciée pour un motif réel et sérieux et de l'avoir en conséquence déboutée de ses demandes d'indemnité pour licenciement injustifié et d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE, sur la gravité de la faute reprochée, la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise ; que l'employeur qui l'allègue a la charge de la preuve ; que la lettre du 16 avril 2007 qui détermine la cause du licenciement et fixe les limites du litige indique que cette cause est la suivante : « Après les événements concernant notre résidente, Mme Z..., dans la nuit du 16 au 17 février 2007, vous vous êtes livrée à un acte de maltraitance envers notre résidente. Vous avez d'ailleurs confirmé cet acte par votre courrier du 19 février 2007. De plus, après le boycott de cette chambre, notre résidente, Mme Z..., a été retrouvée dans un état innommable le matin du 3 avril 2007 par l'équipe de jour. Certaines employées ont d'ailleurs essuyé des larmes de la voir dans cet état. Nous considérons que les faits du 17 février et 3 avril 2007 constituent par deux fois les éléments d'une faute grave rendant impossible la poursuite de votre contrat de travail et nous prononçons à votre encontre un licenciement pour faute grave » ; que pour démontrer le grief du 17 février 2007, consistant à s'être livrée à un acte de maltraitance envers une résidente, la Société produit : - l'attestation de Mme A..., infirmière d'astreinte cette nuit-là, qui certifie que Mme X... ne l'a pas informée de l'agression dont elle affirme avoir été victime de la part de cette résidente, comme elle aurait dû le faire, et qui précise que la résidente, malgré sa maladie, parle très facilement avec tout le personnel et est très gentille et charmante, - la lettre rédigée pour le directeur de l'établissement par le docteur B..., qui, constatant que Mme X... et la résidente se sont battues comme le démontrent les hématomes sur celle-ci, affirme que la résidente n'a jamais frappé qui que ce soit, que si il y a eu agression de sa part, c'est probablement qu'il y a eu un précédent et que Mme X... aurait dû prévenir immédiatement l'infirmière de garde cette nuit-là ; que cependant, même si ces documents tendent à démontrer que Mme X... n'a pas eu, à l'égard de la résidente, une attitude adaptée, la Société, dès lors que ce premier fait qu'elle reproche à Mme X..., est survenu dans la nuit du 16 au 17 février 2007 et qu'elle a licencié Mme X... par lettre du 16 avril 2007, ne démontre pas à son encontre un fait d'une importance telle qu'il rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise ; que concernant le grief du 3 avril 2007 consistant à avoir laissé la même résidente dans un état innommable, Mme X... ne conteste pas le fait qui a suscité ce grief mais elle oppose son droit de retrait prévu par les articles L. 4131-1 et L. 4131-3 du Code du travail, qu'elle aurait invoqué en déposant, dès le 17 février 2007 à 5 heures du matin dans le bureau du directeur, un « mot » manuscrit mentionnant qu'elle ne rentrerait plus dans la chambre de cette résidente, qui « est très dangereuse » ; que toutefois, le directeur dément avoir eu ce document dont Mme X... produit une photocopie sans pouvoir établir à quel moment elle a écrit et transmis ce mot au directeur ; que dans la lettre qu'elle lui a adressée deux jours plus tard, le 19 février 2007 pour relater les faits de violence dont elle aurait été victime, Mme X... ne fait état d'aucun droit de retrait ; que de plus, en l'absence de témoignage objectif susceptible d'attester de ce qui s'est passé au cours de la nuit du 16 au 17 février 2007 avec la résidente, Mme X... ne démontre pas avoir subi, au cours de cette nuit, une situation de travail dont elle avait un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé, et susceptible d'enlever tout caractère fautif au fait du 3 avril 2007 ; que si elle se prévaut de dysfonctionnements relevés dans l'établissement par le rapport de l'Inspection réalisée le 12 janvier 2007, notamment pour le travail de nuit, Mme A..., dans son attestation, souligne qu'étant infirmière de garde, elle était habilitée à être informée des difficultés susceptibles de survenir avec les résidentes et que Mme X... ne l'avait tenue informée d'aucune anomalie cette nuit-là ; qu'ainsi, en laissant sans soin l'une des résidentes de l'établissement le 3 avril 2007, alors qu'elle avait notamment pour fonction de faire les changes de couches, Mme X... a eu un comportement constitutif d'une mauvaise exécution de son travail ; qu'au vu de ces éléments, la Cour estime que les faits examinés et retenus à rencontre de Mme X... ne constituent pas une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en revanche, au vu de ces éléments fournis par les parties, en application de l'article L. 122-14-3, devenu l'article L. 1235-1 du Code du travail, elle estime que les griefs invoqués par l'employeur à l'appui de la mesure de licenciement sont réels et sérieux ; qu'en conséquence, infirmant le jugement, elle décide que Mme X... a été licenciée pour cause réelle et sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QU'aux termes du rapport de la mission d'inspection conjointe de la DDASS en date du 12 janvier 2007, il avait été constaté, outre le comportement déplacé du Directeur, M. Y..., et de l'Infirmière référente, Mme Y..., à l'égard des résidents et du personnel, la présence de nuit d'un seul agent, non qualifié, pour assurer une charge de travail extrêmement lourde alors que l'un des engagements de la convention tripartite signée en 2002 entre la SARL LES JONQUILLES, le Conseil général et la DDASS était d'assurer, en plus de la présence de cet agent, celle d'un agent qualifié qui aurait permis notamment d'assurer en binôme la toilette des résidents non valides ; que la Société LES JONQUILLES, qui n'avait ni appliqué les termes de la convention, ni tenu aucun compte des injonctions de la DDASS, ne pouvait, dans ces conditions, valablement reprocher à Mme X..., travaillant seule de nuit en qualité d'Agent de Service Hospitalier (A.S.H.) non qualifié, de ne pas avoir effectué, le 3 avril 2007, le change de l'une des résidentes, Mme Z..., dès lors qu'elle aurait dû être assistée pour l'exécution de cette tâche par un agent qualifié ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que le fait d'avoir laissé sans soin cette résidente serait constitutif d'une faute justifiant la rupture des relations contractuelles alors que la salariée ne pouvait être tenue pour responsable des dysfonctionnements de l'établissement imputables exclusivement à son employeur, la Cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1235-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en vertu du contrat de travail, l'employeur est tenu envers le salarié d'une obligation de sécurité de résultat qui lui impose, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des salariés ; que Mme X... avait, par lettre en date du 19 février 2007, alerté son employeur sur l'agression dont elle avait été victime dans la nuit du 16 au 17 février de la part d'une des résidentes, Mme Z..., atteinte de la maladie d'Alzheimer, et avait sollicité de lui qu'il trouve des solutions à ce problème en prenant toutes les mesures nécessaires pour éviter qu'un tel événement ne se reproduise ; qu'en affirmant, dès lors que le grief invoqué par l'employeur constituait une faute justifiant le licenciement de Mme X... sans rechercher si la SARL LES JONQUILLES avait satisfait à l'obligation de sécurité de résultat qui pesait sur elle en assurant la sécurité de la salariée dans les soins qu'elle apportait seule aux résidents, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 ancien article L. 230-2, I , L. 4121-2 ancien article L. 230-2, II et L. 1235-1 ancien article L. 122-14-3 du Code du travail ;
ET ALORS, ENFIN (et subsidiairement), QUE Mme X... avait alerté son employeur, par un mot rédigé le matin même, puis par une lettre en date du 19 février 2007, de ce qu'elle avait été victime, alors qu'elle tentait de la changer, d'une agression, dans la nuit du 16 au 17 février, de la part d'une résidente atteinte de la maladie d'Alzheimer, qui lui avait porté des coups de poing violents à la tête et l'avait plaquée à terre en la tirant par les cheveux, ce qui avait justifié un arrêt de travail de 15 jours ; qu'elle avait sollicité de son employeur, au terme de son courrier, qu'il apporte une solution à ce type de problème ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que le grief tenant à l'absence de change de cette résidente le 3 avril 2007 et à l'état innommable dans lequel elle se serait trouvée au matin justifiait le licenciement de Mme X..., sans même rechercher si, entre le 19 février et le 3 avril, l'employeur avait cherché à remédier à la situation sur laquelle la salariée l'avait alertée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 ancien article L. 122-14-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41949
Date de la décision : 15/09/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 26 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 sep. 2010, pourvoi n°09-41949


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.41949
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